
•𝓒𝓱𝓪𝓹𝓲𝓽𝓻𝓮 𝟐•
Lorsque le grand méchant squelette ouvrit la porte de son appartement, il n'hésita pas à donner un bon coup de pied dans le parapluie qu'il avait jeté parterre, pour le faire entrer avant nous.
- Sans ! Ramène tes os ! ordonna mon enleveur, se décidant enfin à me redéposer à terre, néanmoins me tenant par les épaules, ne voulant pas que je parte.
J'entendis alors des bruits de pas dans notre direction, appartenant sans aucun doute au deuxième squelette qui venait de faire son apparition à l'entrée.
- Salut Boss... On a de la visite ? demanda-t-il en croisant des bras, plus surpris que curieux de ma présence.
Il était bien plus petit que mon kidnappeur, mais plus grand que moi encore, je dirais une tête de plus à vue d'œil. Il avait de grands orbites avec des pupilles d'un rubis profond, une dentition acérée ornée d'une dent en or dont j'ignorais la provenance ainsi qu'une cicatrice sur le crane, plus petite que celle du plus grand. Il portait un pull couleur moutarde, un jeans noir et des baskets de la même couleurs que le bas. Je le jalousais. Moi, je n'avais que des vieux trucs trop petits pour moi...
- Sans, mets-la sous la douche veux-tu ? C'est ignoble de vivre dans un tel état. Moi je vais au commissariat de police pour dire qu'on a trouvé une gamine sans abri.
Je fronce des sourcils.
- J'ai un abri ! J'ai mon carton et vous n'irez nul-part parce que les policiers voudront mon nom pour faire un rapport, or vous ne le connaissez même pas. Et je doute que je sois la seule personne recherchée dans cette ville, ils ne sauront peut-être même pas qui je suis. Et puis... Et puis j'veux juste pas ! Donc bonne merde !!
Le dénommé Sans fit un aller-retour du regard passant de moi à son... Boss ?
- Tu vas me dire ton prénom alors... soupira le grand squelette en retirant son manteau et ses bottes trempes, peut-être pour en mettre des secs.
-Comme si j'allais vous le donner ! enchaînai-je en tirant la langue, ce qui fit rire Sans.
Celui-ci se reprit d'ailleurs très rapidement, remarquant le foudroiement de regard du plus grand tandis que ce dernier, justement, jurant dans sa barbe en passant la main sur le visage, cherchait une solution pour se débarasser de moi.
- Bon, on verra ça plus tard. Sans, va la laver pitié, c'est infecte. C'est pas une demande mais un ordre.
Il me poussa en direction de Sans qui vint m'intercepter avec ses bras avant se s'enfermer dans ce qui devait être sa chambre.
- Bon, bah... J'pas trop l'choix, murmura le plus petit squelette qui commençait déjà à me tirer jusqu'à la minuscule salle de bain au bout du couloir peu, voire pas du tout, décoré.
- Wow wow wow, minute papillon. On n'se connait pas, tu vas tout de même pas laver une jeune adolescente qui en plus est une fille ?! Sale pervers, casse-toi de cette pièce !
Le monstre leva les mains en l'air avec un sourire amusé.
- Ok ok, pas la peine de s'énerver.
Il tourna les talons et ferma la porte derrière lui.
M'assurant que plus personne n'était là, je me dévêtis avec lenteur à cause de la fatigue qui me consummait. D'abords mon pull bicolore, puis mon jeans bleu-gris troué au niveau des genoux, mes souliers ainsi que mes sous-vêtements et chaussettes. À présent totalement dénudée, je m'assis dans la baignoire et fis couler l'eau chaude comme je n'en ai jamais eu l'occasion d'avoir. Et de la mousse. Beaucoup de mousse. Ca sentait la fraise, ma parole ! Ces squelettes avaient de la mousse pour le bain, miracle ! Une fois la bassine remplie à ras bord, j'éteignis fermement le robinet comme si j'avais peur de fondre à cause de cette chaleur aquatique. Tandis que je soupirais d'aise, la porte de la salle de bain vint lentement s'ouvrir dans un grincement énervant, laissant entrer un monstre indiscret.
- J'apporte des vêtements propres, je ne te regarde pas, t'inquiète.
Je fixais le petit squelette déposer lesdits vêtements propres à même le sol, s'éloignant ensuite avec mes chiffons sales qui me servaient de seconde peau, mais je le retins.
- Attends, Sans, y'aurez du shampoing ?
Le squelette se tourna vers moi, puis éclata de rire. C'était un rire rauque, parfaitement accordé à sa voix grave.
- Tu t'poses vraiment la question ? Bon laisse moi faire, je vais t'aider à t'laver les cheveux, enchaîna-t-il, une fois à peu près calmé de son fou-rire.
