Dans la voiture qui la conduisait vers son destin, Alizée stressait. Les mystérieux agresseurs n'avaient pas semblé avoir l'intention de partir. Ils lui avaient paru au contraire prêts à attendre qu'elle revienne, et à attendre plusieurs jours si c'était nécessaire. Et au vu de la tête de leur chef, les hommes qui protestaient n'allaient pas faire long feu. Ce chef la terrifiait. Il semblait impitoyable et n'allait sûrement pas être tendre vu qu'elle s'était enfuie sous son nez. Alors Alizée avait peur. Pour sa famille. Et pour elle.

Elle n'avait aucune idée d'où ces étranges personnages venaient, ni de leurs objectifs, mais ils étaient dangereux. Indéniablement. Et ils savaient où elle habitait, comment elle s'appelait, qu'elle était seule dans la maison, et que ses parents et son frère étaient partis et ne pourraient pas lui porter secours. Ils avaient sûrement espionné sa famille pour savoir tout ça. Formidable. Elle se retrouvait avec des ennemis qui ne lésinaient pas sur les moyens.

Alizée posa sa tête sur le rebord de la vitre de la voiture. Cela faisait vingt minutes qu'elle avait quitté la ville, et la SUV était au tiers de son ascension dans les montagnes bernoises. Le paysage qui défilait, alternance entre les parois rocheuses et la vue sur la forêt en contrebas et parfois sur la ville au loin, selon les virages, ne parvenait pas à la plonger dans cet état de calme qui l'envahissait habituellement au contact de ces grand arbres dressés, de ce paysage escarpé et de ces reliefs déchiquetés. En temps normal, durant leur élévation progressive à flanc de falaise, Alizée se rendait compte de la petitesse de l'être humain face à la nature. Elle éprouvait alors un puissant sentiment de respect et d'admiration pour la nature qui l'entourait. Mais pas aujourd'hui. La jeune fille soupira discrètement et jeta un œil du côté de son frère, assis comme elle près de la fenêtre. Le garçon était quant à lui absorbé par la contemplation du paysage qui s'offrait à lui. Pauvre Tom ! Alizée ne voulait en aucun cas le mêler à toutes ces histoires. Il était tellement jeune et innocent ! Elle profita du fait que celui-ci ne la regardait pas pour le détailler du coin de l'œil. Son visage irradiait la jeunesse, la gentillesse et la joie de vivre. Ses cheveux bruns légèrement bouclés lui retombaient sur le front et étaient éclairés par le soleil du matin. De là où elle était, elle ne pouvait apercevoir ses yeux bleus, mais elle les savait remplis de joie et d'énergie. Non, en tant que sa grande sœur, elle devait le protéger et faire en sorte qu'il ne soit pas en danger, et pour cela, les hommes en noir devaient s'être éloignés.

Plus elle s'approchait de la maison, plus le nœud dans son ventre grossissait. Elle avait presque envie d'arriver immédiatement pour mettre fin à ce calvaire. De toutes façons, les résolutions de cette histoire étaient, au pire, sa capture et celle de sa famille, ou peut être même pis, et au mieux la perte de la confiance de ses parents quand ils comprendront, s'il ne l'avaient pas déjà réalisé, qu'elle leur avait menti pour une raison inconnue. Elle avait beau prier pour que ça se finisse bien pour tout le monde, c'était très peu probable. Cependant, la situation allait être bien différente de ce qu'elle pensait. Finalement, au détour d'un tournant, le chemin menant au garage apparut. Alizée ouvrit la bouche. Elle allait dire la vérité, pas question de retourner dans la maison avec les hommes en noir à l'intérieur. Mais le STOP retentissant qu'elle allait hurler mourut dans sa gorge. On voyait des flammèches s'échapper du salon.