6.Heather
« Elle ne s'appellerait pas Heather Johnson si elle abandonnait à la moindre parole.»
Je réglais machinalement mon objectif et fermer un oeil pour observer davantage l'image qui se former dans mon Polaroïd. J'appuyais alors sur l'appareil et souriais en regardant la photo.
Ce n'était pas grand chose. L'arbre n'avait même pas encore retrouver ces feuilles, et la neige couvrait toujours la majorité de ces branches. Il semblait mort, complètement perdu dans ce froid glaçant.
Et pourtant le printemps prochain, il redeviendrait verdoyant et puissant comme un chêne. Je saisis alors un feutre noir et écrivit derrière: « A toutes ces choses qu'on croie perdu et qui finisse par renaître. » Puis, sur une pulsion, je marchais jusqu'à la maison de Cal et glissai la photo dans la boite aux lettres.
—Heather? C'est toi, ma grande? demanda alors une voix derrière moi, et je me retournais pour tomber sur Madame Dewel.
Je sursautais légèrement d'avoir été pris en flagrant délit et Garance rigola en me rattrapant par le bras.
—Je ne pensais pas assez téméraire pour sortir par un temps aussi mauvais. Surtout quand on connait ta maladresse, se moqua-t-elle doucement.
—Excusez-moi, Garance, j'étais juste venue glisser quelque chose dans votre boite aux lettres.
—Maintenant que tu es là, rentre boire un chocolat chaud! Je suis sure que Caleb sera heureux de te voir, il s'est terré dans sa chambre depuis le début du week-end et n'est sorti que pour manger!
J'observais alors cette femme qui avait été presque une deuxième maman. Nous avions passé tellement d'après-midi chez l'un et chez l'autre que nos mères étaient devenues d'excellentes amies. Et nous connaissions les parents de l'autres comme si c'était les notre.
Aussi pus-je voir le petite sourire à peine forcé qu'elle m'adressait.
—Je pense qu'on sait toutes les deux que je ne fais plus vraiment partie des personnes préférées de Cal, en ce moment, avouai-je d'un ton un peu amer.
—Heather... Tu sais bien que tu seras toujours la bienvenue chez nous.
—Je ferais mieux de m'en aller. Mais merci, Madame Dewel.
—Garance, me reprit-elle pour la énième fois depuis que j'avais fait sa connaissance.
Je lui lançais un petit sourire désolé et m'apprêtai à faire demi-tour lorsqu'elle me rattrapa.
—Je sais que ce n'est pas facile, et je sais que mon fils est exécrable en ce moment... Mais merci, d'être là. Je ne sais qu'il ne le voit pas encore, mais il a vraiment besoin de toi, confia-t-elle alors à voix basse, comme si elle craignait qu'il allait l'entendre.
Je me contentais de lui adresser un clin d'oeil avant de rentrer chez moi. Sur le chemin, je tentais désespérément de trouver une explication à ce qui se passait.
Au début, j'avais cru que Caleb s'occuperait de son problème, et m'en parlerait lorsqu'il serait prêt. Mais Cal ne semblait pas déterminé à en parler, ou à tourner la page. Il restait bloqué avec son problème, et il tentait de repousser quiconque qui lui offrait de l'aide.
Peut-être que c'était ça, mon problème. Peut-être que je posais trop de questions. Peut-être que je l'étouffais à vouloir connaitre ce qui l'avait changé si brutalement trois mois plus tôt.
Peut-être avait-il peur que je change, moi aussi.
Aussi le lendemain, lorsque je me retrouvais en cours d'anglais, je glissais un crayon de son côté du banc.
—J'ai pas besoin que tu me prêtes un crayon pour me forcer à te parler ensuite, grommela-t-il sans même me regarder.
—Il est gratuit, soufflai-je en retour avant de poser ma tête dans ma main et de me tourner totalement de l'autre côté.
Et j'avais le coeur gros de le laisser me filer entre les doigts, de ne pas saisir l'occasion de lui parler davantage. Mais je savais aussi qu'il lui fallait une preuve que je ne tenterais pas d'être envahissante ou pressante.
—Merci, finit-il par marmonner.
Et ce n'était pas grand-chose, mais c'était déjà plus que ce que j'avais obtenu les trois mois précédents.
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