IX- Folle, moi ? Non !
La douleur s'est évanouie. Mais le vent n'a pas caressé ma peau depuis deux jours. Pourquoi ? J'ai percuté une personne dans la rue. Mon écharpe s'est presque envolée, à cause d'un vent fort, ce qui avait permis à tous les passants de voir mon collier briller de différentes couleurs. Ils se sont affolés, je me suis enfuie.
Me voilà donc terrer dans mon appartement. Pour passer le temps j'ai regardé dans les grimoires. Un seul d'entre eux n'est pas vierge. C'est étrange. Rien d'important n'est inscrit dans ce bouquin.
Quatre coups retentissent contre la porte. Mon écharpe trouve son chemin autour de mon cou, alors que j'ouvre.
« Hallo Fraulein »
Erskine se tient devant moi. Ses petites lunettes sont perchées sur son nez, comme à son habitude. Il a ce sourire plein de sympathie collé sur le visage. J'éclate en sanglots. Je suis si heureuse de le voir. Il fronce les sourcils.
« Veuillez m'excuser, dis-je entre deux sanglots, entrez et installez... installez-vous, je reviens. »
J'accours à la salle de bain et claque la porte derrière moi. Qu'est-ce qui me prend ?
« Tout va bien lieutenant ? »
Silence.
« Rien ne va docteur. »
Je renifle, tournant la tête contre la porte. Il soupire.
« Vous m'en parlez ? » Reprit-il.
Est-ce bien prudent ?
« Vous... vous croyez aux choses surnaturelles ?
-Ça dépend. Quelques fois oui. »
Ma main entoure la poignée. Après quelques secondes d'hésitation, j'ouvre la porte, lui faisant face.
« Alors dans ce cas, je vous conseille de vous asseoir. »
Erskine me prend délicatement par le bras, nous conduisant vers le canapé. Une boule se forme dans ma gorge. Toute cette histoire est rocambolesque. Après un quart d'explication, le docteur hoche la tête, visiblement impressionné.
« C'est absolument incroyable...
-Je sais oui... Fais-je en jouant avec mon écharpe.
-Ecoutez Daliah : Je vous conseille d'aller faire un tour cet après-midi. Cela vous remettra sûrement les idées en place. Vous entourerez correctement votre cou avec votre écharpe et vous irez faire vos courses, il se lève en direction de la cuisine, Vos placards sont vides ! Il me montre l'intérieur de mes meubles, Regardez-moi ça... »
Je rigole à sa réflexion. Il est vrai que mes placards sont vides. Cette petite discussion m'a allégé le cœur. Bien que je ne sois pas très confiante, la faim allait finir par me tirailler si je ne faisais rien.
« C'est d'accord Docteur.
-Bien. Maintenant, je vais vous parlez de ce pourquoi je suis venu. Nous avons notre super-soldat. »
Je me redresse.
« C'est vrai ? »
Il hoche la tête.
« Je pense que mon choix vous fera plaisir. La procédure à lieu mercredi prochain. J'ose espérer que vous viendrez ? »
Cette nouvelle me donne du baume au cœur. L'envie de sortir refait surface.
« Très volontiers ! »
Le docteur souffle un rire à mon excitation.
« Bien. Dans ce cas, je vais vous laissez. Ça va aller ?
-Tout va bien se passer, ne vous inquiétez pas. »
Il acquiesce et je l'accompagne jusqu'à la porte. Avant de partir, il se retourne me tendant une feuille.
« Le sujet m'a chargé d'une mission : pourriez-vous transmettre ce message à un ami, qui travaille dans une épicerie à Brooklyn. »
J'observe la lettre. Une épicerie à Brooklyn ?
« Vous a-t-il indiqué la rue ?
-Elle se situe au croisement du Boulevard McGuinness et de Calyer Street. »
Ma curiosité est piquée.
« Je vois. Merci beaucoup docteur. A mercredi.
-Je vous en prie. A la semaine prochaine. »
Une fois Erskine partit, je ne peux m'empêcher d'observer le papier. C'est une petite lettre, que je ne vais pas la lire. Je décide de la ranger dans mon petit sac et commence à me préparer un petit repas. Il me reste peu de chose, mais ça suffira. La visite du docteur m'a fait énormément de bien. Plus jamais je ne devrais m'isoler ainsi.
Mais c'est avec une boule au ventre que je sors de chez moi. Par chance, il n'y a pas encore de vent. Je prends mon vélo, en plaquant bien mon écharpe contre mon cou. Les rues sont calmes et certains enfants jouent. Je fais une petite pose sur un pont séparant Brooklyn et Manhattan. Il est assez récent. Le trajet est long, certes, mais pas fatiguant. Le peu de mouvement de l'eau, engendré par les bateaux, est apaisant, hypnotisant. Après avoir observé l'East River pendant quelques minutes, je reprends ma route.
Arrivée au carrefour, je trouve effectivement une épicerie. A l'extérieur, il y a un étalage de divers fruits et légumes : pommes, tomates, carottes, framboises, salades...
