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I. Volutes de bois

Enfant, je pensais que le parfum de ma harpe m'accompagnerait sur scène toute ma vie. Je n'aurais pas pu mieux me tromper.

L'odeur de la musique emplissait l'air peu à peu, m'embaumant dans une semi-quiétude. Au loin, le chuchotement des conversations, le bruissement de la foule, et les musiciens qui accordaient leurs instruments formaient un nuage sonore, tandis que j'essayais d'arranger ma tenue. Ma loge m'isolait, le temps de ressasser mes pensées et de me concentrer, afin de faire la meilleure prestation possible sur scène ce soir.

En dégageant une boucle dorée de mon visage, je croisai mon propre regard dans la glace, qui me fit basculer dans les souvenirs de mon âge le plus tendre. Enfant, lorsque j'avais joué pour la première fois sur scène, je ressemblais en tout point à la jeune femme que j'étais devenue aujourd'hui. Plus innocente, à six ans, et les traits du visage plus ronds. Pour ce premier concert, je portais une robe blanche semblable à celle qui s'évasait autour de mes jambes. Petite Rhéane que j'étais, je ne tenais pas en place, sautant de partout dans la loge.

Ma mère effaça ce mirage en ouvrant la porte pour m'encourager, habitude qu'elle avait prise dès cette première représentation.

« Tu me rappelles l'enfant candide que tu étais il y a encore quelques années. Te souviens-tu de ta première fois sur scène ?

– C'est quelque chose qui ne s'oublie pas, tu sais... répondis-je, encore à moitié plongée dans mes pensées. Je n'ai pas tant changé, si ? »

Elle me sourit chaleureusement en posant sa main sur mon épaule, et dégagea quelques boucles de mon visage, les envoyant cascader dans mon dos. Je jetai un rapide coup d'œil à la montre de ma mère, et m'imprégnai de l'atmosphère à la fois légère et pesante de la loge.

Alors que l'infime essence des instruments – que ce soit leur bois, leurs cordes, ou leur métal – m'apaisait un peu, je commençai à m'échauffer. Mon pire cauchemar serait de me blesser en jouant trop vivement de la harpe. Une tendinite ou n'importe quelle autre blessure susceptible de me gêner dans mes mouvements serait fatale à mon début de carrière d'instrumentiste. Je pianotai des doigts, fis tourner mes poignets, effectuai des rotations des coudes puis des épaules. Ensuite, j'échauffai mes chevilles et mes genoux, car les premières servaient à appuyer sur les sept pédales qui composaient mon instrument, et les seconds à le maintenir de sorte à en faire pleinement résonner le son.

Ce soir, je jouais le concerto pour harpe de Boieldieu, une pièce accompagnée d'un orchestre d'une trentaine de minutes. La nuance, par rapport aux différentes prestations que j'avais pu effectuer que pour la première fois, je passais dernière, à l'Opéra de Lyon. Quatre autres instrumentistes jouaient avant moi, parfois des solos, duos, et même un quatuor. Malgré le nombre de fois où je m'étais produite sur scène, j'étais plus anxieuse aujourd'hui.Si je jouais avec une aisance suffisante, je pouvais être repérée par le directeur de l'opéra ou des musiciens professionnels pour faire l'introduction de leurs concerts. Pour la première fois, on me donnait la chance de faire mes preuves, et cela me stressait plus que je ne voulais l'admettre.

Ma mère faisait tout pour me rassurer mais rien n'y faisait. La boule de stress dans ma gorge ne voulait pas s'en aller.

Vint mon tour de prendre place sur scène.

D'un pas incertain, je marchai sur le bois verni que j'avais tant vu, que ce soit spectatrice à l'Opéra ou pour les répétitions de ce concert. Face à mille cent personnes avides de musique classique, je m'assis à côté de ma harpe, laissant l'odeur du bois poli mêlée à celle des cordes synthétiques me détendre. Je caressai les cordes d'une main légère, me délectant du doux son produit. J'avais depuis toute petite l'habitude de ressentir ce mélange de sons, d'images, et d'odeurs lorsque je jouais de mon instrument. Ces sensations étaient celles de mon enfance, du jeune âge où je m'étais découvert cette attirance pour le monde de la musique.

Avec un peu plus d'assurance et de détermination, je fis un signe au chef d'orchestre pour lui signaler que j'étais prête. Il battit la mesure. Je n'avais plus le droit à l'erreur. Brusquement, les heures passées à travailler le morceau me parurent bien loin...

Les altos, violons, violoncelles, contrebasses, flûtes, hautbois et clarinettes commencèrent à jouer, faisant résonner leur son voluptueux avec une facilité déconcertante dans la salle. L'acoustique de l'Opéra emprisonnait également les odeurs, je sentais les fragrances rustiques et douces du bois mêlés au métal des instruments. L'introduction fila comme un chant d'oiseau, et je plaçai mes mains près des cordes pour me préparer à jouer.

Je comptai les temps. Un, deux, trois, quatre, et je pinçai les premières cordes. L'orchestre me céda la place en créant un tapis de sons légers comme des plumes. Les premiers instants passés, mon stress s'envola en même temps que la mélodie, se dissipant dans l'atmosphère si particulière de la salle, un peu différente de celles dans lesquelles j'avais l'habitude de jouer. Ici, tout semblait plus gracieux, plus léger. L'essence des instruments, les effluves de la musique paraissaient plus délicates dans cet endroit si singulier.

Rapidement, mon jeu prit de l'ampleur, les notes résonnèrent plus intensément. La musique était pour moi quelque chose de plus défini, de plus grand et important qu'un simple assemblage de sons. Elle s'écoute, se voit, se touche, se sent, et se vit. Mon but était de faire découvrir et partager ces nouveaux aspects de la musique aux spectateurs tout en y prenant plaisir. Mon professeur me disait toujours que si je remplissais les cinq conditions, j'avais tout gagné.

Le son léger et délicat de mon instrument prit de plus en plus de place sur les autres. Alors qu'ils jouaient une phrase musicale, je répondis par de multiples croches, triolets, accords et quatre doubles. Ce dialogue était une autre façon de voir la musique, en plus d'en sentir toutes les sensations. Un morceau était une véritable conversation où les mots étaient remplacés par des notes.

Il était intéressant de voir des questions se poser en langage musical certains instruments y répondaient, puis d'autres les contredisaient en argumentant. D'autres encore allaient les soutenir de leurs notes graves et longues, et un groupe d'instruments différent allait arguer contre de leur mélodie fine. Enfin, l'ensemble allait finir par trouver un compromis et jouer de concert un thème soutenu par tout l'orchestre, comme un pilier. Les basses en étaientla fondation, les médiums la colonne, les aigus la décoration : tout cela formait généralement un morceau de musique classique. On pouvait bien sûr jouer sur les multiples dimensions de la musique et ainsi se démarquer : certains compositeurs célèbres comme Mozart, Bach, Debussy et bien d'autres ont su trouver la petite différence qui les fit connaître dans le monde entier, et encore aujourd'hui.

Mon morceau se déroula bien d'un bout à l'autre. Les minutes, mesures, et notes m'avaient glissé entre les mains, je fus presque surprise quand le morceau s'arrêta. D'un même mouvement, avec l'orchestre, nous nous levâmes et saluâmes. Pour mon plus grand bonheur, nous eûmes droit à une ovation et je retournai à ma loge le sourire aux lèvres. J'étais satisfaite de ma prestation, et soufflai un bon coup. Les applaudissements m'avaient grisée. Je me revis enfant, à la fin de mon premier concert. Les joues roses et l'odeur du bois me collant à la peau, tandis que mes parents me souriaient de leur chaises.

Je retirai les quelques broches qui tenaient mes boucles en place, quittai la loge en prenant mes affaires, et rejoignis mes parents. Nous discutâmes avec le chef d'orchestre ainsi qu'avec le directeur de l'Opéra. Ce dernier était intéressé pour me faire jouer en introduction du concert d'un célèbre pianiste, Pascal Comelade. Il souhaitait que j'interprète le Canon en Ré Majeur de Johann Pachelbel, morceau que j'affectionnais tout particulièrement. Cette pièce était la première que j'avais entendue à la harpe, et c'était celle qui m'avait donné envie d'apprendre à en jouer. Le vieux papier de l'artiste qui avait joué l'œuvre, recouvert de petites tâches noires et de traits, ainsi que ses mains se mouvant avec la grâce d'un colibri et l'odeur du bois, m'avaient définitivement fait accrocher à l'instrument.

Si cela ne tenait qu'à moi, j'aurais immédiatement accepté la proposition, mais mes parents étaient catégoriques : je ne devais pas m'enfermer uniquement dans le monde de la musique et aussi m'ouvrir sur le reste.

Nous partîmes dans le bureau du directeur discuter des dates, et de la rémunération des concerts envisagés. J'écoutais les adultes échanger pendant de longues minutes, préférant m'imprégner un maximum de l'atmosphère et de l'odeur apaisante du lieu. Je relevai le nez quand l'accord fut signé, et nous rentrâmes à la maison.

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