La cave
Elle en était sûre et certaine : il préparait quelque chose. Ça faisait un moment que Shôko l'observait, lui et son comportement étrange, depuis qu'elle l'avait vu noter quelque chose sur une feuille. Alors elle avait entreprit de le suivre pour savoir ce qu'il manigançait. En plus, il était vraiment suspect avec ses longues oreilles en pointes et son déguisement de lutin. Franchement, il fallait avoir un grain pour se déguiser à longueur de temps. Peut-être que c'était un ami de la petite servante.
Elle sursauta. Il y avait quelqu'un près d'elle et elle ne l'avait pas senti venir. Une ombre. Ah non, c'était une fille, à peu près de son âge. En même temps, vu l'allure... elle était plutôt sinistre.
- Je t'ai fait peur, lui dit-elle d'une voix à peine audible.
- Non ! se défendit bien vite Shôko. Non, c'est juste que... tu m'as surprise. Je ne m'y attendais pas.
Elle espérait être crédible. Elle avait totalement manqué de vigilance, trop occupée qu'elle avait été par sa filature. Sa filature ! Elle regarda dans le couloir d'à côté. Zut ! Elle l'avait totalement perdu !
- Si tu suis le lutin, il va à la cave.
De nouveau, Shôko regarda cette fille à l'allure sinistre. En plus, elle ne savait même pas qui elle était.
- Je m'appelle Oka Ruto.
La Saintia la dévisagea. Elle lisait dans ses pensées ou quoi !
- Ok, Okaruto. Comment sais...
- Oka.
- Quoi ?! Oka ?
- Oka, c'est mon prénom.
- Ah. Et comment tu sais qu'il va à la cave ?
Oka l'avait déjà vu faire, tout simplement. Et non, elle ne savait pas ce qu'il faisait en bas. Ils n'avaient pas pris le même chemin.
- Et tu fais quoi, dans la cave ?
Question stupide à laquelle Shôko n'avait pas vraiment envie de connaître la réponse. Cette fille devait certainement faire des trucs chelous et peut-être même avec cette autre fille aux yeux rouge, celle qui avait agressé Luciano. Bon, elle n'avait pas d'affection particulière pour lui mais pas au point de vouloir sa mort. Mais au final, elle fut contente que la brune ne réponde pas à sa question. Contente ? Vraiment ? Si elle ne répondait pas, c'était certainement parce qu'elle faisait quelque chose de particulièrement malsain, dans cette cave. Que devait-elle faire ? Laisser cette fille faire ses trucs maléfiques ou la garder près d'elle pour l'en empêcher. Mais si elles restaient ensemble, c'était sur elle qu'elle allait faire ses trucs bizarres.
- Bon... euh... commença Shôko en reportant son attention sur Oka. Hein ?! Mais elle est où ?
Zut ! Shôko avait été trop absorbée par ses réflexions et elle ne l'avait pas vue partir. Un peu prise de panique, elle chercha partout autour d'elle pendant un instant avant de s'immobiliser en croisant ses bras sur sa poitrine. Pourquoi s'agitait-elle comme ça ? Ce n'était pas elle qu'elle suivait mais le gars aux oreilles pointues !
- Tu ne viens pas, finalement ?
Shôko sursauta de nouveau et son cœur dansa le mambo dans sa poitrine. Une main posée sur son cœur affolé, elle se tourna. Du couloir dépassait la tête de cette fille. Oka ne l'avait pas fait exprès mais on dirait bien qu'elle avait encore fait... sursauter cette fille. A force de vouloir être discrète, elle avait fini par être silencieuse. Ajouter à cela que ses chaussures ne faisaient pas de bruit et qu'elle avait le pas léger et elle passait quasiment inaperçue. Les deux filles se détaillèrent un instant. Zut ! Shôko ne se souvenait pas de son nom. Pourtant elle la suivit quand même jusqu'à une porte fermée. En fait, la Saintia s'était un peu sentie obligée de la suivre à cause de la formulation de sa question. Maintenant, elle était partagée entre l'envie que la porte soit verrouillée et l'envie qu'elle ne le soit pas. Et elle ne l'était pas. La porte s'était ouverte sans difficulté lorsque... Ah zut ! Shôko ne se souvenait vraiment plus de son nom !
Et derrière la porte... forcément, un escalier permettait d'accéder au niveau inférieur. Un escalier en pierre cerné par des murs de béton descendait dans l'obscurité. Shôko regarda Oka lever la main vers l'emplacement supposé de l'interrupteur. Sans comprendre pourquoi, son cœur s'accéléra. Et si la lumière ne s'allumait pas ? Faudrait-il vraiment qu'elles descendent dans la cave dans l'obscurité la plus totale. Mais comment voir ce qui s'y cachait ? Elle entendit un petit clic, la brune près d'elle avait trouvé le bouton et l'avait actionné. Une seconde encore et la lumière éclaira l'escalier. Il descendait sur plusieurs mètres avant de tourner, apparemment. Oka amorça la descente, Shôko resta immobile, à regarder. Pourquoi devrait-elle descendre ? Après tout, elle suivait le lutin et rien ne garantissait qu'il soit effectivement descendu dans la cave comme le prétendait la brune. Pourquoi serait-il descendu dans la cave ? Et puis, la lumière était éteinte donc il n'était pas descendu, donc elle n'avait pas besoin de descendre elle-aussi. Pas qu'elle avait peur. Un peu quand même mais de cette fille un peu flippante. D'ailleurs Oka s'était arrêtée quelques marches plus bas pour se tourner vers la Saintia.
