17 La Fin du Dragon
-Il commençait à se faire vieux de toute façon. Suite à ça, autant te dire que la demande a explosé! J'étais au centre de l'attention. J'allais sur mes 18 ans, je crois.
-Tu crois?
-Oui, je connais pas ma date de naissance précise. On fêtait pas ça chez nous, de toute façon. Et puis jmen fous un peu.
-Raconte moi comment tu as tué cet homme! Si c'était un tueur, il devait être fort! Tu n'as pas eu peur?
-Si j'avais eu peur, je n'y serais pas allée!
Elle me regarda avec des yeux grands comme des soucoupes. Qu'elle pouvait être naïve!
-Marie, évidemment que j'avais peur!
-Oncle Antonio dit que la peur est pour les faibles.
-Eh bien oncle Antonio est un con. La peur, c'est un mécanisme de survie. Les faibles sont ceux qui restent paralysés par la peur. Moi, j'aime la peur, car c'est ce mélange de peur et d'excitation que j'aime tant dans mon métier. Elle te rappelle que tu te bas pour ta vie. Et cette fois, face au Dragon, je peux te dire que j'ai ressenti plus de choses que jamais.
-Le Dragon?
-C'était son surnom. C'est maintenant le mien dans la mesure ou j'ai pris sa place, mais je l'utilise assez peu.
-Pourquoi le Dragon?
-Parce qu'il était vieux, ne s'était jamais fait prendre et était connu pour être terriblement résistant, d'où une sorte d'immortalité. Il s'est pris des balles, des coups de couteau, a été pris dans des explosions, des destructions de bâtiment, mais il s'en est toujours sorti. On disait même qu'il n'en gardait pas de cicatrice. Il était réputé pour ses crises de colère dévastatrices. C'était un vrai monstre. Il avait des yeux bleus acier qui te glaçaient le sang, on aurait dit un vrai psychopathe. C'en était un, en fait. Et il était connu pour un autre détail, qui va peut être pas beaucoup te plaire.
-Lequel?
-Il haïssait le clan Rigotti. On dit que toute sa vie, il a servi sous leur bannière parce qu'il avait pas le choix, mais dès que les Sforza ont pointé le bout de leur nez, il a pas hésité un instant à retourner sa veste et à les massacrer à la pelle.
Marie frissonne légèrement.
-Père ne m'en a... jamais parlé.
Je ricane.
-Tu le vois souvent, ton père?
-Non...
Normal... le vieux Rigotti est sous la coupe des Sforza depuis dix ans. Si Antonia Sforza a même reprit en main l'éducation de sa gamine à sa place, c'est qu'il n'est plus que l'ombre du parrain qu'il a put être.
-Comment t'as fait, face au dragon? Reprend Marie, préférant apparemment quitter le sujet de la chasse aux Rigottis.
-Oh, c'est tout simple; j'ai tout préparé pendant des mois. J'avais quasi pas de sources de revenus, et j'ai dû le débusquer et préparer minutieusement mon attaque. Jme suis servie de son plus grand défaut, sa colère justement. J'ai commencé à lui piquer des contrats, à faire circuler des rumeurs sur lui, et tout un tas de coups assez bas. Rapidement, il s'est énervé et a commencé à me chercher, ce qui m'a permis de déterminer son identité. Puis, j'ai semé des indices sur ma planque, pour qu'il la retrouve. Mais il était pas con, lui, et il avait bien flairé l'affaire.
-Il n'est pas venu?
-Oooh, si, il est venu. Il était comme moi; l'idée d'une lutte à mort l'excitait, lui essayait de déterminer qui j'étais, et moi de l'abattre. Il était bien plus fort que moi, je pouvais pas l'attaquer de front. Donc je me suis renseignée, et j'ai dégotté une arme à feu. Je me suis beaucoup entrainée, sur cible fixe, mouvante, et vivante. C'est là que j'ai appris à tirer, mais j'ai toujours un style imparfait et je préfère les méthodes plus traditionnelles. J'ai beaucoup hésité à la manière de le tuer, et je me suis dit que l'arme à feu faisait un peu lâche. Le but était de me faire un nom, donc un meurtre impressionnant était de mise! Notre jeu du chat et de la souris a duré 6 mois, c'était devenu le feuilleton préféré de la pègre, et le Dragon ne décolérait pas de ne pas réussir à me débusquer. Être à la fois proie et chasseur est particulièrement excitant, tu sais. Le sentiment de danger est bien plus présent. Et notre petit jeu a fini par cesser, quand je lui ai tendu mon piège final. Il est venu en sachant parfaitement que je l'attendais et que j'étais préparée, comme s'il voulait me tester. Je savais que si je ratais sur ce coup là, lui ne me raterait pas.
