36 - La mort et le brasier
Équinoxe s'arrête juste au bord du précipice, c'est trop accidenté pour oser un saut.
- Isil ? Lance Aragorn surprit.
- C'est une très longue histoire, répondis je avec un geste de la main. Je me ferais un plaisir de vous la raconter à un autre moment, pour l'heure on l'a un peu distancé mais il faut continuer !
Soudain des flèches ricochent de part et d'autre d'Équinoxe qui reste immobile. Aussitôt Legolas réplique et plusieurs Gobelins tombent des ombres.
- Isil, partez par là, me cri Gandalf en m'indiquant ma droite. Longez ce précipice, il y a un autre pont qui rejoint notre chemin, hâtez vous !
J'acquiesce en hochant la tête et Équinoxe s'élance à nouveau. On devance aisément la Communauté qui ne tarde pas à disparaître dans un tunnel. J'espère les retrouver rapidement, je n'ai aucune envie de me perdre dans ces mines.
On arrive assez vite en vue d'un pont étroit mais toujours en place.
- Calcules bien ton coup, lancé je penché en avant. Ça serait bête de tomber maintenant...
Équinoxe est concentré malgré les flèches qui ricochent tout autour de nous. Le feu sur moi est encore vif mais je ne m'y intéresse pas, chaque chose en son temps.
Mon cheval décrit une courbe pour se placer face au pont mais soudain le sol se met à trembler. Je regarde en arrière et je vois que le Balrog me poursuit toujours. Soit il ne sait pas où est partit le reste de la Communauté, soit il a vraiment une dent contre moi... ou bien les deux...
Heureusement, sa corpulence joue en ma faveur, il est gêné par les arches et les colonnes et doit se frayer un chemin. Il frappe tout autour de lui ce qui ébranle la structure même de la salle. S'il continue, ça pourrait bien s'effondrer sur nous.
Soudain, il frappe le sol du plat de sa lame. Je ne comprends que lorsque le pont émet un craquement inquiétant.
- Il veut le faire s'écrouler, m'alarmé je.
C'est alors que la Communauté jaillit d'une saillie de l'autre coté du pont.
- Hâtez vous ! Me hurle Gandalf.
Équinoxe n'attend pas un signe de ma part et accélère brusquement. Je me plaque sur son encolure mais trop tard, le pont se craquelle et un long morceau tombe déjà dans le vide.
On est coincé !
Soudain le feu s'éteint sur moi. La peur l'a fait disparaître.
Équinoxe se stoppe, haletant, puis il recule pas à pas.
Le son de ses sabots qui claquent sur la pierre ressemble étrangement à celui des tambours qui vibrent toujours dans l'air.
La concentration de mon cheval est impressionnante. Il calme sa respiration, clarifie ses pensées, prépare son corps. Je frémis quand je comprends ce qu'il veut faire.
- On n'y arrivera pas, couiné je la gorge nouée.
Pour toute réponse, Équinoxe s'élance. Le vent me fouette le visage et le son de sa course est assourdissant.
Je suis paniquée par cette folie et époustouflée par tant de puissance.
De l'autre coté je vois Boromir faire reculer les Hobbits dont les visages sont empreint de terreur. Ils ont tous peur, peur pour moi, peur pour la folle action que l'on tente.
En moins de temps qu'il n'en faut pour que je m'en rende vraiment compte, on est déjà au bord. Équinoxe se ramasse sur lui même avant d'impulser sur ses postérieurs, nous propulsant dans les airs.
J'ai l'impression de voler. Non, je vole vraiment. Pas de pesanteur, pas de sol, juste le vide.
Si la panique ne m'intimait pas de me taire, je crierais sûrement, de peur mais aussi d'exaltation.
On atterrit sans encombre et le son des sabots sur la pierre me paraît à nouveau assourdissant.
- Tout droit, s'écrit Gandalf alors que l'on passe devant lui.
Je me mets de nouveau à rire, jusqu'à ce que je vois le plafond soudain très bas.
- Attention, crié je.
Mais trop tard, je dois sauter pour éviter de me fracasser le crâne sur la pierre. La chute est brutale et je roule sur plusieurs mètres avant de m'arrêter.
Sonnée, j'entends Équinoxe revenir. Il s'excuse, piteux. Il était grisé par cette course folle. Je le rassure, j'ai l'air d'être en un seul morceau bien que je sois toute engourdie.
- Isil ? S'écrit une voix.
Je crois que c'est celle de Legolas. Désireuse de sauver les apparences, je me redresse d'un bond.
- Ça va, j'ai rien !
