Situation : c'est compliqué.
Helena.
Ça fait des heures que je roule et je suis crevée. Mes yeux piquent et mes paupières se ferment à une fréquence de plus en plus élevée.
Mais je veux rouler encore un peu, mettre le plus de miles entre nous. Quand le soleil sera couché, je m'arrêterai, je chercherai un motel. Au hasard, c'est mieux, plus facile pour brouiller les pistes. Nous sommes déjà loin, nous avons traversé le Wisconsin, une partie de l'Illinois, tout l'Iowa. Nous sommes passés par Des Moines pour trouver un distributeur automatique.
Je jette un œil dans le rétroviseur, il est à moitié endormi contre la portière, le visage appuyé contre la vitre. Il a presque l'air serein ainsi. Il a les yeux fermés, mais je sais, je sens qu'il somnole. Il s'est réveillé cet après-midi quand j'ai fait un arrêt pour le plein d'essence.
Je soupire. C'est dommage ce qui arrive. Quel gâchis !
Pour une fois qu'un mec qui m'intéresse n'est pas trop mal, trop mauvais et qui n'est pas impressionné par Anton.
Nous n'avions rien dit officiellement, mais Le Russe et moi c'est fini depuis Noël. Ça fait trois mois. Nous avons décidé d'un commun accord de se quitter, en amis, sans cris ni scène. De toute façon, notre relation n'était pas exclusive. Enfin, je devrai dire du côté d'Anton, car moi je n'avais aucune occasion de regarder ailleurs. Difficile d'avoir des ouvertures sachant qui était mon amant. Personne n'avait assez de "couilles" pour se mesurer au Boss.
Sauf peut-être Élias. Il avait l'air séduit. Je voyais bien sa façon de m'observer, de me suivre du regard et de me déshabiller en pensées. Mais là, je pense avoir grillé toutes mes chances, en une seule fois.
Bah oui, voler mon ex, kidnapper mon éventuel futur petit ami et lui faire porter le chapeau de l'histoire, ce n'est pas ainsi que je vais pouvoir conclure.
C'est toujours la même chose, je flashe sur quelqu'un et je me retrouve dans les merdes jusqu'au cou !
Franchement, je suis dans cette bagnole, je fuis à travers le pays et je me lamente sur mon manque de relation.
Pourquoi ? C'est la bonne question ! Qu'ai-je fait pour mériter ça ?
Je ne suis pas au bon endroit au bon moment ? Non, ça je gère.
Je cherche les problèmes ? Non, je fais de mon mieux pour être neutre, pour ne pas me mêler des affaires des autres. Je ferme les yeux et mets des œillères.
Alors pu... ! Qu'est-ce qui a foutu ma vie en l'air ?
Premièrement, je dirai ma sœur, ou ma demi-sœur, pour être précise. Elle est un aimant à galères, toujours où il y a des embrouilles.
Et en deuxième, c'est cet homme. Il a fallu qu'il se mêle de ce qui ne le regardait pas. Elias est beau, charmant et surtout il a oublié d'être con. Mais il aurait pu s'abstenir d'insister, de vouloir savoir pourquoi j'étais dans le bureau d'Anton ce matin.
Non bien entendu, demandez à un homme quelque chose et il fera le contraire ! Je suis tellement en colère avec toutes ces pensées en boucle dans mon esprit, il faut que je fasse un truc pour évacuer. Je frappe le tableau de bord avec le plat de ma main.
Aïe ! Ça fait mal...
Il est réveillé, il me regarde avec une expression horrible, un mélange de dégout, de colère et de déception.
-Arrête ! J'ai paniqué, ça va, je ne savais plus quoi faire, je lui jette ces mots au visage, et je continue sur le même ton :
-Et toi ! C'est de ta faute aussi. Pourquoi vouloir refuser à tout prix de me donner la combinaison ? sinon tu ne serais pas ici. Je t'aurai laissé dans le bureau. Ta faute !, j'insiste.
