Planetarium →ChanMina
Planétarium
~ OS Stray Kids, TWICE,
~ Chan X Mina,
~ inspiré par la chanson Planetarium de Ai Otsuka,
~ octobre 2020
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Elle était là, dans sa robe de danseuse étoile blanche aux motifs dorés, montée sur des pointes qui devaient être devenues inconfortables avec le temps. Ses cheveux étaient fixés en un élégant chignon dont aucune mèche n’osait se défaire. Ils étaient bruns, peut-être plus clairs en réalité, mais la coiffure compacte ne permettait pas d’en distinguer véritablement la teinte. Son visage était paisible, les yeux clos, les traits relâchés. Pourtant sa posture harmonieuse devait lui nécessiter de gros efforts mais elle n’en semblait pas perturbée.
Depuis le temps qu’elle était là, ainsi, j’avais fini par mémoriser la position de chaque partie de son corps. Ses mains gracieuses et pourtant immobiles semblaient fendre l’air. Dans son globe de verre parsemé d’étoiles, le seul mouvement qui lui était autorisé était une rotation aussi longue que le mécanisme à remonter le lui permettait, le tout au fil d’une mélodie presque mécanique connue de tous sans pourtant que personne ne soit capable d’en donner le titre.
Une mélodie qui aidait probablement les petites filles à s’endormir le soir, ou peut-être une mélodie qu’elles fredonnaient en regardant la jolie ballerine dont elles aimeraient tellement avoir la grâce et la beauté. Fantasmer sur des êtres imaginaires, en voilà une belle manie d’enfants… Pourtant cette manie, je l’ai gardé même une fois l’âge adulte atteint, et cette ballerine, je prends toujours autant de plaisir à la contempler. Étrange pour un homme me direz-vous ? Et pourtant…
Il est 19h30, l’heure de la fermeture de la boutique, mon grand-père a déjà fermé le rideau de fer de la vitrine et tourné les multiples verrous de la porte d’entrée. J’ai vidé la caisse et ai mis la maigre recette du jour en lieu sûr dans le coffre-fort de l’arrière-boutique. Il y a des jours meilleurs avec des ventes plus intéressantes financièrement, même si nous prenons néanmoins plaisir à nous séparer du moindre objet présent dans le magasin. Car chacun de ces objets est porteur d’une histoire, de son histoire, et cette histoire touche et émeut les acheteurs, et cette histoire se poursuivra peut-être chez eux, une fois qu’ils auront trouvé la place idéale pour leur nouvelle acquisition.
Mon aïeul a encore quelques paperasses à trier, des factures, des fiches clients, mais il a aussi une ou deux étiquettes à compléter avec les informations concernant plusieurs nouveaux articles qui seront probablement mis en boutique dans les jours à venir. Il me faut l’attendre, nous devons partir ensemble.
— Tu ne lui as pas dit au revoir, me dit-il depuis son petit secrétaire, profite, j’en ai pour une petite dizaine de minutes.
Son ton se veut plein de reproches, mais son timbre est en réalité agréable. Je me penche sur le comptoir et tourne de quelques coups la petite clé dorée. Le mécanisme se bloque avant de se lancer une fois le nombre de tours maximum atteint. La mélodie emplit la boutique, ce petit air que je connais par cœur et que je fredonne parfois sans y penser. La jolie ballerine se met à tourner sur elle-même, suivant le petit circuit tracé à son pied. La peinture est un peu usée par endroit, pourtant elle est toujours aussi ravissante à mes yeux. Il manque peut-être un peu de dorure sur sa robe, un peu de paillettes sur ses collants mais qu’importe, elle est et restera à jamais la plus jolie créature qu’il m’ait été donné de voir.
— Tu es magnifique, Mina, lui murmurai-je les yeux brillants.
J’adorais la contempler, je pouvais y passer des heures entières et mon grand-père me répétait que je finirais un jour par la casser, mais je sais que c’est impossible, car on ne peut pas casser un rêve.
Mina n’était pas à vendre, enfin officiellement elle l’était, mais je m’y étais tant attaché que mon aïeul s’était décidé à retirer son étiquette, il disait qu’elle avait trouvé sa place, qu’elle m’avait choisi et que je l’avais acceptée. Il avait un peu ri quand je lui avais dit avoir baptisé la ballerine et finalement, il s’était souvenu m’avoir appris que nommer les objets leur donnait soit-disant une âme. J'avais toujours trouvé ça beau, et j'espérais vraiment avoir réussi.
***
L’obscurité de la nuit remplace peu à peu la lumière du jour, j’entends cette voix, telle une voix d’enfant, aimante et lointaine, elle se dissipe petit à petit, elle reviendra plus tard.
Je danse, je danse parce qu’on me le demande, parce que c’est ce pour quoi je suis faite. Je n’ai pas de souvenir du passé, je ne me rappelle que d’une voix m’appelant un soir, une voix chaleureuse qui m’a nommée Mina.
Lorsque je lève les yeux, je ne vois que les étoiles, un ciel étoilé constant. I n’est pas changeant et qu’il fasse jour ou nuit, les astres sont toujours présents. Il est magnifique ce ciel et pourtant, j’espère y voir un jour une étoile filante. Si je pouvais en voir une, je ferais un vœu.
J’ai beau avoir les mains tendues, personne ne les saisit jamais, j’ai beau crier, pleurer, personne ne m’entend jamais, il y a juste cette voix. Je ne peux pas lui répondre, elle n’a pas l’air de m’entendre, mes mots semblent heurter les étoiles, ils n’atteindront probablement jamais personne.
Ma solitude est grande dans ce globe de verre parsemé d’astres inertes. Une mélodie résonne, familière et entêtante, elle me force à danser, à tournoyer, à virevolter, de toute manière c’est tout ce que j’ai à faire. Pourtant j’espère, je récite tout bas ce vœu à l’intention d’une étoile filante qui ne passera jamais, telle une prière porteuse de toute la souffrance et la solitude que j’ai en moi.
Elle t’atteindra peut-être un jour, toi la voix des constellations, et si nous ne pouvions néanmoins pas nous rencontrer, je continuerais à danser, à espérer, à souhaiter.
Mon rythme ralentit, la musique se fait moins fluide, il va disparaître à nouveau, celui qui m’a nommée, celui dont j’entends la voix par delà les astres. Ça me donne envie de pleurer, de savoir que ma prière ne l’atteindra jamais.
***
La mélodie se fait plus mécanique, plus lente, la clé dorée a terminé ses tours, Mina va cesser de danser. D’un geste délicat, je passe un coup de chiffon sur le globe en verre, mon grand-père me dit que c’est inutile, je passe tellement de temps à manipuler et à observer cette boîte à musique que la poussière n’a pas le temps d’y poser ses valises.
Pourtant c’est important pour moi, si je ne peux rencontrer ma ballerine, alors je veux au moins que son ciel étoilé reste clair. Ça m'attriste, elle doit se sentir si seule dans cet endroit restreint, à tournoyer au gré de mes envies. Peut-être est-elle las de cette musique faussement orchestrale ? Elle fait cependant partie de son univers.
— Chan, m’appelle mon aïeul depuis la porte de l’arrière boutique, c’était ce soir le feu d’artifices ?
Je me redresse de mon comptoir en bois verni et le rejoint près de la sortie, là nous levons les yeux vers le ciel. De grandes fleurs brillantes explosent tour à tour dans la nuit, de différentes formes et de différentes couleurs, plus ou moins rapprochées les unes des autres.
— Les feux d’artifices, c’est un peu comme les étoiles filantes, si on prie très fort, nos vœux peuvent être exaucés.
Je lui souris, il me prend vraiment encore pour un enfant... Je profite pourtant du fait qu’il verrouille la porte pour fermer les yeux et je fais ce vœu fou… Peut-être atteindra-t-il les cieux, peut-être que de manière aussi brève que ces artifices, une étoile filante brillera dans le ciel de Mina et peut-être qu’aussi fort que j’y crois, son rêve à elle se réalisera.
***
Le ciel immobile et constant de mon monde s’est illuminé ce soir, une étincelle flamboyante s’est tracée un chemin parmi les étoiles figées.
J’ai fait un vœu, j’ai prié pour te rejoindre, toi dont je ne connais que la voix et qui pourtant me paraît si familier. J’ai récité mon souhait fou à ce ciel magnifique, t’a-t-il atteint ?
J’ai pleuré, j’ai pleuré en espérant pouvoir te rejoindre, là-haut, loin… Peut-être que demain sera différent…
~
Une odeur de brûlé, comme après un feu d’artifices, lorsque les milliers de petites paillettes enflammées s’éteignent peu à peu et retombent au sol.
Des pas sur le plancher, qui s’approchent puis qui s’arrêtent en plein élan, leur rythme est familier.
La lumière artificielle d’une lampe qui éclaire une pièce jusqu’alors plongée dans la pénombre.
Des larmes qui coulent sur des joues alors qu’ils se rencontrent enfin.
La ballerine est là, allongée sur le sol de la boutique, le vendeur l’approche, comme il le ferait près d’un oiseau blessé.
Elle tend la main et pour la première fois, quelqu’un la saisit.
***FIN***
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