La Communauté s'arrête à mon niveau. Je me tâte, cherchant une douleur particulière mais ça va, j'ai rien de cassé.
- Que s'est t'il passé ? Me demande Gandalf alors qu'on reprend notre course.
- J'ai tentée de discuter avec le Balrog pour vous donner le temps de fuir, expliqué je surexcitée. Mais ça ne c'est pas bien passé... Il a tenté de forcer mon esprit pour savoir pourquoi nous sommes ici.
Le magicien pâlit et je m'empresse de le rassurer.
- Je n'ai rien dit, plutôt mourir, lancé je sans ralentir ma course. Du coup, il m'a lancé ses flammes mais elles ne m'ont rien fait, je suis apparemment immunisée du feu... A moins que ça soit dut à la pierre d'élément ?
- C'est une hypothèse plausible, admet Gandalf. Sortons d'abord de ces mines, après nous pourrons nous interroger sur ce phénomène.
-Peut être que ce monstre ne pourra pas franchir le précipice ? espère Merry.
Soudain il y a une explosion suivit d'un fort tremblement.
- Si Équinoxe a put sauter, il peut en faire autant, répond Aragorn la voix tendue.
On court comme des lapins qui tentent de fuir leur terrier. Les tambours continuent de résonner mais leur son s'atténue au fur et à mesure que l'on monte. Gandalf nous presse mais je commence à être fatiguée.
Je ne sais toujours pas ce qui s'est passé mais ma lutte mentale m'a vidée...
Je suis avant dernière, juste devant Aragorn qui m'encourage à continuer. On arrive dans une large cavité ouverte où trône un immense pont qui enjambe le plus grand précipice qu'on ait vu ici.
- C'est le pont de Khazad-dûm, s'écrie Gandalf. Il nous faut le traverser, la sortie est de l'autre coté.
Je m'inquiète que le Balrog puisse aussi le traverser et sortir des mines, quand soudain la pierre explose derrière nous.
Je me retourne, la créature ne veut vraiment pas nous laisser partir.
- Traversez le pont ! Hurle Gandalf.
Mentalement, j'envoie Équinoxe en éclaireur. Il traverse le pont au grand galop puis m'informe que la voie est libre.
- C'est bon, lancé je.
Aussitôt la Communauté s'élance encouragé par Gandalf qui attend pour passer en dernier.
Aragorn et moi clôturons la marche. Alors que j'arrive de l'autre coté, je m'arrête et je regarde en arrière. Je frissonne en voyant le Balrog déployer ses ailes et s'avancer, doucement, menaçant.
Gandalf s'est arrêté au milieu de pont, appuyé sur son bâton.
- Qu'est ce qu'il fait ? M'enquis je.
- Je pense qu'il va faire tomber le pont, répond Aragorn à coté de moi. Reculons.
Il me fait signe de le suivre mais je ne bouge pas. Je suis hypnotisée par l'aura du magicien. En apparence on dirait un simple vieillard mais il cache une force phénoménale.
Un peu comme moi, je suis une gamine qui cache un brasier en moi... mais Gandalf est bien plus puissant.
Le Balrog gronde en avançant puis il se redresse, dévoilant toute son ampleur et tirant son épée. Il est prêt au combat.
Gandalf se prépare aussi, il assure ses appuis, tend son bâton qui luit et son aura semble se propager dans l'air.
Je suis ébahie par tant de force, il me semble imbattable. Il va faire qu'une bouchée de ce pont et de ce Balrog.
- Je suis un serviteur du feu secret, détenteur de la flamme d'Anor, s'écrit le magicien. Le feu sombre ne vous servira à rien, flamme d'Udûn. Repartez dans l'ombre !
Je frissonne alors que le Balrog semble hésiter. Il souffle puis grogne avant de s'avancer brusquement.
Gandalf lève son bâton puis l'abat sur le pont qui se fissure aussitôt.
- VOUS NE PASSEREZ PAS !
La voix du magicien est assourdissante, elle claque comme le tonnerre. Je recule de quelques pas alors que le pont s'effrite. De gros morceaux s'en détachent puis le pont tombe, entraînant le Balrog avec lui.
Je suis sidérée. Ébahie par tant de puissance, je rêverai d'avoir autant de force et de contrôle que Gandalf le Gris. Un large sourire étire mes lèvres et je retiens de peu un cri de joie. Gandalf a vaincu le Balrog. Nous avons vaincus le Balrog.
Je vais pour me retourner afin de partager ma joie avec les autres quand soudain je vois un filament enflammé sortir du gouffre. Je mets un temps à le reconnaître : le fouet du Balrog.
