Chapitre 55
Mon Ombre,
Me croirais-tu, si je te disais que ma paix intérieure est revenue ? Après tout, il me plaît à penser qu'elle ne m'a jamais quittée. C'est simplement ce que tu as voulu me faire croire.
Oh, jamais je ne cesserais de désirer ardemment ta mort. J'ai simplement cessé de te chercher. J'attends que tu viennes à moi, à présent. Parce que tu le feras, bien sûr.
On dit que les assassins reviennent toujours sur le lieu du crime.
Je suis le lieu.
Ça n'est pas intéressant, de se laisser consumer par la haine. Tu es comme père et mère, pour moi. Savais-tu, d'ailleurs, que le temps se fait tel que j'en perds presque le souvenir des miens ? Je n'ai que mon propre visage pour me rappeler les leurs. Le nez de ma mère. Les yeux de mon père. Les cheveux de mon père. Les pommettes de ma mère. Les lèvres de mon père. Le sourire de ma mère. Les sourcils de ma mère. La mâchoire de mon père. Je me le répète en boucle, parfois, pour ne pas oublier, malgré les portraits que j'ai dessiné d'eux, maintes et maintes fois.
J'aurais presque pu t'aimer, si la condition que tu m'as infligée ne m'avait pas fait perdre mon âme. Et si l'amnésie de notre unique rencontre avait été définitive.
Tu es la muse de ces lettres. Je me plais à penser que ces papiers seront seuls dans ton cercueil. Tu es mon Ombre, après tout. Tu m'appartiens. Ta vie m'appartient, en dette de celle que tu m'as volée.
Ta mort m'appartient.
En attente de te revoir, et de te serrer dans mes bras —jusqu'à t'en briser les os.
Je suis tout à toi,
Ta créature.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro