Emmène-moi avec toi
- Je te sortirai d'ici Junmyeon, tu verras, et sans être gladiateur. On aura une vie honnête.
- Tu es cruel de me donner de l'espoir.
- Je m'assure simplement que tu resteras en vie pendant que je ne serai plus là.
Un an que Sehun est parti après avoir dit ces mots. Junmyeon n'a pas changé, il s'entraîne, combat, s'ennuie souvent car Vilnius ne réserve sa poule aux œufs d'or que pour les occasions les plus lucratives. En attendant, Junmyeon voit passer hommes libres et esclaves, il refuse de s'attacher à nouveau, s'il est destiné à rester ici, il ne veut pas revivre une expérience comme celle de Sehun. Même s'il doute de pouvoir s'attacher à qui que ce soit comme il l'a fait avec Sehun. Peu importe, la vie est plus supportable en étant las que triste, il ne fera pas l'erreur de l'oublier une fois de plus. Malgré tout, et surtout malgré lui, il continue à espérer, que Sehun viendra, et qu'il le tirera d'ici. Mais il garde ça pour lui, pour les heures sombres de la nuit où il est plus simple en fermant les yeux d'imaginer sa présence endormie à côté de lui comme il l'a fait à de trop rares occasions.
- Je te sortirai d'ici Junmyeon, tu verras, et sans être gladiateur. On aura une vie honnête.
- Tu es cruel de me donner de l'espoir.
- Je m'assure simplement que tu resteras en vie pendant que je ne serai plus là.
Ces mots tournent toujours dans sa tête trois ans après les avoir entendus, sont-ils toujours ceux qu'il a entendu ? Il se les ait répétés si souvent qu'il a l'impression qu'il s'agit d'un mantra qu'on lui a appris, non pas d'une discussion dont il a refusé le futur potentiel qu'il lui offrirait. Il aurait dû demander à Sehun s'il le pensait, si cela valait vraiment la peine de l'attendre, comment il comptait faire. Finalement, tout ce qui lui reste sont trois phrases qui perdent peu à peu l'inflexion de la voix de Sehun, devenant la sienne. Junmyeon sent qu'il fatigue, il n'a plus l'énergie qu'il avait encore il y a un an, quand il croyait qu'à force de combattre, il s'en sortirait. Treize ans qu'il est l'esclave de Vilnius, un peu moins qu'il a compris que le vieil homme ne le laisserait pas partir si c'est Junmyeon qui le demande. Il ne reste plus que Sehun, sa seule chance, il est trop vieux maintenant pour que quelqu'un d'autre vienne le racheter à un prix mirobolant, et pour quoi faire ? Qu'il combatte plus longtemps ? Ce n'est pas ça qui va améliorer sa condition. En plus, Junmyeon le sent, bientôt il commencera à perdre, de nouveaux champions arrivent en ce moment, qui ont la rage qu'il avait quand il a commencé. Son expérience et sa technique ne feront le poids qu'une ou deux années de plus, ensuite, il va devoir faire de son mieux pour perdre avec panache et sans mourir.
- Je sortirai d'ici sans être gladiateur, tu verras Junmyeon. J'aurai une vie honnête.
- Tu es cruel de me donner de l'espoir.
- Je m'assure simplement que tu survivras quand je serai parti.
Il semble à Junmyeon que ces phrases ont été modifiées dans son esprit, six ans après qu'il les ait entendues. Est-ce que Sehun n'a toujours vraiment parlé que de lui ? Ou y avait-il aussi Junmyeon dans son avenir ? Il ne se souvient plus, de toute façon, ça n'aura plus vraiment d'importance bientôt. Junmyeon a commencé à perdre, oh, il pourra survivre encore deux ou trois ans dans le Colisée, il n'en a que trente-quatre, les plus vieux y ont atteint les quarante ans, c'est ce que lui répète en boucle Vilnius quand il le fait fouetter pour valoir un peu moins à chaque nouvelle défaite. C'est assez ironique, parce que le temps que les coups guérissent, il ne peut pas combattre ni s'entraîner, et maintenant, quand il foule nouveau le sable, tout le monde peut voir les marques de ses récents mauvais traitements, ce qui fait un peu plus baisser sa côte. Le vieux patricien commence à vieillir, il n'a plus la tête sur les épaules.
