Chapitre 2 : Espoir et lumière
La vie est-elle juste? Vous vous demanderiez peut-être.
« Non, la vie n'est qu'un fantasme auquel les élus ont droit. Et le bonheur n'est qu'un sentiment éphémère et illusoire de bien-être. Le vrai bonheur ne peut exister dans ce bas monde. La mort n'est que la libération des souffrances de l'être humain. La vraie vie est celle après la mort... »
Ces paroles qu'avait retenues Orvate dès son plus jeune âge résonnaient dans sa tête sans arrêt. Son désespoir était sourd, muet et le tuait à petit feu. C'était semblable à une gangrène qui ne faisait que le ronger de l'intérieur.
Près de onze ans après la mort de sa femme, Orvate s'en alla à Heidelberg dans le but de s'éloigner de son chagrin mais au lieu de ça, il se laissa plutôt emporter dans la dépravation et la déchéance. Ce sont ses « Onze années perdues ». Onze années de solitude, onze années d'égarement, onze années de tristesse, onze années souffrances.
Un jour, sur un coup de tête, alors que celui-ci avait essayé de se jeter du haut du pont le plus grand de la ville, il décida de rentrer sans plus tarder dans sa contrée natale, en Haute-Saxe. C'est ainsi que onze jours après avoir envoyé une lettre annonçant son retour à son frère, Eurysthe, Orvate revint dans son domaine, mélancolique. Quant à Eurysthe, ses deux enfants, avaient déjà bien grandi et celui-ci se soucia de l'influence qu'Orvate pourrait avoir sur ceux-ci.
« Pourvu que sa folie ne déteigne pas sur mes enfants ! » Se disait-il sans arrêt.
Et au retour d'Orvate, pas de grande fête ni de buffet extravagant. Juste une visite impromptue au domaine. C'était le mieux pour les deux frères. Après tout ce temps, leur relation n'avait pas grandement évoluée [...]
La vie reprends son cours...anormal
Couché sur la magnifique herbe verte du jardin de Médicis, les yeux dans le vide, il semblait presque être mort. Sur son corps tombaient quelques rayons jaunes filtrés par le feuillage touffu des arbres. À côté de lui, des magnifiques fleurs de toutes les couleurs valsaient au rythme du vent léger qui rafraîchissait l'atmosphère. Le bruit délicat de l'eau qui s'écoulait de la fontaine contrastait avec le chant des cigales, typique d'une journée d'été. Les montagnes enneigées des Préalpes s'étendaient à perte de vue et semblaient vouloir rattraper le ciel.
Orvate, couché là dans ce paysage idyllique rêvait de sa vie passée. Tous ces bons moments passés en compagnie de sa femme, tous ces rêves qu'ils avaient ensemble, leurs espoirs, leurs peines, leurs désirs, leur convictions, leur amour... Tout lui avait été arraché, dérobé. Il avait presque l'impression de voir sa femme, en face de lui avec leur enfant aux bras. Il tendit son bras dans le vide comme voulant rattraper celle-ci.
-Sévinque ! Hurla-t-il en tendant le bras en l'air.
Soudainement, se réveillant de son rêve et il n'aperçut que l'éther azuré, éblouissant, parsemé de nuages qui partaient du haut des montagnes vers le ciel intrinsèque. Toujours le bras tendu, il s'en voulait encore de penser autant à elle. Submergé par la tristesse, de fines larmes cristallines ruisselèrent de ses yeux et il se serrait fermement le poignet, affligé. Pourquoi cela lui arrivait-il ? Qu'avait-il fait pour mériter ça ? Réfléchir à cette question ne lui servirait plus à rien désormais ; il avait tout perdu.
Puis résigné, il se releva tel un mort-vivant. Son teint, devenu terne semblait décrépit. Ses yeux vert-émeraude et ses courts cheveux bruns lui donnaient une allure maladive et fébrile. Bouleversé, il regardait autour de lui, les yeux plissés par la lueur éblouissante du soleil.
Soudainement, il aperçut une silhouette en train de l'observer.
La personne en question, découverte et surprise couru aussitôt à travers les haies étroites du jardin. Orvate, intrigué se mit à courir après ce mystérieux individu. En tout cas, celui-ci était rapide et semblait bien connaître les lieux. Elle se faufilait à travers les hauts buissons taillés. Orvate, de plus en plus attiré marchait de plus en plus vite dans le but de découvrir qui pouvait bien oser s'aventurer dans son domaine.
C'était une fillette ! Orvate avait aperçu ses longs cheveux blonds bouclés et sa robe blanche de soie fine. Dans son élan effréné, elle trébucha sur un pavé jonchant le chemin de fleur et tomba. Orvate, inquiet accouru vers la fillette.
-Hé petite! Ça va ? Tu ne t'es pas fait mal j'espère ? Demanda Orvate en relevant la fillette.
