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VENDREDI 20 / 0 HEURES 30


Ils avaient l'air de cambrioleurs qui sortaient d'un raid quand ils mirent le premier pied dehors. Ils s'étaient habillés tout de noir, gros sweats à capuche, chaussures de sécurité et tout le reste. Seul le masque blanc qui cachait la bouche et le nez de Louis jurait dans l'obscurité. Pour la forme, ils avaient glissé dans leurs poches respectives l'attestation de sortie, en cochant la case : « déplacements brefs, à proximité du domicile pour l'activité physique individuelle », même si, si jamais ils se faisaient contrôler, ils auraient bien du mal à se justifier. La peur du flagrant délit tenaillait Ninon, mais l'air confiant et l'enthousiasme de Louis la rassurait un peu. Juste un peu.

La nuit, c'était encore pire que le jour. Il n'y avait plus d'éclairage public, et les vitrines des magasins de la rue, d'ordinaire lumineuses aux heures les plus sombres étaient éteintes. Des mannequins menaçants, aux looks dépassés car ils n'avaient pas été changés depuis une semaine, dessinaient des silhouettes approximatives. Le ciel était clair, mais la lune presque noire, plongeait la ville dans une nuit dense. Les yeux de Ninon finirent par s'habituer à la pénombre, mais elle ne distinguait pas les détails de la figure de Louis, juste son masque et sa capuche. Le ricochet d'un caillou sur les pavés, quelques mètres plus loin, la fit sursauter. Elle s'immobilisa, s'attendant à voir débouler un escadron de flics au coin de la rue. Mais il n'en était rien, mis à part l'ombre d'un chat s'étirant sur une rambarde.

─ Viens, lui chuchota Louis.

Il s'élança sur sa gauche, remontant la rue. Ninon enfouit ses mains dans ses poches, alerte du moindre bruit ou phare de voiture. Mais il n'y en avait pas. Les véhicules étaient soigneusement rangés dans les parkings souterrains et les cours intérieures.

Louis était déjà loin devant, marchant à grandes enjambées. Elle le rattrapa en courant un peu. Ils atteignirent une petite place, où autour d'une fontaine s'érigeaient plusieurs jeux pour enfants. Louis, tel le gamin qu'il était s'empressa de grimper au mat d'un bateau en bois, dans une petite cabine. Les murs lui arrivaient aux hanches, il avait l'air d'un géant. Il écarta les bras, comme la scène dans Titanic. Si Titanic avait eu lieu pendant une pandémie et que tous les acteurs portaient des masques.

─ T'es vachement malade, à ce que je vois, lui lança Ninon.

Pour seule réponse, il lui fit signe de le rejoindre, et la jeune femme hésita, trouvant cela débile de sortir en pleine nuit pour s'amuser sur des jeux pour enfants. Puis, elle restait tendue. Même si les volets fermés et le silence royal attestaient qu'ils étaient les seuls à des centaines de mètres à la ronde, elle restait aux aguets.

Après une longue inspiration, elle accepta de monter à son tour sur le bateau, emprunter l'échelle. Il fallait passer par une trappe minuscule, conçue pour des enfants de cinq ans, et comme elle avait du mal, ses genoux craquant au passage, Louis lui attrapa le bras gauche pour l'aider à se relever, comme ça ne suffisait pas, il prit sa main droite aussi, avant de se rendre compte de son erreur. Ninon fut enfin debout, et son colocataire leva les deux mains, désolé.

─ Pardon, s'excusa-t-il à nouveau.

─ C'est bon pas grave.

Elle sortit le gel hydro-alcoolique de sa poche et s'en badigeonna généreusement les mains, épousant la vue du regard. Ce n'était rien d'extraordinaire, ils n'étaient qu'à un mètre cinquante du sol.

─ On aurait mieux fait de sortir sur le balcon, maugréa Ninon.

─ Toujours à te plaindre. C'est pas possible.