Heureusement, Junmyeon n'a encore perdu que trois fois. La dernière date d'il y a un mois, il peut se remettre à l'entraînement depuis une semaine, s'il huile bien les croutes pour les assouplir, elles ne se rouvrent pas malgré les mouvements. Ça ne les empêche pas d'être douloureuses, mais il a fait pire, alors il oublie le reste en répétant sa routine d'échauffement ce matin, des grands jeux doivent bientôt être organisés, il imagine que le vieil homme l'y enverra, autant être le plus en forme possible. Pourtant, quand le laniste vient le chercher dans la cour, ce qu'il entend n'est vraiment pas ce à quoi il s'attendait.
- Junmyeon, j'ai à te parler, de la part de Vilnius., S'annonce le laniste en l'interrompant.
- C'est pour les prochains jeux ?, Il demande en baissant ses armes de bois.
- A vrai dire, non, Le laniste secoue la tête, Il souhaite que tu ailles à sa maison cette après-midi car il va te vendre à un homme prêt à y mettre le prix fort. Ce sont les termes que le messager tient de Vilnius même.
- Il t'a donné le nom de cette personne ?
Junmyeon ne peut s'empêcher d'espérer, Sehun ? Il avait dit qu'il reviendrait, si ce n'est pas lui, devrait-il tout de même accepter, peut-être que celui-ci l'affranchira au bout d'un moment. Enfin, s'il est prêt à l'acheter, ce n'est sûrement pas pour se débarrasser de lui la seconde qui suit, c'est sûrement un patricien qui ne suit pas assez bien les jeux pour savoir qui acheter, et qui n'a pas appris que Junmyeon n'était plus le numéro un. Pour ne pas savoir où placer son argent, ce serait plutôt un homme riche venant des campagnes cherchant à s'intégrer dans la bourgeoisie romaine plutôt.
- Je n'ai aucun nom, je sais juste que c'est un propriétaire vignoble. Le vin de qualité se vend de plus en plus cher ces derniers temps, si le sien n'est pas trop mauvais, j'imagine qu'il y a de quoi se faire de belles pièces.
- Tu n'as pas réussi à en acheter hier ?
- Pas assez pour le banquet que j'aurais voulu organiser., Il secoue la tête énervé, Je ferais en plus petit comité. Mieux vaut qu'ils pensent qu'ils sont privilégiés plutôt que je ne les insulte en servant de la boisson de mauvaise qualité. Enfin, je n'aurais pas dû te parler de ça, tu sais déjà trop de mes ambitions politiques. En même temps, je ne suis pas sûr que qui que ce soit ne soit ici depuis aussi longtemps que toi.
- Et pourtant tu ne veux toujours pas me donner ton nom.
- Le laniste me va tant que je suis ici, ce n'est pas un nom que je veux que n'importe qui répète. Enfin, je t'ai fait passer le message, n'oublie pas de préciser à Vilnius que je prends ses intérêts à cœur et que je l'ai fait moi-même. Si je pouvais profiter ne serait-ce qu'un peu de son influence...
