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Chapitre 38 - La dernière carte

Dehors, il pleuvait à verse, et le fracas de l'eau ruisselant sur le toit de zinc emplissait l'espace. Il était par ailleurs affreusement tard. Ils avaient quitté la demeure de Clervie à la nuit tombée pour rejoindre l'officine de Hammond, un local étroit tout juste discernable par la couleur verdâtre de sa porte et par le heurtoir en forme de serpent qui y était fixé. L'arrière-boutique était si étroite que Lizzie se retrouvait coincée entre Jan et Ambroise. Le lieu, avec son odeur de plantes séchées, lui faisait penser à l'infirmerie de la Pension.

Lizzie tâchait de juguler sa respiration, en songeant à toutes les fois où elle avait atterri dans un lit de l'infirmerie. Il y avait eu cette fois où elle s'était fracturé le poignet lors d'un entraînement, et où Ambroise avait prétexté qu'elle avait glissé sur une plaque de verglas. Il y avait cette autre fois où une maladie avait frappé les pensionnaires et une bonne partie de la cour.

Voilà plus d'une heure qu'ils attendaient Carlton Belvild. Lizzie était parvenue à contenir son inquiétude jusqu'à présent ; c'était sans compter la soudaine crispation d'Ambroise, quelques instants plus tôt. Une crispation que nulle autre qu'elle n'avait pu discerner, mais qui annonçait, elle le savait, l'arrivée imminente de Belvild.

Ambroise n'aimait pas son plan et elle ne l'ignorait pas. Mais tout ce qui importait à Lizzie, pour l'heure, fût qu'il ne découvrît pas la vérité. Qu'il ne perçût pas le mensonge dans ses yeux, dans sa voix, dans quoi que ce fût qui pourrait la trahir.

Lorsque Carlton Belvild franchit la porte de l'arrière-boutique, Lizzie ne put empêcher ses mains de trembler.

— Madame, dit-il. Je suis heureux de vous revoir.

Lizzie se leva. Elle tendit sa main gauche, où la bague de saphir avait remplacé son alliance et que Belvild embrassa.

— Le plaisir est partagé.

Il eut un rictus – fugace – puis se tourna vers Ambroise.

— Monsieur, dit Belvild en s'inclinant.

Ambroise s'était levé. Sa main, Lizzie l'aurait juré, venait de s'envoler à son côté à la recherche d'un pistolet. Cependant, Hammond et Jan avaient insisté pour qu'ils se séparent de leurs armes. Lizzie n'en conservait qu'une, celle que personne n'avait songé à – ou osé – lui demander : la dague qui ceignait sa cuisse.

Ambroise laissa retomber son bras et le salua en retour.

Ils prirent tous place autour de la table.

— Jan vous a-t-il informé de l'objet de notre entrevue ? attaqua Lizzie.

— Absolument.

Lizzie prit une profonde inspiration.

— Fort bien. Si nous collaborons, je veux que les termes soient clairs. Pour tous ceux ici présents.

Coudes appuyés sur la table, Carlton Belvild joignit ses mains devant lui et y posa son menton, l'air attentif. Il ne quittait pas Lizzie des yeux, et elle aurait juré voir dans ses prunelles une vague inquiétude.

Il la laissait ouvrir la partie, et elle ne se priverait pas du privilège qu'il venait de lui accorder.

Lizzie décocha un regard vers Ambroise. Il lui renvoya un hochement de tête imperceptible.

— J'ai cru comprendre, monsieur, dit-elle, que vous aviez essayé de m'adresser un message.

— Et j'ai cru comprendre, madame, répliqua Belvild, que vous aviez vous-même tenté de m'en envoyer un. Il m'est d'avis que vous n'êtes guère douée au tir.

Lizzie vacilla.

— Vos méthodes, répliqua-t-elle, sont tout aussi discutables que les miennes.

Ambroise se raidit. Piètre répartie. Lizzie serra les dents.

— Ma chère, fit Carlton Belvild d'une voix affreusement mielleuse. Nous sommes semblables, vous et moi.

Sous la table, Lizzie serra les poings. Non. Ils n'étaient en rien semblables.

— Mettons de côté nos... divergences passées. J'ai trois questions.

— Posez-les, ma chère. Posez-les.

— Vous souhaitez que je tue Ascelin de Glaves, raison pour laquelle vous avez enlevé Ambroise. Le confirmez-vous ?

