Le procès (2)
Les morceaux à livrer étaient lourds, il y avait beaucoup de livraison à faire et pas question de lambiner.
Elle rencontrait toujours quelqu'un qui lui demandait un remède, elle avait beau refuser de soigner ceux qui avait de l'argent, sa réputation s'étendait.
Le médecin Grobois, qui avait soigné sa famille, l'avait arrêté la veille alors qu'elle faisait déjà des livraisons pour le boucher.
─ Il parait que tu soignes les gens Phil et que tu connais les herbes ?
─ Non maitre médecin, j'ai juste aidé une vieille femme qui vomissait en nettoyant sa maison.
─ Pourtant j'ai entendu des gens dire que tu soignais, répliqua le médecin sévère.
─ Les gens sont bavards, la vieille je lui ai préparé une potion avec des plantes que m'avait indiquées ma mère pour soulager son ventre et elle a guéri toute seule. Je sais faire des emplâtres pour protéger la peau et je n'ai pas le cœur a refusé de partager ma recette.
─ Je comprends tu as peut être un don, lui dit le médecin mais méfit toi... les frères dominicains n'aiment pas trop la sorcellerie de bonnes femmes.
─ Je ne fais pas de sorcellerie, se récria Phili, inquiète de la menace à peine voilée. Elle fit une révérence. Je ne peux pas trop trainer le maitre boucher m'attend pour les livraisons.
Il la salua froidement, "chacun son métier Phili ne l'oublie pas."
Phili ruminait les paroles du médecin et s'en inquiétait encore quand elle croisa la Blette, une fille antipathique. Elle vivait avec son frère un pécheur sous le gué de la seine et les mauvaises langues disaient qu'elle allait finir dans les bordels de la ville, car la seule position qu'elle aimait c'était allongée.
─ Enfin je te trouve Phili, Je suis enceinte d'un enfant du diable, il faut que tu m'aides !
─ Je suis placière ! je ne vois pas ce que je pourrais faire, excuse moi je travaille, répondit Phili horrifiée,
─ Passe me voir ce soir s'il te plait, tu feras passer l'enfant et je te donnerais des sous.
─ Tu blasphèmes ! Je ne peux pas, se défendit Phili, qui préféra s'enfuir. Elle fut ennuyée car la menace du médecin était encore fraiche dans sa tête et suffisamment inquiétante pour qu'elle n'apprécie pas que des gens viennent lui demander des remèdes défendus.
Elle poursuivit sa tournée de livraison et dans une grande maison bourgeoise, au lieu de lui prendre la viande la cuisinière lui fit signe de rentrer, "ma maitresse veut te voir."
Phili déposa la viande sur la table de la cuisine alors que la maitresse de maison arrivait et la scruta.
─ Mais comment fais-tu pour avoir une peau aussi parfaite ? demanda-t-elle.
─ J'ai une peau qui se porte bien, je ne fais rien, expliqua Phili honnêtement.
─ Sais-tu qui je suis ? Je suis maitresse Rollier et mon époux le teinturier est membre du conseil des commerçants. Pas une marque, pas un défaut, s'étonna la femme qui continuait de l'examiner, alors que moi j'ai la peau toute gâtée.
─ Cette fille connaît les herbes ! dit la cuisinière qui avait suivi sa maitresse. Elle est un peu diablesse !
─ Mais non pas du tout, se récria Phili.
─ Tout le monde le sait que tu peux soigner et la meilleure preuve, c'est cette peau parfaite.
Phili se dépêcha de partir, en refusant leur argent contre des remèdes de beauté magique.
A son retour à la boucherie, elle constata qu'il y avait un attroupement devant le magasin, elle passa par derrière et même les commis bouchers n'étaient plus à l'abattoir, ça devait être sérieux.
Qu'est ce qui se passe, demanda t'elle a Jérôme qui lui tournait le dos et regardait dans le magasin encombré
Au lieu de lui répondre, il la tira vers la boutique en disant : "La voilà !"
Phili se retrouva au milieu de la boutique avec Maitre Bonneau, maitre Van Rampen, le maitre des bans et le maire lui-même Charles Gandin accompagné des deux bourgmestres.
Que lui reprochaient-ils ? Les questions se bousculaient dans sa tête, qu'allait-il advenir de Margot et des enfants ?
Maitre Van Rampen la désignait. "Voilà ce que je vous disais maire, alors que dites-vous de cela, qu'avez-vous à répondre de cette infamie."
Phili n'avait jamais attiré les regards sur elle. Elle n'avait pas la beauté de Margot, n'était pas spéciale comme Judith qui possédait une voix puissante portant à travers tout le marché ou Sara qui avait une force herculéenne.