Celle-ci le regardant avec crainte et peur n'osait répondre. Plutôt ne pouvait répondre. Son regard niais, traduisait sa timidité. Orvate, reconnaissant son visage se souvint de qui c'était.
-Mais tu es Eileen je présume ! Mais que fais-tu ici dis-moi ?
Eileen ne répondit pas, toujours aussi craintive. Orvate remarquant sa timidité essaya de la rassurer.
-Ne t'inquiète pas. Je ne vais point te faire de mal. Allez, on y va. On doit nettoyer ta blessure. Dit-il en prenant Eileen et en la mettant sur son dos.
Eileen, toute émue s'agrippait au dos de celui-ci. Orvate pouvait sentir ses bras tout fébriles autours de son cou. Elle ne parlait pas. Depuis sa naissance, elle n'avait prononcé mot. Mais le fait de ne pas parler lui conférait la capacité d'être plus attentive aux autres. Orvate la trouvait triste.
Tout compte fait, elle lui ressemblait assez. Les deux étaient taciturnes. Cela les permettait de prêter plus d'attention aux sentiments de l'autre. Ils se comprenaient.
Orvate l'emmena dans son ancien atelier qu'il avait abandonné mais qui restait toujours entretenu. Les toiles étaient recouvertes de draps blancs. Il déposa Eileen sur un tabouret puis s'activa à nettoyer sa plaie.
-C'est bon. Tu peux te lever. Dit-il une fois terminé.
Celle-ci se leva et se contenta de baisser la tête en signe de reconnaissance et s'en alla aussi promptement. Orvate appréciait bien cette petite. Peut-être car il se voyait en elle. Enfin ça n'en valait pas la peine car elle ne reviendrait sûrement pas. Mais Orvate espérait quand-même la revoir.
Contre toute attente, c'est ainsi que le jour d'après, Eileen revint. Mais cette fois elle ne vint pas les bras ballants. Elle arriva avec un panier à la main contenant deux baguettes de pains accompagnés d'un bocal de confiture. Toujours aussi discrètement, elle s'approcha d'Orvate, lui, toujours couché sur la fine herbe la sentit arriver. Elle lui tendit le panier en baissant la tête non seulement par timidité mais aussi par soumission. Orvate, surpris par cet acte de reconnaissance hésita un instant avant de prendre le panier.
-M...Merci. Quelle aimable attention. Répondit-il.
Le panier à la main, il sortit le bocal et l'observait.
-De la confiture aux fraises... Comment a-t-elle su que c'était ma préférée ?
Toujours avec le panier en main, il retourna s'asseoir sur l'herbe, au pied de l'arbre contemplant le vaste paysage qui s'offrait à lui. Il sorti une baguette de pain qu'il rompit en deux. Puis il les garnit chacun de confiture. Et il tendit l'un des morceaux à Eileen.
-Tiens ! C'est pour toi. Tu peux venir t'asseoir.
Elle prit le morceau de pain les deux mains tendues, grandes ouverte, puis alla s'asseoir près d'Orvate. Les deux se mirent à croquer timidement le bout de pain, lançant parfois des regards discrets à l'autre.
Orvate observait avec attention les traits caractéristiques d'Eileen. Ses longs cheveux blonds, ses petits yeux d'un vert étincelant, son nez fin et son teint clair. Elle était le symbole parfait de la candeur. Depuis ce jour, Eileen revint encore et encore, toujours avec son panier. Et s'appréhendaient chaque jour un peu plus. Chaque nouvelle découverte, chacune de leurs promenades quotidiennes, les rapprochaient toujours plus.
Ainsi, une très forte amitié naquit entre Orvate et Eileen. Elle devint pour lui, l'enfant qu'il n'avait jamais pu avoir. Désormais ils se connaissaient déjà bien et la vie d'Orvate qui les années précédentes semblait s'écrouler a finalement repris un sens. Eileen était son rayon de soleil au milieu de l'orage, un espoir sur lequel il pouvait s'accrocher, sur qui il pouvait compter.
Mais un jour Eileen ne vint pas et à la place de celle-ci vint plutôt un messager envoyé par son frère Eurysthe lui demandant de se rendre immédiatement à son domaine. Cela ne présageait rien de bon ; et Orvate en avait bien le sentiment. Aller au domaine principal sans doute ferait remonter en lui des souvenirs dont il voulait se débarrasser mais il n'avait pas d'autre choix que de partir à la rencontre de son frère. Le doute le rongeait...
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Haute-Saxe : Land de l'Allemagne de centre administratif la ville d'Hanovre
Jardin de Médicis : L'un des sept jardins du domaine des Ëlderweiz. Selon la tradition familiale, l'héritier possède cinq des sept jardins à savoir : le Jardin d'Eden, le jardin d'Auschen, le jardin de Klavar, le jardin de Micompte et d'Auxlard. Les deux autres, le jardin de Médicis et le jardin de Vixlard sont possédés par le cadet.
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