Des silhouettes ténébreuses se découpaient sur la pleine Lune. Ils étaient environ une vingtaine. La nuit était tombé depuis longtemps sur la forêt, et le silence régnait, jusqu'à qu'un premier hurlement de douleur se fit entendre. 

Comme à un signal, les mystérieuses silhouettes se jetèrent en avant en émettant des feulements terribles. De l'autre côté de la clairière, un autre groupe vint à leur rencontre, le poil hérissé, les crocs luisants et les griffes sortis. 

Le choc fut terrible. Les chats s'entre-déchiraient, ne savaient même plus si ils affrontaient un ami ou un ennemi. Et dans ce brouhaha, deux jeunes chats se faufilaient et tentaient de combattre eux aussi. Le premier était un chat gris et noir aux yeux jaunes et à la tête haute et fière. La deuxième était une jeune chatte rousse un peu tigrée.

- Il faut repousser l'attaque ennemie ! S'exclama le grand chat gris.

Sa sœur acquiesça et ils s'élancèrent au milieu du champ de bataille. Autour d'eux, des hurlements ponctuaient les combats et, parfois, du sang souillait le territoire de leurs ancêtres. 

 La jeune guerrière avait fait des progrès : elle avait déjà chassé deux assaillants, et son frère trois. La chatte rousse s'attaquait au troisième ennemi et elle eut rapidement l'avantage. En effet, son adversaire était frêle et incompétent, sûrement un apprenti. 

Mais il fut sauvé par un guerrier qui faisait deux fois la taille de la femelle, ce qui l'a déstabilisa. Elle se retrouva facilement en position de faiblesse, et le grand vétéran se mit à lui labourer le ventre. Mais il fallait qu'elle résiste, elle ne voulait pas partir en laissant son clan derrière elle, et elle ne le ferait pas, sinon elle n'était pas Portail de Flammes du Clan de la Faune. Elle s'écria :

- Vortex Noir, à l'aide !

Vortex Noir se retourna. Il avait reconnu le cri de sa sœur bien-aimé. Il se rappelait combien elle lui avait manqué lors de sa disparition quand elle était chaton, et encore pendant plusieurs lunes jusqu'à ce qu'elle revienne au Clan de la Faune, quelques lunes plus tôt. 

Mais il ne fit rien. Sa sœur l'avait trahie en quittant son clan pour le Clan de la Lune, et même si elle ne l'avait pas fait de son plein gré il avait souffert de son absence. Il avait une colère sourde envers elle et elle devait payer. C'est pourquoi il ne bougea pas d'un poil pour venir à son secours.

- Vortex Noir ! Supplia de nouveau Portail de Flammes d'une voix pressante.

En effet, son assaillant approchait désormais dangereusement sa mâchoire de la gorge de l'a chatte rousse. Elle se débattit une dernière fois, mais se fut trop tard. Elle eut juste le temps de voir les yeux de son frère virer au rouge par la colère, et le jaune ne reviendra pas à ses yeux, avant de se sentir s'engourdir lentement. 

Portail de Flammes rejoignit alors le Clan de l'Aube.

Les féroces guerriers adverses n'en crurent pas leurs yeux ! Un démon venait de naître devant eux. Un démon gris sombre aux yeux rouges brûlants de haine. En poussant un terrible feulement de rage, il se jeta sur ses quatre adversaires. 

Le premier eut la nuque brisée, le second le ventre déchiqueté, le troisième le cou ouvert et le dernier fut poussé dans une fosse marécageuse qui tapissait le sol de la forêt humide. La furie du chat démoniaque ne s'éteint pas. 

Il s'attaqua au matou qui dirigeait l'attaque. Ce dernier recula d'un bond, presque paralysé par l'effroi. Il se débloqua enfin et débuta un affrontement acharné contre le féroce Vortex Noir. Le guerrier gris aux yeux rouges poussa un cri grave, rempli de haine, de rage mais aussi de joie :

- Plume de Phénix ! Je vais te tuer !

Le dénommé Plume de Phénix indiqua à ses compagnons le repli, mais ces derniers étaient paralysé de terreur, leurs yeux exorbité rivés sur Vortex Noir. Plume de Phénix répéta :

- On se replie ! Allez !

Toujours aucune réaction de ses compagnons. Vortex Noir en profita pour les éliminer, les uns après les autres. Plume de Phénix fut contraint de s'enfuir, le poil hérissé, la queue entre les pattes et un profond désir de vengeance encré dans sa mémoire.

Quand Vortex Noir, entraîné par sa folie meurtrière, le sourire aux lèvres, se mit à pourchasser le fier guerrier ennemi, les guerriers de son Clan le rappelable et il revint à lui, s'arrêtant d'un coup.

Les yeux injectés de sang, il émit un petit désolé assez sec, que son lieutenant prit mal.

- Assez de pertes comme ça, Vortex Noir ! Nous les laissons s'enfuir.

Et les guerriers, fatigués, se mirent à panser leurs blessures et honorer leurs morts... Parmi lesquels figurait la jeune Portail de Flammes.