Questions sans réponses
L'un d'eux descendit de cheval et s'approcha prudemment de la bête.
Tout à coup, une vive lumière blanche jaillit de la Fille Gelée ainsi que du dragon. Aïkida hurla de douleur alors qu'elle eut l'impression que des centaines de couteaux lacéraient son dos avec violence. Ses yeux la brûlèrent violemment tandis que ses veines s'enflammaient de douleur. La créature légendaire rugissait, elle aussi en proie à de terribles souffrances alors que ses écailles se redressaient, menaçantes.
La lumière disparut brusquement alors que la vision d'Aïkida devenait floue à une vitesse inquiétante. Son cœur battait si vite qu'elle eut l'impression qu'il allait sortir de sa poitrine. Elle porta une main à sa tête, ses cheveux étaient imbibés de sang et de sueur. Le visage sale de la jeune fille était cadavérique, et ses magnifiques yeux bleus ne regardaient plus rien. Ensanglantée, Aïkida lâcha l'épée, tremblante et parcourue de violents spasmes. Elle s'effondra sur le dos du dragon.
Aïkida se réveilla dans une sombre cellule. Elle avait terriblement mal à la tête, et lorsqu'elle voulut se masser le crâne, la jeune fille sentit des morceaux de tissus sur sa peau. On lui avait fait des pansements. Fronçant les sourcils et s'habituant peu à peu à l'obscurité, la Fille Gelée se redressa péniblement.
Elle était assise sur une sorte de banc en bois usé qui faisait office de lit. La pièce était humide et la seule ouverture était un petit trou dans le mur qui ne dégageait presque pas de lumière. Sa cellule était vide. Les murs en pierre grise donnaient un caractère froid et inquiétant à cette pièce silencieuse.
Soudain, elle entendit des voix et des bruits de pas qui se rapprochaient. Tous ses sens en alerte, elle voulut prendre son bâton de combat, mais il n'était plus dans son dos. Paniquée, elle comprit que ses armes lui avaient été retirées.
Un tintement de clés retentit et la porte s'ouvrit après un lourd cliquetis. Deux gardes surgirent en face de la jeune fille et lui agrippèrent violemment les bras. Aïkida tenta de se dégager mais comprit que c'était inutile et se laissa emmener à travers de sombres couloirs sans dire un mot.
Ils arrivèrent devant une immense porte en bois très riche. Elle était ornée de dorures et de bas-reliefs habilement sculptés, représentants des dragons ainsi que des hommes. Le garde qui était posté devant la porte ouvrit le lourd panneau de bois à l'aide d'un de ses compagnons et les salua.
Ils entrèrent dans une immense salle recouverte de tapisseries tandis que le sol était habillé d'un sublime tapis rouge flamboyant. Chaque tapisserie racontait une histoire différente et la Fille Gelée constata la richesse du tissu, et malgré sa situation, elle ne put s'empêcher d'admirer la décoration, des étoiles plein les yeux. Elle n'avait pas l'habitude d'une telle richesse, elle qui vivait dans une petite maison de bois qui menaçait de s'effondrer à tout moment.
Au centre de la pièce, se trouvait une grande table sur laquelle étaient penchés trois hommes. Une carte était dépliée et ils étaient en train de discuter quand la jeune fille et les gardes firent irruption.
Les trois hommes se retournèrent et Aïkida en reconnu deux d'entre eux. Ils avaient fait partie des six soldats qui étaient arrivés juste avant qu'elle ne blesse le dragon. C'était les deux qui n'avaient pas porté d'armure.
Ils étaient vêtus d'une tunique vert kaki avec une épée à leur ceinture, mettant leur carrure en avant. Les bras dénudés, la Fille Gelée apprécia leurs muscles saillants tandis que leurs épaules carrées étaient impressionnantes. Celui de gauche était blond aux yeux clairs. Ses cheveux courts dévoilaient sa nuque et mettaient en valeur son teint légèrement bronzé. Svelte, élancé et assez grand, le jeune homme sourit poliment à la jeune fille, dévoilant une dentition superbement blanche.
Celui de droite était légèrement plus viril. Ses cheveux longs et brun clair dévoilaient à peine ses yeux vert émeraude tandis qu'une fine barbe de trois jours recouvrait sa mâchoire saillante. Il fixait la jeune fille avec attention, le regard autoritaire, et avait croisé ses bras.
Aïkida dût se retenir pour ne pas ouvrir grand la bouche devant ces deux hommes dignes de légendes. Se rappelant qu'elle était certainement prisonnière et que ses « hôtes » ne devaient pas être très sympathiques, bien que le jeune blond lui ait adressé un sourire, la jeune fille soutint le regard perçant du jeune brun en lui faisant comprendre qu'elle ne se laisserait pas faire.