Elle sourit. En réalité, elle était contente d'être là, à l'extérieur. L'air était frais, mais c'était délicieux de respirer autre chose que les vapeurs d'eau des pâtes. Chaque fois qu'elle gonflait ses poumons, elle revivait. Alors qu'elle était sortie le matin-même. Elle s'en sentait presque coupable d'apprécier autant de s'aérer le corps et l'esprit. Elle aurait dû être chez elle.

Louis devait ressentir le contre-coup de son escapade énergique, et entreprit de s'asseoir. Il était bien trop grand pour la cabine, et ses jambes logeaient pas, il s'adossa contre un des murets, à côté de la trappe pour ne pas être vue. Ninon l'imita, et elle, en revanche, pouvait s'étendre. Chacun placé sur un des côtés de l'entrée de la cabine, ils gardaient ironiquement au moins un mètre de distance entre eux. Ninon leva les yeux au ciel, on voyait les étoiles. Elle ne se souvenait pas de la dernière fois où elle avait pris le temps d'observer le ciel. On vivait dans un monde où les gens ne levaient plus la tête.

─ Je pourrais m'endormir ici, s'enquit Louis.

─ Moi aussi.

Ils chuchotaient, et Ninon n'était pas certaine que c'était la peur de se faire attraper. Ils murmuraient car l'ambiance était devenue intimiste, et ils ne voulaient pas la briser. Un courant d'air s'engouffra par la trappe, et Ninon frissonna, repliant ses jambes contre elle.

─ Imagine si ça ne s'arrête pas, commença Louis. Imagine qu'on est coincés chez nous pour toujours. Qu'est-ce que tu ferais ?

─ Ça finira forcément par s'arrêter.

─ Je sais bien, mais imagine.

Ninon réfléchit.

─ Je pense que je finirais par retourner chez ma mère. Une fois que je serais sûre que tu n'es plus malade.

─ Mais non, tu ne peux pas, la règle, c'est qu'on est coincés chez nous pour toujours. Recommence.

Elle fit la moue, mais il ne pouvait pas la voir. Ninon retenta :

─ Je déciderai d'écrire un roman. J'ai toujours voulu le faire, mais je me dis à chaque fois que je n'ai pas le temps, ou pas les idées. Peut-être que si je sais que je suis bloquée à vie chez moi, ça m'aidera.

─ Tu ne pourras jamais le publier, lui fit remarquer Louis.

─ J'ai dit que je voulais l'écrire, pas forcément le publier.

─ Il serait à propos de quoi, ce roman ?

─ J'en sais rien, Louis ! Sinon, je l'aurais déjà écrit.

Elle entendit un rire étouffé, un gloussement dans le masque.

─ Et toi ? l'interrogea Ninon. Qu'est-ce que tu ferais si t'étais coincé chez toi pour le reste de ta vie.

─ Chez moi ou chez nous ?

─ Peu importe, là où tu veux.

Il prit un moment pour réfléchir. Il avait l'air mal à l'aise, ses grandes jambes ne trouvant pas leur aise dans l'espace riquiqui de la cabine du bateau. Ninon fixa ses mains, calés entre ses cuisses pour les réchauffer, et écoutait la respiration de Louis. Ils partageaient ce moment, ils n'avaient jamais été aussi proches, et ça n'avait rien de physique.

Avec les jours, elle avait appris à découvrir le garçon. Au début, elle avait cru apprendre à connaître un nouveau Louis, drôle, conciliant et attentif aux détails. Puis, elle avait compris son erreur. Son colocataire n'était pas cette personne nouvelle qui se révélait avec l'épreuve de l'enfermement, il était lui-même. Jusque là, Ninon n'avait pas cherché à regarder sous la face, elle s'en était arrêté aux faits, aux cuvettes de toilettes relevées et aux poils dans le lavabo, elle n'avait pas l'être. Elle pouvait bien s'émerveiller de découvrir la couleur préférée ou le métier des parents de Louis, en réalité, elle ne le lui avait jamais demandé. Il n'était pas soudainement sympathique car le confinement l'y obligeaient, il l'avait toujours été mais Ninon avait refusé de l'envisager. De combien d'autres ça avait été le cas ? Combien d'amitiés avait-elle repoussé sous prétexte que des actes superficiels ne lui plaisaient pas ? Combien de belles personnes avait-elle mis de côté car elle n'avait pas voulu creuser un peu ?

Ça paraissait difficile à Louis de répondre à la question. Ou alors, il savait exactement ce qu'il ferait, mais n'osait pas le lui dire, et cherchait une parole plus correcte.

─ Merde... souffla-t-il. J'en sais rien du tout. Honnêtement, je finirais par déprimer dur. Et tu sais, heureusement que t'es là, avec moi. Tout seul, j'aurais câblé.

Ninon sourit, émue.

─ C'est de ça que t'as peur, toi, pas vrai ? La solitude.

─ Je crois bien, ouais. Ça me terrifie de me dire que je vais finir célibataire par exemple.

Elle ricana.

─ Allez, c'est bon, Calimero, tu finiras pas célibataire.

─ Qu'est-ce que t'en sais ?

─ Les filles t'aiment bien, assura-t-elle.

Elle n'en savait trop rien, mais elle se l'imaginait. Il ne pouvait pas être un mauvais parti.

─ J'ai pas conclu en six mois, lui confia Louis.

─ Et alors ? Six mois seul dans ta vie ça veut pas dire que tes soixante prochaines années seront solitaires.

─ On devrait faire ce truc, tu sais, se promettre de se marier si on est seuls d'ici quarante ans.

Ninon rit avant de se reprendre, de crainte qu'il ne soit sérieux. Elle secoua la tête, les traits froncés avec embarras.

─ Non, pas moyen, affirma-t-elle. Moi, ça ne me dérange pas de finir ma vie seule. Puis, je sais déjà que je ne pourrais pas vivre avec toi toute une vie.

Elle ne voyait pas son visage, et il resta de marbre. Ninon eut peur de l'avoir vexé. Quand Louis parla, le ton de sa voix ne trahissait aucune déception, ce qui la soulagea un peu :

─ Ah oui, pour la vaisselle, se rappela-t-elle.

─ La vaisselle et les poils dans le lavabo.

─ Ah ! J'ai débloqué un nouveau trophée. Les poils dans le lavabo aussi, c'est noté. De toute manière, je ne vais pas me raser pendant tout le confinement, alors comme ça, c'est réglé.

Soudain, un moteur ronronna dans leur direction, et les phares d'une voiture éclairèrent le panneau de bois devant eux. Louis se tourna vers Ninon, posant un doigt sur son masque pour lui faire signe de se taire. Le sang de la jeune femme se glaça, persuadé que la police les avait trouvés et venait leur demander des comptes. Elle se recroquevilla, sans bouger le petit doigt, et patienta. La voiture passa, replongeant le quartier dans le noir épais. Ils se turent trente secondes supplémentaires, puis Ninon murmura :

─ On devrait rentrer.

─ Ouais.

Elle redescendit la première, et pendant que Louis s'extirpa de la cabine à son tour, elle nettoya ses mains. Elle ne savait combien d'enfants avant mis leurs doigts contaminés dessus. Ils marchèrent les cents mètres qui les séparaient de la porte de leur immeuble sans incident. Le chat sur la rambarde n'avait pas bougé, ses yeux jaunes perçant comme deux billes vers eux. Ninon ouvrit la lourde bois, Louis s'engouffra dans le hall.

Quand Ninon referma, elle réalisa qu'ils étaient sortis en pleine nuit sans se faire prendre. Ce n'était pas une bonne chose, ça la tentait de vouloir recommencer.




(nda : NE SORTEZ PAS !!!!! Restez chez vous)

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