Chapitre 69 : Vengeance
Une fois Carène de retour dans la chambre des filles, Grace avait cessé de rendre des visites nocturnes à son père. Mais ce n'est pas pour autant que ses crises s'étaient arrêtées. Law le remarqua à la fatigue de Carène. Elle était généralement très énergique en matinée et plus réactive lors des entraînements qu'il continuait à lui faire subir.
Après lui avoir collé son sabre sous la gorge, il l'avait questionné.
- Qu'est-ce qui t'arrive en ce moment, Carène ? Tu es sans arrêt distraite.
Elle détourna le regard, consciente de ne pas être au mieux de sa forme et ainsi représenter un danger pour ses camarades. Elle finit par lever les yeux vers Grace, faisant des tractions, assurément son activité préférée après la gymnastique et la lecture.
Law avait suivi son regard et s'était mis à son niveau.
- Explique-moi ce qu'il lui arrive.
- Elle se réveille en pleine nuit et essaye de sortir, mais je me réveil avant qu'elle sorte.
- Tu comptais me le dire quand ?
Elle ne sut que répondre et il soupira. Il savait qu'elle n'avait pas de mauvaises intentions, mais cacher des choses sur l'état de santé de son amie n'allait pas l'aider. D'autant qu'il était de plus en plus visible que, malgré ses efforts et son repos, sa fille restait fatiguée, nerveuse et par moment craintive. Il ne l'avait jamais connu très émotive, or il lui arrivait de plus en plus régulièrement d'être au bord des larmes pour un rien ou d'aller se cacher sans réel raison.
- Tu as remarqué des choses particulières avec ces levés nocturnes ?
- C'est toujours à la même heure, assura la sabreuse en s'asseyant en tailleur pour réfléchir. Et ses gestes c'est tout le temps les mêmes. Quand je lui dis de se recoucher, elle retourne au lit systématiquement... comme si... comme si...
- Comme si elle ne contrôlait pas ce qu'elle faisait ?
- Oui. Vous pensez que ça a à voir avec son temps en captivité ?
- C'est fort probable. Il doit y avoir des choses coincées dans son subconscient. Peut-être des choses que son cerveau à préférer dissimuler pour son bien mental.
- Comment est-ce que je peux l'aider ? J'ai l'impression de ne servir à rien...
- Détrompe-toi, tu es un grand soutien pour elle. Sans toi, elle se serait peut-être déjà effondrée.
Il observa sa fille quelques minutes avant de rajouter que, dès qu'elle le pourrait, elle devait reprendre la gymnastique.
***
Presque trois mois maintenant que Grace avait été sortie de l'orphelinat, trois mois que son état mental ne semblait faire qu'empirer. Une situation qui ne pouvait plus durer aux yeux de Law. Son contacte sur l'île médicale ne se manifestait plus, aucunes informations sur la captive et les deux femmes en fuite et cette carte de vie qu'il suivait et qui ne semblait mener nulle part... Tout ça réuni le mettait de mauvaise humeur et voir Grace aller mal le rendait nerveux.
Autant dire que tout chasseur de prime, autres pirates et marins qui avaient essayé de les attaquer s'en était mordu les doigts. Ses hommes non plus n'avaient pas été épargnés. Certains avaient vu d'un bon œil la prime de Grace et avaient voulu fêter l'évènement. Grossière erreur qui en avait mené plus d'un dans le labo.
Et les voilà maintenant sur une énième île bouffée par la pauvreté, la maladie et l'insalubrité. Si cette fichue carte de vie ne pouvait pas lui apporter une éventuelle solution à ses problèmes, il l'aurait déjà jeté. Il pestait et pestait encore. Plus les gens semblaient miséreux, plus sa fille semblait aller mal. C'était invraisemblable. Mais cette fois, fut bien pire que les autres. Comme si il avait besoin de ça !
Son groupe, comprenant sa fille pour une question évidente de protection, allait de magasin en magasin à la recherche de nourriture, de pièces de machinerie et d'information sur la fichue carte qu'il suivait. Dans ce trou à rat, impossible de trouver quoi que ce soit ! Il était prêt à repartir, prendre la direction d'une nouvelle île au risque de carence alimentaires, lorsque Grace percuta un personnage couvert d'une cape. Elle allait s'excuser, alors qu'elle n'était pas fautive, lorsque la femme cachée sous le vêtement sale, s'était énervé, insultant la gamine de tous les noms.
Le sang de l'ancienne captive n'avait fait qu'un tour en reconnaissant cette voix. Incapable de faire le moindre geste, Carène l'avait passé dans son dos tandis que Law sortait son sabre, le regard noir.
- Alors c'est là que tu te planquais, tête de piaf, avait grondé le chirurgien de la mort.
La harpie avait à peine réalisé son erreur, que le nodachi s'abattait sur elle. Se protégeant au dernier moment, elle avait évité la faucheuse et prit la fuite. En un temps record, Law l'avait rattrapée et lui avait fait passer l'envie de torturer des enfants et de lui enfoncer des plumes dans les membres.
Toutefois, puisqu'il avait besoin d'information sur les pouvoirs de Veia et ce qu'il s'était passé dans l'orphelinat, Law la garda en vie.
***
Tout l'équipage et leur captive, sonnée, saignée et enchaînée, s'étaient regroupés au pied d'une montagne escarpée. Derrière elle, mouillait le sous-marin, devant elle, quelques arbres servaient de frontière avec la ville la plus peuplée qu'ils venaient de quitter.
Elle avait hurlé. Pour le plus grand plaisir des oreilles et du sadisme du chirurgien de la mort, elle avait hurlé lorsqu'il avait planté une lame dans ses mains jointes pour la maintenir à un arbre. Elle l'avait fusillé du regard après en grognant et se mordant la lèvre au sang pour ne plus lui procurer le plaisir d'entendre sa voix.
- Alors ? Agréable pas vrai ?
Son expression était celle d'un dément prenant sa revanche sur celle qui prenait son gouter à une époque lointaine. Sauf que cette revanche concernait un passé proche et qu'il ne faisait que lui retourner la pareil, exhibant le plaisir qu'il prenait à la faire souffrir à quelques centimètres seulement de son visage.
Aucun de ses hommes ne le dérangea durant la séance punitive qu'il menait avec Célaéno depuis une bonne heure maintenant, depuis qu'elle était réveillée en somme. Même Carène se tenait tranquille et se contentait d'observer ce qu'il faisait sans dire un mot. Grace restait en retrait derrière elle, les yeux tout aussi fixés sur la scène. Les autres s'étaient occupés de faire du feu, de chercher de la nourriture et de faire des tours de garde. Même si ils étaient sur une île pauvre où la vendetta devait être monnaie courante, il n'était jamais trop prudent de surveiller les alentours, histoire que personne ne vienne déranger leur capitaine.
Accroupis devant la harpie, le visage barré par un mauvais sourire, il se délectait de lui faire du mal. Il ne lui avait encore rien demandé, ce qu'il faisait là n'était que vengeance et cruauté. La position dans laquelle il se trouvait aurait pu lui porter préjudice, si il n'avait pas réduit ses deux genoux à l'état de bouillie à peine maintenu à l'intérieur de son corps par sa peau transpercée d'os par endroit. Après lui avoir donné quelques coups au visage, elle avait essayé de répliquer sans succès à cause des menottes en granite marin qu'elle avait aux poignets, objet fort pratique piqué à des marines. Il lui avait écrasé le dos du pied manquant de briser sa colonne vertébrale. A défaut, il avait eu certaines de ses côtes.
Maintenant qu'il la tenait assez droite grâce au poignard, elle lui cracha du sang au visage dans une attitude toujours provocante, accompagnée d'un regard noir. Il avait répliqué par un coup de pied puissant juste sous la cage thoracique, la faisant cracher du sang en provenance cette fois de ses organes internes.
*
- Elle me ferait presque de la peine, commenta Carène en s'étirant.
- Pas à moi.
- J'ai dit presque, rappela-t-elle à sa meilleure amie en faisant la moue. Je m'ennuie... Y a rien à faire dans ce trou pommé...
- Va faire un tour alors.
Elle cligna des yeux et observa Grace. Elle avait les yeux rivés sur le travail de son père et n'en perdait pas une miette. Elle l'avait déjà vu en colère contre lui, s'amuser à torturer des marins et d'autres pirates pour différentes raisons. Mais, de mémoire, c'était la première fois qu'elle le voyait autant s'acharner sur quelqu'un. Voir la tête de piaf, comme l'appelait en cachette les enfants les moins touchés par l'hypnose, se faire tabasser à en crever ne lui faisait ni chaud, ni froid. Voir son père faire preuve de tant de violence, ne l'affectait pas non plus.
- Tu as l'air captivée et ennuyé à la fois. Comment tu fais ça ?
Carène avait décidé de rester au moins quelques minutes de plus, cherchant à savoir ce qu'attendait Grace à observer une de ses tortionnaires se faire torturer.
- Tu attends quoi de tout ça ?