L'homme qui se positionnait au milieu était plus âgé et dégageait une prestance royale. Ses cheveux, poivre et sel, ainsi que sa courte barbe, lui donnaient un air sévère mais pas mauvais. Sa tunique à lui, était rouge. Il était un légèrement plus enrobé que les deux jeunes hommes à ses côtés et ne semblait pas en éprouver le moindre complexe. Mais la Fille Gelée n'était pas dupe, elle se doutait que sous cette apparence de vieil homme sévère, se cachait un homme bon et vaillant. Ses yeux marrons fixaient Aïkida avec curiosité tandis qu'il rajustait son léger manteau noir sur lequel la jeune fille avait aperçu une sorte de broche rouge.
Le vieil homme s'avança vers la jeune fille et ordonna aux gardes de la relâcher. Celle-ci protesta aussitôt :
— Qui que vous soyez, ce n'est pas une façon de traiter les femmes ! Je
n'ai rien fait de mal, qu'est-ce que vous me voulez ?
Les yeux du vieil homme se mirent à briller d'amusement et il répliqua :
— Excusez-nous pour cet accueil peu chaleureux, mais voyez-vous, nous ne faisons confiance à personne. Encore moins aux femmes.
Le brun s'esclaffa et approuva d'un signe de tête, hilare. Aïkida s'apprêtait à répliquer mais le vieil homme la coupa de court :
— Trêve de plaisanterie. Quel est votre nom ?
La jeune fille se massa les bras, engourdis par la poigne de fer des deux gardes, et répondit :
— Aïkida.
Le jeune homme aux cheveux longs ajouta d'une voix autoritaire :
— Ton nom complet.
Aïkida le foudroya du regard et répliqua sèchement :
— Il ne me semble pas vous avoir autorisé à me tutoyer.
— Je ne vouvoie que les personnes qui en valent la peine, rétorqua violemment le brun.
— Dans ce cas, tu n'y verras pas d'inconvénient à ce que je te tutoie à mon tour ?
Le jeune homme allait répliquer une phrase cinglante quand le vieil homme s'interposa :
— Ça suffit ! Tarek tais-toi ! Et Aïkida je veux connaître ton nom complet !
La Fille Gelée se fit violence pour ne pas répondre violemment et ne releva pas ce nouveau tutoiement de la part de son interlocuteur.
— Je m'appelle Aïkida Ar-Feiniel.
Tous se turent en entendant cette nouvelle. Après un silence pesant, le vieil homme s'avança vers la jeune fille, lui sourit et lui tendit la main.
— Je suis heureux de rencontrer la fille de Lomiòn.
Ce fût au tour de la Fille Gelée d'être surprise. Elle serra néanmoins la main qu'il lui tendait mais demanda, intriguée :
— Vous connaissiez mon père ?
Le vieil homme sourit de plus bel et s'apprêtait à répondre quand on le prit de court :
— C'était l'un de nos plus valeureux guerriers, expliqua le jeune blond en souriant, laissant transparaître un profond regret dans sa voix. Je suis enchanté de connaître sa fille.
Aïkida regardait les trois hommes postés devant elle, complètement perdue. Guerrier ? Le vieil homme vola à son secours en ajoutant :
— Mais nous parlerons de tout ça une autre fois.
Son ton se fit plus grave :
— Pour l'instant, il faut que tu nous expliques. Que sais-tu des dragons ?
La jeune fille ne répondit pas à sa question, reprenant contenance, et annonça sèchement :
— Je veux d'abord savoir où je suis, qui vous êtes, pourquoi je suis ici et pourquoi je suis traitée comme un dangereux spécimen.
— Répond d'abord à ma question Aïkida, je répondrais aux tiennes après.
— Je ne vous direz rien tant que je n'aurais pas de réponses.
Elle joignit le geste à la parole et croisa les bras, le regard sévère. Le vieil homme soupira et répondit, à regret :
— Je suis Nàmo, le Haut-Dragonnier. Voici Leeroy, dit-il en montrant le blond. Et voici Tarek, en désignant le brun.
— Enchantée Nàmo, mais j'ai le regret de vous annoncer qu'il manque les trois quarts des réponses.
Le Haut-Dragonnier soupira d'agacement en marmonnant dans sa barbe :
— J'ose espérer que tu n'as pas le même caractère que ton père.
Tarek regarda la jeune fille, un rictus aux lèvres, et ajouta :
— Je mettrais ma main au feu qu'elle est pire que lui.
Aïkida tourna la tête vers lui, le regard noir, et le prévint d'une voix tremblante de rage :
— Je ne t'autorise pas à parler de mon père sur ce ton. Ni à m'insulter sans même me connaître. Est-ce que c'est clair ?
Le rictus de Tarek s'étira en un rire forcé.
— Sinon quoi ? Tu vas me tirer les cheveux ? s'esclaffa-t-il.
— Tu serais étonné de voir ce que je peux faire, répliqua Aïkida en s'avançant vers lui, menaçante.
Nàmo intervint une deuxième fois, exaspéré :
— Ça suffit maintenant ! Puisqu'on ne peut pas parler sérieusement, réglez ça une bonne fois pour toute sur le stadium ! Nous reprendrons cette discussion après ! Disposez !
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