Il grommelle en partant. Il n'y a aucune chance que ce soit Sehun, il ne peut pas devenir propriétaire terrien en si peu de temps. En plus, il n'en sait sûrement rien, ce garçon faisait bien trop dissipé pour avoir été assidu à quoique ce soit avant d'être esclave. Enfin, cette attitude pourrait cacher une naissance dans une famille aisée, ce qui ne l'obligeait pas à travailler, une famille de propriétaire... Junmyeon secoue la tête en chassant ces pensées, il ne doit plus penser à lui aussi simplement, Sehun est parti, il doit le retenir. Il range ses armes d'entraînement, il ne va pas risquer que les plaies de son dos se rouvrent et qu'il saigne en croisant son nouveau maître cette après-midi. Faisons bonne impression au moins. Le reste de la matinée passe assez lentement, Junmyeon n'annonce rien à personne par rapport à son changement de maître, il n'a vraiment personne à qui le dire et de toute façon, il ne s'imagine pas que ça changera quoique ce soit à sa présence ici. Avant le repas de midi, il se rend chez Vilnius, marcher jusque chez le patricien prendra une bonne heure, autant ne pas être en retard et risquer le fouet si son achat n'est finalement pas conclu. Peut-être que changer de mains lui sera profitable finalement, la nouveauté des coups de fouet rend les choses moins supportables qu'elles ne l'étaient avant. Il marche sous le soleil mais c'est à peine s'il ressent l'effort, il a déjà combattu dans des heures pareilles, avec un simple pagne d'esclave et son exercice physique habituel, il a finalement plus belle allure que les citoyens qui passent dans la rue eux aussi, rouges et transpirants à grosses gouttes. Maigre consolation mais une tout de même. Une fois chez Vilnius, on le force à prendre un bain et on lui coupe les cheveux. Selon les esclaves, Vilnius a demandé une somme astronomique que son acheteur a tout de suite accepté. Le vieil homme jubile et veut qu'aucun des aspects de Junmyeon ne rebutent l'homme. Il se laisse faire sans un mot, ce n'est pas souvent qu'il peut bénéficier de ce genre de luxe. Une fois prêt, il est amené à la porte du bureau du maître de maison et on lui dit d'attendre que celui-ci l'appelle pour rentrer. Junmyeon reste debout à côté de la porte, restant bien droit. La porte du bureau est trop épaisse pour qu'il n'entende quoique ce soit, il essaie malgré tout de surprendre des voix avant d'abandonner, il devra prendre son mal en patience. Moins de cinq minutes plus tard, la porte s'ouvre et on appelle son nom pour qu'il rentre.
- Comme je vous l'ai annoncé, il est en parfaite santé encore, ses combats ne lui ont laissé quasiment aucune trace et il a de l'énergie à revendre pour ses trente-quatre ans à peine. Je dois avouer que j'ai un peu de mal à m'en séparer, il pourrait rapporter tellement encore. Mais vous avez l'air de tenir à lui encore plus que moi, et puis, je suis toujours à la recherche de nouveau talents, ça ne m'étonnerait pas si vous l'achetiez qu'il ait bientôt à combattre contre un de mes autres gladiateurs.
Junmyeon garde la tête basse, ne voulant pas que ses expressions viennent trahir sa colère ou son dégoût face aux mots sordides de Vilnius. Si cela avait pu changer quelque chose à sa condition, il aurait sûrement tué son maître depuis longtemps, ce n'est pas le genre de meurtre qu'il aurait répugné à exécuter. Cependant, il meurt d'envie de voir la tête de l'acheteur, il n'a pas interrompu Vilnius, n'a pas lâché un rire de politesse face à son discours. Ce n'est vraiment pas quelqu'un de la ville, ils sont reconnaissables entre mille, tout en manières et lourds parfums entêtants. Seul celui de Vilnius vient déranger l'odorat de Junmyeon.
- Je veux juger de sa santé moi-même, de ce que je peux en dire actuellement, il peut tenir sur ses pieds et marcher, je m'attends à voir plus tout de même.
Tout le corps de Junmyeon se raidit en entendant cette voix qu'il pourrait reconnaitre dans n'importe quelle situation. Tout un torrent d'émotions se déverse en lui, lui donnant presque l'impression de perdre l'équilibre alors que six ans de sentiments pour beaucoup contradictoires lui remontent à la gorge.