— Je le confirme.

— Et si je refusais de me plier à votre volonté, vous le tueriez en représailles ?

Carlton Belvild hésita un instant. Un infime instant.

L'homme était assez intelligent pour ne pas menacer de mort Ambroise devant lui. Mais quoi qu'il réponde, Lizzie menait la danse, à présent. L'indépendantiste la fixa quelques secondes encore, un rictus étirant ses lèvres.

— J'admets avoir fait une erreur. Vous tenez tant à votre vie, très chère, qu'il aurait sans doute été plus simple de vous menacer vous. Oh, vous auriez tué De Glaves, comme vous étiez sur le point d'assassiner votre époux. Sans trembler.

Lizzie écarquilla les yeux. C'était un coup bas. Si mesquin, en vérité, qu'elle ne sut quoi répondre. Elle se tint là, silencieuse et immobile.

Jusqu'à ce que la voix de Jan s'élève en un grondement étouffé.

— Il suffit. Élisabeth ne m'a pas tué et elle ne l'aurait pas fait.

— Vous croyez donc encore, Jan, qu'elle a de l'honneur ?

Lizzie prit une profonde inspiration pour juguler la colère qui montait en elle. Belvild ne savait rien d'elle. Rien du tout.

— Si vous souhaitez notre collaboration, articula-t-elle d'une voix forte, vous éviterez de m'insulter de la sorte. Ce qui m'amène à ma dernière question. Pourquoi moi ?

— Pourquoi vous ?

— Vous me haïssez, mais vous m'avez choisie. Je suis certain que n'importe lequel de vos hommes pourrait se charger de cet assassinat.Pourquoi moi ?

— Vous aimez vous sentir importante, n'est-il pas ? Comme il doit être doux de savoir que l'on a été choisi. Voyez-vous, madame, pour le commun des mortels, la vérité est tout autre.

— Vous ne...

— Quoi que nous désirons de ce monde, ma chère, il nous faut l'arracher pour l'obtenir. Pourquoi vous ? C'est une question à laquelle, je le crains, peu de gens ont le luxe de connaître la réponse.

Lizzie ouvrit la bouche pour répliquer, mais Belvild lui vola la parole.

— Il doit être étrange de regarder le monde depuis votre piédestal. Mais le monde, Élisabeth, ne tourne pas autour de votre personne. Je vous concéderais néanmoins ceci : vous n'êtes pas le commun des mortels. Vous êtes la lame de l'Ardrasie. Et ceci est la seule raison de notre... collaboration.

— Je ne suis pas certaine de comprendre.

— Il n'y a rien de plus traître qu'une rose, et votre royaume, à force de porter cette fleur en étendard, en a oublié ses épines.

Par-dessus la table, il se pencha vers elle.

— Je crois, asséna-t-il d'une voix douceâtre, qu'il est temps qu'il s'en souvienne.

— Cela vous amuse. De m'ériger en traîtresse. De m'utiliser pour humilier mon royaume.

Belvild lui répondit par un rire et se rencogna contre le dossier de sa chaise.

— Je n'ai guère le temps, madame, de m'amuser. J'ai une guerre à mener, et la guerre s'accommode mal des plaisanteries. Et si, très chère, nous passions sur ce charmant prélude pour en venir aux faits ?

Lizzie le détailla un instant. Il avait croisé ses bras sur sa poitrine, l'air parfaitement serein. Lizzie sentit l'horreur l'envahir : elle avait perdu pied. Sans qu'elle s'en aperçoive, il avait repris l'ascendant sur leur conversation. Elle croisa le regard d'Ambroise, et, à son grand désarroi, elle y lut la déception qu'elle y craignait. Lui aussi avait senti le vent tourner. Ambroise qu'elle allait trahir.

Concentre-toi, s'admonesta-t-elle.

— Le Roi Lancelin viendra à Fort-Rijkdom, énonça Lizzie d'une voix calme. Il viendra pour clamer son triomphe. Il viendra avec des troupes, pour pacifier la ville. Éliminer les dernières menaces. Vous éliminer vous et tous ceux qui vous suivent.

Lizzie vit à peine une lueur de surprise dans son regard.

Grands dieux. Belvild était doué pour cacher ses émotions. Tout autant qu'Ambroise, si ce n'était plus.