- Tu ne viens pas.
- La lumière était éteinte, donc oreilles pointues n'est pas descendu.
- C'est vrai, répondit Oka d'une voix toujours aussi peu audible en lui tournant le dos. En fait, tu as peur de ce qu'il pourrait y avoir plus bas.
- Comment ça ?
Sans se retourner et toujours d'une voix à peine audible, au point que Shôko avait dû se rapprocher pour l'entendre, Oka raconta ce qu'elle avait entendu. Il y aurait plus bas un enfant qui pleure. Fille ou garçon. Impossible de savoir. Personne n'était jamais parvenu à l'atteindre. Il était toujours plus bas. Et ce n'était pas tout. Il y avait aussi cette chose sans paupière qui fixait et qui se trouvait toujours là.
- Où est-ce que tu as entendu ça ? lui demanda Shôko qu'un frisson venait de secouer.
- Sur YouTube.
Shôko soupira bruyamment avant de s'exclamer : « tu ne crois tout de même pas à une telle ineptie ! ». Non, mais tout le récit des expériences avait été retranscrit dans la vidéo.
- Pourquoi ce ne serait pas vrai, conclut Oka, pas offusquée pour un sou que Shôko ne la croie pas.
- Franchement, c'est juste du texte dans une vidéo ! Comment peux-tu croire un truc pareil ?
En tout cas, la Saintia avait bien flippée. Cette fille était forte pour raconter les histoires un peu bizarres. Manquait plus que le feu de camp et la forêt autour. Forêt qui se trouvait tout près de la pension...
- Alors si mon histoire est fausse, tu ne risques rien à descendre avec moi.
Oka tourna la tête juste assez pour regarder Shôko. Celle-ci la regardait également, dépitée. Elle venait de se faire avoir. Mais alors, en beauté !
- Mais ce qui est vrai par contre, continua la brune, c'est que la lumière s'éteint au bout de quelques minutes. Il faut atteindre l'autre interrupteur qui se trouve plus bas.
Evidemment. Les deux filles entamèrent donc réellement la descente. L'une à côté de l'autre, c'était un peu juste mais ça le faisait, Shôko préférant garder un œil sur la brune. Mais seuls ses pas résonnaient sur les dalles de pierre. Oka était silencieuse. Pas un bruit. Comme si elle était un fantôme. Ajouté à ça, son style vestimentaire un peu... sinistre et le lieu, et la Saintia n'en menait pas large.
Elles s'immobilisèrent en même temps. Et si Oka gardait son regard fixé vers le bas, Shôko, elle, avait tourné la tête vers la brune. Le cœur battant fort, elle repensait à ce qu'Oka lui avait dit tout à l'heure, à propos des pleurs d'enfant. Parce que là, elle avait entendu, provenant d'en bas...
- Euh... tes histoires... commença Shôko. C'était que des histoires...
- Je croyais que tu n'y croyais pas.
Elle n'y croyait pas mais elle avait l'impression d'être manipulée. Après tout, elle ne savait rien de cette fille. C'était peut-être une psychopathe assoiffée de sang ! Une tueuse en série !
- Euh... l'interrompit Oka.
Shôko tourna la tête vers la brune avec une mine déconfite. Aurait-elle penser à voix haute ? Oka confirma d'un hochement de tête et contrairement à ce qu'elle pensait, la Saintia ne risquait rien. Après quoi, Oka continua la descente. Et puis, les gémissements s'étaient arrêtés et ce n'était peut-être que le vent.
- Le vent ? s'étonna Shôko. Dans une cave ?
- Une cave ? reprit Oka. Aussi profonde ?
Shôko regarda un instant la brune puis le bas des escaliers. Il y avait encore beaucoup de marches à descendre et il semblait y avoir un tournant donc, la descente n'était pas finie. Elle regarda le haut, elles avaient déjà descendu plusieurs marches, l'équivalent de deux étages au moins. C'était trop pour une cave classique. D'où la question : qu'est-ce que Claya pouvait bien cacher en bas ?
- Tu n'es pas obligée de venir.
- Tu plaisantes ! lança Shôko en la rejoignant. Tu m'as intriguée avec cette cave !
Les deux filles avaient enfin atteint le bas des escaliers. Il y avait effectivement eu une bifurcation à 90°. A partir de là, les murs n'étaient plus en béton mais de la pierre taillée, comme si c'était plus ancien. Elles s'étaient attendues à trouver une porte mais rien. Le couloir était plus large et il se séparait, plus loin en trois autres couloirs, un en face et un de chaque côté. Les murs étaient en pierre taillée noire et le plafond culminait à trois mètres environ.
- La pension est reliée à une grotte aménagée.
Shôko et Oka sursautèrent en même temps. En se retournant, elles découvrirent un adolescent aux cheveux blonds et aux yeux bleus, déguisé en lutin, avec des oreilles en pointes. Link. Il avait finalement rejoint les deux filles.
- Je vous ai fait peur ?
- Non, répondit Shôko alors que son cœur peinait à reprendre un rythme normal. Tu nous as juste surprises.
Oka détailla Shôko avec insistance. Si la Saintia faisait un bond à chaque fois qu'elle était « surprise », alors ça donnait quoi lorsqu'on lui faisait peur ?
- Tu es déjà venu ici ? demanda Shôko à l'adolescent plus jeune qu'elle.
Link hocha simplement la tête. C'était la deuxième fois qu'il descendait ici mais il ne s'était pas attendu à ce que ce soit aussi vaste. Il pensait que la cave ferait la surface du bâtiment et qu'il y aurait tout un tas de bazar. Mais une grotte... c'était inespéré ! Et il espérait bien qu'elle était encore plus vaste que ça !
- Pour quoi faire ? lui demanda Oka, plus intriguée par ses oreilles que par ses vêtements.
- Je viens d'Hyrule. C'est surtout célèbre dans le monde du jeu vidéo pour la saga « The Legend of Zelda ».
Puis, voyant que les filles semblaient ne pas connaître, il se lança dans quelques explications.
- Et tu as joué dans certains opus ? lui demanda Shôko.
- Dans tous en fait. Comme Zelda. Elle a des oreilles comme les miennes.
Oka et Shôko se regardèrent. Pour être honnêtes, elles avaient cru qu'il faisait du cosplay.
- Alors dès que vous voyez des vêtements différents des vôtres, c'est du cosplay.
- Ben... avoua Shôko un peu gênée.
- Alors pour moi, tu fais du cosplay.
- Très drôle.
- Tu as dit que tu étais déjà venu, coupa Oka. (Link acquiesça d'un hochement de tête). As-tu entendu les gémissements ?
Non, il n'avait rien entendu. Et oui, il en était sûr et certain, il avait une ouïe excellente ! En plus, il y avait un léger écho et de ce qu'il avait vu, cette grotte, même si elle avait une partie artificielle, était un sacré labyrinthe. Les deux filles se regardèrent. Si Link semblait plutôt à l'aise, elles, elles n'avaient pas vraiment envie de se perdre. Surtout que, comme prétexta Shôko, qu'est-ce qui leur faisait croire qu'il n'y avait pas une créature monstrueuse. Il y avait bien un minotaure dans la pension ! Même si personnellement, elle ne l'aurait pas imaginé avec une robe de vache normande ! Oka acquiesça d'un léger hochement de tête mais Link avait porté son regard ailleurs. Il laissa les filles pour se diriger un peu plus loin, vers le croisement de couloirs. Sous les regards intrigués de Shôko et d'Oka, il s'arrêta en plein milieu et resta immobile. Les deux jeunes filles se regardèrent un instant avant de le rejoindre.
- Un problème ? lui demanda Shôko.
Link la fit taire d'un geste de la main. Il y avait effectivement quelqu'un dans ce dédale. « Quelqu'un ou quelque chose » avait renchéri Oka sans pour autant parler plus fort. Elle avait peut-être raison. Link serra les dents. Elle avait raison, il ne reconnaissait pas le bruit qu'il entendait. Mais une chose était sûre : ça venait de ce couloir. Il s'apprêta à s'y engager, un air déterminé sur la face et pour plus de prudence, il se saisit de son bouclier et de son épée... Il les chercha puis, la panique le saisit. Un Like-Like lui avait prit ses armes !!!
...
Un Like-Like nommé Claya lui avait pris tout son armement. Absolument tout ! Mais quelle poisse d'être tombé sur une fan ! Maintenant, il était désarmé face à un ennemi inconnu et avec deux filles qui étaient très certainement comme lui, sans arme. Alors il fit face, courageusement à la silhouette informe qui s'approchait péniblement vers le jeune hylien (comprenez ici « habitant d'Hyrule » et pas « habitant des îles », merci). Link ne parvenait pas à bien le détailler dans la pénombre de la galerie. Une chose était sûre, l'ombre rampait et elle avait une énorme bosse sur ce qui semblait être son dos.
Les persos :
Shôko, 17 ans, Saintia Shô
Oka Ruto, 17 ans, Yandere Simulator
Link, 14 ans, The Legend of Zelda
Like-Like, monstre présent dans certains opus de The Legend of Zelda. Bon, forcément là, il n'est pas à son avantage ! Normalement, il est plus haut que Link !
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