Les enfants se précipitaient vers le portail vert, impatients de déjà rentrer chez eux alors que l'école venait à peine de reprendre. Alice et Elijah ne firent pas exception, tous deux excités à l'idée de pouvoir passer le reste de la journée ensemble. Durant les vacances, la mère d'Alice avait appelé les parents d'Elijah pour leur proposer d'accueillir leur fils pour la soirée. L'invitation avait été acceptée avec joie, en particulier par les enfants qui avaient trouvé la journée bien trop longue.

Voyant son père sortir de la voiture, Alice le montra à l'enseignant chargé de vérifier que les élèves étaient bien récupérés par leurs parents, et ils purent le rejoindre sans soucis. C'était la première fois qu'Elijah rencontrait Luca et il put remarquer aussitôt la ressemblance frappante entre Alice et lui. Si elle avait hérité ses cheveux roux de sa mère, ses yeux bleus et la forme de son visage venaient de son père.

— Bonjour monsieur, fit Elijah une fois à sa hauteur. Merci de m'accueillir chez vous pour ce soir.

Le même sourire que sa fille illumina son visage tandis qu'il tendit la main pour prendre les deux sacs d'Elijah.

— Ravie de te rencontrer, répondit Luca. Tu me passes tes affaires pour que je les mette dans le coffre ?

Elijah hocha la tête et les lui donna, avant de suivre Alice à l'arrière de la voiture. Pendant le trajet, Alice raconta sa journée à son père, jusqu'à ce qu'ils arrivent devant le pôle médical où se trouvait le kinésithérapeute. Prévenu qu'ils auraient trente minutes d'attente, Elijah avait pris de quoi dessiner. Luca, lui, avait pris son ordinateur portable pour travailler sur ses cours. Enseignant de physique-chimie au lycée, ses élèves de Terminale allaient bientôt passer le baccalauréat et il s'efforçait de les préparer du mieux qu'il le pouvait. La demi-heure s'écoula ainsi en silence, avec les coups de crayon gris et des touches comme bruit de fond.

Lorsqu'Alice ressortit enfin de la salle d'exercice, elle souriait. Luca le remarqua, habitué à la voir faire la grimace d'ordinaire, et fut heureux de ce changement. Chacun rangea ses affaires et ils purent reprendre la voiture pour aller jusqu'à la maison. En chemin, il leur annonça le repas du soir.

— Des pizzas pour le dîner, ça vous dit ?

Luca jeta un regard dans le rétroviseur intérieur et eut un petit rire en voyant leur enthousiasme. Alice s'était redressée sur son siège et se rapprocha du sien.

— C'est vrai papa ? Maman est d'accord ?

— C'est elle qui a proposé, avoua-t-il.

Ravie, Alice tapa alors dans ses mains et se tourna vers Elijah.

— Tu verras, ce sont les meilleures pizzas qu'on va manger !

Une fois les pizzas devant lui, Elijah comprit ce qu'Alice entendait par meilleures pizzas. Il n'avait encore jamais mangé de pizza en France et n'avait aucune comparaison potentielle, mais l'odeur qui en émanait disait déjà tout sur le goût qui l'attendait. Après lui avoir demandé s'il y avait quelque chose sur la carte qui lui faisait envie, les parents d'Alice avaient commandé deux margheritas, une reine et une quatre fromage.

Désormais installés devant la télévision où tournait un film d'animation avec un robot, le quatuor mangeait tranquillement. Des verres de soda venaient accompagner le tout, pour le plus grand plaisir d'Alice et Elijah qui avaient ainsi la sensation que les vacances étaient prolongées. Les pizzas avaient été coupées en huit chacune, de quoi laisser chacun alterner entre les différents goûts. Assis sur le canapé avec un coussin dans son dos, Elijah était heureux.

Une fois le repas terminé, il fut déjà vingt-et-une heures, horaire où ils devaient aller se coucher. Comme c'était la première fois qu'il était chez Alice, elle lui montra sa routine du soir. D'abord, elle défaisait ses couettes et se brossait les dents ainsi que les cheveux. Elle se mettait ensuite en pyjama et se glissait sous la couette, avant que sa mère ne lui raconte l'histoire du soir. Elijah l'imita, surpris de voir que le lit d'Alice était un lit double et qu'ils dormiraient ensemble. Voyant son trouble, son amie se redressa.

— Tu veux qu'on t'installe un autre matelas ?

Il secoua la tête et la rejoignit en souriant.

— No, no, j'ai juste été surpris. Mais ça va !

Elle acquiesça et lui sourit à son tour. Avec sa longue chemise de nuit rose claire avec des froufrous, elle ressemblait à une princesse sortie d'un dessin-animé et cela l'amusa. Suzanne arriva alors, plusieurs livres en main pour leur laisser le choix de la lecture du soir. Alors qu'il regardait les couvertures, Alice ne leur accorda aucun intérêt.

— Maman, on peut prendre une photo ?

Lorsqu'ils étaient rentrés du kinésithérapeute et avant de se mettre à leurs devoirs, Alice avait tenu à lui montrer l'appareil photo qu'elle avait reçu de ses grands-parents. Il comprenait mieux pourquoi elle avait été aussi excitée lorsqu'elle le lui avait montré et un sentiment de chaleur le traversa, qu'il associa à de la joie. Bien sûr, il avait eu des amis avant Alice, mais même s'il ne la connaissait que depuis moins d'un mois, il avait l'impression qu'elle avait débarqué comme une vague dans son quotidien. En jetant un regard à son amie et à l'énergie qui animait son corps alors qu'elle allait chercher l'appareil, il songea qu'elle ressemblait plus à une tornade qu'à une vague.

Le lendemain, alors que l'une mettait une photo dans un cadre sur son bureau, l'autre dessina une tornade et l'afficha sur son mur.