— Et comment êtes-vous arrivée en possession d'une telle information, Élisabeth ?

— J'ai mes sources, rétorqua Ambroise.

Carlton Belvild se tourna vers Ambroise. Ses traits affichaient une mine railleuse qui n'augurait rien de bon aux yeux de Lizzie.

— Je le conçois fort bien. Comment se porte ce cher Haut-Régent ?

— N'est-il pas curieux, reprit Belvild, qu'un tel personnage vous confie un secret si capital, à vous, un simple soldat...

— Je ne suis pas un simple soldat, siffla Ambroise.

Carlton Belvild lui adressa un sourire froid. Son regard détailla un instant Ambroise, avant de se poser sur Lizzie. Assurément, l'homme qui l'avait entrainée ne pouvait être un simple soldat.

— Non, en effet, susurra-t-il. Néanmoins, vous conviendrez que cette façon d'agir est curieuse. Je serai même tenté de prendre cela pour un piège.

Le souffle de Lizzie se coupa dans sa poitrine.

Son cœur rata un battement lorsque Belvild la désigna du doigt. Au même instant, un coup de tonnerre ébranla les murs, et Lizzie ne put s'empêcher d'y voir un mauvais présage.

— Que cette jeune femme trahisse son propre royaume, cela ne m'étonnerait pas. Mais vous, monsieur ? Un membre du cabinet noir ?

Lizzie fronça les sourcils. Elle n'avait jamais, au grand jamais, entendu ce terme.

Pourtant; le regard d'Ambroise venait de s'illuminer d'une lueur dangereuse. Elle n'eut pas le temps de l'interroger que Belvild continuait.

— Vous trahiriez la confiance qu'Ascelin de Glaves a placé en vous ? Vous trahiriez votre Roi ?

Ambroise serra les poings. Lorsqu'il parla, sa voix fut parfaitement maîtrisée. Son visage était neutre, indéchiffrable, comme à chaque fois qu'il s'apprêtait à mentir.

— Oui. Je le trahirais. Je les trahirais tous.

— Au nom de quoi ?

Il y eut un silence.

Lizzie savait qu'Ambroise connaissait la réponse ; ils l'avaient préparée. L'Ardrasie a perdu ma loyauté à l'instant où elle m'a retiré la sienne.

Lizzie vit la poitrine d'Ambroise se soulever sous l'ample respiration qu'il prenait. Ses yeux s'accrochèrent aux siens et la jeune femme hocha imperceptiblement la tête. L'Ardrasie a perdu ma loyauté à l'instant où elle m'a retiré la sienne.

— Pour elle, fit-il. Pour Lizzie.

Cette fois, Lizzie fut saisie d'un vertige.

Non. Non, ce n'était pas ainsi que cela devait se passer.

Ne voyait-il pas ce qu'il était en train de faire ? Il ne pouvait pas. Il ne...

— Tout ce que j'ai fait, tout ce que je ferai jamais, sera toujours pour elle.

Lizzie eut soudain trop chaud, trop froid. Elle aurait volontiers foudroyé Ambroise du regard, si seulement il lui avait resté un semblant de force. Ambroise venait de dévoiler une de ses failles à Belvild. Peut-être même sa seule faille. La seule, du moins, que Lizzie lui connaissait.

Mais elle n'eut pas le temps de s'appesantir sur cette pensée. Belvild venait de se tourner vers elle.

— Et vous ? Y a-t-il une autre raison qui vous pousse à trahir votre royaume, autre que celle de la menace qui pèse sur la tête de votre très cher frère ?

— Oui. L'Ardrasie a perdu ma loyauté à l'instant où elle m'a retiré la sienne.

Belvild les contempla tour à tour. Inclina la tête, un sourire aux lèvres.

— Fantastique ! Quel spectacle vous ferez, quand l'heure sera venue, quand vous dévoilerez tous deux vos épines.

— Il va sans dire, rétorqua Lizzie, que jusqu'à temps que l'heure pour nous de trahir soit venue, comme après notre trahison, vous assurerez notre protection. À tous les deux.

Lorsqu'ils s'étaient entraînés avec Ambroise, elle avait réussi à imposer cette demande. Elle avait prétendu qu'ils devaient jouer le jeu jusqu'au bout ; que Belvild s'attendrait à cette question. Mais en vérité, Lizzie essayait simplement de les protéger. De protéger Ambroise malgré le couteau qu'elle lui planterait dans le dos en assassinant De Glaves et en trahissant véritablement. Car, de ce qui viendrait ensuite, elle ignorait si elle en sortirait vivante.