- Bien sûr, Junmyeon nous fera une représentation de ses talents si c'est ce que vous demandez, n'est-ce pas ?
- Bien sûr maître.
Sa voix sonne rauque alors qu'il essaie au mieux de retenir les larmes qui lui montent aux yeux. Il doit se contrôler, ne rien laisser passer, agir en parfait esclave, et ensuite il pourra crier sur cet imbécile pour l'avoir fait attendre si longtemps.
- Pas besoin, je peux en juger moi-même.
Des bruits de pas se font entendre alors que deux mains viennent saisir son visage pour le remonter avec tendresse. Junmyeon résiste à la tentation de fermer les yeux, pour être sûr de ne pas être déçu par ce qu'il verra et se retrouve la seconde d'après à plonger son regard dans celui de Sehun. Leurs adieux se sont faits sur un échange sans mots, leur rencontre suit le même chemin. Les yeux de Sehun sont tellement expressifs alors qu'il le regarde, soulagement, tendresse, joie et tristesse, Junmyeon ne pense pas être le seul à revivre les six ans qui ont mené jusqu'à cette journée. Cependant, il ne peut pas maintenir le contact plus longtemps et commence à regarder Junmyeon comme s'il estimait sa force et son endurance à la taille de ses muscles, sa santé en cherchant la moindre marque d'un mal.
- Retourne-toi.
Il demande trop doucement pour que ce soit un ordre mais Junmyeon le fait sans hésiter, peu importe ce qu'il y trouvera, ce ne sera bientôt plus qu'un souvenir. Junmyeon sent la colère de Sehun avant que celui-ci ne s'exprime à nouveau. Ses mains viennent se poser sur les cicatrices des marques de fouet, n'osant pas toucher les plus récentes.
- Vous ne m'aviez pas parlé de ça., Il dit la voix tranchante, Est-ce que vous cherchez à me rouler ? J'ignore la loi pour payer quatre fois le prix maximum qu'un gladiateur devrait coûter et vous me cachez quelque chose d'aussi important ? Devrais-je revoir les termes de notre accord ? Après tout, quels défauts pourriez-vous encore me cacher ?
- Allons, il ne s'agit pas d'un défaut. Ce sont simplement des blessures dues aux combats dans l'arène, tous les gladiateurs en ont. Ce n'est là que la preuve de son expérience et de sa résistance.
Vilnius sourit, agitant sûrement les mains dans tous les sens comme il le fait toujours quand il veut convaincre quelqu'un de ses propos. Junmyeon frissonne quand Sehun remonte ses mains vers les plaies plus fraiches avant de les retirer.
- Vous me rassurez, ces plaies ressemblent bien plus à celles de mauvais traitements..., Il fait une pause alors que Vilnius lâche un rire étranglé.
- Il me semble quand-même en santé pour le reste, mon offre tient toujours, passons à l'achat que je puisse partir. J'imagine que vous avez dû avoir un accident, l'odeur de ce bureau est vraiment désagréable.
- Ah effectivement, je vous remercie pour votre compréhension de l'avoir supportée jusqu'à maintenant.
Ses mots sonnent faux, en même temps, comment pourraient-ils ne pas l'être quand la seule chose que sent ce bureau c'est l'odeur de son parfum ? On me renvoit à l'extérieur du bureau le temps que le contrat soit signé et l'argent échangé avant que les deux sortent du bureau. Vilnius insiste pour accompagner Sehun jusqu'à la porte et Junmyeon se contente de les suivre en silence. Une fois arrivés dans la rue, il salue finalement Sehun enfin et les laisse seuls. Sehun passe discrètement un bout de papier à Junmyeon avant de commencer à parler.
- Nous allons chercher tes affaires au plus vite, tu ne resteras pas au ludus. J'ai d'autres tâches pour t'occuper que celles de gladiateur.
- Bien maître.