Marie est suspendue à mes lèvres. Elle attend la suite, et je prends un malin plaisir à la faire patienter.
-J'avais piégé l'entrepôt, mais il a évité ou désamorcé la plupart de mes pièges. C'était un vrai pro, et ma lutte contre lui m'a mise à son niveau. En tout cas, c'est lui qui n'a pas pu éviter l'un de mes pièges, mon meilleur d'ailleurs, que j'avais caché derrière un autre. Une petite bombe artisanale bien réglée, et hop, une jambe en moins! Mais il était coriace. Même à ce moment, il se défendait encore parfaitement bien et avait cet air dément sur le visage. Après ça, c'était une mêlée. Il a vidé son chargeur en tentant de m'atteindre, puis s'est servi de ses poings et de son couteau. Il m'a même laissé une sacrée cicatrice sur le ventre! Mais c'est le mien qui a atteint sa gorge, et je lui l'ai tranchée sans autre forme de procès. Il ne pouvait pas éviter à cause de sa blessure. J'ai cru qu'il allait réussir à survivre même de ça, alors je l'ai poignardé une bonne dizaine de fois dans la poitrine pour faire bonne mesure. Mais il a eu le temps de bien m'amocher avant. Je suis restée alitée 2 semaines après ça. De toute façon, on était dans un endroit à l'écart, personne n'a retrouvé le corps, mais je suis quand même retournée m'en débarrasser une fois que j'allais mieux.
-Tu as été alitée où? À l'hôpital?
-Bien sûr que non! Ils auraient posé des questions. Non, c'est... une amie, qui m'a recueillie.
-Une amie? Tu la connais toujours?
-Bien sûr. Elle était intéressée, en me sauvant. Elle avait suivi le Dragon, c'était une petite maline. Maintenant, on a une sorte d'accord de sexe/protection, mais c'est sans doute ce qui se rapproche le plus d'une amitié pour moi. Elle s'appelle Ambre, et si un jour tu suis les pas de ton père ou de ton "oncle" dans la mafia, tu la rencontreras sûrement très vite.
-C'est une mafieuse?
-Non, c'est une pute.
-Oh!
Marine semble ne pas savoir que penser de cela. Une précision est sans doute nécessaire.
-Pute et prostituée, c'est la même chose. Je ne suis pas en train de l'insulter.
-Aaah, d'accord, je comprends mieux.
Sérieux, cette gamine m'étonnera toujours.
-Je pourrai la rencontrer?
La question me prend de cours.
-Pourquoi voudrais tu la rencontrer?
-Je ne sais pas... elle à l'air gentille.
-Elle est un concentré de choses qui n'iraient décidément pas avec ton innocence. Fais je remarquer.
-Plus que toi?
Elle marque un point.
-Ok, peut être pas autant que moi. Mais suffisamment. Et moi je dois te garder au secret, Ambre est légèrement trop bavarde.
Elle est déçue, mais ne rajoute rien.
-Tu pense que le commissaire va revenir me chercher bientôt? Demande-t-elle soudain.
-Vu la situation, je ne pense pas. Mais il a intérêt à pas trop tarder non plus et à te trouver une meilleure planque! Je vais pas jouer la baby sitter indéfiniment.
Elle à l'air déçue une nouvelle fois. Je ne sais pas ce qui la déçoit, le fait que le commissaire ne vienne pas ou le fait que je ne veuille pas la garder. Cette dernière partie est de toute façon un mensonge de ma part. L'avoir chez moi est assez plaisant, même si pas des plus pratique pour baiser en paix. Elle me fait la bouffe, s'occupe des taches ménagères que j'ai toujours négligées, et brise ma coquille de solitude. Et elle a besoin de moi aussi, finalement, vu que je lui fais découvrir ma vision du monde, ce monde qui lui est inconnu.
Enfin, j'espère qu'elle le ressent de cette manière. Mais j'en doute pas mal.
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