Mais le silence s'éternisait, et Belvild ne répondait pas.

Il planta ses yeux dans les siens.

— Il va sans dire, madame, que si l'un de vous devait agir contre moi, cette protection vous serait immédiatement retirée. Comprenez par là, que ces personnes que vous évoquiez tout à l'heure, les assassins parmi mes rangs, recevront des ordres... très clairs.

Lizzie déglutit. Elle n'osa pas regarder Ambroise. Ambroise aux yeux de qui elle allait tuer Belvild. Ambroise aux yeux de qui elle se condamnait en acceptant ce marché.

— Bien évidemment, monsieur.

— Fort bien. Ma protection la plus absolue vous est donc acquise. Maintenant que nous avons nos conditions, reprenons, voulez-vous ? Lancelin viendra à Fort-Rijkdom, donc. Quand cela ?

— Ce n'est qu'une affaire de semaines. Il compte célébrer le jour sombre à Fort-Rijkdom.

La célébration en l'honneur de Mercyng. Le regard de Carlton Belvild se posa sur elle.

— Mercyng, susurra Belvild avec un rictus.

Lizzie réprima un frisson.

— Un dieu, ajouta-t-il, pour lequel votre souverain parait avoir une certaine... dévotion. Et que suggérez-vous ?

— Je tuerai Ascelin de Glaves. Et je tuerai le roi.

Cette fois, une franche surprise s'afficha sur le visage de Belvild.

— Je n'ai aucun intérêt en la mort d'un roi, aussi détestable fut-il.

— Mais...

— Tuez De Glaves. C'est tout ce que je vous demande.

— Tant que le roi sera là, vous ne pourrez pas prendre le pouvoir. Tant que Lancelin sera en vie, il fera tout pour conserver Fort-Rijkdom.

— Qu'il essaie.

— Mais...

— Je peux tenir Fort-Rijkdom. Les autres nations s'entretueront devant nos murs. Mais je ne peux pas, madame, assassiner un roi. Croyez-vous que les autres nations resteront sans réagir ? Je ne peux faire la guerre contre l'ensemble des Bas-Royaumes.

Lizzie serra les poings. Elle avait joué, et elle avait perdu. Belvild était un homme intelligent. Elle devait se montrer plus rusée que lui.

Lizzie jeta un coup d'œil à Ambroise, et elle sut qu'il était arrivé à la même conclusion qu'elle : dans son regard bleu, elle vit pour la première fois un éclat d'inquiétude. Le ventre de Lizzie se serra. Elle devait aussi duper Ambroise Auguste.

Elle devait les duper tous.

Et elle savait comment faire. Au diable le jeu qu'ils avaient patiemment forgé avec Ambroise.

— Soit, répondit-elle. Mais une fois Ascelin de Glaves mort, vous devrez prendre le contrôle de la ville.

Lizzie se pencha vers lui.

— La garde de Fort-Rijkdom vous est-elle acquise ?

— Une partie d'entre elle.

— Mais Lancelin ne viendra pas seul. Il aura ses troupes pour pacifier la cité. Vous devrez frapper fort et vous imposer avant que Lancelin ne puisse le faire. Le roi aime les réceptions, il en donnera très certainement une pour le jour sombre. Des invités triés sur le volet, l'élite de Fort-Rijkdom. Tous rassemblés dans la même pièce.

Lizzie peinait à suivre le fil de ses propres pensées. Elle força un masque impassible sur ses traits.

— Je tuerai De Glaves. Je suis Ardrasienne, et vous m'avez accusée au Burgsæl d'être une meurtrière pour le compte de l'Ardrasie. Ils verront que vous aviez raison.

Elle laissa un silence planer entre eux.

Une lueur fulgura dans le regard d'Ambroise. Belvild, lui, laissa un sourire jouer sur ses lèvres.

Lizzie abattit sa dernière carte.

Celle que personne, en vérité, n'attendait.

— Quel camp choisira Fort-Rijkdom ? Celui d'un despote tyrannique prêt à assassiner un de ses vassaux les plus fidèles ? Ou le vôtre ?


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