Le lundi de Laurie
─ Lundi matin déjà, ai-je gémit en entendant mon alarme de téléphone sonner. J'étais courbaturée, mais je ne savais pas si c'était parce que j'avais déménagé des meubles tout le dimanche après-midi ou à cause de ma nuit au moyen âge. Je penchais plutôt pour les meubles, car j'aurais dû être bien plus fatiguée si j'avais erré dans les bois toute la nuit.
Je n'étais pas du tout désorientée, on était lundi matin au 21ème siècle et j'allais en cours dans moins d'une heure et pourtant je me rappelais aussi ma nuit dans la famille de Philiberte. J'étais de bonne humeur pour un lundi matin, j'étais heureuse d'avoir une amie et cela aidait sans doute que tous mes devoirs soient faits. Il valait mieux que je ne réfléchisse pas trop au fait que mon amie vivait à près de 600 ans de moi et probablement uniquement dans mon imagination.
Comment nier son influence, quand je constatais tous les changements en quelques jours. Le chagrin que j'avais ressenti devant l'état de Margot était bien réel et je renonçais à démêler plus avant ce qui était réel ou imaginaire.
Le jour ne filtrait qu'à peine à travers les volets, signe que le beau temps anormal de ce début de mars était terminé. Je me suis étirée en constatant que j'étais encore une fois dans un triste état. La routine était prise maintenant et j'ai lancé une machine à laver, puis filé à la douche. J'avais prévu que cela pouvait arriver et mon réveil avait sonné un quart d'heure plus tôt.
Quel soulagement, de ne pas avoir perdu Phili.
Ma mère était déjà partie, mais elle m'avait laissé un mot dans la cuisine disant de ne pas venir à l'hôpital, elle se chargerait de prévenir que je travaillerais moins comme bénévole, elle terminait son message en me souhaitait une bonne journée, un vœu pieux.
Je triturais le mot de son écriture soignée et n'en revenais pas de l'avoir convaincue si facilement. J'étais émue qu'elle est enfin pris en compte mes désirs et heureuse d'avoir du temps pour moi ce soir, en même temps c'était au détriment des enfants et ce n'était pas très cool. Avec Lucie l'autre bénévole nous formions une équipe et j'avais l'impression de la lâcher. Comme elle ne pourrait pas s'en occuper seule, j'influais aussi sur son emploi du temps. Les enfants étaient adorables mais nécessitaient beaucoup d'énergie et une grande vigilance. Par exemple Ludo, Greg, Arthur et Fernanda ne voulaient pas qu'on les touche. Fernanda et Arthur ne supportaient pas le bruit. Si un des jeunes était de mauvaise humeur il pouvait se blesser ou blesser quelqu'un.
J'ai envoyé un SMS à Lucie pour lui expliquer qu'elle me verrait moins, j'ai terminé mon message en lui disant que j'espérais qu'elle ne serait pas trop fâchée que je la lâche et mes longues discussions avec elle allait me manquer.
Elle m'a répondu aussitôt, pour me dire qu'il était temps que je profite de ma jeunesse et elle ajoutait, on discutera encore les jours ou tu seras là.
Après un copieux petit déjeuner avec des céréales aux fruits rouges et un yaourt, j'ai été récupérer mon sac déjà prêt, un peu d'organisation cela ne faisait pas de mal. J'avais aussi préparé mes habits à l'avance au cas où, un jean foncé étroit et une chemise bleu marine, ma mère venait de m'acheter l'ensemble chez Burberry et je devais reconnaître qu'elle avait du goût. En tout cas elle n'avait pas le sens des économies, mais comme elle disait toujours quand le vin est tiré il faut le boire.
J'avais préparation TPE et anglais, et l'après-midi français et italien. Je terminais tôt, ça s'était bien. Par contre ce midi, je retrouverais Sébastien et je me demandais encore comment réagir vis-à-vis de son attitude de samedi soir et je me creusais la tête à tenter de comprendre pourquoi il m'avait parlé ainsi devant ma mère. Pourtant à la piscine il avait été sympa. Si je lui faisais des reproches, je ne savais pas comment cela allait tourner et je ne me voyais pas me battre avec ce gars, une armoire à glace alors que je faisais à peine 50 kilos. Bon je ne l'avais jamais vu battre une fille, mais ce n'est pas le genre de chose qui avait l'air de le gêner.
Je m'étais disputée avec lui une fois quand Josselin lui avait jeté une énorme liasse de billets, cela remontait à quelques mois.
─ Qu'est-ce que cela veut dire, avais-je demandé, choquée par la somme d'argent.
─ Demande à ton copain, a dit Josselin, en repartant aussitôt. Joss avait été un de mes amis d'enfance et si je n'aimais pas le frimeur qu'il était devenu, il restait entre nous une ancienne solidarité. Il jouait les beaux gosses du lycée, faisait partie d'un groupe de rock, conduisait une Porsche et enchainait les conquêtes féminines. La plupart des filles du lycée le trouvait génial, moi pas.
─ Tu le dépouilles ! Je ne sais pas ce que tu trafiques mais c'est lamentable, avais-je crié à Sébastien, ne relevant même pas qu'on appelle Sébastien mon copain, car c'était du dernier ridicule.
─ Si tu ne sais pas, ne juge pas ! a dit Sébastien en empochant l'argent.
J'étais furieuse après lui et je n'avais qu'une envie lui reprendre l'argent, pour une fois c'est moi qui l'ai fusillé du regard. J'ai attendu Josselin sur le parking, ce soir-là, il n'avait plus sa Porsche mais la Clio de sa mère.
─ Joss, pourquoi tu as donné autant d'argent à ce type ?
─ Tu ne le diras pas à ma mère, Laurie, soit sympa. Il semblait secoué comme s'il avait de gros soucis. Il m'a pris le bras et je l'ai consolé machinalement.
─ Non je ne le dirais pas mais j'aimerai savoir si tu es en danger ! Cela à l'air grave. Je ne sais pas ce que tu fabriques mais je ne peux pas te laisser faire n'importe quoi.
─ Voyez-vous ça ? a dit Seb, qui se trouvait sur le parking derrière nous, mais vous êtes trop mignon tous les deux. J'ai sursauté surprise, il était arrivé près de nous sans que je m'en aperçoive et il était furieux.
─ Et oui on est ami, lui a dit Josselin, qui a posé son bras sur mes épaules, il le faisait exprès je le voyais bien. Sébastien a enfourché sa moto visiblement contrarié et une fois qu'il est parti Josselin m'a lâchée.
─ Non Laurie, c'est bon, ne t'inquiète pas et si mes parents savaient, ils seraient d'accord avec moi. S'il te plait ne leur en parle pas.
─ Bon si tu le dis, avais-je capitulé, ne voulant pas me mêler de la vie de Josselin. Je n'ai jamais su le fin mot de l'histoire, pourquoi Josselin avait donné de l'argent à Sébastien, et si j'avais été courageuse pour Joss et je n'étais pas sûre de l'être pour moi.
Je suis revenu au présent, en soupirant. J'ai regardé l'heure sur mon téléphone Il était temps que je parte pour le lycée, assez rêvé. Le temps était à nouveau maussade et la pluie allait bientôt reprendre. Au moment de faire mon chignon, j'y ai renoncé, c'était plus agréable finalement d'avoir les cheveux libres.
En Français nous avons eu une rédaction sur table. En une heure, c'était abusé mais j'ai réussi à la terminer pour une fois, car j'avais lu le cours samedi après-midi et je savais quoi dire. Il y eu un contrôle surprise en SVT, c'était décidément la nouvelle mode.
Personne ne me regardait en rigolant comme je l'avais craint, la déclaration d'amour imaginaire de Sébastien, la dernière blague du moment n'avait pas fait le tour du lycée.
Je fus sans doute aidé par l'arrivée de la fameuse nouvelle, dont tout le monde parlait.
Enfin en anglais, j'avais appris mon cours mais j'ai eu un 6 à mon contrôle surprise, alors que tout le monde tournait autour de 19. La professeur m'interrogea et constata que je savais ma leçon.
─ C'est bien Laurie mais pourquoi n'avez-vous pas répondu au contrôle alors ? me demanda Melle Guerin.
─ Je n'avais pas encore appris, ai-je réussi à marmonner gênée de l'attention qu'elle attirait sur moi.
Parmi les adultes qui avaient connu ma mère, j'affrontais deux groupes très différents, ceux qui avaient détesté ma mère et de l'autre côté, ceux qui l'adoraient.
Le groupe des admirateurs de ma mère la mettait sur un piédestal et attendait donc de moi que je suive ses traces. Melle Guérin faisait partie des fans inconditionnels et en gardait le souvenir de l'élève la plus merveilleuse qu'elle ait jamais eu. Cette femme guettait désespérément en moi l'étincelle de talent.
Cela amusait mes camarades qui ne perdaient pas une occasion de se moquer de moi, à la sortie des cours, imitant la prof quand elle parlait de ma mère. Curieusement aujourd'hui la prof n'insista pas et se contenta de dire " Je vous mets en retenu demain soir et vous referez un contrôle. Quel gâchis ! une telle intelligence et ne pas travailler."
─ Bon reprenez vos livres chapitre 9, poursuivit elle.
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