L'intérieur ressemble beaucoup à celui de la boutique dans laquelle j'ai travaillé : simple et peu coloré, mais charmant. Je commence à faire le tour, prenant quelques légumes, des pâtes et aussi des biscuits. Bien sûr, je ne tiendrai pas une semaine, mais en même temps, je n'ai pas tellement faim en ce moment. L'opulence de la nourriture en temps de guerre me fait culpabiliser. Je pose mes minuscules courses sur la caisse et comme il n'y a personne, je fouille dans mon sac pour retrouver la lettre. N'ayant pas eu de précision sur le destinataire, je le cherche sur le papier.
« Bonjour mademoi... Daliah ! »
Je trouve le destinataire exactement au même moment où la voix retentit.
« Barnes ? Je ne pensais pas vous rencontrer ici ! Surtout... Dans une épicerie ! »
Il rit, je le rejoins bien vite. James n'est pas vêtu de son uniforme. Il porte un t-shirt blanc, avec un tablier aussi blanc autour de la taille. Il a cependant ses plaques militaires autour du cou.
« Qu'est-ce que vous faites là ? Dit-il en commençant à prendre mes articles.
-Mes courses. Comme... tout le monde.
-Non mais euh, il rigole, Ce que je veux dire c'est : pourquoi vous faites vos courses à Brooklyn alors que chez vous, dans le Bronx, il doit bien y avoir une dizaine d'épicerie ! »
J'examine encore une fois la lettre.
« Je cherche un certain...je fronce faussement les yeux sur la lettre, "James Buchanan Bucky Barnes". Vous connaissez ? »
Nous rigolons ensemble. A mon grand étonnement, mon rire est cristallin. Peut-être que j'ai retrouvé ma bonne humeur. Cette prise de conscience me fait resserrer mon écharpe. Essayons de ne pas gâcher ce moment.
« Tenez. Dis-je en tendant la lettre.
-Merci. Vous savez qui c'est ? »
Je secoue la tête négativement.
« J'ai hâte de savoir qui c'est ! Ça fera donc... Dix-huit dollars et trente cents, je lui donne l'argent et prends les sacs, Merci de m'avoir... apporter la lettre. Dit-il un superbe sourire aux lèvres.
-Oh de rien ! C'est normal. Bonne journée et bonne chance pour dimanche. »
Il vient à mes côtés, les bras croisés.
« J'ai un peu peur justement pour... pour dimanche et... après. S'il y a un après... »
Je soupire. Sa peur est compréhensible. Qui sait s'il reviendra d'Europe ? Je mords ma lèvre inférieure et ferme les yeux.
« Tout va bien se passer. Vous ferez sans doute parti des chanceux qui reviennent. Y a-t-il des gens qui vous attendrons ? »
Il fixe le sol. Il réfléchit longuement.
« A part Steve... une petite larme s'échappe de son œil droit, je ne vois pas qui. »
Il relève sa tête et me dévisage, un sourire triste sur les lèvres.
« Je vous attendrai aussi dans ce cas. Bon, je risque aussi de partir mais enfin... c'est déjà ça ! »
Il me rend le sourire que je lui lance. J'efface rapidement avec mon pouce la petite larme qui avait coulé de son œil. Il m'enlace, me prenant par surprise.
« C'est gentil. Merci...
-Je vous en prie. »
Je me défais de son étreinte, lui souris une dernière fois et sors. Les rues de New York défilent à nouveau sous mes yeux. Le vent s'est levé mais les rues ne sont pas bondées, ce qui est étonnant.
La luminosité diminue fortement. Je m'arrête à peine quelques mètres de chez moi, et lève rapidement la tête. D'énormes nuages noirs se positionnent au-dessus de la ville. D'où est ce qu'ils viennent ? Cinq minutes plutôt, le soleil brillait sans relâche et il n'y avait aucun nuage à l'horizon. Mon cou commence à brûler.
« Non mais, c'est quand même pas moi qui fais ça ?! » Soufflai-je, désespérée.
Je me dépêche de rentrer et accours à ma salle de bain. Dans le miroir, je peux voir mes yeux brillés de la même couleur que les nuages. Je me poste devant la fenêtre de mon salon. Il commence maintenant à pleuvoir.
« C'est pas toi... C'est pas toi... C'est pas ta faute... »
Je lâche un petit cri, un éclair éclatant juste devant la vitre. La pluie tombe et s'accorde parfaitement avec mon cœur. Bam. Un autre éclair. Boum. Encore un.
« C'est pas vrai... »
Je m'affale sur mon canapé, recroquevillée. La panique s'est emparée de moi. Si i je me calme, est-ce que l'orage s'arrêtera ?
Autant essayer. Je m'assois en tailleur et ferme les yeux.
« Ok... Con-cen-tre toi. »
Mon esprit se vide, petit à petit. Le temps se calme, petit à petit. Quand j'ouvre les yeux, les rayons du soleil illuminent mon appartement.
« D'accord. Là, ça devient vraiment étrange, dis-je en me grattant la tête, et aussi effrayant... Je deviens folle c'est pas possible. »
Je venais de déclencher un orage. Moi, folle ? J'espère que non !
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