|5| ...je veille sur toi."
La fourrure est douce et soyeuse. Une odeur de paille flatte son nez. Drakaïs veut rester là longtemps, s'endormir dans les poils de Carotte. Les longues oreilles du lapin frémissent, lui chatouillent le cou. Elle entend la voix de Drags, irritée, et c'est cette pointe de colère dans la voix de sa sœur qui finit par attirer son attention sur l'agitation autour d'elle, qu'elle a ignorée jusqu'à présent.
« Parce que je suis une fille, je dois être Songe ? Et si je veux être l'Inconnu ?
– Ben quoi ? On va pas jouer une fille !
– Et pourquoi pas ? Songe est super forte !
– Alors qu'est-ce qui te gène ?
– Je veux être l'Inconnu !
– Mais t'es pas un garçon !
– Mais je suis la plus forte ! »
Carotte gesticule entre ses bras, ce qui la pousse à relever la tête. Drakaïs fixe du regard Drags, qui se tient fulminante, les poings sur les hanches, devant Tête-de-noeud. Puant et Grognon se trouvent derrière Tête-de-nœud, les bras croisés sur leurs poitrines.
«C'est pas vrai ! crache Tête-de-nœud, tout rouge. T'es pas la plus forte !
– Et puis l'Inconnu, c'est pas le plus fort, renifle Puant en se grattant le nez. C'est connu que le Mort Vivant est le meilleur. »
Grognon se tourne vers Puant, furieux.
« N'importe quoi ! C'est Blizzard ! Il peut te congeler d'un seul contact !
– Vous êtes des idiots, ricane Drags en relevant le menton. L'Inconnu est le chef, donc c'est le plus fort. Et comme je suis la cheffe et la plus forte, je vais être l'Inconnu.
– Menteuse ! T'es pas la plus forte! », rugit Tête-de-nœud.
Et sur ce, sous les encouragements des deux autres, il se jette sur Drags.
« Ils sont tous bêtes, ma Carotte, chuchote Drakaïs à son lapin. C'est la Bête, le plus fort. Il peut se transformer en Dragon. Et tout le monde sait que c'est les Dragons les plus forts.»
Sa sœur finit par l'emporter. Victorieuse, elle se tient sur le dos de Tête-de-noeud et le maintient au sol par les bras. Aucune gesticulations du garçon ne la désarçonnent. Les cheveux bruns de Drags sont ébouriffés et sa frimousse est fendue d'un large sourire taché de sang.
Elle rigole follement et enfouit de nouveau son nez entre les oreilles du lapin, pour lui délivrer son secret dans un filet de voix admirateur:
– Mais la plus forte de tous, même plus forte que les Dissidents, c'est Drags, parce que c'est une Drago –
– HARIETTE FALLIN TURNIEL !»
Drakaïs sursaute, comme tous les autres et le pouls de son lapin accélère, un poumpoumpoumpoum terrifié. Drags s'est recroquevillée sur elle-même à l'entente de son alias et de son nom complet, plus du tout victorieuse mais défaite. Drakaïs quitte sa sœur des yeux pour observer la figure furieuse qui se dirige vers eux. C'est un ouragan. Ses cheveux bruns volent dans son sillage et ses poings sont serrés à ses côtés, tandis que son expression d'habitude si délicate, est féroce sous sa colère. Ses yeux bruns jettent des éclairs sur Drags, et Drakaïs se sent soulagée de ne pas être le sujet de sa fureur.
« Mais maman... ! C'est lui qui a commencé ! gémit sa sœur en pointant d'un doigt tremblant Tête-de-Noeud. Il–
– Je ne veux rien entendre. », lance maman en la prenant par le bras.
La figure résignée et déchirée de Drags remue quelque chose chez elle. Drakaïs serre Carotte contre sa poitrine et elle se lève, claudiquant vers maman en hésitant. Les larmes dans les yeux de sa sœur la décident à agir. Carotte a les oreilles abaissées en arrière. L'animal tremble de tout son corps et son cœur bat la chamade. Elle enlève sa main posée contre la poitrine du lapin et la pose sur la manche de maman. Elle tire, jusqu'à ce que maman porte son attention sur elle, son expression s'adoucissant en la voyant.
« C'est pas sa faute. », la défend Drakaïs d'une petite voix.
Maman fronce les sourcils, et Drakaïs se tortille sur elle-même.
