Le lundi de Laurie (3)
Il y avait un attroupement à la table des populaires sur ma gauche et j'ai tourné la tête en même temps que lui et nous avons pu admirer la nouvelle qui s'installait. Elle était effectivement très belle et ressemblait au double féminin de Sébastien, blouson de cuir noir et tee-shirt noir, à croire qu'ils s'étaient concertés ce matin avant de venir. Lui les cheveux bruns, elle blonde.
Comme tout le monde sûrement, j'ai pensé qu'ils allaient finir ensemble et cela m'a rappelé ce que me racontait ma mère sur son histoire avec mon père. A la fac, tout le monde avait décrété qu'ils étaient faits l'un pour l'autre et c'était un des regrets de ma mère, d'ailleurs, d'avoir écouté les autres.
Seb a fait une légère moue et il ne semblait pas admiratif, ai-je pu constater et pas prêt à céder à la pression populaire. Il retourna à son hamburger et sirota son coca en regardant ailleurs.
Je ressentais un peu de jalousie pour cette fille qui s'était fait des amies en moins d'une matinée. Je n'étais même pas sûre de réussir à me faire admettre au club de botanique, si le club existait encore. Pour ce que j'en savais, il pouvait très bien avoir fermé faute de participant, ou quand c'était trop la honte d'en faire partie.
Il ne faisait pas partie des clubs cool, comme le club de théâtre ou de journaliste. Il ne devrait normalement pas y avoir mes ennemis dedans, encore que quelqu'un comme Stanislas serait bien fichu d'en faire parti.
Ma mère avait été chef du club de théâtre et de math, ainsi que des majorettes. Un jour ou nous nous étions disputées, toujours sur les thèmes habituels, ma vie nulle et son adolescence géniale, alors que j'étais particulièrement énervée par un prof injuste, j'avais jeté sa canne de majorette dans la rivière. Je pense qu'elle a ressenti ma détresse contre son glorieux passé. C'était très méchant de ma part, car elle y tenait et j'ai dû lui faire peur aussi en lui rappelant mon père.
Des cris provenaient d'un chahut un peu plus loin m'ont tiré de mes pensées. Deux garçons se bagarraient, je reconnaissais l'un des combattants il rackettait les autres garçons et son adversaire faisait partie du groupe de rock, de la violence gratuite. Sébastien n'étais pas le dernier à se battre et je détestais quand il faisait cela. J'étais désolée de voir un spectacle aussi affligeant et en détournant mon regard j'ai croisé machinalement les yeux de Seb qui me fixait toujours.
C'était très perturbant, comme si il voulait m'obliger à sortir de mes gonds ou me parler.
Je mangeais difficilement mes légumes, me reprochant en boucle ma lâcheté quand j'ai entendu du mouvement derrière moi.
C'était la nouvelle, qui venait directement saluer Sébastien.
─ Salut je m'appelle Lola dit-elle il parait que tu te débrouilles en voiture.
Ça ne me surprenait pas tant que cela qu'il se débrouille avec les voitures. Mais qu'avait-elle voulu dire au juste, qu'il savait réparer les voitures ou qu'il conduisait bien ? Sans doute les deux.
Il ne répondit pas, son regard se durcit et j'admirais le courage de cette fille de poursuivre.
─ Tu pourrais me donner des cours de conduite, demanda-t-elle.
J'avais ma réponse à ma question, il conduisait bien.
─ Laisse ton numéro chez Tardy, il va organiser des cessions.
─ Je te passe mon numéro de téléphone et je viendrais te voir samedi soir, répondit Lola en lui tendant un papier qu'il ne prit pas.
Je me demandais ce qui se passait samedi soir, mais j'aurai l'air ridicule à poser la question. Cette fille venait d'arriver et elle en savait déjà plus que moi. Elle s'est assise à notre table et j'ai fait le vœu de ne prendre qu'un dixième de son courage.
─ C'est vrai que ton père était un coureur automobile.
─ Oui, répondit Sébastien laconique.
─ Mes parents viennent de déménager en ville, expliqua Lola, mon père est médecin et ma mère est infirmière. Nous habitions à Rennes avant.
Aïe des collègues de ma mère, la barbe.
Les autres filles étaient reparties à part Kelly, qui était restée debout derrière Lola et ne s'était quand même pas assise avec nous.
Lola commençait à perdre contenance devant le mutisme de Sébastien et Kelly est venu à son secours selon la bonne vieille méthode de la diversion et la victime c'était moi.
─ Celle-là c'est Miss bourge en personne, phobie et parano à l'horizon, elle s'appelle Laurie Boudin dit Kelly pour combler le silence que Sébastien ne souhaitait visiblement pas remplir. De l'autre côté tu as Maya la gothique, ça va les sorciers t'ont parlé cette nuit. Ajouta Kelly en désignant Maya.
Maya lui fit un doigt d'honneur alors que moi j'avais baissé les yeux gênée.
─ Salut, moi c'est Lola.
─ Salut ai-je marmonné bêtement. La présentation n'était pas flatteuse cependant.
─ Je vais rester un peu, merci Kelly.
Kelly congédiée retourna à sa place vexée. Lola ne regardait que Sébastien et elle se moquait complètement de faire de la peine à sa nouvelle amie et je me suis sentie bêtement désolée pour Kelly.
Lola se lança dans une question dangereuse : Tu as des frères ou des sœurs ?
Sébastien ne répondit pas. Je savais qu'il n'avait que Greg et n'avait visiblement pas du tout envie d'en parler.
─ Tu n'es pas bavard ?
─ J'aime manger tranquille et j'aimerai que tu dégages, répondit ce mufle.
Il m'incluait dans le silence, c'est vrai qu'avec moi il n'était pas dérangé nous n'avions pas échangé un mot pendant une année.
Lola perdit contenance et se tourna vers moi.
─ Tu n'as pas pris le cheeseburger, me demanda t'elle.
─ Je ne mange pas de sandwich.
─ Elle est pas là ta mère, répondit Lola moqueuse.
─ Je n'aime pas les sandwichs, ai-je précisé, gênée, car Sébastien ne perdait pas une miette de notre discussion.
─ Il est sympa ton imper, c'est ta mère qui t'habille en vert, a continué Lola.
─ J'ai terminé de manger j'y vais, ai-je dit agacée. Qu'elle se débrouille avec Sébastien moi j'avais mes propres problèmes, je me passerais de manger mais pas question de leur tenir la chandelle. J'avais supporté l'an dernier, de voir Diana avec Seb mais pas question de subir encore cela.
Sébastien a fait un geste et j'ai vu qu'il était furieux. Je ne vois pas de quoi, je n'avais rien dit et je m'en allais.
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