La forêt de Mina

Chapitre 3 | T'as merdé maman

  - Maman ?

Je m'inquiète, depuis que je me suis réveillée ma mère n'a donné aucuns signes de vie.

  - Maman ?

Je descends nos petits escaliers en bois grinçant et parcours le séjour du regard. Des papiers sont éparpillés sur la table à manger et un stylo est tombé. Je me rapproche et jète un bref coup d'œil. Ce sont des factures. Eau, électricité, chauffage, elles sont toutes accumulées ici, sur la table. Un verre d'eau est renversé et est venu mouillé la paperasse, faisant baver l'encre noir.

  - Maman ?

Je tente de la rappeler une nouvelle fois mais c'est encore sans réponse. Je décide de m'aventurer dans le salon mais lorsque j'aperçois la porte de la salle de bain entrouverte et la lumière allumée, je m'y précipite.

  - Maman !

Ma mère est allongée sur le sol, une boîte de médicament dans la main. Je me jette à ses côtés et attrape ses épaules avant de la secouer de tout sens.

  - Maman ! Maman réveille toi !

Mais elle reste immobile, les paupières closes, on pourrait presque croire qu'elle dort. Je la relâche et me couche contre son pauvre corps. Les larmes roulent sur mes joues et décident de ne plus jamais s'arrêter. Je suis brisée, anéantie. Elle était tout ce qu'il me restait, comment suis-je supposée y arriver ? Je n'y arriverais jamais. Qui me donnera l'argent pour aller chercher le pain le matin ? Qui me graissera mon vélo après l'avoir trop utilisé ? Qui viendra me crier de me réveiller et me supplier de me lever ? Comment vais-je faire pour l'oublier ?

  - Tu n'avais pas le droit de me laisser maman... Pas là, pas maintenant... Reviens moi s'il te plaît...

  - C'est fini Mina, elle ne reviendra pas.

Je me retourne subitement, un homme se tient derrière moi. Il a le crâne rasé et de magnifiques yeux bleus. Sa veste en cuir semble coûter une fortune et ses chaussures cirés paraissent neuves, trop neuves.

  - Vous êtes qui vous ?

Il s'accroupi à ma hauteur et vient doucement caresser ma joue.

  - Il est temps qu'on ai une discussion toi et moi.

Il se lève mais voyant que je ne bouge pas, il attrape mon bras.

  - Mina, le samu va arriver d'une minute à l'autre, dépêches toi

Je me lève et décide de le suivre, il rabat son bonnet noir sur son crâne le temps que nous traversions la route et me fait monter dans une grosse voiture, noire elle aussi.Une fois à l'intérieur, je sèche mes larmes et réalise l'ampleur de la situation.

  - Vous êtes qui bon sang ? Et pourquoi je vous ai suivi ! Faites moi sortir ! Je veux retourner auprès de ma mère !

  - Calmes toi Mina ! D'abord on bouge d'ici, ensuite je t'expliquerais tout c'est promis

Il verrouille les portes et s'empresse de partir du petit parking. Il s'assure qu'aucune voiture ne le suit puis accélère l'allure.

  - Bon vous m'expliquez maintenant ?

  - Tu peux me tutoyer Mina

  - Comment vous connaissez mon nom déjà ?

Il soupire et passe sa main sur son crâne.

  - Écoutes Mina, ta mère et moi on se connaissait... On se connaissait très bien même

  - Connaît. Vous vous connaissez.

Il ne relève pas ma réflexion et continu son histoire.

  - On a eu, dans nos plus jeunes années une belle relation. On s'aimait beaucoup... Mais ses parents eux, ne m'aimaient pas vraiment, ils me détestaient même. Ils disaient que j'influençais ta mère et que je l'incitais à faire de mauvaises choses alors que pas du tout... On a finit par se voir en secret. Puis un jour elle est tombée enceinte... Elle était si jeune, si belle... Mais je n'ai pas assumé. Ma vie était trop compliquée et je n'avais pas envie d'assumer une responsabilité de père et peut-être même de mettre la vie de mon enfant en danger. Ta mère l'a très mal prit et a décider de couper tout contact avec moi... Elle ne m'a rappelé que l'année dernière alors qu'elle venait d'apprendre qu'elle était atteinte d'un problème de cœur qui l'obligeait à prendre des médicaments qui coûtaient très cher... Elle avait du mal à finir ses fins de mois et m'avait fait promettre que s'il lui arrivait quoi que ce soit, je devrais prendre soin de toi. Elle a tenté de m'appeler toute à l'heure alors qu'elle a eu une forte douleur dans la poitrine. Elle n'a pas eu le temps de dire quoi que ce soit qu'elle est morte d'une crise cardiaque... J'ai tout de suite compris et j'ai foncé aussi vite que j'ai pu pour venir te chercher avant qu'ils ne s'occupent de toi Mina... Je suis désolé d'avoir été un si mauvais père, je me rattraperais je te le promets...

Les larmes sont si nombreuses sur mes roses joues que ma vue se brouille. Ma mère est morte, mon père revient dans ma vie comme une fleur et j'apprends que ma propre mère m'a caché ses problèmes de cœur. Je suis sure que si elle avait pu se justifier elle m'aurait dit :    « C'était pour ton bien Mina. Je n'avais pas envie de t'embêter avec mes histoires de cœur. Tu as déjà tellement de soucis... »    Sauf que j'aurais aimé être au courant. J'aurais aimé pouvoir me préparer à un possible abandon.       T'as merdé maman...