Junmyeon acquiesce un peu perdu avant de se mettre à avancer, guidant Sehun jusqu'au ludus. Il en profite pour lire le petit morceau de papier que lui a donné Sehun.
« Attendons d'être dans ma propriété, je ne fais pas confiance aux gens ici »
Junmyeon déchire rapidement le bout de papier avant de le jeter sur la route. Les morceaux seront rapidement détruits par le passage incessant des chars et des passants. Leur marche jusqu'au ludus est rapide. Sehun n'y rentre pas, ne voulant pas être reconnu et devoir parler avec le laniste ou d'autres gladiateurs de sa connaissance. Cependant, il demande à Junmyeon d'acheter une rudis au laniste, contre une bourse bien plus grosse que ce qu'elle ne devrait contenir. Il imagine qu'il s'agit d'une forme de remerciement, après tout, ce n'est pas le laniste qui a fait de Sehun un esclave, mais c'est lui qui lui a rendu sa liberté. Junmyeon met à peine quinze minutes à prendre ses affaires, n'oubliant pas ses gains durement gagnés et à peine entamés sur ces dernières années. Une fois sorti, ils marchent tous les deux en silence jusqu'aux portes de la ville, Sehun a laissé un char là-bas avec un conducteur. Il n'a pas dit s'il s'agit d'un esclave ou pas, Junmyeon espère que non, il ne veut pas penser que Sehun ait pu devenir un de ces maîtres après avoir été esclave et avoir connu le calvaire de Junmyeon. La marche est rapide, il vaut mieux ne pas être bloqué pour la soirée dans Rome quand les portes fermeront pour la nuit. Sehun s'approche d'un char tiré par deux chevaux. L'avant est un simple banc en bois qui doit pouvoir contenir deux à trois personne et la partie arrière est recouverte d'une toile montant assez haut pour que Sehun puisse se tenir debout à l'intérieur.
- Salone, sort d'ici. On va partir, j'ai besoin que tu prennes les rênes.
- Bien sûr, je commençais à penser que quelque chose n'allait pas.
Un homme apparait de derrière les toiles et saute à terre. Il me voit seulement une fois redressé sur ses pieds.
- J'imagine que tout s'est bien passé pour vous ?
- Effectivement, merci Salone, fais-nous sortir rapidement s'il-te-plait, je ne veux pas passer la nuit ici.
- C'est comme si c'était fait. Ravi de vous rencontrer Junmyeon.
Il part ensuite monter à l'avant de la charrette, après avoir vérifié l'harnachement des chevaux. Pendant ce temps, Sehun monte et enjoint Junmyeon à faire de même après avoir pris ses affaires. Junmyeon le suit sans un mot, ne comprenant pas trop ce qu'il se passe. Cette personne est évidemment aux ordres de Sehun mais il lui a parlé plus poliment qu'à un esclave, qu'à Junmyeon même depuis que celui-ci est son esclave. Donc il ne le serait pas ? Il finit par monter à l'intérieur qui est tapissé de coussins et de couvertures avec un simple coffre. Il n'est pas difficile de voir que cet endroit est fait pour y voyager et non pas y transporter de la marchandise. Sehun dépose les affaires de Junmyeon à côté du coffre et alors qu'il allait se mettre à parler, la voix de Salone retentit pour dire qu'il met en route la charrette. Sehun fait signe de s'assoir avant que les chevaux ne se mettent en branle. Junmyeon le fait sans réfléchir et il se retrouve assis à côté de Sehun.
- J'imagine que tu as pas mal de questions..., Grimace Sehun.
- J'avais l'intention de commencer par te frapper pour m'avoir fait attendre honnêtement.
- J'ai fait de mon mieux ! Ce n'est pas donné à tout le monde de devenir riche en six ans alors moins ? Impossible, tu en demandes beaucoup à quelqu'un qui ne peut rien faire mieux que toi.
- Je ne pense pas que j'aurais réussi à ta place., Junmyeon murmure, la voix plus grave sous l'émotion
- Comment ça ?