« C'est pas sa faute, maman, il s'est jetée sur elle et il voulait pas qu'elle joue l'Inconnu parce que c'est une fille, et c'est bête parce que c'est la plus forte alors quand il s'est jetée sur elle, elle s'est défendue et comme c'est la plus forte elle a gagné, donc c'est pas sa faute, c'est pas sa faute, donc faut pas la punir et, et, et ... »
Elle se tait, les yeux écarquillés, et elle veut pleurer car elle a toute l'attention de maman à présent, et c'est intense, mais maman n'est plus en colère. Non, son expression s'est adoucie : un sourire étire ses lèvres et ses yeux sont comme du chocolat chaud. Et si les yeux de maman sont du chocolat chaud, c'est que tout va bien et qu'elle n'a pas besoin de pleurer.
« Vous savez quoi ? Et si vous me racontiez tout ça à la maison ? J'ai fait une tarte aux–
Drakaïs recula brusquement en arrière et tomba sur les fesses, les larmes coulant sur ses joues et les lèvres tremblantes. Sa sœur, sa mère, les garçons ; tout avait disparu. Elle était seule. Le silence de la forêt l'entourait et les arbres étaient les seuls témoins de sa nouvelle crise. Sous ses mains, la terre froide et humide l'aida à s'ancrer dans la réalité.
La Drakonique prit une inspiration tremblante. Dans sa détresse, ses griffes étaient sorties et quelques écailles rouges avaient recouvert ses mains et ses bras. Elle pouvait aussi sentir ses crocs contre ses lèvres.
Un rire amer et sidéré lui échappa. Devant elle, les yeux morts du lapin pris dans son piège étaient fixés sur elle.
« Putain de lapin. », marmonna-t-elle dans un soupir.
La vision, non, le souvenir, avait été trop beau et doux pour s'arracher à son emprise aussi rapidement que d'habitude. Elle n'arrivait plus à penser à sa sœur et à sa mère sans penser à la mort. Ces images avaient été un court réconfort, mais revoir ce qu'elle avait perdu était peut-être pire. Les voir mortes était une chose. Les revoir en joie, revivre ce souvenir, pour finir écrasée une fois l'illusion levée... C'était comme les reperdre une seconde fois.
Sur ses joues, les larmes coulaient toujours. Elle n'avait pas la force de les essuyer.
L'obscurité de la nuit engloutissait la forêt. Les lueurs bleutée des champignons et celles violacées des fleurs fluorescentes étaient telles des fanaux à travers le voile opaque des ténèbres. Les flammes d'un feu de camp ondulaient et craquaient dans l'air avec des explosions d'étincelles. Drakaïs, assise devant la source de chaleur, mâchonnait son repas tandis qu'elle fixait du regard les flammes dansantes.
Ses yeux lui piquaient et elle lâcha un retentissant bâillement. Elle posa son bol à ses pieds et se passa une main sur la figure. Merde. Deux nuits d'affilées qu'elle ne dormait pas pour ensuite gambader dans la forêt tout le reste de la journée. C'était certain, elle n'arriverait pas à rester éveiller toute la nuit. Cette fois, elle ne pourrait pas échapper à ses rêves.
Avec un grognement, elle s'emmitoufla un peu plus dans ses fourrures, les lèvres abaissées en une moue contrariée.
Elle n'y coupera pas : le sommeil l'emportera quelques heures. Mais rien ne l'empêchait de retarder le moment le plus longtemps possible.
La carcasse du lapin gisait aux bordures du feu. La Drakonique fronça les sourcils et ses tripes se nouèrent. Putain de lapin. Le raccourci entre une proie, un repas, et Carotte, le lapin de son enfance, était tordu. Elle ne savait pas si c'était la fatigue qui commençait à l'affaiblir, mais le souvenir qui l'avait engloutie dans la soirée avait été long, trop long, et l'élément déclencheur particulièrement vague.
Sa sœur, sa mère... Elles avaient paru si réelles, si proches. Elles lui étaient pourtant perdues à jamais, et cela, depuis des années.
Elle avait les yeux lourds et un sourire amer se dessina sur ses lèvres. Elle ne se faisait pas d'illusion quant au contenu des rêves qui la hanteraient durant son sommeil. Et malgré l'angoisse qui lui serrait le cœur, un engouement morbide et fou allumait sa poitrine à l'idée de revoir les spectres de sa famille.
Elle ferma les yeux, les rouvrit aussitôt, et elle cligna des paupières rapidement, en se claquant plusieurs fois les joues. Sans effet. L'attrait du sommeil était trop fort.
« Reste éveillée, reste éveillée, reste éveillée... », marmonna-t-elle, les paupières déjà à moitié fermées.
Sa joue rencontra son épaule. Elle s'accrocha à la lueur rouge des flammes, floue et terne. Sa tête était pleine de coton. Le noir tomba sur elle.
Son ombre ailée vole sur les hautes herbes. La horde de cerfs court et une joie cruelle fait vrombir sa poitrine. Elle n'a qu'à abaisser la tête et le buffet est à elle. Sa gueule jaillit et ses dents s'enfoncent dans la chair. Elle sent le pouls de sa proie sur sa langue. Un peu plus de pression sur ses mâchoires, et le cerf est coupé en deux. Le sang abonde dans sa bouche, coule sur son cou –
– du rouge partout, il jaillit de la gorge de sa mère, forme une flaque de plus en plus grande aux pieds de la table sur laquelle est elle attachée, et les cris stridents lui percent les tympans. Elle sait qu'elle crie, que sa sœur crie, que sa mère crie, mais elle ne le réalise pas vraiment. Un coup, un autre, et le monstre n'a aucune réaction, il continue d'abaisser sa machette, même lorsque sa mère ne crie plus et que son corps est enfin immobile, même lorsque Drakaïs a la gorge en feu à force de supplier et que les larmes noient sa vue. Drags est silencieuse à ses pieds. Le monstre arrête, il prend derrière lui une scie et Drakaïs n'arrive pas à détourner le regard, elle se pousse contre les barreaux de la cage, et elle n'entend plus que ce bruit infernal, celui de la chair et des os –
Drakaïs ouvrit les yeux, en nage et en haletant, le cœur au bord des lèvres et la gorge irritée. Le cauchemar n'eut pas le temps de prendre racine.
Il y avait une figure humanoïde, soulignée par le halo bleuté des champignons, de l'autre côté de son feu.
Elle agrippa son épée à côté d'elle et la dégaina en se levant d'un bond. L'individu était encapuchonné et une écharpe noire masquait son visage. Une épée reposait à sa droite, dans son fourreau. Drakaïs serra les mâchoires, le souffle court. Elle relâcha son corps en le voyant marcher lentement vers elle, prête à tout instant à se défendre si besoin. Rapidement, elle écarta les pieds, et sonda les vibrations venant du sol. Il était seul.
Il n'en était pas pour autant inoffensif.
L'individu se laissa tomber mollement devant elle, toujours de l'autre côté du feu. Il posa son sac face à lui. Il abaissa sa capuche et son écharpe, pour laisser apparaître des cheveux bruns ébouriffés et un visage pale. Il attrapa son regard au dessus des flammes et elle se perdit un instant dans ses yeux d'un bleu intense, qui réveillèrent en elle un sentiment de familiarité qu'elle ne comprit pas.
« Est-ce que ça va ? On pouvait entendre tes cris à des lieux à la ronde. »
Sa voix était sans intonation et son visage était un masque inexpressif. Un frisson traversa le dos de la Drakonique. Elle ne répondit rien. L'homme soupira.
« Tu ne me reconnais pas, hein ? », souffla-t-il en ricanant amèrement.
Elle se trémoussa sur elle-même, les sourcils froncés. Il était vêtu d'habits noirs, sa peau était d'un blanc de neige, ses cheveux noirs comme la nuit, ses yeux d'un bleu pan, et même si le sentiment de familiarité ne la quittait pas, elle restait convaincue qu'elle ne l'avait jamais vu.
Elle resta silencieuse.
Le masque de l'homme se fissura d'un petit sourire.
« Je suis Seth, un ami de Cerbère. C'est lui qui m'envoie.»
Cela pourrait expliquer le sentiment de familiarité. S'il disait la vérité.
Elle ne dit toujours rien.
Cette fois, l'homme rit pleinement, d'un rire chaleureux, qui lui fit lever le visage vers le ciel feuillu. Malgré elle, Drakaïs sourit. Il y avait quelque chose de contagieux dans son attitude nonchalante, et son instinct lui soufflait qu'il n'était pas dangereux. Seule sa suspicion l'empêcha d'ouvrir son clapet.
Seth amorça un mouvement de sa main gauche, et le sourire quitta aussitôt les lèvres de la Drakonique. Il le remarqua et ralentit son geste, l'autre main à découvert et levée en l'air pour faire acte de bonne intention. Il passa sa main gauche dans son manteau, et il la sortit serrée autour d'un objet. Elle n'eut pas le temps de s'interroger sur ce que c'était : il jeta l'objet au dessus des flammes et elle dut se faire violence pour ne pas l'attraper et pour le laisser tomber à ses pieds.
Elle ne quitta pas des yeux Seth. Le sourire de l'homme se fit plus amusé encore.
« C'est le collier de Kaï. On se doutait que tu ne me croirais pas sur parole. »
Ce fut l'utilisation du surnom de son Alpha qui la convainquit d'y jeter un coup d'œil. Le médaillon en argent surmonté d'une feuille de chêne, le symbole de sa meute, était inimitable. Cerbère ne s'en serait séparé qu'à sa mort.
Ou bien, pour prouver que l'homme qu'il envoyait à sa Bêta venait bien sous ses ordres et en paix.
Après quelques secondes à continuer de tenir le regard bleu de Seth, elle finit par s'asseoir, non sans vérifier une dernière fois qu'ils étaient bien seuls. Elle ne rengaina pas son épée.
« Pourquoi t'a-t-il envoyé ? », marmonna-t-elle enfin en s'emmitouflant dans ses fourrures.
Elle était encore recouverte de sueur et le froid de la nuit la faisait trembler.
« Il m'a prévenu de ton état ; de tes visions. Il sait que je peux peut-être t'aider, donc il m'a demandé d'aller vérifier par moi-même si je pouvais remédier à ton état. »
Elle serra les poings sur son manteau.
« Et donc ? Est-ce que tu peux m'aider ? »
Le sourire de Seth ternit.
« Je le saurai une fois que tu auras répondu à mes questions. De quoi rêves-tu ? Que vois-tu dans tes visions ? »
Drakaïs siffla et se crispa. Toutes émotions chaleureuses quitta l'expression de Seth.
« Tu n'en as pas parlé à Cerbère ou Elesborn, ni à aucun membre de ta meute. Personne n'a pu me renseigner là-dessus, Drakaïs. Je suis désolé de te demander ces réponses, mais elles sont nécessaires. »
Drakaïs ferma les yeux et s'enjoignit au calme.
« Des souvenirs, d'avant la meute. La mort de ma famille, entre autre. Le reste est incompréhensible. Je suis une Dragonne, je chasse, je bronze au soleil, je vole dans le ciel, seule ou accompagnée. Un homme qui m'attaque. Je ne le reconnais pas. » Elle ricana fébrilement. « J'ai l'impression de devenir folle.
– Pas folle, non, murmura Seth. Quand cela a-t-il commencé ?
– Il y a quelques semaines. Je ne sais pas. J'ai perdu le fil du temps depuis que je suis dans la forêt.
– Hum... Une différence entre tes souvenirs et les visions de Dragons ?
– Si ce n'est que les uns sont des souvenirs et les autres des hallucinations indéchiffrables ? », répliqua-elle sèchement.
Seth l'observa avec un air blasé, peu impressionné par sa remarque. Elle lâcha un lourd soupir et y réfléchit sérieusement.
« Les visions sont toujours par flash, des images ou des sensations. Les souvenirs sont plus conséquents, plus longs.
– Quand as-tu commencé à les voir éveillée ? »
Drakaïs baissa le regard.
« Il y a une douzaine de jours, lors de l'attaque contre les Humains, répondit-elle d'une petite voix. Des visions, celle d'un dragon qui vole dans un ciel et un homme qui allait m'attaquer.
– Des éléments déclencheurs ? »
Elle fronça les sourcils, frustrée.
« Insignifiants la plupart du temps. Un nuage pour le Dragon qui vole, un sentiment de danger pour l'homme qui allait attaquer, le bruit d'un cerf au loin pour des scènes de Dragons qui chassent ou... ou un lapin mort. Il y a toujours un lien avec le souvenir ou la vision, aussi faible qu'il soit.
– Est-ce que tu as des migraines ? »
Drakaïs se frotta le front d'un air absent.
« Oui. »
Seth se gratta le menton, avant de se lever et de la rejoindre en fouillant dans son sac. Drakaïs le regarda faire, la main crispée sur son épée une fois qu'il fut devant elle. Il lui tendit une boîte, qu'elle regarda bêtement, les sourcils froncés. Il l'agita sous son nez.
« Eh, je te promets qu'il n'y a rien de dangereux là-dedans. », la taquina-t-il avec un petit rictus.
