Klya se retrouva dans un lieu blanc, mais pas blanc comme à l'hôpital, blanc comme si elle était entourée de pureté. Elle regarda autour d'elle, et vit que le lieu était circulaire, avec une sorte de rond-point de fleurs blanches au milieu, et huit chemins qui partaient comme les rayons du soleil tout autour. Elle avait son corps qu'elle avait à l'âge de dix ans et comprit alors que c'était un rêve. En face de l'adolescente, le chemin était différent des autres. Tous étaient bordés d'arbres qui formaient une forêt immaculée aux feuilles de plumes blanches et aux troncs de cristal. Ce chemin, lui, n'était pas bordé d'arbres, et au bout de ce chemin se trouvait une porte, encadrée par deux anges. Le premier avait des ailes blanches brillantes et portait une robe blanche majestueuse sur un corps qui semblait féminin. Il avait les cheveux longs et blancs, mais pas blanc comme ceux d'une personne âgée. Ces cheveux étaient bien plus soyeux et brillant. Son regard était doux comme celui d'une mère et avait l'innocence d'un enfant. Puis Klya s'arracha à la contemplation de cet ange pour regarder l'autre. Il avait des ailes noires brillantes, portait une tunique rouge sang cintrée avec une ceinture noire à la boucle rouge. Il semblait être un homme musclé. En bas il portait un jean noir de jais. Ses cheveux étaient courts et rouges avec des flammes au bout. Son regard était terrifiant et effrayait les gens qui le croisait. Klya regarda la porte qu'ils gardaient, une immense porte blanche avec une poignée rouge. L'ange blanc tenait une feuille, le noir avait une montre. Quand ce dernier regardait sa montre il disait quelque chose à son coéquipier et parfois ils allaient voir quelqu'un. Tout autour d'elle, des gens erraient autour des arbres. La majorité semblait assez âgée et elle ne voyait pas d'enfants. Soudain elle entendit un bruit derrière elle et elle s'engouffra dans les arbres à la recherche du son qu'elle venait d'entendre. Au bout de quelques pas elle trouva une petite fille cachée dans un buissons. Elle ne devait pas avoir plus de sept ans et pleurait à chaudes larmes. L'adolescente se pencha vers l'enfant et lui demanda doucement :

— Comment tu t'appelles ?

— Tu vas m'emmener à la porte? Je veux pas y aller… sanglota l'intéressée

— Je ne veux pas t'y emmener, je voudrais juste savoir ou je suis, et t'aider.

— Je suis Sky et on est dans un lieu que les gens ici appellent le Purgatoire. Apparemment les gens qui passent par la porte vont soit dans un lieu génial appelé le paradis, soit dans un lieu nul appelé l'enfer… mais ils ne reviennent jamais… je veux pas y aller… 

— Ne t'inquiète pas ils n'ont pas l'air de vouloir t'emmener. Viens là…

Klya pris l'enfant dans ses bras et tenta de la rassurer le plus possible. Soudain, elle vit les anges venir et le noir dit d'une voix forte.

— Mathilde Corsangal ?

Elle grimaça, ce nom était le sien sur Terre, et elle ne l'appréciait guère. Elle acquiesça méfiante, et se leva, l'enfant dans ses bras qui refusait de la lâcher. Elle suivit les anges qui se rapprochaient de la porte en lui disant qu'elle irait au paradis parce qu'elle était morte en faisant une action noble. Quelle action au juste? Elle n'arrivait pas à se souvenir. Arrivée à la porte, on lui demanda de lâcher l'enfant. Elle essaya mais Sky ne la lâchait plus. Elle pleurait de plus en plus fort. Klya la lâcha, à contrecoeur, et elle s'approcha de la porte avec appréhension. Elle ouvrit la porte et tenta de passer. Elle entendit Sky hurler derrière elle et alors qu'elle se heurtait à une barrière invisible, l'enfant, voulant rester avec elle, courut et passa la porte sans le vouloir. Elle tomba en hurlant.

***

Klya se réveilla en sursaut. Ce rêve, ce n'était pas la première fois qu'elle le faisait et chaque fois elle en était un peu plus sûre. Cette Sky avait existé. Le Purgatoire, les Anges et la Porte aussi. Elle entendait encore le hurlement de la petite fille qui tombait et son visage, déformé par la peur… Elle frémit à cette pensée. Elle se leva et se dirigea vers le cœur de la Kalmina puis tourna vers le lac, y trouvant là quelque chose qui pourrait l'apaiser. Lorsqu'elle arriva, elle distingua une forme allongée dans le sable et reconnu l'uniforme de l'école de la Kalmina et en s'approchant elle reconnut vite son amie. Elle passa sa main au dessus de sa tête et sentit qu'elle dormait. L'adolescente fut vite rassurée que son amie ne soit pas tombée dans les pommes ou autre, et elle s'assit à côté en la regardant dormir, caressant machinalement le nœud de cravate de la jeune adulte endormie. Elle avait vite pris cette habitude depuis qu'elle lui avait appris comment on nouait une cravate, le jour de sa première rentrée officielle. Les années scolaires de la Kalmina française commençaient le 1e Février après deux mois de vacances par une petite cérémonie où tous ceux dont les pouvoirs s'étaient manifestés l'année précédente portaient pour la première fois l'uniforme. Tous les élèves étaient obligé de venir à cette cérémonie afin de recevoir leur carte d'étudiant à la Kalmina Française, sorte de carte d'identité qui définissait les aptitudes magiques dominantes de chaque personnes. Pour cela on appelait les élèves un à un selon une liste par ordre alphabétique classe  par classe. Ceux qui n'étaient plus scolarisés avaient une carte qui ne changeait plus, à moins d'en faire la demande qui donnait lieu à un test d'aptitudes qui disait si oui ou non on changeait la carte. Klya avait toujours la sienne sur elle, qui disait qu'elle maîtrisait les métamorphoses et était la première disciple de Pedro. Avec cette carte on leur donnait leur emploi du temps et une fois que ce long moment d'attente était fini les élèves étaient invités à manger et boire le reste de la soirée. Le lendemain les cours commençaient. Klya adorait cette cérémonie où chacun se retrouvait et bien souvent les nouveaux, pas si nouveaux, étaient heureux d'être officiellement un des leurs. Klya se souvenait que la première rentrée de Maëlie était spéciale. La jeune femme ne supportait plus le regard des autres depuis que Klya lui avait demandé pourquoi elle parlait plus. Lorsque Maëlie avait été appelée elle s'était levée, tremblante et avait fait trois pas vers le directeur avant de tourner les talons et de partir en courant. Klya l'avait suivie avec Mélodie et elles avaient réussi à la faire aller voir le chef pendant que les autres buvaient et mangeaient. Elle pleurait encore et les adolescentes avaient dû avoir beaucoup de patience pour la calmer suffisamment pour qu'elle reçoive sa carte et son emploi du temps. Klya repensait à tout ça, à l'arrivée de Maëlie dans leur vie, à cause de Amy qui ne pouvait pas dire qu'elle sortait avec une fille à ses parents alors que ladite fille manifestait sa magie. Ce jour là était depuis appelé le dernier jour. Le lendemain, l'accouchement de Elina, la mère biologique des jumelles, avait lieu. Pedro avait en même temps traîné sa fille dans une amnésie la plus totale. Un mois après Klya se réveillait du coma et son amie était muette, Angèle avait disparue de leur vie et plus rien ne serait jamais comme avant. Elina et Theo étaient décédé, laissant derrière eux deux jumelles. Klya repensait à tout ça toujours caressant le noeud de cravate de Maëlie qui dormait paisiblement dans le sable. Elle écoutait le bruit des vagues de l'étang qui l'apaisaient peu à peu de son cauchemar et qui calmaient ses pulsions meurtrières qu'elle peinait souvent à gérer lorsqu'elle pensait à Angélique. Elle attrape son téléphone et regarda ses notifications. Rien. Personne ne parlait, à trois heures du matin. La jeune fille s'allongea sur le côté, la main sur le noeud de son amie. Elle laissa son esprit divaguer un moment puis sentit le corps sous sa main bouger, ne provoquant aucune réaction auprès de la jeune fille déjà somnolente.