Je suis de mauvaise foi, s'il s'est obstiné à vouloir savoir ce que je faisais là, c'était pour m'aider. Si j'avais su mieux gérer la situation, pas de catastrophe à l'horizon.
Mais lui crier dessus me fait du bien. Il referme les yeux et fait mine de m'ignorer.
-C'est ça ! Fais ta tête de mule, ma journée ne peut pas être pire, je marmonne.
Il ré-ouvre les yeux et fixe son regard dans le mien via le miroir. Il me dit tout, me transmet toute sa rage. Bien sûr, c'est le bon moment pour me réjouir qu'il ne puisse pas me répondre.
Oui, avec le bâillon, c'est compliqué!
Je lui souris, soulève un sourcil de façon ironique et retourne à ma conduite.
===
Elias
Ma tête douloureuse ballotte contre la vitre. L'alternance d'ombre et de lumière sur la route m'hypnotise. Mes paupières se ferment.
Je me souviens de ce jour où je l'ai vue la première fois, comme si c'était hier.
Je reviens de la zone "Or", de petit matin, les gains de la nuit dans une valise. Je traverse l'Envie et la Luxure, quelques collègues encore là, se rhabillant, parlant de l'un ou l'autre client. Je suis pressé, mon travail ne fait que débuter, le leur est fini.
Et là, je la vois ! Habillée d'un tailleur blanc, sexy et faussement innocent. Je me fige sur place et la détaille de bas en haut. Chaussures de marque noires à talons rouges. Ne me demandez pas laquelle, je suis un homme, je m'en fous du nom tant que ça lui fait des chevilles et des jambes de déesse.
Je peux vous dire que c'est réussi. Plus je remonte, plus elle est bandante. Je sais, c'est macho et misogyne ou connard. Oui, si vous voulez, à vous de choisir. Je ne m'en cache pas.
Cette femme est parfaite, grande, blonde, des seins à se damner. Elle a des yeux vert foncé en amande et une bouche pulpeuse. Je ne suis pas un saint. Je suis tout de même le comptable d'Anton Iourenev. Je ne suis pas tout blanc, je gère son argent, ses gains et je le blanchis. Je suis resté sur place un bon moment, la suivant des yeux, ma queue au garde-à-vous, prête pour les présentations.
Une des filles en passant près de moi me dit:
-Arrête de baver Élias, c'est la femme du patron. Surtout ne t'en approches pas !
Pour une fois qu'une des filles des 7 Péchés Capitaux me plaît, il faut qu'elle soit avec le Boss. Je ne l'avais pas encore rencontrée, je ne pouvais pas savoir à quoi ressemblait Helena. Merde !
Un cahot dans la route me secoue.
Je me réveille et je me redresse avec difficulté. Ça fait un moment qu'on roule. Je regarde ma kidnappeuse. Toujours aussi belle, concentrée sur la route, elle passe une mèche de cheveux derrière son oreille et se frotte les yeux. Elle croise mon regard dans le rétroviseur.
Elle m'attire et je la hais. Par sa faute, ma vie est foutue, je suis un homme mort.
Anton a sûrement envoyé des hommes à notre poursuite. C'est une question d'heures, de jours.
Je n'ai aucune chance de m'en tirer. Ces gars-là tirent d'abord et posent les questions ensuite. Je suis mort.
Mais avant je trouverai le moyen de me venger. De lui faire payer. Je la baiserai comme elle m'a baisé.
Je veux l'embrasser, la faire gémir. Je veux la prendre et la baiser. Je la veux sous moi, sur moi. À quatre pattes, moi derrière elle, m'enfonçant au plus profond, lui tirant des cris et des frissons.
La migraine revient, je me relève et la fusille du regard.
Putain ! Le bâillon serré sur ma bouche m'empêche de lui dire ce que je pense.
La raideur dans mes épaules est un douloureux rappel de ma position: les bras en arrière, les menottes serrées au maximum sur mes poignets engourdis.
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