Elle lui jeta un regard noir et accepta la boîte. Elle n'y prêta de l'attention qu'une fois Seth debout de son côté du feu. La boîte était en cèdre lustré, et faisait une vingtaine de centimètres de longueur pour une dizaine de centimètres de largeur et de hauteur. Elle ouvrit la boîte, et fut assaillie par un parfum fruité. Des herbes.
«Tu as les instructions dans la boîte pour faire des infusions. Tu continueras d'avoir des souvenirs et des visions, mais elles seront moins fréquentes, lui expliqua Seth en replaçant son sac sur ses épaules.
– Tu sais ce que j'ai. »
Seth renâcla, amusé.
« Les souvenirs ? Un sort d'oubli. Mais il commence à se briser. »
Elle cligna des yeux et étouffa un bâillement.
« Un sort d'oubli ? »
Seth se tourna vers elle, la main à l'épée et l'autre sur l'une des bretelles de son sac.
« Avant ça, tu n'as jamais vraiment pensé à ta famille, je me trompe ? Tu savais qu'elle était morte, que tu en avais eu une avant de rejoindre ta meute, mais tu n'y as jamais réfléchi plus que ça, n'est-ce pas ? C'est le sort d'oubli. Tu étais traumatisée quand la meute t'a recueillie. Tu faisais des cauchemars, tu t'en rendais malade et tu ne laissais personne t'approcher. Alors Cerbère a fait appel à moi.
– Tu as placé un sort d'oubli sur moi, fit-elle d'une voix atone. Tu m'as fait oublier ma famille. Pas seulement sa perte. »
La rage la faisait trembler. Comment Cerbère et Elesborn avaient-ils pu lui faire une chose pareille ?
« Drakaïs, n'en veut pas à tes Alphas. Ils t'ont sauvé la vie. Tu ne t'en rappelles pas, mais ça te tuait. Et j'ai dû placer le sort sur l'ensemble des souvenirs de ta famille, car le placer seulement sur leur mort n'était pas suffisant. Ce n'était pas un Effacement, mais seulement une Abstraction. Les souvenirs de ta famille sont toujours là. L'Abstraction t'empêche juste d'y accéder pour ta propre sécurité.»
Elle prit le temps de se calmer. Il lui faudrait du temps pour digérer l'affaire. Et elle devrait avoir une sérieuse discussion avec Cerbère et Elesborn la prochaine fois qu'elle les verrait.
« Est-ce que c'est pour ça que tu m'es familier ? Parce que c'est toi qui a placé...l'Abstraction ? »
Un sourire énigmatique fendit son visage pâle. Il le camoufla en relevant son écharpe.
« Entre autre. »
Il se recula et se tourna vers les arbres derrière lui.
« Et les visions, alors ? Qu'est-ce que c'est ?
– Des souvenirs aussi, lui répondit-il d'un air absent.
– Quoi ? Les miens ? »
Seth ricana, moqueur.
« Je ne sais pas, Drakaïs ; es-tu une Dragonne ? »
Elle montra les crocs. Connard.
« D'où ça vient alors ? »
Seth haussa les épaules.
« Je ne sais pas l'expliquer. »
Il ne mentait pas. Il ne savait pas l'expliquer. Mais il en savait plus qu'il ne le sous-entendait. Elle ouvrit la bouche pour l'interroger plus, mais il la devança :
– Pas très prudent de t'éloigner de ta meute pour dormir seule dans la Forêt Originelle. Tu n'es pas invincible. Des raisons particulières pour expliquer un choix si absurde ? », lui demanda-t-il en haussant un sourcil.
Un grognement fit vibrer la poitrine de la Drakonique et elle montra les dents.
« Des jours que je suis ici et je m'en sors très bien. »
Seth eut un reniflement moqueur.
« Tu es sûre de ça ? Les cernes sous tes yeux en disent autrement. Et qu'aurais-tu fait si j'avais été un ennemi ?
– Je t'aurais tué, siffla-t-elle en serrant son épée. Et je ne suis pas encore sûre de te laisser en vie.
– Ah oui ? J'étais là depuis longtemps, tu sais. Des minutes. J'ai eu tout le temps nécessaire pour te tuer dans ton sommeil. Tu te mets inutilement en danger. »
Il avait raison. Mais elle refusait d'acquiescer devant lui.
Seth secoua la tête et son torse trembla.