Avant que j'ai le temps de faire quoique ce soit, le filament s'enroule autour des jambes de Gandalf puis l'entraîne dans le vide. Le magicien parvient à s'accrocher au bord déchiqueté du pont, ses yeux braqués sur nous.
- Fuyez, pauvre fou !
Le magicien lâche prise et tombe dans le précipice.
Le silence semble retomber brusquement, à moins que ça ne soit un état de choc de ma part. Je suis sonnée, je n'arrive pas à comprendre, je ne veux pas comprendre...
Gandalf...
Est il... ?
- Frodon ! Hurle la voix d'Aragorn, me sortant de ma torpeur.
Je me retourne et je vois le Hobbit courir vers moi alors que des flèches se remettent à pleuvoir. Sans savoir comment, mon corps s'enflamme et je me dresse, embrasée, devant Frodon qui se fige.
- Partez, soufflé je.
- Gandalf... murmure le Hobbit tandis que des larmes coulent sur ses joues.
- Partez, repris je un peu plus fort alors qu'une douleur me transperce le cœur.
- Il nous faut continuer, clame Boromir. Sinon... cela aura été vain.
Soudain je sens le feu s'agiter et gronder en moi.
- PARTEZ !! hurlé je alors que le brasier sur moi s'intensifie.
Je vois Aragorn attraper Frodon puis le tirer en avant. Je me force à contenir mon feu, juste un petit peu plus longtemps, il faut qu'ils soient loin, très loin de moi...
Mon aura de feu est si intense que j'entends les flèches se consumer avant même de m'atteindre. Je vois alors qu'Équinoxe est toujours là, il m'attend au bord du précipice. Je lui intime de partir, horrifiée à l'idée qu'une flèche puisse le blesser. Il refuse puis se tourne dans la direction qu'a prit la Communauté. Il hume puis m'informe qu'il sent de l'air frais, les autres ont réussit à sortir.
Je relâche ma concentration et je hurle ma douleur, mon chagrin et ma colère. Le feu explose dans l'air, je sens les pierres vibrer sous la chaleur.
Jamais je n'ai fait de brasier aussi étendu et puissant. Jamais je n'avais ressentir autant de peine... Gandalf est mort, et je n'ai rien put faire.
Je ne sais combien de temps j'irradie la salle mais quand je reviens à moi, je suis à genoux au sol. L'ombre qui règne à présent me paraît dense, comme si j'avais perdue la vue.
Équinoxe est à coté de moi. Je portes mes mains à mon visage et je me mets à pleurer, je ne peux rien faire d'autre. Mes sanglots me secouent si forts qu'on dirait que je convulse.
Équinoxe passe sa lourde tête sous mon bras et m'incite à me lever. Je ne peux pas...
Il me dit alors que les autres doivent m'attendre, ils doivent être inquiets.
Non, je pense qu'ils sont partis.
Équinoxe s'offusque, ils ne seraient pas partis sans moi et je les mets en danger en les faisant attendre à découvert.
Je suis certaine qu'ils sont partis sans moi, pourquoi seraient ils restés ?
Équinoxe me rétorque qu'on a qu'un moyen de le savoir puis il m'incite à nouveau à me relever. Je m'accroche à son encolure et il m'aide à me hisser sur mes pieds.
Je titube alors que mes yeux s'habituent à nouveau à l'obscurité et que l'odeur de brûlé m'agresse le nez.
Le chemin jusqu'à la sortie me paraît très long, j'ai l'impression que je me traîne depuis des heures quand j'aperçois enfin la lumière. Équinoxe m'encourage à accélérer le pas mais je n'y arrive pas.
On sort des mines à la vitesse d'un escargot. Je suis éblouie par la simple lumière d'un fin de jour. Dommage, j'aurai aimé voir le soleil.
- Isil, vous allez bien ? S'enquit la voix d'Aragorn.
Surprise, j'entrouvre un œil alors qu'il s'approche de moi.
- Vous m'avez attendu, soufflé je.
Je ressens la fierté d'Équinoxe, il avait raison. Ils m'ont attendus.
Je regarde mes compagnons, ils sont aussi atterrés que moi. Les Hobbits sont à terre, ils pleurent à chaude larmes. Boromir est aussi assit au sol ainsi que Gimli. Legolas se tient la tête, l'air décontenancé et Aragorn est des plus soucieux.
- Vous allez bien ? Me répète t'il.
Je vais lui répondre quand soudain mon estomac s'agite et un goût de bile m'envahit la bouche. Je me retourne juste à temps pour vomir.
Je frissonne, je suis couverte de sueur mais j'ai froid. Mon estomac vidé, je me redresse. Aragorn me tend une gourde.
