Sur un lit de dollars.
Je suis passée de salle en salle. Rien ne me convient. Ici, tout rappelle la luxure, le sexe et mon Russe. Au final, je pousse une porte au hasard.
La décoration est décadente, un lit rond, des draps de satin, des instruments qui hésitent entre le bondage et la torture. Une croix de Saint André. Des cordes et des menottes pendent à un mur.
Je m'en fous, je m'écroule sur le matelas et me recroqueville. Les bras sur le visage, je souffle pour me reprendre.
Je ne veux penser à rien. Je reste là, dans la pénombre bienfaisante et le calme relatif de cette chambre.
Le temps passe, je n'écoute que le bruit de mon pouls qui résonne dans mes oreilles. Mes paupières se ferment et je flotte entre la veille et un demi-sommeil.
Je revois des images de ces quelques jours. Cela ne fait que trois jours. Trois nuits de hauts et de bas. De frayeur et de plaisir.
Je me revois à genoux devant lui. Lui, au-dessus de moi. Lui contre moi. Parfois dans le noir, parfois à contre-jour.
Je me souviens de ses paroles, de ses gestes et de ses caresses. Comment croire ce qu'il vient de dire, le pense-t-il vraiment ? Ou, n'a-t-il fait qu'agiter un chiffon rouge devant les yeux d'Élias pour le faire réagir. Qu'il s'énerve et revienne.
Que j'aie été témoin de ses paroles ne veut pas dire qu'il faut que j'y croie. Ce Russe est malin. On ne reste pas à sa place, en position dominante dans un monde dangereux tel que le sien sans être rusé et intelligent, sans scrupules aussi. C'est douloureux même si je comprends ses raisons de sa stratégie.
Une main se promène sur ma peau. Un souffle léger court le long de ma nuque. Je l'ai entendu entrer dans la pièce mais je l'ai ignoré. Je veux connaitre ses futures actions. Je veux savoir s'il souhaite se faire pardonner ou s'il a encore une exigence qui lui permettra de se sortir de cette situation. Je garde les paupières closes et tente de respirer de façon régulière.
Il s'est agenouillé à côté du lit.
Je ne peux pas voir son visage pour surveiller ses expressions. Par contre, je l'entends soupirer.
— Je sais que tu es éveillée, me dit-il avec son accent rugueux.
Mes épaules se raidissent. Je me tends, les muscles douloureux.
— Ce que tu as surpris, quand tu m'as espionné, reprend-il, n'était pas ce que je pensais. Juste une manière de mettre en rage ton frère, pour le pousser à réagir. Je ne te considère pas comme une souka. Tu es forte et honnête dans ta vie. Tu sais ce que tu veux et ce qui te fout en colère. Je ne veux pas que tu croies ce que tu m'as entendu dire. Ce n'était que mensonges.
Mon silence perdure. Je le laisse parler. Il n'a qu'à m'expliquer ses agissements. Plus il le fera, plus il sera en position de faiblesse et je pourrais alors me venger. Et frapper là où ça fait mal.
— Réponds-moi, tu dois admettre que ce que je disais ne t'était pas destiné... Je mens souvent, c'est préférable à tuer et torturer, non ? Tromper, duper, trahir, c'est mon quotidien. Putain, mais dis quelque chose ! Tu es aussi en tort que moi de toute façon, si tu ne m'avais pas épié, s'énerve-t-il en me secouant l'épaule.
Je bondis et me retourne à genoux, face à lui. Je le menace d'un doigt.
Oui, ce n'est pas grand-chose mais j'accompagne ce geste d'un regard meurtrier.
— De un, je t'arrête tout de suite, je ne t'espionnais pas. C'est un pur hasard si je t'ai entendu. Tu avais laissé cette porte ouverte. Tu n'es pas vite gêné de m'accuser. Tu te permets de parler de moi, à MON frère qui plus est, d'une façon qui devrait te faire honte. Je pensais qu'on était dans un début de relation. Mais là, tu as perdu toute la confiance que je pouvais avoir en toi.
— ..., je le coupe avant qu'il ne puisse dire quelque chose pour sa défense.
— Non, ne m'interromps pas ! De deux, je suis venue pour te rendre l'argent que JE te devais, selon toi. Toute la dette payée, nous aurions pu repartir sur une bonne base. TON foutu fric. TON argent maudit.
Pour me stopper dans ma tirade, mon Russe m'attrape les épaules et me secoue. Il se redresse de toute sa hauteur et me surplombe. Il veut m'intimider.
Je crochète ses poignets de mes mains et le force à me lâcher. Petite victoire, il aurait pu sans mal me maintenir. Je comprends qu'il se laisse faire pour ne pas me meurtrir. Il pense à protéger mon corps mais pas mon cœur. Homme stupide !
— Cet argent n'est rien pour moi, m'avoue-t-il. Il faut que je sauve la face. Si tu le veux, je te le laisse. Tu peux le prendre.
— Je ne suis pas comme ça. Je ne veux rien de toi.
— J'ai bien compris que tu ne veux rien, tu me méprises. Mais cet argent provient de tes efforts. Tu l'as mérité.
— Je NE suis pas une PUTE, je te l'ai déjà dit. Rien à foutre de l'avoir mérité. Ce que tu viens de dire me prouve ton manque de respect. Ta vie est sordide, si tu crois que je serais heureuse d'être rémunérée une fortune pour être avec toi.
Je crache ces mots pour le blesser, lui faire mal autant que j'ai souffert il y a quelques heures et maintenant, quand il ose sortir des insanités pareilles.
Il se recule, blanc comme un linge. Son visage devient d'un seul coup stoïque, sans émotions apparentes. Il se penche et ramasse le sac de sport. Il l'ouvre en grand, le retourne et déverse le contenu sur le lit.
Les billets non attachés s'envolent et tombent comme des feuilles en automne. Il y en a partout. L'image est impressionnante, même pour une fille qui vient de dire qu'elle se fout d'être riche.
— Tu es sûre de ne pas vouloir de ça ? Que penses-tu en les voyant ? Tu ne veux pas être avec moi, même si je te paie ? Rage-t-il en les remuant et les rejetant en l'air.
— Mais tu es stupide ou quoi ?
Je ne devrais pas l'injurier, il est connu pour son caractère difficile. J'en suis à un point où cela m'est égal qu'il réagisse. Tant qu'il le fait.
— Je n'ai pas dit que je ne voulais pas de toi, crétin ! J'ai affirmé que je ne voulais pas être payée pour coucher. Tu es tellement égocentrique, tu n'écoutes pas mes paroles. Tu interprètes trop vite et tu te vexes.
Il se fige et ancre son regard dans le mien. Sa respiration s'approfondit. Son regard brille et déverse ses sentiments. Il me crie qu'il me veut, qu'il me désire. J'ai un mouvement de recul et perds l'équilibre. Je tombe sur ce matelas recouvert de billets verts. Ils crissent et se plient de façon désagréable dans mon dos.
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