- Je n'imagine même pas comment tu as pu devenir propriétaire terrien en six ans et fructifier suffisamment pour payer Vilnius sans te ruiner totalement. Tu n'es pas de ce monde, ou alors c'est une vaste farce, je ne sais pas.
- Peut-être que je vaux plus que tu ne le pensais., Sehun essaie de plaisanter.
- J'ai toujours su que tu étais inestimable.
Junmyeon tourne la tête vers lui, les yeux embués de larmes qui ne couleront pas, plus maintenant, son calvaire est fini. Sehun lui sourit avant de le prendre dans ses bras, posant la tête de Junmyeon dans son cou alors que sa main vient se passer dans les cheveux drus de son ami.
- Je te préfère avec les mèches plus longues, c'est désagréable de passer la main dans tes cheveux comme ça.
- Est-ce qu'il s'agit d'un ordre de mon maître ?
- Non, juste d'un caprice personnel. Il n'y aura bientôt plus de maître qui soit.
- Dans ce cas, je ne suis pas contre le fait de les laisser repousser.
Junmyeon sent Sehun sourire alors qu'il passe une dernière fois sa main sur ses cheveux. Ils restent quelques secondes dans le silence qui s'allongent bientôt en minutes, bercées uniquement par les cahots de la charrette. Ils entendent tous les deux la voix de Salone parler aux gardes alors qu'ils sortent et ils sont bientôt sur les routes, hors de Rome. La seule pensée de Junmyeon à ce moment, c'est qu'il ne veut plus jamais avoir à retourner dans cette ville de malheur. S'il doit passer sa vie quelque part, il refuse que ce soit Rome.
- Ce n'est pas un esclave, Salone je veux dire,bje l'engage contre un salaire. Je ne veux pas d'esclave, c'est pour ça que je ne le traite pas non plus comme tel. A vrai dire, je pense que c'est une des personnes dont je suis le plus proche. Il sait que tu ne resteras pas esclave longtemps. Dès qu'on arrivera chez moi... chez nous si tu le veux, je t'affranchirai.
- Où habites-tu ?, Demande Junmyeon d'une petit voix
- En Sicile, c'est là où je suis né, loin de Rome.
- Tu viens de Sicile ? Comment t'es-tu retrouvé à Rome en tant que gladiateur ?
- Il y a peu de choix de villes pour ceux qui sont destinés à être gladiateurs. Ce n'est pas le laniste qui m'a directement acheté mais quelqu'un qui repère pour les acheteurs de Rome et vend aux intéressés.
- Tu as fait du chemin.
- Indubitablement.
- On va en faire aussi.
- On n'a pas vraiment le choix.
- On va être loin de Rome.
- Tu ne le veux pas ?
- Je ne souhaite que ça.
- Parfait.
Sehun sourit et encore une fois, un long silence s'ensuit alors que Salone les dirige sans faute vers leur destination.
- Je trouve ça bien, que tu n'aies pas acheté d'esclaves., Finit par dire Junmyeon.
- Je ne peux pas supporter l'esclavage en l'ayant vécu. Tu es le premier que j'achète, et tu ne le resteras pas longtemps. D'ailleurs, pas officiellement encore, mais sache que je ne te considère déjà plus comme mien. Tu es libre Junmyeon, un homme, plus un objet.
- Ça fait longtemps qu'on ne m'a pas dit ça.
- On n'aurait jamais dû arrêter de te le dire.
Sehun dit fermement, faisant sourire Junmyeon. Il pose sa tête contre le corps du plus jeune et ferme les yeux, souriant doucement. Qu'importe qu'ils leur restent suffisamment de jours de voyage pour qu'il se comptent en semaines. Il a retrouvé les deux choses qui lui manquaient le plus, il n'a plus rien à demander, juste à laisser le temps passer et à profiter de sa nouvelle vie.
- Je te remercie des services que tu m'as rendu Junmyeon, et en tant que maitre, je te remets cette rudis, symbole de la liberté des esclaves gladiateurs, pour qu'à partir d'aujourd'hui tu sois à nouveau considéré par tous comme ce que tu as toujours été, un homme libre.
- Merci.
Junmyeon dit simplement mais avec émotion après avoir pris la rudis des mains de Sehun. Enfin, officiellement et pour aussi longtemps qu'il sera capable de se défendre, Junmyeon est à nouveau un homme libre. Les employés de Sehun applaudissent poliment à part Salone qui lui le fait avec cœur. Junmyeon n'est dans le domaine de Sehun que depuis hier dans la matinée. Ils ont passé la journée à dormir l'un dans les bras de l'autre dans la chambre de Sehun, un peu à parler, parce qu'il y a tant de choses à dire sur six ans de vie que trois semaines, presque quatre n'ont pas pu combler pendant le trajet. Sehun a aussi fait attention à chaque étape dans une ville ou un village à bien faire vérifier par un médecin que les coups de fouet sur son dos guériront bien, même quand les plus frais ont presque disparu pour se mêler avec les cicatrices déjà présentes. Junmyeon s'est un peu plaint d'être surprotégé, mais il préfère ça comme ça. Il avait peur que son cadet se soit trouvé quelqu'un d'autre à protéger comme ça, quelqu'un à aimer. Mais quand il voit la façon dont Sehun le regarde, il sait que rien n'a changé. Ils n'en ont pas encore parlé pour le moment, mais Junmyeon n'est pas pressé, il sait que ça viendra rapidement, lui attend juste d'être officiellement libre pour tout avouer enfin à Sehun. C'est chose faite, et quand Sehun tend sa main à Junmyeon pour qu'ils aillent marcher à deux sur le domaine autour de la maison, il sait qu'il n'attendra pas une seconde occasion pour lui avouer.
- J'ai du mal à croire qu'on habite proche de la mer maintenant, c'est incroyable. Je n'avais jamais vraiment pu l'observer comme ça.
Junmyeon s'exclame alors qu'ils s'arrêtent sur les côtes les plus proches de la villa.
- J'étais sûr que tu apprécierais la vue. Je la trouve vraiment reposante, et il n'y a rien de mieux qu'écouter le bruit des vagues pour se détendre. J'y suis souvent allé le soir, quand je pensais à toi.
- Tu le faisais si souvent ?
- Presque tous les soirs. J'ai choisi cet endroit parce que j'y ai passé mon enfance et que c'est aussi loin de Rome que ce peut en Italie, mais le problème, c'est que je n'avais aucune nouvelle des combats non plus. J'avais peur d'arriver à Rome quand je serais prêt à te racheter et que je ne trouve plus personne à sauver.
- Tu ne me fais pas confiance pour me défendre moi-même ?
- Bien sûr que si, mais des personnes peuvent réussir par chance ce que tu fais par la technique., Sehun sourit doucement en se souvenant des leçons du plus vieux.
- Quelques uns ont fini par réussir à dépasser l'invaincu, c'est vrai., Junmyeon sourit tristement.
- Je suis désolé qu'il n'y ait aucun moyen d'effacer ces cicatrices. Je donnerais ma fortune et mon terrain si tu le voulais et que ça pouvait y changer quoique ce soit.
- Ne dis pas ça, il y a bien plus à faire avec ça que les bénéfices de les enlever te rapporterait.
- Je pense que te savoir heureux est le plus grand des bénéfices, le seul que je recherche.
- Tu as vraiment appris comment parler toi., Grommelle Junmyeon, Dommage que ça ne veut pas dire que tes mots en sont plus vrais.
- C'est blessant ça.
- C'est mérité, pour te moquer de moi tout le temps.
- Je ne me moque pas.
- Bien sûr.
Junmyeon lève les yeux au ciel avant de les reporter sur l'étendue bleue à leurs pieds. C'est vrai que lui aussi pourrait s'assoir et juste écouter le bruit des vagues pendant des heures.
- Ferme les yeux, c'est encore plus saisissant.
Lui conseille Sehun et Junmyeon s'y oblige de bon cœur. Le roulement des vagues lui paraît alors plus fort, il le ressent avec tout son corps, il ne l'entend plus uniquement. Alors qu'il sourit, ébahi par la sensation, il sent une paire de lèvres se poser sur les siennes. Il ouvre immédiatement les yeux sous la surprise et tombe sur Sehun face à lui. Il ne répond pas assez tôt et Sehun se recule un peu gêné. Mais Junmyeon ne veut pas que ça se finisse, pas maintenant, jamais. Il franchit la courte distance que Sehun avait instauré entre eux deux et vient s'emparer à son tour des lèvres de Sehun, l'embrassant avec passion. Quand il pense qu'il lui semblait avoir besoin de leurs baisers après simplement deux semaines et qu'il a dû se passer pendant six ans de ceux-ci. Sehun répond en même temps qu'il entoure Junmyeon de ses bras, le rapprochant autant de lui qu'il est matériellement possible. Ils restent pendant de longues minutes juste ainsi, les baisers alternant entre des tendres amoureux et des désespérés.
- J'avais un peu peur que tu ne veuilles plus de moi comme ça., Junmyeon murmure.
Sehun pose son front contre celui de Junmyeon en souriant doucement.
- Jamais, comment pourrais-je ? Je t'ai dit, je te dois plus qu'à n'importe qui. Je n'ai besoin que de toi.
- Moi aussi, on pourrait partir d'ici demain et tant que je t'aurais, je sais qu'on trouvera un moyen de nous en sortir. Manifestement, tu sais déjà comment devenir riche., Junmyeon rit doucement.
- J'avais une bonne raison de m'activer.
- Tu penses qu'on peut être ouvertement ensemble ici ?
- Tant qu'on se moque de notre réputation. Mais qu'est-ce qu'on en a à faire ? Pourquoi est-ce qu'on ne deviendrait pas les plus riches vignerons tout en aimant les hommes ? Pour embêter ces patriciens ?
Junmyeon rit en entendant les dernières paroles de Sehun et relève la tête pour l'embrasser. Il se sent mieux qu'il ne l'a jamais été, extatique. Quelques éclats de rire le prennent alors qu'il embrasse Sehun et il finit par être obligé de s'éloigner. Sehun le regarde bizarrement avant de rire à son tour. Au bout de quelques minutes, ils finissent tous les deux par se calmer.
- Merci d'être venu me chercher Sehun, ma liberté n'aurait pas de saveur sans toi.
- Merci de m'avoir pris sous ton aile Junmyeon, je ne serais plus sans toi.
- Tu essaies de me faire passer pour meilleur que je ne suis, tu m'as peut-être sauvé la vie aussi.
- Je t'ai totalement sauvé la vie, mais je veux simplement dire que tu l'as fait avant., Sehun rit.
- Imbécile.
Junmyeon lui donne une petite tape sur le bras et Sehun sourit avant de se pencher pour l'embrasser à nouveau.
- Je t'aime., Junmyeon se confesse finalement.
- Je t'aime aussi., Lui répond Sehun.
- J'ai hâte de vivre avec toi.
- On arrivera à rendre ça agréable.
Sehun prend la main de Junmyeon et ils retournent à leur villa, laissant la mer derrière eux. Junmyeon pense qu'il pourra rapidement appeler cet endroit sa maison, autant que le ludus semblait l'être devenu tant que Sehun était là. Oui, avec Sehun, cet endroit pourra devenir son paradis terrestre.
Merci d'être venu jusqu'à la fin de ce one shot. J'ai une petite idée pour un petit épisode bonus qui sortira aussi tôt que possible. En attendant, n'hésitez pas à faire un tour sur mon compte ^^
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