2ème Intermède
Une nouvelle gorgée désaltérante mit fin au désert qui s'était emparé de la gorge de la prisonnière. Elle tendit de nouveau la gourde à son geôlier qui s'en empara prestement.
— Tu vois, je ne mentais pas quand je disais que nous nous connaissions, lança le freluquet.
— Tu as omis de me préciser que tu nous avais trahis.
— Nous n'étions pas dans le même camps, je n'ai fait que mon devoir.
— Rien ne t'obligeait à nous avertir à propos de l'embuscade aux ruines de l'avant-poste.
— Je me disais que vous cachiez certainement un atout dans votre manche. Je devais en prendre connaissance. Le destin m'a donné raison.
— Au prix de devoir sacrifier certains de tes camarades ?
— C'est le jeu, tu connais la chanson. Seul les plus forts survivent. Puis de toute façon ces maudits Sudiens prévoyaient déjà de nous attaquer.
— Comment Vaiyn a-t-il réussi à s'échapper ce jour-là ?
— Je te l'ai déjà dit, c'est moi qui pose les questions. Mais je veux bien faire une exception cette fois-ci. Pour tout te dire, l'avant-poste recèle de nombreuses cachettes. Vaiyn s'est réfugié dans l'une d'entre elle puis a attendu. Le lendemain il suivit votre groupe et est resté en marge du campement des mïsthyari. Dans la soirée, il a réussi à se faufiler jusqu'à moi, je lui ai donné toutes les informations dont je disposais sur vous.
— C'est donc comme ça que les Foudres de Guerre ont anticipé notre opération commando. Mais toi, comment as-tu réussis à échapper aux griffes des Sudiens ?
— L'orgueil furent leur plus grand péché, ils ne pensaient pas quelqu'un comme moi capable de se soustraire à eux. Tout en s'emparant au passage de l'un de leurs destriers. Je te passe les détails mais j'ai agi peu après votre départ, je redoutais que cette sorcière me crame la cervelle. J'ai filé au sud vers le Cadhras à la rencontre de Gerald le Noir. À ma grande chance, lui et ses cavaliers étaient déjà sur le chemin du retour. Je l'ai convaincu de revenir au fort plutôt que d'attaquer les Sudiens restés en arrière-garde. Bref, assez parlé.
La prisonnière considéra du regard le jeune homme et de ce qu'elle se rappelait de lui tandis qu'il s'éloignait de la cellule. A priori à un certain intervalle de temps s'était écoulé depuis la chute des mïsthyari et son intégration parmi les Foudres de Guerre. Si elle se souvenait d'avoir éprouvé de la colère à l'égard d'Ervin par le passé ce n'était plus le cas à présent même si elle n'en connaissait pas la raison. À vrai dire son passé ne faisait plus partie de ses prérogatives. Elle n'aspirait qu'à s'échapper de cette cellule miteuse. Pourtant que ferait-elle une fois dehors, entourés d'ennemis de toutes parts, eux aussi encerclés par d'autres au-delà des hautes murailles du Fort du Croc ? Les prémices d'un plan émergèrent dans son esprit, audacieux mais risqué.
Malgré le passage des heures, son Don lui semblait toujours aussi lointain et faible. Le siphonneur avait dû la vider de tout son Pouvoir par précaution. Cependant une vigueur renouvelée s'était emparée de son être. Cela devrait suffire pour se débarrasser d'Ervin.
— Hé ! Regarde ce que je viens de trouver – le freluquet revint vers les barreaux les bras chargé d'un objet ample – Quand on la voit de loin, elle ressemble à une cotte de mailles comme une autre mais une fois en main... Légère comme une plume ! Alessia ?
La prisonnière, s'était recroquevillée au sol, son corps victime d'une série de spasmes violents. Ervin ouvrit immédiatement la cellule et s'agenouilla auprès d'elle. Il toucha son front maculé de sueur.
— Mince elle est brûlante de fièvre ! Harbard m'avait prévenu qu'une telle chose risquait d'arriver. Je dois agir au plus vite !
Alors que son geôlier s'apprêtait à tourner les talons pour regagner l'alcôve, la prisonnière sortit de sa léthargie feinte. D'un croche-patte astucieux, elle le fit trébucher. Une fois au sol, elle se jeta sur lui, s'appuya sur son dos et se servit du mou de la chaîne en fer pour l'enrouler autour du cou du malheureux. Pris dans l'étau mortel, Ervin essaya de se débattre, balança ses bras en arrière pour toucher la jeune femme.
— Donne-moi la clé de la menotte tout de suite si tu veux la vie sauve
— Je ne l'ai pas... Tu crois qu'ils sont assez fous pour la confier à moi ? Relâche-moi !
Elle resserra davantage son emprise et attendit que l'asphyxie fasse le travail. Ervin ne se contentait plus que de gémir. La prisonnière passa une main à sa ceinture à la recherche d'un trousseau. Elle n'en trouva aucune trace. Elle relâcha la chaîne en fer contre le mur du fond. Le freluquet glissa à l'autre bout de la cellule tout en hoquetant, de l'air se rependait à nouveau dans ses poumons.
— Quel idiot je suis. J'aurais dû me douter que tu tenterais quelque chose de la sorte, lança Ervin après avoir enfin repris son souffle.
— Il fallait bien que j'essaye quelque chose, grogna la prisonnière.
— Et après ? Comment comptes-tu sortir vivante du fort ? Puis une fois dehors ? Nous sommes encerclés. Je suis ta seule chance de t'en sortir
— Je viens d'essayer de te tuer, pourquoi persisterais-tu à vouloir me sauver ?
— Je ne suis pas ton ennemi, Alessia. Nous sommes plusieurs à remettre en question les actes de Gerald le Noir et de ses drengirs. Tu as des amis entre ces murs. Je peux intervenir auprès d'eux. Harbard, Marjolaine, Andronikos, Vaiyn... Ils ne t'abandonneront pas.
— Et qu'attends-tu de ma part en échange ?
— De la franchise. Convaincs-moi du bien fondé de tes actes et je me chargerais de les rallier à ta cause.
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