« Que crois-tu faire en t'isolant dans la Forêt Originelle ? Protéger ta meute ? Éloigner tes visions ? Alors, verdict ? C'est efficace ?
– Ça le sera une fois que je prendrai tes putain d'infusions ! », explosa-t-elle en se levant.
Il l'observa quelques secondes et tout à coup, le poids de son examen fut trop lourd. Il semblait fouiller son âme. Elle se rassit et baissa le regard.
« Une dernière chose, Drakaïs. »
Son ton sombre lui fit lever les yeux. Le regard bleu de Seth plongea dans le sien, et son sérieux l'immobilisa.
« Ne fouille pas. Ne force pas les souvenirs. Les migraines viennent de là. Laisse les souvenirs venir à toi naturellement. Tu te souviendras de tout en temps voulu. »
Il lui tourna le dos et s'éloigna dans les ténèbres bleutées et violacées. Il partait. Drakaïs se releva brusquement.
« Quoi, c'est tout ? Tu crois que je n'ai pas réalisé que tu n'avais pas répondu à toutes mes questions ? »
Seth haussa les épaules.
« Rentre chez toi Drakaïs, lui jeta-t-il par dessus son épaule. Ce n'est pas en t'éloignant que tu rendras service à ta meute. Et Cerbère réclame ta présence. Une affaire d'intrus à la frontière sud de la Forêt Originelle. Et je me dépêcherai si j'étais toi : j'ai cru comprendre qu'ils étaient dangereux. Ce serait trop bête que tu perdes une autre famille à cause de tes peurs, n'est-ce pas ? »
Et trop sonnée par sa dernière accusation, Drakaïs ne put que l'observer disparaître dans l'obscurité de la forêt. Les vibrations du sol lui apprirent qu'il n'était plus là.
« Huh. », lâcha Drakaïs en se laissant tomber au sol.
Elle était seule. Le feu avait tari et elle replaça une bûche machinalement. Le crépitement des flammes la berça, mais le sommeil était loin. Trop de questions agitaient son esprit.
Seth. Un sort d'oubli, une Abstraction. Le danger. Des intrus. La meute.
Elle enfouit son museau dans ses fourrures et lâcha un lourd soupir.
Il était temps de rentrer à la maison.
Note:
...hey !
Bon... Je m'excuse de ma grosse absence. J'ai eu un gros coup de déprime sur le mois dernier, et je n'ai pas réussi à écrire. Mais me revoilà :D !
Ce chapitre était censé être court (LOL). J'étais bien partie pour le boucler en 4 pages... mais voilà, la deuxième partie, le dialogue entre Drakaïs et Seth, est devenue beaucoup plus longue que prévue. Heh. Pas grave. J'ai été trop ambitieuse. Il y avait beaucoup trop d'éléments à mentionner correctement pour faire seulement 4 pages ahah. Je reste encore assez mitigée sur la forme du chapitre. Il est assez chaotique, je l'admets. Mais bon, ça sert le fond, donc ça ne me gène pas plus que ça. A vous de me dire !
Ce chapitre, c'est une sorte de chapitre de transition. Pour les lecteurs de la première version, vous verrez peut-être les éléments de cette dernière que j'ai voulu remettre ici ahah. Mais c'est quand même nouveau. J'avais besoin de ce chapitre pour commencer à parler de certaines choses. Promis, les choses sérieuses commencent dans le prochain.
D'ailleurs, le prochain sera encore relativement court (entendez 6/7 pages) mais celui qui suit... Préparez vous à un gros morceau de dix pages ou plus lol (peut-être que je le couperai en deux pour faciliter la lecture... je verrai le moment venu).
J'espère que vous ne vous ennuyez pas trop. Je sais que les choses mettent du temps à se lancer, mais j'aime prendre le temps de bien développer ce qui doit l'être. Et j'essaie de mettre des actions dynamiques dans chaque chapitre.
J'en profite aussi pour vous fêter une bonne année ! J'espère que vous avez passé de bonnes fêtes et de bonnes vacances et que la rentré pour ceux qui étaient concernés n'était pas trop dure.
Je vous dit à la semaine prochaine pour le chapitre 6 ! Bisous !
PS: ALORS ! GROSSE BLAGUE ! Personne pour me dire qu'il y avait une faute sur la couverture XD ! Un gros "s" manquant ! Oulala, j'ai eu tellement honte quand l'une de mes amies me l'afait remarquer ahah !
PS2: Adieu note courte, on revient sur des notes longues !
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