- Je veux savoir ce qu'il s'est passé. Pourquoi je me lève encore la nuit sans m'en rappeler le lendemain. Je suis tout le temps fatiguée et à cran... j'en ai marre. Il peut continuer à la tabasser autant qu'il veut, je m'en cogne. Mais je veux qu'elle finisse par dire ce que Veia faisait aux enfants comme moi.
- Et tu penses que le capitaine va lui poser la question à un moment ?
Elle hocha la tête après quelques secondes.
Jugeant qu'il était préférable de ne pas la laisser seul devant le spectacle qu'offrait leur capitaine quelques mètres plus loin et près de révélations assurément peu réjouissantes, la sabreuse choisit de rester. Reprenant le silence, elle fit juste passée Grace sur ses jambes. Elle avait toujours une taille de naine face à elle, ainsi assise sur elle, elle donnait l'impression d'être une petite sœur sur les genoux de son aînée. C'était étrange à voir pour leurs camarades, sachant que Grace avait la maturité d'une adulte et Carène plus souvent celle d'une gamine.
*
Law releva le visage de Célaéno en la serrant fort au cou.
- Bien réveillé maintenant ? demanda-t-il avec sarcasme.
- J'étais réveillée au premier coup, grand con !
- C'était pour être sûre.
Elle commença à suffoquer sous la pression qu'il exerçait.
- Maintenant que je t'ai rendu la monnaie de ta pièce, on va pouvoir parler de choses plus sérieuses.
- Reste donc dans ton ignorance, pauvre tache. Je dirais rien quelque soit le sujet et la raison. Va crever... heu !
Il avait desserré sa prise, le temps qu'elle reprenne son souffle. Puisqu'elle n'était toujours pas coopérative, il la bastonna encore un peu.
- Je dirais qu'il te reste... quatre heures avant de te vider de ton sang de l'intérieur et d'éventuellement te noyer dedans par la même manière.
Elle cracha encore une gerbe rouge, accentuant ses dires.
- Et alors ? Tu vas me sauver la vie si je collaborer ? Me prend pas pour une conne ! La seule chose que tu veux c'est me buter lentement et douloureusement ! J'en sais quelque chose ! Quand on a ce regard, on veut du sang et toujours plus de sang sans personne pour nous arrêter !
Il lui caressa le haut de la tête avec un faux sourire, l'inondant de toute sa condescendance.
- Mais non enfin. Si au bout de quatre heures tu n'as pas parlé, je se soignerais, pour te torturer encore plus lentement et douloureusement qu'avant, ça dans un cycle sans fin, jusqu'à ce que tu me dises enfin ce que je veux.
Même quand il l'avait roué de coup, elle ne lui avait pas rendu de regard aussi noir.
- J'aurais ta peau espèce de fils de pute ! hurla-t-elle en se dégageant de sa main.
Elle tenta de le mordre mais n'obtint qu'un coup de pied en pleine mâchoire.
- Laisse ma mère – qu'elle repose en paix – en dehors de notre petite discussion, tu veux. Oh, mais avec les mandibules inférieures dans cet état tu n'es pas près de dire quoi que ce soit.
Pour remédier au problème, il la lui replaça, suscitant de nouveaux cris.
- Bien, tu peux reparler, non sans douleur, mais tu peux. Maintenant je vais te poser mes questions et tu vas y répondre. Si tu ne réponds pas dans les dix secondes, je plante mon sabre dans un de tes membres. Si tu mens, j'en fait de même et si tu recommences à déblatérer des conneries ou des menaces je te sors le cœur pour le presser de toute la force de mon poing. Tu en dis quoi ? Ça peut être marrant comme jeu.
Elle sembla vouloir répliquer par une remarque des plus venimeuse mais ne parvint pas à ouvrir la bouche. Puisqu'elle ne répondit pas, il planta sa lame dans l'une des cuisses de sa victime. Elle serra les dents, étouffant un double cri de douleur.
- Mauvaise réponse. Essaye encore.
Elle articula difficilement et douloureusement qu'elle n'avait de toute façon pas le choix. Pour la première fois depuis qu'il la torturait, il lui donna raison.
- Bien. Je ne vais plus tourner autour du pot. Commence par me dire ce que vous faisiez dans cet orphelinat. Absolument tout ce que vous faisiez, dans le détail.
Il dû la saigner quelques fois avec son sabre avant qu'elle ne se décide enfin à parler. A chaque fois il avait rajouté d'autre demandes. Comme est-ce qu'elles avaient réussi à démarrer leur business ? Qui était leurs plus gros clients ? Etcétéra, etcétéra.
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