Elle voulut reculer mais les gens attroupés dans la boutique la repoussaient.
─ Approche petite, dit le maire en lui faisant signe de la main d'avancer.
Phili s'exécuta à contrecœur, horriblement gênée d'être au centre de l'attention générale.
─ Comment t'appelles-tu ?
─ Philiberte, monsieur le maire.
─ As-tu déjà été chez maitre Van Rampen et qu'a tu fais la bas.
─ Oui j'y ai déjà été, car je vais chez beaucoup de marchands différents, j'ai aidé à installer les tissus et à ranger, j'ai vendu mais je n'ai rien volé.
Il l'interrompit d'un geste de la main. Je peux difficilement juger de ton allure car tu es couverte de sang.
─ Oui j'ai dû découper tout à l'heure et maintenant je fais les livraisons.
─ Ce matin, le maitre des bans t'a affectée à la boucherie, comme hier, pourrais-tu me dire pourquoi ?
─ Je ne sais pas, répondit Phili. Elle ne comprenait pas à quoi rimaient les questions du maire. Ils ne semblaient pas être venu à cause du braconnage, ni même des soins. On aurait dit qu'il était la à cause de son travail cher maitre Van Rampen. Qu'avait encore manigancé Françoise.
Phili cherchait Marie des yeux et la trouva qui se tenait dans un coin de la boutique terrifiée.
─ As-tu demandé à maitre Sechot qu'il t'envoie à la boucherie ? Demanda le maire qui passa sa main sous son menton pour la regarder, c'était déroutant de le voir de si près. Il avait des yeux verts intelligents et ne semblait pas fâché mais clairvoyant. Généralement les garçons qu'elle connaissait baissaient toujours les yeux.
Elle n'avait plus ressenti ce sentiment depuis Géraud sauf qu'ils passaient leur temps à se battre. Géraud ne baissait pas les yeux mais administrait des taloches.
─ Non je n'aime pas trop, je n'aime pas le sang, répondit Phili.
─ Pourquoi es-tu à la boucherie alors ?
Le Maitre des bans ordonne tous les jours où je dois aller.
─ Maitre des bans ? Appela le maire en la lâchant enfin.
Tout le monde se recula et le maitre des bans s'approcha déconfit.
Le maire dit au bourgmestre, "avez-vous noté les déclarations de la petite. "
S'ils notaient c'est que c'était une décision de justice du tribunal de commerce, c'était grave !
─ Maitre des bans j'ai une question très simple pour toi, que fait une donzelle ici, alors que c'est la place de solide gaillard.
─ Attention, elle ne travaille pas mal, dit maitre Bonneau, c'est une bonne petite, ma femme en est contente, mais elle n'a pas de force ! Je ne comprends pas pourquoi le maitre des bans la met ici, mais bon je ne discute pas ! je prends ce qu'il m'envoie.
─ Je je...Maitre Sechot renonça à poursuivre.
Maitre Van Rampen intervient alors," je le savais! Il affecte les placiers en dépit du bon sens et depuis que je suis là il m'a toujours mal servi. J'ai toujours des filles stupides et empotées. Cette petite est miraculeuse d'intelligence et comme il a constaté que j'étais content d'elle, il me l'a retiré. Je vous préviens maire j'exige des indemnités de compensation et en plus je veux la récupérer."
Le maire leva la main. "Tout doux maitre Van Rampen nous autre essayons de comprendre."
Phili réalisa qu'on n'en avait pas après elle. Maitre Van Rampen s'était plaint de ne pas l'avoir comme placière, ce qui était gentil et très déroutant.
─ Petite, dit maitre Van Rampen va te laver vite pour paraitre propre devant nous.
Phili couru affolée chez elle chercher une tenue propre et du savon. Maitre Sechot avait l'air tellement furieux. Elle se ressaisit en arrivant à la maison.
Margot se reposait et fut surprise de voir Phili, que se passe-t-il ?
Maitre Van Rampen s'est plaint de Maitre Sechot. Phili pris de quoi se changer et se laver. Je réponds au tribunal de commerce.
A la rivière elle se lava et se changea, puis démêla ses cheveux rapidement mit un tablier, et un bonnet propre et pris un autre bonnet un châle et un tablier pour Marie.
─ A-t-on vu plus mauvaise gestion, dit Maitre Van Rampen qui s'approcha d'elle, dès qu'il la vie arriver.
Le maire se tourna alors vers maitre Sechot : "Maitre, je te donne 5 minutes pour m'expliquer cela !"
─ Je l'ai puni, elle est insolente.
─ C'était faux, songea Phili mais qui la croirait.
─ Comment quelqu'un qui ne t'a pas approché pourrait être insolent avec toi, dit le bourgmestre Gremmel qui n'avait pas encore pris la parole, j'ai assisté aux répartitions de tous ces derniers jours tu ne t'es jamais approché de cette fille et je n'ai jamais eu le moindre rapport à son sujet et pourtant tu ne manques pas de me rapporter tout ce qui se passe.
Phili n'en croyait pas ses oreilles mais c'est vrai que le bourgmestre était là, si discret avec son mouchoir sur la bouche qu'on en venait à l'oublier mais il venait surement de lui sauver la vie.
Le maitre des bans commençait à perdre pied.
─ Quelqu'un a-t-il une explication ? S'énerva le maire.
La petite Marie approcha, "il a voulu embêter Phili, car ma sœur le lui a demandé par pure méchanceté."
Phili tenta de faire taire Marie, mais c'était déjà trop tard, le maitre des bans se vengerait pour une telle injure. Il vendrait Marie ou la tuerait et Françoise ne l'en empêcherait pas.
─ Ce serait ridicule ! Maitre des bans tu n'aurais pas fait cela, demanda le maire en se tournant vers Sechot qui regardait ses chausses sans rien dire.
C'était déjà un aveu et Phili fut stupéfaite de voir cet homme mis à terre.
Le maire gronda, "je te chasse de ton poste. Tu dois 1000 écus de dédommagement à maitre Van Rampen et 1000 écus au maître boucher, 2000 écus à la guilde pour une mauvaise gestion du marché de la ville. Tu rendras ta maison des aujourd'hui à la communauté des marchands. Vous avez noté bourgmestre."
Les sommes étaient pharamineuses, personne ne pouvait avoir une telle richesse.
Le bourgmestre hocha la tête tandis que maitre Sechot protestait affolé.
Charles gandin leva la main pour le faire taire, "si tu ne t'exécute pas tu seras pendu ! "
Le maire se tourna vers Phili à nouveau. Tu dois en savoir plus que tu ne veux dire car tu es rusée je le vois il avait repris le visage de Phili entre ses mains.
Il se tourna vers le bourgmestre : pourquoi cette fille n'est pas à sa place chez les orfèvres ou les drapiers par votre négligence vous nuisez au marché ?
Le bourgmestre balbutia une pauvre excuse, il ne s'était jamais occupé de placer.
─ C'est une grande erreur qui a amené le courroux de tous les marchands.
─ Pardon seigneur ma maitresse était jalouse de la petite et j'ai cédé, larmoya maitre Sechot.
─ Disparaît de ma vue ou tu seras exécuté, le repoussa le maire, Phili je ne te veux pas à ce genre d'endroit ce n'est pas ta place, sers nous bien sur d'autres stands dès demain.
Le bourgmestre Gremmel dit d'une voie blanche, j'en prends la responsabilité et une telle erreur ne se reproduira plus.
─ Je le note bien bourgmestre à la prochaine erreur vous serrez dessaisi de toute vos fonctions, dit le maire. La menace était lourde.
─ Bourgmestres vous me répondrez de vos vies si un malheur arrive à ces jeunes filles. Puis se tournant vers les filles : Petites rentrez chez vous.
Phili et Marie ne se firent pas prier. Phili prit Marie pas la main.
─ J'ai eu si peur Phili, dit la petite Marie.
─ Moi aussi Marie, je ne comprends qu'à peine ce qui se passe et je suis terrifiée. Je ne crois pas que Françoise soit responsable de cela ?
─ Non et d'ailleurs je ne l'ai pas vu, reconnu Marie.
─ Je te donne ce tablier et ce châle ma petite, tu pourrais ne pas en parler à ta sœur ?
La petite hocha la tête gravement. Les hautes personnes sont rentrées dans la boutique et ont réclamé après toi.
Phili serra Marie dans ses bras : Ca va Marie tu n'as pas eu trop peur,
Marie secoua la tête.
─ Tu es une bonne petite va vite te reposer chez toi auprès de ta maman.
─ Que va-t-il se passer demain ?
─ Je ne sais pas. Mon Dieu Maitre Sechot a été renvoyé, dit Phili en frissonnant. Je vais rentrer chez moi je suis extenuée.
A la maison, Phili expliqua à Margot le déroulement du procès et lui parla ensuite de sa rencontre avec la Blette et la femme de maitre Rollier un des membres du conseil des commerçants.
─ Tu ne sortiras pas de la maison cette nuit Phili je ne veux pas, dit Margot.
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