Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

6. Juancho, que la fête commence !

[Image : street view d'une rue de Cartagena la nuit, qui peut aider à se représenter l'atmosphère... et les crédits reviennent à notre ami google maps !]


Lorsque le taxi nous dépose, Juli et moi, devant les locaux de La voz del Caribe, je suis quelque peu surprise. Non pas que j'aie déjà mis les pieds dans une station radio, mais je pense que je m'attendais à quelque chose de plus... disons, formel.

Après avoir roulé quinze minutes, nous avons rejoint un quartier périphérique. Contrairement à la ville fortifiée où je vis, ici, les rues sont plus cabossées, les maisons plus délabrées. Les seuls espaces publics aménagés sont des terrains de foot qui, eux, peuplent chaque coin de rue.

La maison devant laquelle nous nous arrêtons est prise en sandwich entre un salon de massage et une petite épicerie. Les vitres sont opaques et les murs, d'un blanc sale, auraient cruellement besoin d'un coup de neuf. Au pied des fenêtres, une végétation sauvage cherche à s'enfuir des maigres platebandes qui ne la contiennent plus depuis longtemps. Mais le clou du spectacle, c'est une pancarte qui annonce : « Défense d'uriner ici, il y a des caméras et les vidéos pourraient être publiées sur Facebook ». Heureusement qu'un écriteau surmonté d'un drapeau colombien nous informe qu'il s'agit d'un local radio, autrement, je ne crois pas que j'aurais deviné.

— Hector ! appelle Juli en frappant trois coups à la porte d'entrée.

Quand ma nouvelle alliée m'a proposé d'enregistrer l'annonce aujourd'hui, je n'ai pas hésité une seconde. Il faut dire que l'idée s'est fermement ancrée dans mon esprit depuis la dernière fois que nous en avons discuté. En restant anonyme, je n'ai pas grand-chose à perdre.

Juli, dichosos los ojos que te ven* ! Ça en fait, du temps !

Mon amie semble ravie, comme chaque fois qu'elle discute avec quelqu'un. Elle commence par me présenter à Hector, puis les deux s'échangent les dernières nouvelles, ce qui dure... un certain temps. Finalement, ma patience porte ses fruits et nous pénétrons dans les locaux, plus professionnels que l'extérieur ne le laisse croire. Nous traversons l'accueil pour atteindre une salle équipée de matériel d'enregistrement, où est diffusé le rythme d'une salsa entraînante :

« Qué me tienes temblando de noche y de día, tú me hiciste brujería... »

— Vous avez réfléchi au texte à diffuser ? s'enquit Hector en s'installant devant son ordinateur. L'annonce sera intégrée à nos flashs info quotidiens, alors elle doit être concise. Pas plus de deux ou trois phrases, autrement, les auditeurs pourraient manquer les informations clé.

Juli et moi acquiesçons. Son ami ayant déjà connaissance de la situation et de mon besoin d'anonymat, les choses se font naturellement. Au vu du peu d'informations dont nous disposons, la brièveté de l'annonce s'impose d'elle-même. Difficile de s'étendre quand les seules choses que l'on sait, c'est que ma mère s'appelle María, qu'elle m'a eue il y a vingt-quatre ans et m'a laissée à l'hôtel Color Caribe quelques mois plus tard. Après une invitation aux auditeurs à contacter la station s'ils reconnaissent quelqu'un dans cette description, l'affaire est bouclée.

Une fois Hector remercié, nous reprenons un taxi pour rentrer à l'hôtel. Nous descendons tout juste, quand la voix de Sara nous interpelle :

— Ana, Juli ! Alors, cette annonce ?

— Ça y est, elle est enregistrée, déclaré-je. Hector, l'ami de Juli, devrait la diffuser dès demain.

— Waouh, c'est excitant ! se réjouit l'afro-caribéenne. On va boire un verre pour fêter ça ?

La réponse est unanime, je suis donc Sara et Juli à travers la vieille ville. Trois croisements et deux rencontres fortuites plus tard, nous arrivons devant ce qui s'apparente à une petite épicerie.

« Y me paré en la playa, y me senté en la arena
Con los ojitos tristes y la mirada larga
Que tardes de verano tiene Cartagena...
»

Une mélodie s'échappe de la devanture, qui ne paie pas de mine avec son carrelage bancal et ses étagères croulant sous les bouteilles d'alcool et les paquets de chips. Un écriteau indique « Juancho Super-tienda » dans un splendide montage qui me rappelle avec émotion mes premiers pas sur Paint. Le titre en Comic sans MS surplombe la tête d'un vieux monsieur, elle-même collée sur un fond d'explosion atomique.

— Nous y voilà, déclare Juli.

Ma mine décontenancée fait rire mes nouvelles amies.

— Il faut que tu saches quelque chose, Ana, maintenant que tu vas vivre ici... me glisse Sara. Les bars touristiques que tu trouves dans la vieille ville ne reflètent pas l'âme de Cartagena. La plupart des habitants ne peuvent même pas se payer un verre dans ce genre d'endroits... Mais ce n'est pas grave, on n'a pas besoin de grand-chose pour passer un bon moment, et les colmados sont un très bon exemple.

— Les colmados ? répété-je, interloquée. C'est quoi, exactement ?

— Ce sont des commerces qui servent à la fois d'épicerie et de bar. Ici, tu peux t'acheter ta bière pour pas cher et la boire tranquillement devant la télé ou à une table.

Je jette un bref coup d'œil à l'intérieur du local, où quelques tables hautes sont calées entre les étals, quand je me retrouve face à l'incarnation vivante du vieux monsieur sur le montage photo. Sa peau hâlée, sa moustache blanche et son crâne dégarni ne me laissent pas l'ombre d'un doute.

Hola, mis hermosuras !

Juancho ! Nous ne sommes pas tes beautés, mais bonjour à toi aussi, lui retourne Juli.

— Ah, ma Juli, toujours aussi têtue...

— Je ne suis pas « têtue », Juancho, je prône juste un monde égalitaire. En nous appelant tes beautés, tu entretiens l'idée que le principal but de la gent féminine est d'être agréables à regarder. Ce qui n'est pas le cas des hommes.

— Dire que c'était un compliment ! De mon temps, parler aux femmes n'était pas si compliqué...

Mon amie lève les yeux au ciel avant de commander trois bières. Le gérant file alors derrière le comptoir pour les sortir du frigidaire.

— Comme tu peux le constater, Juancho et moi avons quelques... différends, me glisse-t-elle. Mais, dans le fond, on s'entend bien. Si je devais détester toutes les personnes machistes de la ville, je n'aurais pas beaucoup d'amis.

J'acquiesce d'un air compatissant. Cette semaine passée m'a déjà permis de constater que les stéréotypes de genre sont bien plus présents ici qu'en France. J'imagine qu'avoir l'âme d'une militante à Cartagena ne doit pas être évident au quotidien.

Nous prenons place à l'une des tables en plastique disposées sur le trottoir, où la playlist de vieux morceaux de Juancho s'entend tout aussi bien qu'à l'intérieur.

— Et voilà, trois bières pour mis princesas ! chantonne Juancho.

Juli le regarde poser les bouteilles sur la table d'un air consterné. Je me doute bien que le « princesa » ne l'enchante pas davantage, d'autant moins venant d'un homme qui pourrait presque être son grand-père.

— Tu ferais mieux de garder tes belles paroles pour tes conquêtes, Juancho, rétorque-t-elle.

— Mes conquêtes ? Ah, si seulement... Yo no levanto ni el polvo* ! soupire-t-il d'un air dépité.

Juli regarde le vieil homme s'éloigner, avant de hausser les épaules en décapsulant sa bière avec une pièce de monnaie.

— Il faut vraiment qu'on lui trouve quelqu'un, déclare Sara.

— Tu es sûre que tu veux te lancer là-dedans ? l'interroge Juli en arquant un sourcil.

— Il me fait de la peine...

— Si je t'écoutais, on serait déjà mortes épuisées à essayer de sauver le monde entier, Sara.

L'afro-caribéenne hausse les épaules, admettant probablement la véracité de ces propos.

— En tout cas, s'il y en a une que je suis décidée à aider, c'est toi, Ana, déclare-t-elle. Je propose de lever nos bières à ta quête, qui commence sur les chapeaux de roues avec cette annonce à la radio ! La Voz del Caribe, ce n'est pas rien !

Touchée par ses paroles, je lui souris et lève ma bouteille, suivie par Juli. Après deux premières gorgées, je déclare :

— D'ailleurs, il faut que je vous partage quelque chose.

Ay ve ! Est-ce que ça concerne un certain accordéoniste ? souffle Sara d'un air innocent.

Je laisse échapper un sourire.

— Comment ça ? s'exclame Juli en braquant de gros yeux sur moi.

— Sara fait allusion au soir de ta serenata. J'ai échangé avec l'accordéoniste du groupe... Et il m'a proposé de se retrouver le lundi suivant pour une promenade nocturne.

Ira* ! Ta vie est un film, ce n'est pas possible !

— Dit celle qui chasse à coups de seaux d'eau les prétendants venus chanter à sa fenêtre ...

Dans sa grande diplomatie, Juli me tire la langue.

— Bon, et comment s'est passé ce premier rencard ? renchérit-elle.

— Alors là, je vous arrête tout de suite, ce n'était pas un rencard, rétorqué-je. Je suis venue ici pour retrouver ma mère biologique, pas pour chercher l'homme de ma vie !

— Bon, comment s'est passé cette... rencontre, alors ? me demande Sara.

— Je ne sais pas... C'était marrant d'apprendre à le connaître. Et en même temps, il est resté très mystérieux. Je ne sais même pas comment il s'appelle, et je n'ai pas ses coordonnées. Mais le plus bizarre c'est qu'à la fin, j'ai cru comprendre qu'il connaissait Carlos... J'ai voulu l'interroger à ce sujet, mais il a décidé de rentrer chez lui pile à ce moment-là.

— Vraiment ? s'étonne l'afro-caribéenne. C'est bizarre, non ?

— Mais non, Sara, justement : c'est là que notre trio de détectives entre en jeu ! s'exclame Juli.

Je me tourne vers mon amie, qui arbore un air triomphant.

— Moi aussi je trouve ça louche, appuie-t-elle. Je vais essayer de t'aider... Ce gars a l'air d'être un ami de Rola, je devrais pouvoir user de mes charmes pour le sonder discrètement. On va débusquer son identité en moins de deux, j'en fais le pari !

— Tu es sûre que c'est une bonne idée ? l'interrogé-je en posant ma bouteille vide sur la table. Je préfère qu'on se concentre sur ma mère biologique, c'est pour elle que je suis venue...

— Pour l'instant, on ne sait pas où aller, donc toute piste est bonne à prendre, non ?

Ne trouvant rien pour contredire ses paroles, je cède en haussant les épaules. Juli conclut alors, les yeux brillants d'excitation :

— Mes chères consœurs, pour trinquer à nos casquettes de détectives, je propose de commander une nouvelle tournée... Juancho, trois bières bien fraîches, s'il te plaît !

Le gérant, alpagué par mon amie, passe la tête à travers l'embrasure de la porte.

— Vous avez déjà bu les premières ? Dios mío, que sont devenues les femmes d'aujourd'hui...

En guise de réponse, Juli lui adresse un sourire éclatant.

— Et au passage, tu peux nous mettre un peu de Daddy Yankee ? On se sent d'humeur à boire et perrear* toute la nuit, tu nous connais.

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro