II. 5-1 (première phase du tournois)
Une semaine entière c'est écoulée.
J'ai pu profiter d'un entraînement auprès de mes coéquipiers, d'un soleil brûlant et d'un désert aussi sec qu'un gosier de soldat Aariens en quête de l'alcool de la taverne. D'ailleurs, je me suis toujours demandé si le nom « l'auberge du dragon vert », était pleinement un choix fait au hasard, ou au contraire, un signe du destin.
Finalement aujourd'hui, cela m'importe peu. Certes, ma route a croisée celle d'une dragonne en détresse, mais que vaux mon aide alors que je ne suis qu'un enfant du mal?
Sans un mot, j'obéis aux directives d'Assan ou de son second et m'attache à ne pas penser aux réjouissances qui nous attendent pendant le tournois. Nos entraînements nous prennent toute la journée, mais heureusement les repas sont copieux et la fraîcheur du soir associée à un bain parfumé de fleurs d'oranger est un délice et aide à détendre mes muscles endoloris.
J'évite le plus possible Émeraude, comme si ma présence lui était néfaste. J'ai l'impression d'avoir commis une erreur en lui demandant son aide. D'ailleurs, comment un être comme moi serait en droit d'avoir son amitié? J'imagine des scénarios pour rompre le lien qui m'uni a elle, je tente parfois de dénicher un manuscrit, une peinture, un chant qui expliquerait comment rompre cette promesse que nous nous sommes faite dans cette clairière à la cascade bouillonnante.
Assis sur un coin de table, alors que notre chef d'équipe, Assan, nous explique la première partie du tournois pour la millionième fois, mon esprit vagabonde et je me surprend même à regarder voler les rideaux aux fenêtres immenses.
J'entends que quelqu'un se racle la gorge, puis la voix du prince disparaît. C'est finalement un coup de coude bien placé dans les côtes qui me réveille. Je pousse un gémissement tantôt surpris, tantôt de douleur et masse la zone sensible frénétiquement avec ma main.
- Un soucis, interroge Assan en levant un sourcil inquisiteur.
- Non, non, désolé, j'ai un peu de mal à me concentrer après cette semaine passée au combat, à la course de morse des sables et aux études de stratégies de combats...
Ma voix résonne comme une confession dans la pièce et les regards tournés vers moi semblent à la fois compréhensifs et consternés.
Le prince dans sa tenue ample et blanche, ceinturé dans un tissus bleu marine avance avec grâce dans ma direction, la mine grave.
- Vous savez que ce tournois est DÉCISIF pour nous, commence t'il. La suite de nos relations avec Aarions dépend de qui va gagner et la guerre est à nos portes avec ce que nous avons fait il y a presque deux mois maintenant. Je pense que vous comprenez bien la posture délicate dans laquelle nous nous trouvons?
- Alors pourquoi provoquer ce roi fou furieux, ce démon de Omans si vous avez tellement peur de la guerre?
Assan marque une pause. Puis reprend:
- Nous n'avons pas peur de la guerre, nous n'avons pas peur du roi Aldini, mais plutôt de ce qui dort dans les souterrains de son château. Cet homme était bon autrefois, vous savez, il savait aimer...
Mon cœur se serre, comme si ce monstre connaissait ce mot et son sens!
- Ce n'est pas vraiment ce que j'ai pu constater, ni en vrai, ni même au travers de la fontaine...
Des gémissements de surprises s'échappent de mes coéquipiers. Leur attention est encore plus intense et la lueur de leur yeux indiquent qu'ils en attendent plus de me révélations.
- Elle n'a pas pu en révéler davantage, mais son cœur a été noirci par une créature sombre et sans pitié, même si officiellement, elle n'a jamais été aperçue jusque là.
- Alors il la cacherait?
- Certainement... mais personne ne voit un tel changement de comportement sans une bonne explication. Et cette hypothèse est la plus probable selon ma mère, la reine Sidia.
Alors que je m'apprête à poser une nouvelle question, Assan me coupe la parole en levant une main. Il s'appuie de sur la table, baisse son visage quelques instants puis, l'air las, nous prie de profiter de la soirée et d'une journée de repos avant le début de la première épreuve. Un soupire accompagne cette annonce, mais j'ai la sensation que c'est là une ruse pour ne pas continuer notre discutions.
Quand tout le monde a quitté la pièce hormis Assan, alors que je me dirige de mes pas lourds vers la sortie, le prince m'interpelle:
- Alban, je ne sais pas ce que vous avez pu voir au travers de la fontaine. Commence celui-ci. Mais sachez qu'elle ne vous montreras jamais plus que ce que vous souhaiter contempler. Si cela doit obscurcir votre cœur, alors ne laisser pas cette difficulté atteindre votre âme. Garder en esprit que vos alliés ne sont jamais loin et que votre plus belle réussite n'est pas derrière, mais devant vous.
Les mots restent en suspension dans mon esprit vide. Une fois de plus, mon cœur lourd me hurle de lâcher des larmes contenues depuis bien trop longtemps.
- Le monstre dont vous parliez, c'est une vouivre, n'est-ce pas?
D'un hochement de tête il acquiesce, puis venant à ma rencontre, me susurre de ne pas en parler et cela, sous aucun prétexte.
- Ce sont des créatures maudites, n'existant que pour faire le mal. Je prendrais le temps de vous en dire plus, mais pour l'heure, nous avons un tournois à gagner.
Un sourire franc étire ses lèvres, tandis qu'il m'offre une frappe de l'épaule amicale.
- Gardez espoir mon ami, je vous en prie.
Puis il quitte la pièce à son tour avant que je ne lui emboîte le pas et ne rejoigne mes appartements.
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