- Il nous faut nous hâter, fait il.
- Ne pouvons nous pas nous reposer un peu ? Demande Boromir. Laissons au moins le temps aux Hobbits de se remettre.
- Nous n'avons pas ce temps, répond Aragorn las. La nuit ne va pas tarder et ces collines vont grouiller d'Orques. Il nous faut partir.
Je vais acquiescer mais mon estomac recommence à se tordre. Je vomis à nouveau, recrachant le peu d'eau que j'ai put boire. Des points envahissent ma vision et je redoute de m'évanouir. Je suis allée bien trop loin mais je dois continuer, je dois lutter, je ne peux devenir un nouveau poids pour eux.
- Que faisons nous ? Demande Legolas soucieux.
- Il nous faut trouver un abri pour la nuit, répond Aragorn. Je sais que c'est beaucoup vous demander, nous sommes tous éreintés mais il faut avancer. Nous ne pouvons rester ici à attendre un destin funeste...
Personne n'esquisse un mouvement, seul Boromir se relève.
- Isil ? Lance alors Frodon.
Lentement, en inspirant profondément, je tourne la tête vers lui.
- Que... Que pensez vous que nous devrions faire ?
Pourquoi il me demande ça à Moi ? J'ai l'air de savoir quoi faire ? Je suis dans le même état, sinon pire, qu'eux.
Pourquoi a t'il besoin de mon avis ? Pour se rassurer ?
Possible...
Je prends le temps de la réflexion bien que je sais que c'est inutile. Je lève les yeux vers Aragorn qui attend, impassible.
- Je... je crois qu'Aragorn a raison, répondis je. Il serait bête de se faire tuer par des Orques maintenant alors que...
Tous le monde comprend, ce qui me soulage, je n'ai pas envie de formuler cette pensée...
Je tente de les encourager en me hissant sur mes jambes. Je suis affaiblis et nauséeuse mais je tiens debout.
Les Hobbits se lèvent à leur tour, imité par Gimli.
- Vous arriverez à marcher ? Me souffle Aragorn alors que je me rince à nouveau la bouche.
Je crache l'eau avant de lui répondre.
- Ça devrait aller. Le problème va se poser si je perds connaissance...
- Il n'y aura pas de problème, Elrohir vous a porté sans encombre du gué jusqu'à Imladris.
- Ha bon ? M'enquis je surprise.
- Vous ignoriez que votre feu ne brûle plus quand vous êtes inconsciente ?
- Complètement, et j'ignorai aussi qu'Elrohir m'avait porté sur plusieurs kilomètres...
Aragorn m'adresse un pâle sourire alors que je fulmine contre ce cachottier d'Elrohir. Soudain je me rappel son bracelet, je crains qu'il n'ait pas supporté le feu. Je remonte ma manche et je suis soulagée de le voir brillant comme au premier jour. Visiblement, comme pour mes vêtements, le feu épargne mes bijoux, c'est bon à savoir.
Par contre je ne comprends pas : la première fois c'est le Balrog qui m'a enflammé et le feu est resté sur moi, mais la seconde fois, je l'ai fait apparaître toute seule. Comment ?
Je suis trop fatiguée pour tenter d'y réfléchir et je vois que les autres commencent déjà à s'éloigner. Je titube à leur suite, Équinoxe m'aidant du mieux qu'il peut.
On marche pendant ce qui me semble être une éternité. Ma vision s'assombrit par moment et je dois vraiment lutter pour rester consciente. J'ai à peine conscience de l'environnement autour de moi.
- Ces arbres sont immenses, souffle Boromir intimidé.
Je suis si fatiguée que je n'arrive pas à m'émerveiller sur la forêt qu'on vient d'atteindre.
- Nous sommes à la frontière de la Lothlorien, renseigne Legolas.
- On dit qu'une sorcière vit ici, répond Gimli agité. Elle ensorcelle les voyageurs pour qu'ils entrent dans les bois où elle les fait se perdre...
On dirait presque qu'il parle de moi.
- Alors gardez l'œil ouvert, mes amis, continue le Nain à voix basse. J'ai un œil de Lynx, je ne me ferai pas prendre...
Soudain il y a du mouvement autour de nous.
- Le Nain respire si fort que je pourrais le tuer dans le noir le plus complet, fait alors une voix.
Tout à coup mon monde s'assombrit encore, la tête me tourne et je me sens tomber sans ressentir ma chute.
Ma dernière vision est Aragorn, l'air inquiet et un Elfe, l'air embêté, penchés sur moi.
Fin du chapitre
La fuite a été éprouvante pour toute la Communauté et ce n'est qu'un début... ^_^
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