Sans broncher, je laissais ses mains osseuses parcourir mes cheveux noirs mal coupés jusqu'aux coudes, me frottant avec force pour me nettoyer un minimum, sauvagement certes.
- Sinon, moi j'm'appelle Sans, mais tu le sais déjà, n'est-c'pas ? annonça-t-il pour entamer la discussion, idiot en soit, car il connaissait déjà ma réponse.
- Tu espères peut-être que je vous dise mon prénom ? C'est mal partie, je ne le donnerai à personne, surtout pas à un pervers comme toi.
Il sourit.
- Alors je t'appellerai sale gosse. Ou morveuse. Je n'sais pas, tu préfères quoi ?
Je roulai des yeux tandis qu'il rajoutait de la mousse à la fraise dans mes cheveux.
- Contente-toi de me laver, 'spèce de larbin. Pourquoi t'appelles le kidnappeur Boss au juste ? Il s'appelle vraiment comme ça ?
Je sentis ses phalanges me griffer un coup sur le crâne, peu enchanté du surnom, ou alors du sujet.
- Mon frère s'appelle Papyrus, mais il préfère que je l'appelle Boss. S'il n'y a que ça pour satisfaire son égo... Prends en de la graine, ne l'appelle pas Papyrus si tu tiens à ta vie.
Il s'assoit sur le carrelage, sa main, avec le manche de son pull retroussé, se baladant dans l'eau mousseuse de mon bain sans pour autant chercher de contact avec mon corps nu, l'air mélancolique.
Nous restâmes ainsi quelques longues minutes, dans un silence lourd, jusqu'à ce que je me décide à le briser.
- Je vais sortir du bain. Tu es un pédophile ou tu vas sortir ?
Surpris du changement de mon humeur, ou de mon langage déplacé que j'empruntais depuis notre rencontre, malgré mon âge plutôt jeune, il quitta la salle de bain sans un mot. Je sortis, vidai la baignoire et enfilai les vêtements qu'il me prêtait par obbligation, je suppose. Ces habits devaient belle et bien lui appartenir car ils m'étaient un peu trop larges, mais ça ne me dérangeait pas. Un tee-shirt jaune-orange, un short noir qui me faisait plutôt office de pantacourt et... ma culotte sale parce que logiquement, un squelette ne porterait pas de sous-vêtements féminin pour jeune adolescente... Quoique, je ne sais pas. Et je n'ai pas envie de savoir.
Je sortis de la pièce et, pieds nues, je visitai le petit appartement constitué d'une salle de bain, un hall d'entrée, une petite cuisine, un salon, deux chambres et un minuscule balcon. Pour moi c'était déjà un luxe, surtout lorsque je me laissais tomber sur le canapé pour rejoindre Morphée mon vieille ami.
Combien de temps avais-je dormi sur ce confortable canapé miteux ? Dur à dire, seulement assez longtemps pour être réveillée par une étrange odeur provenant du balcon, près de moi. Je me frottai les yeux en baillant, puis quittai mon pseudo-lit.
-Enfin réveillée ? demanda Sans, légèrement courbé au-dessus du vide, accoudé à la barrière métallique du petit balcon.
Il fit tomber quelques molécules de cendre de sa cigarette avant d'en tirer une longue latte. Au loin, derrière les gratte-ciel, une lueur orangée se distinguait dans l'ombre. Les lampadaires s'éteignaient une à une, et les automobiles se faisaient moins rares. Le jour se levait.
- Tu vas finalement t'décider à dire ton nom ? demanda le squelette, un sourire narquois imprimé sur son visage osseux, un rayon de soleil se reflétant même sur la dent dorée.
- Bien essayé mais non, répondis-je en posant les mains sur la barrière du balcon.
- Je dirais à Boss que j'aurai au moins essayé... soupira Sans en utilisant le vide comme cendrier. D'ailleurs, 'l est au travail, à son retour il va t'amener au commissariat d'police. Si t'as faim, je t'ai laissé le fond d'une boite d'raviolis. Si t'as soif, va au robinet d'la salle de bain. Celui de la cuisine n'est pas potable et je parle en connaissance de cause. Quoi d'autre... si tu t'ennuies, tu pourras faire la vaisselle, ça m'arangerait.
D'un faible hochement de tête, je sortis du balcon et allai dans la cuisine. Lorsque je vis ladite boite de conserve qui dégageait une odeur suspecte, ma faim prit rapidement le dessus et j'en dévorai ce qu'il restait, sans signe de dégoût, malgré ce petit-déjeuner périmé depuis deux jours. En espérant que je ne tombe pas malade.
Et le jour s'était levé.
Urg.
J'en ai déjà marre de c't'endroit.
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