Scène 6
Angélique et Edith Volage réapparaissent, portant des plats, et vont déposer la nourriture sur la table.
Edith Volage : Messieurs, nous avons le droit à un festin, ce soir !
Angélique : Oui, le maître de maison vous a gâté !
Edith Volage : Oh, d'ailleurs, ne devrait-on pas l'attendre ?
Florian Laroche : Ah non, nous allons finir par mourir de faim s'il ne réapparait pas ! Et je dois avouer que mon ventre attendait ce moment avec impatience !
Tristan Minois : Je meurs de soif, pouvons-nous nous servir en vin ?
Angélique : Buvez tant que vous voulez mais je ne veux aucune tâche sur le tapis !
Florian commence à prendre des petits fours et Tristan à se servir du vin. A partir de ce moment-là, tous les personnages mangeront durant la scène, sauf Angélique.
Edith Volage : Pourquoi restons nous debout ?
Tristan Minois : Les chaises sont neuves, on ne voudrait pas les salir...
Florian Laroche : Ne l'écoutez pas, il serait prêt à vous faire croire au seigneur...
Edith Volage : Oh mais je crois en Dieu et je...
Louise Laroche fait subitement apparition, agacée, et coupe la parole à Edith.
Louise Laroche : Ah non ! On ne parle pas de religion ! Ce sujet a l'effroyable manie de tout gâcher et de ne rien apporter de nouveau, mise à part la migraine !
Edith Volage : Mais nous ne parlions pas de religion, je me demandais seulement pourquoi nous ne nous asseyons pas !
Louise Laroche riant : Oh mais ma chère, nous ne nous asseyons jamais au début d'un repas ! C'est le moment où nous pouvons manger tout en discutant en petits groupes éparpillés dans la pièce avant de se rejoindre autour de la table... Mais j'imagine que ce prologue au diner n'existe pas chez vous...
Edith Volage : Si, mais on appelle cela l'apéritif... Et ce n'est pas aussi cérémonieux, surtout que nous ne sommes certainement pas assez pour discuter en petits groupes !
Tristan Minois : Oh non malheureuse, laissez votre logique à l'entrée de la discussion ! Un débat sur la tradition n'a plus aucune raison d'être lorsqu'on commence à réfléchir !
Florian Laroche : Même sans réflexion, ce genre de débat risque de vite m'ennuyer ! Servez-vous au lieu de vous demander pourquoi on reste debout !
Louise Laroche : Mon fils a raison, mangeons au lieu de perdre notre temps !
Ils se servent et Louise propose des canapés à Tristan qui refuse.
Louise Laroche : Goutez donc à ces petits fours au lapin !
Tristan Minois : Ils m'ont l'air délicieux et je suis sûr que Mademoiselle Angélique a pris grand soin de les cuisiner mais je suis désolé, je n'en veux pas...
Louise Laroche : Allons, vous êtes tout maigre !
Tristan Minois : Ou c'est vous qui ne l'êtes pas assez !
Louise Laroche agacée : Mangez moi ça ou je vous mets à la porte !
Florian Laroche : Maman, Tristan est végétarien...
Louise Laroche : Quoi ? Végéta quoi ?
Florian Laroche : Il ne mange pas de viande...
Louise Laroche dédaigneuse : Et ça se dit homme de goût ! (soudainement moqueuse) Du coup, vous ne pourrez pas gouter aux verrines de lard fumé, un véritable délice, ou encore aux toasts de foie gras qui sont parfaitement...
Louise Laroche prend un toast de foie gras, en mange un bout et ferme les yeux en gémissant exagérément de plaisir.
Louise Laroche : Exquis...
Angélique : Oui, c'est bien ce que je pensais... Il me suffit d'apporter de la nourriture pour vous faire oublier l'absence de Monsieur... Moi qui espérais trouver des cœurs plus gros que des estomacs, me voilà déçu...
Louise Laroche : Tu te trompes, Angélique ! Je n'oublie pas mon mari, bien au contraire ! J'espère justement que nos mastications le feront venir !
Angélique : J'imagine que c'est pour ça que mademoiselle Volage mange la bouche ouverte...
Tristan Minois amusé : Je vois que vous apprenez vite de mon cynisme, ma chère... Je suis flatté !
Florian Laroche : Regretter les absents ne les fera pas venir ! Aller, Angélique, viens manger avec nous !
Angélique : Oh, ce ne serait pas raisonnable, n'est-ce pas ?
Louise Laroche : Oui, effectivement, ce ne serait pas raisonnable...
Tristan Minois : Le raisonnable n'a pas toujours raison...
Angélique : Non, vraiment, je n'en ai pas envie... Et je n'aimerais pas enlever le festin de la bouche de Mademoiselle Volage...
Edith Volage : Pourquoi moi ?
Angélique : On ne parle pas la bouche pleine...
Florian Laroche : Allons, Angélique, tu ne vas tout de même pas te laisser mourir de faim !
Louise Laroche : Ne la traite pas comme une affamée ! On la nourrit, que crois-tu !
Tristan Minois : Vraiment ? Et comment faites-vous ? Vous lui jetez des cacahouètes à travers les barreaux de sa cage ?
Florian Laroche : Allez, Angélique, accompagne nous...
Angélique (lasse) : Bon... Passez-moi un de ces radis, alors !
Florian tend le bol de radis à Angélique qui en prend un.
Florian Laroche : Tu ne veux que cela ?
Angélique : Oui, ça suffira amplement...
Louise Laroche : Bien, Monsieur Maunois, parlons un peu de vous !
Tristan Minois : Dire que la discussion vous ennuyait aurait été plus simple mais je vous écoute...
Louise Laroche : Vous nous paraissez bien fortuné, alors je ne peux m'empêcher de me demander quel est votre métier...
Tristan Minois : Et bien, je travaille dans un cabaret parisien, comme artiste...
Edith Volage (enthousiaste) : Au Moulin Rouge ? Parmi les plumes, les lumières...
Louise Laroche : Et les prostituées, aussi...
Tristan Minois : Non, pas exactement au Moulin Rouge... Mon lieu de travail est beaucoup plus secret, mais il est aussi question de tout cela... Je me produis à l'Apollon...
Angélique : Et vous êtes danseur ?
Tristan Minois : Et bien, j'imagine qu'on peut considérer ce que je fais comme de la danse... Qu'en penses-tu Florian ?
Angélique : Florian vous as déjà vu sur scène ?
Tristan Minois : Oh mais c'est un habitué !
Florian Laroche (prit au dépourvu) : C'est vrai que Tristan est un artiste impressionnant et vraiment professionnel... Il est d'ailleurs très célèbre à Paris !
Edith Volage : C'est formidable ! Ça doit être magnifique ! Il vous arrive de rencontrer des divas, n'est-ce pas ?
Louise Laroche : Qu'importe ! La seule vraie question est simple : gagnez-vous bien votre vie ?
Tristan Minois : Il n'y a donc que l'argent qui vous intéresse ?
Louise Laroche : Oui, et alors ? Qu'y a-t-il de mal à cela ? J'aime les petites pièces, les billets et les lingots, mais il n'y a rien de plus normal... L'argent régie le monde, il le gouverne et le modèle pour le rendre confortable...
Angélique : Oui, mais pas pour tout le monde...
Louise Laroche : Pour ceux qui le méritent...
Edith Volage : Et pensez-vous l'avoir mérité ?
Tristan Minois : La fleuriste sort ses épines, je suis impressionné !
LouiseLaroche : Mais bien sûr !
Florian Laroche : Mais bien sûr que non !
Louise Laroche : Florian ! Je te rappelle que la fortune familiale sera la tienne lorsque je ne serais plus de ce monde !
Angélique : Ne parlez pas de miracle...
Florian Laroche : Je le sais, mais je ne prétendrais pas l'avoir mérité, seulement avoir eu beaucoup de chance le jour de ma naissance...
Tristan Minois : Au fond, ce sera un peu grâce à votre mère, alors...
Louise Laroche : Ah, vous remontez dans mon estime, Monsieur Maunois !
Florian Laroche : Non, ça sera grâce au hasard...
Edith Volage : Ou grâce à Dieu...
Louise Laroche : Ha non ! On ne parle pas de religion ! Je vous l'interdis !
Tristan Minois : Tiens, voyez-vous cela, elle nous interdit de parler...
Angélique : Personnellement, j'ai l'habitude...
Louise Laroche : Mais c'est ma soirée !
Florian Laroche : Non, c'est celle de papa.
Louise Laroche : Il n'est pas là, que veux-tu que j'y fasse ?
Edith Volage : Quelqu'un a-t-il gouté aux verrines de tartare ? Elles sont délicieuses !
Un silence énervé s'installe, suite à la tension entre la mère et le fils Laroche.
Angélique : Bien, je pense qu'il est temps d'aller chercher l'entrée...
Tristan Minois : Attendez-moi, ma chère, je préfère la cuisine à cette ambiance assassine...
Angélique et Tristan Minois sortent. Un nouveau silence de gêne s'installe, Florian Laroche va s'assoir dans un fauteuil, à l'écart.
Louise Volage : S'il vous plait, au nom du ciel, que quelqu'un dise quelque chose !
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