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Chapitre 60 : Le jugement des orphelins

Bonjour tout le monde <3

(JE SUIS IDIOTE MERCI AUX ATTENTIFS.IVES vous êtes oufs ! Que voulez-vous, c'est la chaleur qui écrase mon pauvre cerveau, heureusement que votre cerveau à vous fonctionne. Pour celle.eux qui arrive après, j'avais d'abord posté ce chapitre sur O&P. STUPIDE JE SUIS) 

Oui je suis déjà des retours. J'avais prévu que je risquais d'accélérer : mais hier j'ai réfléchi, et je n'ai pas réussi à m'arrêter sur un calendrier des posts. Dites-moi, maintenant qu'on a repris, ça vous dérange beaucoup les chapitres en semaine? Vous avez des jours moments préférentiels? Dites-moi toooout

JE SUIS DEVANT AFRIQUE DU SUD ECOSSE. Mes pauvres écossais souffrent, et je suis sûre que c'est parce qu'ils ont dû subir leur hymne sans cornemuse. Sinon je suis RAVIE de la victoire de l'équipe de France vendredi, ça m'a grandement rassuré pour la suite de la compétition (parce que clairement on a une belle marge de progression). Merci à qui m'a bien tenu compagnie !

Ensuite je vous remercie infiniment pour vos nombreuses réactions au dernier chapitre, j'ai beaucoup aimé avoir vos impressions sur cette fameuse nuit, les décisions des uns et des autres et au final j'ai eu ce que je voulais : quelque chose de gris, difficilement lisible où on comprend les uns, les autres. La situation a échappé à tout le monde avant de dégénérer ...

Et on continue pour tout doucement refermé les actes les uns après les autres. Act I : pardon ou poursuite? C'est parti !

***

Le pardon est certainement l'une des plus grandes facultés humaines et peut-être la plus audacieuse des actions, dans la mesure où elle tente l'impossible - à savoir défaire ce qui a été - et réussit à inaugurer un nouveau commencement là où tout semblait avoir pris fin.

- Hannah Arendt

***

Chapitre 60 : Le jugement des orphelins.

Vendredi 20 juin 1991

Je me sens tellement vide depuis que je suis sortie de l'infirmerie.

C'est mon constat. J'ai beaucoup pleuré, j'ai beaucoup écrit, j'ai beaucoup volé aussi. Et à la fin, que du vide. C'est paradoxal parce qu'en même temps je cogite beaucoup trop pour une personne qui est censée être vide.

- Pourquoi j'ai pris ce couteau ? Pour hurler autrement ? Pour obtenir des réponses ? Pour tous leur faire payer ? Je ne sais même plus. Je n'ai pas vraiment envie d'avoir une réponse. Heureusement que Berry est rentrée, finalement. Bon sang, heureusement ...

- Que faire, papa ? Te pardonner parce que j'ai vu l'homme sous le masque ? Alors qu'il a fallu qu'on se pousse à l'autodestruction l'un et l'autre ? Enfin, papa ... papa ...

- Comment vont Farhan et Maya ? Apaisés ou détruits par les nouvelles ? Qu'ont-ils décidé ? J'aimerai tellement être là ... mais est-ce que c'est bon ? J'ai fait ce que j'avais à faire ... maintenant, et peut-être pour la première fois, ils ont le destin entre leurs mains. Qu'ont-ils décidé ?

Ça me fait du bien de poser sur ça à l'écrit. Non, il n'y a pas à dire, la plume c'est vraiment la meilleure chose que j'ai. Mon meilleur outil, mon plus grand équilibre. Je ne suis plus sûre d'aimer grand-chose en ce moment, je suis trop épuisée ... mais j'aime ma plume.

***

Depuis qu'il était descendu du bureau de Dumbledore, Farhan était resté muré dans un silence effroyable. Pourtant, son histoire s'était transmise, de bouche à oreille, dans l'intimité de leur cercle. Son unique récit avait été murmuré à Maya. Troublée, pleurant sur son histoire enfin retracée, Maya l'avait narré à Bérénice pour l'encrer définitivement dans son identité. Pour prouver que leur plan n'avait pas été vain et que jusqu'au bout, elle avait eu raison, Bérénice avait répété les mots exacts de Maya à Joséphine. Pour compléter le cercle, Joséphine avait bravé ses anciennes horreurs pour rejoindre Charlie chez Hagrid, le visage grave. Epouvanté, Charlie l'avait écoutée en silence jusqu'au bout, sans même songer à l'interrompre. Depuis une semaine, il subissait le mutisme de Farhan dont il parvenait toujours juste à saisir les nuances. Affligé parfois, déboussolé d'autres, courroucés pour certains. Jamais silence n'avait paru plus pesant à Charlie, mais ses mots, Farhan les réservait depuis une semaine à Maya. Alors quelque part, il était soulagé d'en avoir enfin l'échos de la bouche de Joséphine.

-Tu parles d'une histoire ..., souffla Charlie, hébété. Donc ce sont tes parents qui sont responsables de tout ... ?

Joséphine pinça des lèvres et baissa les yeux sur l'herbe qu'ils foulaient depuis une demi-heure à la lisière de la forêt. L'air était doux, le soleil à peine masqué par quelques nuages épars et pourtant, tout le long de son récit, Joséphine avait eu l'air de trembler de froid.

-C'est ma mère qui a eu l'idée de les séparer, pour minimiser les chances qu'ils se retrouvent, reconstituent leur passé et demandent des comptes ... Quant à mon père ... (Elle exhala un profond soupir). Par Merlin ... au moins ça donne un éclairage ... cru sur sa personne. Il a perdu le contrôle de sa mission, les événements l'ont dépassé, ses émotions l'ont rattrapé ... et regarde le carnage que ça a été ...

-Mais il n'a rien fait ... je veux dire, ce n'est pas lui qui a tué la mère de Farhan ... il voulait les dénoncer, il a eu les bons réflexes, il s'est juste ...

-.... Laissé emporter par la peur et l'amour, et a volé douze ans de la vie de Maya et Farhan en plus de leur souvenir. Et c'est peut-être lui qui a envoyé le sort fatal à Shahrazade ... Non, je ne vais pas chercher à lui donner des excuses, Charlie. Je veux bien qu'il ait été humain dans cette affaire et qu'en un sens c'est normal qu'il ait voulu protéger l'intégrité de notre famille ... mais ... je ne pourrais jamais en vouloir à Farhan et Maya de le trainer devant les tribunaux si c'est ce qu'ils choisissent de faire.

Sa voix se fondit dans un souffle et elle riva son regard sur l'horizon. Elle était allée jusqu'à simuler une tentative de suicide pour faire craquer son père, mais malgré ses beaux discours, l'idée que Farhan traine son père devant la justice semblait la troubler. Le déchirement se lisait sur ses traits, et elle le verbalisa en lançant du bout des lèvres :

-Il t'a dit ... si c'est ce qu'il comptait faire ... ?

-Non, Jo. Ça fait une semaine qu'il ne parle pas ... peut-être que tu auras plus de chance que moi.

Un rictus amer retroussa les lèvres de Joséphine. D'une main nerveuse, elle trouva la poche de sa cape et en tira son étui argenté. Charlie retint une remarque bloquée derrière ses dents alors qu'elle en sortait une cigarette qu'elle alluma de la pointe de sa baguette.

-Ça m'étonnerait fort, répliqua-t-elle après avoir rejeté dans l'air une fumée grisâtre. La dernière chose qu'il m'a dite, c'est qu'il valait mieux que notre relation s'arrête. Depuis il a appris que mes parents, en plus d'être en partie responsable de la mort des parents et de sa sœur, ont tout fait pour que jamais il ne découvre la vérité. Mes parents, Charlie. Je suis la fille des gens qui ont bousillé sa vie ...

Charlie aurait aimé avoir un mot de réconfort pour Joséphine. La contredire, lui donner de l'espoir pour effacer le profond désarroi qui brillait dans son regard et la résignation qui affaissait ses traits. Mais rien ne lui vint. Qu'est-ce qu'il viendrait à l'esprit de Farhan à présent, chaque fois qu'il contemplerait Joséphine ? Songerait-il combien il l'avait aimé, pour son feu et sa façon originale de concevoir le monde, ou ne verrait-il sur son visage que l'écho des personnes qui lui avaient volé sa vie ... ? Qui était-il pour répondre à sa place ? Comme il n'avait pas de certitude à apporter à Joséphine, il passa outre la répugnante odeur de tabac qui la baignait pour enrouler un bras autour de ses épaules.

-En tout cas moi je comprends tout ce que tu as fait. L'article, votre plan ... terriblement foireux et brutal. Mais il a marché. Il fallait au moins ça pour faire sauter le verrou ... C'est terrible, quand on y pense ...

-Terrible ..., murmura Joséphine, et ses yeux se baissèrent sur le sol. Mais c'est loin d'avoir tout réglé, au contraire ... j'ai l'impression que cette histoire a tout brisé. Mes parents s'aimaient, avant que ma mère ne demande à mon père de tergiverser sur ses valeurs. Cet ultimatum, cette décision qu'elle l'a obligé à prendre, il ne lui a jamais pardonné ... il ne le s'est jamais pardonné. Ça a détruit leur couple. J'étais persuadé que la vie de Maya et Farhan ne pourrait être que meilleure s'il connaissait leur histoire, leur passé et leurs racines et regardent dans quel état ils finissent ... Regarde où je les ai mené, Charlie ...

Sa façon de prendre le blâme de cette sinueuse quête rappelait étrangement la responsabilité que portait leur père, simplement parce qu'il était en charge. Ils oubliaient tout deux qu'ils n'avaient eu qu'eux dans cette affaire, que ce n'étaient pas leurs décisions et leurs actions qui avaient pesés sur la balance. Ils avaient été les petits ruisseaux, réceptacle de millier de gouttes de pluies, de cours d'eaux, qui d'embranchement en embranchement en avaient rejoint d'autres et étaient venus nourrir une crue immense destinée à tout emporter sur leur passage. Leur flux avait bien sûr entrainé la catastrophe ; mais s'il en avait été autrement, et que leur cours avait été détourné, en aurait-il été autrement ? Charlie n'en était pas si sûr. Trop de facteurs différents pesaient lourdement dans cette histoire. Joséphine en avait fait le parfait étalage dans son article.

-Ils se seraient posé la question toute leur vie, sinon, trancha alors Charlie. Et c'est la première chose qu'on a compris, Jo. L'attente et l'ignorance, c'est un poison. Ça se serait endormi pendant quelques années pour ressurgir plus tard, et peut-être que les réponses se seraient envolées dans la nature ... Au moins, ils les ont. Et ils ont toute la vie pour les digérer ...

Joséphine hocha plusieurs fois la tête, à moitié soulagée. Dire qu'au déclenchement de tout ça, c'était lui qui s'était abattu en furie face à elle, indigné à l'idée qu'elle puisse vouloir se venger à travers Farhan ... à présent, sa colère lui paraissait bien futile. Risible. Cruelle. Alors pour expier ses remords, il serra un peu plus l'épaule de Joséphine, la laissa s'épancher pendant qu'elle finissait sa cigarette avant qu'ils ne rejoignent tous les deux le château pour le déjeuner, un peu sonnés, mais plus léger. Les mots avaient quelque peu apaisé leurs âmes troublées.

-Tu veux venir manger avec Lauren et moi ? proposa Charlie alors qu'ils pénétraient dans le Hall. On s'en fout, c'est la fin d'année, qui va venir vérifier si tu es de Serdaigle ou de Gryffondor ?

-Et Farhan ... ?

Farhan descendait rarement depuis une semaine, mais Charlie passa tout de même une tête pour être certain que la voie était libre pour Joséphine. Le simple fait d'en être réduit à ça lui morcela le cœur. Il avait fini par se faire à la relation entre son meilleur ami et son ex, à leurs sourires complices, à leurs baisers volés. Pendant des semaines tout avait semblé tellement naturel, beau, allant de soi ... ça ne pouvait pas être fini. Il ne pouvait pas partir en Roumanie sur cet échec.

Mais pour l'heure, mieux valait la jouer fine, et une fois assurée que Farhan n'était pas descendu, Joséphine consentit à venir s'installer à la table des Gryffondor. Même Lauren n'était pas là et ils poursuivirent leur tête à tête tout le repas. Leur conversation était partie sur quelque chose de plus léger quand le claquement des ailes d'un hibou leur fit lever les yeux au plafond. L'espace d'un instant, Charlie craignit que ce ne fut de nouveau Errol qui, déboussolé par sa traversée, aurait raté l'heure de dépose du courrier au petit-déjeuner. Mais c'était une belle chouette effraie grise qui atterrit gracieusement devant eux. Un peu surprise, Joséphine mit quelques secondes avant d'entreprendre de dénouer la lettre qu'elle portait à la patte.

-J'espère que ce n'est pas ma mère, parce que sinon je préfère te prévenir, je risque de partir en hurlant, maugréa-t-elle alors que la chouette trempait son bec dans son jus de citrouille.

-Tu as des nouvelles de tes parents ?

-Pas vraiment. Ils sont partis de Poudlard après un entretien avec Flitwick qui a promis que je serais punie pour ma simulation ... Mon père m'a dit que j'avais tout mon temps pour digérer tout ça et qu'une fois que ce serait fait, il serait disponible pour ... (Elle roula les yeux en un geste si Joséphinien que Charlie en sourit) Parler.

-Un peu trop tard pour ça, non ?

-Etant donné qu'il a fallu que je me taillade les poignets pour ça ? Un peu, ouais.

Sur ceux, elle déploya la lettre devant son visage et tapota ses ongles courts et rongés, mais parfaitement vernis de rouge sur les bords du parchemin. Petit à petit, il s'abaissa pour laisser apercevoir son font plissé, puis son regard écarquillé qui sautait d'une ligne à l'autre dans un silence abasourdi.

-Euh ...

-Qu'est-ce que c'est ? Ta mère ?

-Non. Non, pas du tout, c'est ... je suis pas sûre ... (Elle lui tendit précipitamment la lettre, brusquement paniqué). Tiens, lis-toi. Tu lis la même chose que moi ?

Un peu dérouté, Charlie saisit la feuille de parchemin et l'éloigna un peu car Joséphine semblait vouloir la planter sur son nez.


Chère miss Abbot,

Grâce à des trésors d'ingéniosités dont nous avons le secret, nous avons réussi à obtenir vos coordonnées de La Gazette du Sorcier après la parution de votre tribune dans ses pages. Nous devons dire que votre style ainsi que la gravité et l'importance du thème choisit ont retenu tout de suite notre attention, ainsi que la maturité avec lequel le sujet a été traité. C'est pour ça que nous avons été grandement surpris d'apprendre qu'il a été rédigé par une jeune femme même pas sortie de Poudlard ...

Notre journal, La voix du chaudron, est une jeune production dont la maison mère se situe au Canada. Depuis quelques années, nous avons décidé de nous implanter en Angleterre où il n'existe qu'une seule véritable ligne éditoriale, celle de La Gazette. Nos pages n'ont pas simplement vocation à relayer les faits-divers et informer nos lecteurs. Non, La Voix du chaudron veut alerter, enquêter, questionner, que ce soit l'actualité du monde sorcier, la pertinence de notre mode de fonctionnement, la rigidité de notre culture ou de notre norme sociétale. C'est donc un journal qui se veut progressiste, porté vers l'avenir et les idées nouvelles.

Mais vous l'avez brillamment souligné dans votre tribune : comment envisager notre avenir en ignorant notre passé ? Votre plume aura sa place dans notre rédaction, Miss Abbot, et c'est pour ça que nous vous proposons un entretien d'embauche ce lundi. Notre rédacteur-en-chef de notre section Britannique sera présent à Pré-au-Lard aux Trois Balais pour vous rencontrer à 15h.

En espérant de tout cœur recevoir rapidement une réponse positive de votre part,

Liam Cooper,

Directeur général de La voix du chaudron.


-D'ac...cord, lâcha lentement Charlie, estomaqué.

-Tu as lu la même chose que moi ?

-Qu'un journal en construction te proposait un entretien d'embauche ?

-Oh mille gargouilles tu as lu la même chose que moi, gémit Joséphine en se prenant la tête entre les mains. Je ne connais pas du tout ce journal, ça me parait bizarre ...

-Je crois que j'ai déjà vu ce logo, évalua Charlie en détaillant le petit chaudron dont la fumée dessinait une élégante plume. Où ça ... ? Je crois que c'est Tonks qui se le fait livrer, pour avoir accès à toute l'actualité et être au taquet pour son entretien pour la formation d'Auror si jamais elle est prise. Ou Lauren pour avoir un autre point de vue que La Gazette ? J'ai un doute.

-Donc c'est un vrai journal ? Ce n'est pas une blague ?

Les yeux de Joséphine s'écarquillèrent derrière ses doigts toujours plaqués contre son visage. Ils fixaient la lettre comme si elle était une beuglante déjà en train de fumer, sur le point d'imploser. Charlie la lut, et la relut encore, et lorsqu'il l'abaissa enfin, un sourire fendait son visage.

-C'est génial, Jo !

-Génial ? répéta-t-elle, dubitative.

-Mais oui ! Tu as été repérée par un journal ! C'est une super reconnaissance, non ?

Joséphine paraissait sceptique. D'une main prudente, elle fit glisser la lettre jusqu'à elle pour s'imprégner de nouveau de ses mots, maintenant qu'elle était certaine qu'il ne s'agissait pas d'un canular. Face à tant de réticence, Charlie plissa les yeux.

-Joséphine Abbot. Tu vas y aller, dis-moi ?

-Je ne sais pas, avoua-t-elle du bout des lèvres. Je ne connais pas le journal et ... j'ai écrit cet article sur un coup de tête. Pas parce que je voulais être journaliste ... je n'ai jamais eu cette prétention ...

-Tu n'as pas besoin d'avoir la prétention : ils te disent que tu pourrais être journaliste ! Regarde, c'est noté là : « votre plume aurait sa place dans notre rédaction ». Jo !

-J'ai lu, oui, calme-toi Septimus !

Mais Charlie n'était pas enclin à se calmer. Au contraire : tant que cette moue boudeuse déformait les lèvres de Joséphine, il était bien déterminé à compenser son manque d'enthousiasme par le sien.

-Tu n'y as vraiment jamais songé ? insista-t-il. Jo, tu griffonnes depuis des années dans ton journal, tu as toujours un avis sur tout et un regard original sur le monde ! C'est évident que tu pourrais faire une bonne journaliste.

-Il faut être neutre et avoir de la retenue pour être une véritable journaliste, rétorqua Joséphine. Tout ce que mon article montre, c'est que je n'ai aucune retenue. Tu sais ce que Lili m'a dit dans sa dernière lettre ? Que Fudge et le directeur de La Gazette avaient eu un entretien suite à la parution de ma tribune, et qu'ils s'étaient accordés sur une sorte de pacte de « non-agression ». Fudge allouera un budget pour La Gazette et en échange le journal cesserait de publier des attaques frontales contre sa gestion de la Communauté Magique. Tu me vois vraiment dans un monde pareil, Charlie ?

Sa bouche s'entrouvrit en un cri étranglé d'indignation qui ne parvint pas à jaillir. Il était évident que l'article avait plus qu'embarrassé Fudge qui bâtissait son succès sur celui de la paix et la prospérité retrouvée. D'autant que suite à l'article de Joséphine, certains dossiers avaient été rouverts, des langues s'étaient déliées et de nouveaux articles publiés. De quoi ébranler le socle le piédestal à peine érigé de Fudge.

-Voilà, ironisa Joséphine devant son mutisme. C'est bien ce que je pensais. (Elle replia la feuille de parchemin). Ce n'est pas pour moi. Je détruirais leur entreprise naissante en moins de temps qu'il n'en faut pour dire « Quidditch ».

Charlie la contempla longuement. Puis ferma les yeux. Puis inspira longuement. C'était prendre ce temps, ou lui envoyer son verre de jus de citrouille en pleine figure. Il n'aurait pas dû avoir autant de scrupule. A sa place, elle n'aurait pas hésité et il se serait trouvé arrosé dans la seconde. Pour éviter de céder à ses bas instincts, il se massa longuement les tempes en exhalant un soupir.

-Joséphine, Joséphine Abbot. Que toutes les forces magiques m'empêchent de t'enlever sur mon balai et de te jeter dans le lac noir pour te rafraichir les idées.

-Charmant.

-Tu en aurais besoin. Alors quoi, tu vas repartir dans ta spirale ? La grande théorie de la Jo qui détruit ce à quoi elle touche ?

-Tu étais le premier à y adhérer, rappela-t-elle.

Ce n'était même dit avec aigreur, juste avec un profond défaitisme. Elle avait à peine toucher à son repas, et avait repoussé son assiette pour tordre nerveusement ses doigts et faire tourner l'anneau à son majeur qui laissait une trace noire à chaque passage.

-Oui bon, on venait de rompre, on était dans la meilleure période, concéda Charlie en penchant la tête sur son épaule. Mais maintenant que j'ai absolument toutes les cartes et qu'on voit comment ça a fini ... Jo, tu as déterré un secret profondément enfoui. Si tu n'avais pas été là pour secouer tout le monde, moi y compris, jamais il ne serait venu au jour. Maya et Farhan ne se seraient jamais retrouvés, et tout ce qui s'est passé avant qu'ils soient adoptés serait tombé dans l'oubli. On aurait continué à être naïf sur la guerre en songeant qu'il y avait un côté de gentil, un côté de méchant, alors que ton article prouve pertinemment que tout ce monde était pourri jusque la moelle, comme ton père nous dit que chacun a fait de son mieux dans la pire situation qui soit. C'est grâce à toi que tout ça a émergé.

Il reprit la feuille de parchemin pliée de ses doigts crispés et l'aplatit entre eux avant de pointer des lignes.

La Voix du chaudron veut alerter, enquêter, questionner, que ce soit l'actualité du monde sorcier, la pertinence de notre mode de fonctionnement, la rigidité de notre culture ou de notre norme sociétale ». Si avec tout ce que tu as pu faire cette année ça ne s'adresse pas à toi, je ne sais pas à qui ça s'adresse.

-Depuis quand tu sais si bien parler, Septimus ? plaisanta Joséphine avec l'ombre d'un sourire avant de passer une main sur son visage. Ce n'est pas gentil de me tenter comme ça ... je ne suis pas en état d'aller lundi à un entretien et de me vendre, de montrer le meilleur de moi-même alors qu'en ce moment je macère le pire. C'est adorable tout ce que tu me dis, ça me touche et ça fait du bien à entendre ... mais ...

Elle poussa un grognement et plaqua de nouveau ses mains contre ses joues, l'air prête à les griffer de ses ongles.

-Mais tant que je ne les entendrais pas de la bouche de Farhan, je ne les croirais qu'à moitié, lâcha-t-elle, dépitée. Je suis désolée, mais après les derniers mots qu'on a eus ... après la chose stupide que j'ai fait derrière ...

-La chose stupide a porté ses fruits. Et tu avais l'autorisation de Maya.

-Mais pas la sienne. Comme pour l'article : je ne lui ai pas demandé son avis, je l'ai mis devant le fait accompli. C'est ça qui l'a blessé, plus que tout le reste. Il a tout fait pour qu'on soit un couple solide, uni. Il m'a prévu pour Berry et Aidan pour ça, il m'a tellement soutenu quand il a su que ... (sa voix s'étrangla et elle resta quelques secondes mutique, les traits figés en un masque d'albâtre). J'ai tout gâché en tentant de vouloir me prouver que ... je valais quelque chose.

Charlie la considéra d'un air peiné, mais s'efforça de secouer le parchemin sous son nez.

-Et tu ne veux pas que tout ça vaille le coup ? Regarde. Ils te disent noir sur blanc que tu vaux plus que quelque chose.

-Charlie ...

-Bon, tu m'énerves alors je vais abattre ma dernière carte et après ça je ne veux entendre que « oui Charlie ». Tu m'as forcé à faire un virage à cent quatre-vingts degré dans mes perspectives d'avenir en te mettant de mèche avec Brûlopot pour m'envoyer au pays des dragons. Tu as eu raison de le faire, encore une fois, mais ça ne s'est pas fait sans me secouer. Alors je te jure que je sais que j'ai raison et que je n'hésiterais pas à te secouer, à la Joséphine Abbot.

La moue qui déforma les lèvres de Joséphine lui parut être le meilleur des augures et face à ses premiers signes de reddition il décida d'enfoncer le clou avec plus de douceur :

-Je me doute que rien n'est facile dans ta vie en ce moment, qu'entre Farhan et ton père tu dois broyer du noir ... mais cet entretien, ça te donne l'opportunité de réussir quelque chose. Par toi-même ou pour toi-même. Est-ce que ce n'est pas précisément ce dont tu as besoin maintenant ?

Petit à petit, le masque d'albâtre de Joséphine se délita. C'était peut-être le soleil qui inondait la grande salle qui réchauffait son regard, mais Charlie avait envie de croire que c'était la perspective qu'il venait d'ouvrir devant elle. Un filet de voix jaillit de ses lèvres, peu assuré, mais assez clair pour qu'un sourire retrousse ses lèvres :

-Oui, Charlie.

***

Depuis une semaine, Maya avait la sensation de traverser le désert.

Pourtant elle était une femme du désert. Sa chair était faite de sable et de chaleur. Ses ancêtres avaient erré dans les paysages arides et dans son sang chantait leur héritage. Mais cette longue ligne droite, cet horizon désolé dans lequel elle marchait en vain ressemblait à l'antichambre de l'enfer.

Fort heureusement, elle n'était pas seule dans sa marche. Son frère cheminait à ses côtés.

C'était la seule réalité qui ne se délitait pas à ses yeux. Sinon son regard traversait les hêtres et les saules comme des mirages, la pelouse se muait en sable à l'infini, la surface du lac se creusait en la pente d'une dune. Aucun intérêt, nulle part. Tout était vain. Mais c'était cette vue d'esprit qui la maintenait toute entière dans la discussion qu'elle entretenait avec sa propre intériorité depuis une semaine.

Et maintenant ? Qu'est-ce qu'on fait ?

-Ce sont les parents de Berry, répéta-t-elle pour la millième fois.

-Ce sont les parents de Jo aussi. Crois-moi, pour moi non plus ce n'est pas facile.

Malgré elle, Maya sentit un sourire effleurer ses lèvres. Elle coula un regard discret sur Farhan qui marchait à ses côtés sur la berge, la tête basse, les mains enfoncées dans ses poches. Les doux rayons du soleil peinaient à réchauffer sa peau pourtant naturellement encline à recevoir la luminosité. Mais depuis quelques jours, son teint semblait gris à Maya.

-Donc tu es toujours amoureux d'elle.

-J'espère bien, sinon ça fait beaucoup de souffrance inutile, soupira Farhan. C'est parce que je l'aime que ça fait si mal. Ce n'est pas l'amour le problème dans cette affaire ...

Il détourna les yeux et laissa son regard vagabonder sur le lac dont la surface scintillait de mille paillettes d'or. Ils n'étaient pas le seuls à profiter de la quiétude ensoleillée du week-end : un groupe de fille de Serpentard trempaient leurs pieds dans l'eau, deux Poufsouffle jouaient aux échecs à l'ombre d'un hêtre et Maya repérait même Bérénice seule sur la berge, un livre à la main. Elle disparut au détour d'une courbe et la poitrine de Maya se comprima.

-C'est pour ça que leur père ne leur a jamais rien montré, déclama sombrement Farhan. Si on veut il nous a séparé par amour pour sa famille, et dans sa tête c'est la pire décision qu'il a pris de sa vie ...

Maya serra les dents pour lutter contre l'amertume qui était venu saturer ses papilles. Depuis que Farhan était venu lui narrer tout ce à quoi il avait assisté dans la Pensine, elle avait prié, supplié Allah de lui montrer la voie, le chemin à suivre au bout de laquelle se trouvait la réponse à la question par laquelle s'était clos le récit de Farhan.

Alors ? Qu'est-ce qu'on fait ?

Qu'est-ce qu'on fait ...

D'un geste machinal, elle sortit de sa poche la feuille de parchemin qui ne la quittait plus depuis qu'elle l'avait arraché aux mains d'Aloyssius Abbot. La dernière page. La même écriture nette et claire qui parcourait le rapport volé par Joséphine aux vacances de noël, qui déclamait d'une nouvelle manière, plus froide et protocolaire, tout ce que Farhan avait raconté la voix aussi tremblante que ses mains. Les Aurors étaient venus dans le but d'intercepter Shahrazade avant que les Mangemorts aient vent de sa présence. S'ils n'y parvenaient pas – le cœur de Maya se souleva alors qu'elle relisait les mot – ils étaient autorisé à utiliser leurs nouvelles directives qui leur permettait d'éliminer toute menace directe à la Communauté Magique. En dernier recours, bien sûr. Mais la possibilité était là, ouverte, béante, et ils s'y étaient engouffrés.

-Je n'arrive pas, Farhan, lâcha-t-elle, les yeux braqués sur la page. Non, je n'arrive pas à me dire que les Aurors censés nous protéger sont venus pour neutraliser notre sœur et qu'ils ont fini par la tuer. Une petite fille ...

Farhan tressaillit à ses mots et sa mâchoire se contracta pour venir durcir davantage son visage.

-Je sais ...

-Nos parents étaient vulnérables, en terre étrangère, aux abois parce qu'ils cherchaient à tout prix à guérir Shahrazade. Ils les ont pris à la gorge ... Je n'arrive pas, vraiment, pourquoi je bouillonne de colère comme ça ? J'ai vidé un pot de peinture sur le mur de ma chambre, j'ai tout mélangé avec mes mains en poussant des cris horribles et pourtant je te jure, elle est toujours là à me bouffer le cœur !

Un soupçon de rage était venu enrouer sa voix et elle fourra le parchemin dans sa poche avant de passer ses nerfs dessus. Face à son courroux palpable, Farhan réagit à peine. Il se contenta de s'abaisser et de ramasser une pierre sur la berge avant de la lui tendre, sans un regard. Maya ne réfléchit pas. Elle la saisit et la fixa intensément en imaginait sa colère comme un flux écarlate qui ressortait sur sa peau qui, elle non plus, n'absorbait pas le moindre trait de lumière. Elle attendit, visualisa le fil qui s'enroulait autour de la pierre à l'en étrangler et lorsqu'elle s'estima vidée, que ses yeux brûlaient, elle réprima le cri qui venait aux lèvres et la jeta de toutes ses forces. Maya n'avait jamais été une fille forte, mais sa colère lui donnait une énergie nouvelle et elle frappa la surface avec tant de violence que les filles de Serpentard vrillèrent leur regard sur l'eau qui ondulait. Maya attendit que les vaguelettes cessent et que le lac retrouve sa quiétude pour se sonder intérieurement, et découvrir avec désarroi que la colère était toujours là.

-Je suis une musulmane épouvantable.

-Oh, arrête, râla Farhan en rejetant sa tête en arrière. Je veux bien que tout ce qu'on vient d'apprendre ébranlent toutes nos certitudes et tout ce qu'on pensait être, mais je t'en prie, ne doute jamais de ça.

-Si j'en doute, insista Maya, la gorge serrée. J'ai eu cette exacte conversation avec Joséphine en janvier dernier, figure-toi ! Je ne suis pas omnisciente, je n'ai pas toutes les cartes, je n'ai pas à les juger ! Ma justice n'est pas celle des hommes mais celle d'Allah ! Alors pourquoi, pourquoi j'ai tellement envie qu'ils paient ?! Ici et maintenant ?

Cette fois, elle se baissa elle-même pour attraper un galet et de nouveau le jeter dans les airs. Il décrivit un gracieux arabesques pour venir s'écraser avec un « PLOUF » sonore.

-Et en même temps le fait que je ressente toute cette haine, ça ne montre pas combien je suis imparfaite et pétrie de défaut ? Alors comment je peux oser les juger ?

-Oh Maya, soupira Farhan, peiné. J'aimerais tellement te dire de ne pas le faire, d'oublier cette histoire et que tu n'aies pas ce dilemme moral ... que tu peux juste tout confier entre les mains d'Allah sans crainte ...

-Mais tu ne veux pas non plus ? Toi aussi tu veux les voir payer ?

Enfin, le regard de Farhan effleura le sien. Les cernes lui mangeaient les joues et malgré le temps clair, ses prunelles ne lui avaient jamais paru si sombres, profondément enfoncés dans leurs orbites qu'ils semblaient vouloir creuser leur gouffre jusque son esprit.

-Je change d'avis tous les jours, réfuta-t-il dans un souffle. Avant-hier je pleurais en me disant que la guerre était la seule coupable et qu'on aurait pu empiler les pièces dans un autre sens que ça n'aurait rien changé. Puis j'ai rêvé de trainer les Abbot devant les tribunaux ... et dans la foulée j'ai imaginé Joséphine derrière, écartelée entre eux et moi et tout s'est effrité ...

-Ouais. Tu es vraiment encore amoureux.

-La question n'est vraiment pas là, répliqua Farhan en roulant des yeux. Joséphine c'est mon problème, et je le réglerai plus tard. Là c'est un autre qui nous occupe. Maya, on ne va pas laisser traîner ça ... ça va nous empoisonner. Comme ça le fait depuis des mois ... C'est comme si on laissait l'histoire inachevée. On n'a pas fait tout ça pour ne pas y mettre un terme ...

Maya savait parfaitement ce qu'il avait raison, mais l'énormité de la décision la suffoquait. Aloyssius Abbot avait suspendu son destin, celui de sa femme et de sa profession à leur jugement. Il y avait quelque chose de vertigineux qui à la fois réjouissait sauvement Maya. C'était comme si on lui rendait un peu d'un pouvoir qui lui avait été arraché douze ans plus tôt.

-Moi aussi j'ai envie qu'ils paient, Maya, assura-t-il avec une glaçante conviction. Ils ont trop fait de mal. Ils nous ont trop fait de mal. Qu'ils nous séparent si froidement alors qu'on était tout qui nous restait au monde ...

La révulsion qui transpirait dans sa voix se reflétait sur son visage. A moitié mutine, Maya lui ramassa une pierre et la tendit, un sourcil dressé. Un fantôme de sourire se dessina sur les lèvres de Farhan. Il la prit, mais se contenta de la faire tourner dans ses mains.

-Et en même temps, qu'est-ce que ça va nous apporter ? Qu'est-ce que ça va changer ? Teresa Abbot n'avait pas tort, ce soir-là. Le mal est fait. Il a été fait quand un connard a pris la liberté de prendre la vie de notre mère. Le connard en question est mort depuis longtemps ... On n'a plus son sort entre nos mains.

Ses doigts s'enroulèrent férocement autour du galet jusqu'à ce que ses jointures blanchissent et que Maya craignent que la pierre éclate dans sa main.

-Aloyssius ? Il était en charge d'accord. Il s'est laissé amadoué par ses collègues et sa femme. Il était l'exécuteur d'une mission ignoble.

-Mais il regrette, admit Maya avec réticence. Il a porté le poids de sa décision toute sa vie. Il se punit lui-même depuis douze ans ...

-Tout en détruisant psychologiquement ses filles mais bon, soit. Quant à Teresa Abbot ...

Un silence pesa suivit le nom qui résonna longuement dans leurs esprits. La fameuse signature au bas de leurs dossiers d'adoption qui avait rendu Joséphine folle. La femme qui avait brisé leur fratrie, les restes éparses de leur famille déjà fracassée sous l'égide de son mari.

-A sa place, comment tu aurais agi ? souffla Farhan, dépité. Si le père de tes enfants proposait d'aller à Azkaban ? Briser leur vie et leur foyer ?

-Je n'ai pas envie de me poser la question.

-Non, évidemment. Personne n'a envie de se retrouver dans cette situation c'est tellement ... déchirant à imaginer. Ça me tort les entrailles rien que d'essayer. Mais ... je ne sais pas je trouve ça tellement atroce de les envoyer à Azkaban pour une décision qu'on aurait pu prendre nous-même.

Maya souffla profondément en prenant soin de gonfler ses joues pour que Farhan ait le son et l'image. Il ricana amèrement et elle écarta largement les bras comme une démonstration.

-Tu vois. Je suis une mauvaise musulmane.

-Tu es une fille de seize ans qui subit un gros bouleversement. Je te l'accorde c'est loin de m'arranger : je suis obligée d'endosser le rôle du grand frère et d'énoncer tous les arguments rationnels.

Maya leva les yeux sur lui, brusquement honteuse.

-Tu as raison, tu as le droit d'être en colère autant que moi et je t'oblige à être mesuré. Ce n'est pas juste. (Elle garda le silence quelques secondes). A moins que tu n'aies pas envie de les accabler par rapport à Jo ...

-Je pensais qu'on ne parlait plus de Jo...

-Mais ça joue. Pas vrai ?

Farhan cilla. Il pouvait nier tant qu'il voulait, Maya en était persuadée. Ils avaient parlé tous les jours depuis qu'il était sorti de la Pensine : à chaque fois, le nom de Joséphine était apparue dans les conclusions. Et si Maya devait être parfaitement honnête, celui de Bérénice flottait dans ses pensées, sous-jacent. Si elle avait tout raconté à sa meilleure amie avec des larmes sur les joues, depuis elle se gardait bien de débattre avec. Bérénice elle-même s'était mise en retrait, certainement horrifiée d'être la fille de ceux qui avaient volé leurs vies. Elle l'avait senti, la veille. Alors qu'elle sortait de la salle de bain, Bérénice avait sauté de son lit, rouge d'embarras. Comme si elle était certaine que sa simple vue dégoûtait Maya.

Sonnée, la jeune fille finit par se laisser aller sur l'herbe. Même la douceur de ses brins lui piqua la peau. Aussi agressive que le sable.

-Je comprends, tu sais. Berry ... je ne veux pas briser son foyer comme ils ont brisé le nôtre.

-Ils ont brisé leur foyer tout seul tu sais, Maya. Tu as entendu Ophélia ? Les murs de l'infirmerie ont tremblé ...

-Donc ils sont assez punis, c'est ça que tu veux me dire ?

Farhan pressa ses paumes contre ses yeux, dépassé.

-Je pense sincèrement que rien n'aurait pu sauver les Abbot. Et ce ne sont pas nos actions qui pourraient recoller les morceaux, tout dépend d'eux. Je pense même que Jo comme Berry nous comprendraient de les poursuivre ... Mais je ne suis pas sûr que des « si » nous auront sauvé non plus. Si ça se trouve, Shahrazade aurait eu une crise quelques semaines plus tard qui nous aurait tous tué. Si ça se trouve les Mangemorts l'auraient vraiment trouvé et utilisé comme une arme et ce sont des centaines de personnes qu'elle aurait emporté sur son passage. Peut-être même que ça aurait permis à Tu-Sais-Qui de gagner la guerre ...

-Les « peut-être » ça empoisonne l'esprit, lui rappela Maya, inquiète de voir les hypothèses s'étirer à l'infini.

-Je sais. Mais je ne sais pas ... dans ma tête, donner cours à un procès, c'est donner foi à ce « peut-être ». C'est admettre qu'il y avait ce « peut-être » et que notre destin aurait pu être différent. Que ce « peut-être » repose sur les Abbot, malgré la guerre qui faisait rage et l'Obscurus de Shahrazade. Est-ce que ce ne serait pas nous empoisonner à tout jamais ... ? Avoir la porte ouverte à nous dire toute notre vie « et si Aloyssius Abbot n'avait pas traqué notre famille ... ? ».

Farhan laissa la conclusion suspendue dans l'air. Les mots flottèrent dans leur désert personnel avait de se fondre dans l'atmosphère et s'imprégner Maya. Elle se remémora tous ses mois d'angoisse et de stresse où une boule brûlante n'avait jamais quitté son ventre, où à chaque frémissement ou chaque murmure de Joséphine elle avait retenu son souffle, qu'elle avait attendu avec anxiété chaque nouvelle, chaque lettre de Fiona. Etait-elle prête à continuer ainsi, à laisser la plaie à vif ... ? Pour assouvir une rage sauvage qu'elle savait être malsaine ? La cicatrice serait-t-elle plus belle à contempler après cela ?

-Et on n'est pas sûr d'obtenir gain de cause, renchérit Maya, plus calme, plus lucide. Les Aurors vont vraiment se laisser faire ? Se laisser traîner dans la boue ? Même si Aloyssius accepte de plaider coupable, rien ne dit que Teresa fera de même ... Elle est issue d'une grande famille de sang-pur, elle a les fonds, les connexions ...

-Je me suis fait la réflexion aussi. Si seulement j'étais certain d'obtenir justice ... (Son poing se serra sur le galet qu'il tenait toujours). Et puis, où on s'arrête ? Aloyssius très bien, mais avant lui quelqu'un lui a bien donné l'ordre. Est-ce qu'on remonte la chaîne jusque la source ? Jusqu'où on va ... ?

Maya se massa la tempe où une migraine menaçait de poindre tant les réflexions exécutaient des trajectoires alambiquées dans son esprit. Mais elles finissaient par obtenir gain de cause. Dans son ventre, la boule brûlante de colère rougeoyait moins violement. Son aura se ternissait alors que son esprit reprenait le pas sur ses états d'âme. Elle exhala un souffle tremblant, et un l'étau sur sa poitrine se desserra un petit peu.

-Le chef du bureau des Aurors, le Ministre de l'époque lui-même, celui qui a autorisé les Aurors à tuer ..., énuméra-t-elle en comptant sur ses doigts. Tu as raison, on peut aller loin ... autant mettre en accusation la guerre elle-même ... C'est elle qui a instillé le poison en Shahrazade. C'est elle, le péché originel sans qui rien ne serait arrivé ... En Palestine comme en Angleterre.

Farhan acquiesça en silence. Ils marchèrent quelques mètres sans un mot et autour de Maya le parc retrouva ses couleurs. Son horizon se remplissait de nouveau. Elle touchait au but du bout des doigts.

-Le seul qui méritait vraiment Azkaban, sans ambiguïté, sans qu'on puisse lui donner de circonstances atténuantes, c'est celui qui a tué maman, concéda-t-elle finalement, vaincue. Mais un Mangemort l'a eu avant nous ...

-Allah l'a jugé depuis les cieux, non ?

Maya accueillit les mots comme un réconfort. Farhan disait vrai : on pouvait fuir la justice des hommes tant qu'on voulait, avoir la plus vile vie dans l'impunité la plus totale ... mais une fois son âme détachée de la chair, c'était Allah qui reprenait prise sur son destin. Une douce chaleur se diffusa dans la poitrine de Maya et elle y pressa les deux mains pour la garder, la contenir contre son cœur. C'était Allah qui posait une couverture sur son cœur tremblant. Il lui rappelait sa présence en sa chair pour réchauffer son monde et lui promettre qu'en ce choix difficile, elle n'était pas seule. Il la guidait.

-Et Il jugera les Abbot le jour venu, conclut-t-elle dans un souffle.

Ses pas s'interrompirent sur le bord de la berge. Elle contempla le paysage, les couleurs qui chatoyaient, révélées par la lumière pure du soleil qui se déversait sur eux. Le mirage du désert s'était réduit à une mince illusion qui se superposait à peine au lac. Elle s'approchait de la vérité. Elle en fut d'autant plus persuadée que lorsqu'elle pivota vers Farhan, elle découvrit qu'il la contemplait, un léger sourire aux lèvres.

-Revoilà la bonne musulmane.

-Fais attention, la folle furieuse qui jette des galets n'est pas si loin sous la surface, tenta-t-elle de plaisanter. Tiens, regarde...

Elle se baissa pour ramasser un galet plat, ce n'était pas une envie dévorante de faire jaillir le plus de chaos possible de la pierre qui la tenaillait, mais un besoin de beauté et d'harmonie. Alors elle se cambra et le galet glissa de ses doigts pour aller ricocher sur la surface du lac. Il fit deux bonds avant de s'enfoncer dans l'eau sans un bruit. Un second vient le rejoindre, jaillissant des doigts de Farhan et décrivit lui trois arcs avant de plonger. Ils échangèrent un regard, et un défi silencieux brilla au fond de leur prunelle, le genre qui ne pouvait être lancé que d'un frère à une sœur. Aussitôt, ils se mirent en quête de pierres adaptées et s'enfoncèrent dans l'eau jusqu'aux mollets. Pendant dix minutes les galets frappèrent l'eau et les sombres réflexions s'effacèrent pour ne laisser que des mots purement enfantins jaillir de leur bouche :

-Je suis allée plus loin, cette fois !

-Attends tu es avancée, tu triches !

-Oh, joli celui-ci ! Comment tu as fait ?

-Attends, j'essaie d'atteindre l'île au milieu !

Ils jetèrent des pierres à l'infini et Maya réalisa à mesure qu'un sourire se dessinait sur les lèvres que ce jeu avec son frère grignotait bien plus efficacement sa colère que n'importe lequel des cris qu'elle avait bien pu pousser. Un rire finit même par s'échapper de ses lèvres quand Farhan faillit tomber dans l'eau, déséquilibré par son lancé un peu trop franc. Son hilarité nourrit la bonne humeur de Farhan dont les traits s'étaient détendu galet après galet, ricochet après ricochet. Lorsqu'ils eurent épuisé leur coin des pierres plates, Maya se rapprocher de lui pour enrouler son bras autour du sien et presser sa joue contre son épaule. Farhan fit de même en s'appuyant contre sa tête couverte de son hijab, les yeux clos, le visage offert au soleil qui réchauffait enfin son teint pour lui rendre ses vraies couleurs.

-Tu es bon, murmura-t-elle. Dans le rôle du grand frère rationnel.

-Merci. J'essaie.

-On s'est retrouvé. Au fond c'est tout ce qu'on doit retenir, non ? Peu importe leurs plans, peu importe les efforts qu'ils ont fait, on a été plus fort que ça.

-C'est une belle conclusion, concéda Farhan, les yeux clos. Enfin ...

Ses lèvres se tordirent, marquant son indécision, mais Maya savait le nom qui lui chatouillait la langue. Un sourire entendu retroussa ses lèvres.

-Enfin sans Joséphine, ça ne serait jamais arrivé, c'est ça ? devina-t-elle, mutine. Tu as raison. Finalement, c'est elle qui est plus forte que tout le monde. Elle a eu le premier et le dernier mot de cette histoire.

-Maya Tabet, tu sais que tu es douée également ? Dans le rôle de la petite sœur pénible qui se mêle de ce qui ne la regarde pas ?

-Oh s'il te plait ! De toute manière je n'accepterai aucune autre belle-sœur, c'est elle que je veux !

-Excuse-moi je suis encore novice dans les relations fraternelles, mais je crois avoir lu dans le guide que tu n'avais aucun droit de choisir mon amoureuse.

-C'est dans les petits caractères en bas de page que tu n'as pas lu avant de signer le contrat.

Farhan s'esclaffa face à la pique mais s'écarta d'un bas pour pincer son nez entre son pouce et l'index. Le désarroi était venu brouiller l'expression de son visage et Maya se rapprocha de lui, peinée. Avec douceur, elle plaça une main sur sa joue et planta son regard dans le sien. Si c'était jusque son cœur que ses yeux creusaient leur gouffre et non en son esprit, elle était certaine qu'elle aurait pu lire le nom de Joséphine à travers les prunelles veloutées de son frère.

-Puisqu'on est parti sur cette voie, il faut que ce soient des belles choses qui émergent de cette année, Farhan. Pas des échecs, des regrets et de l'amertume.

Farhan pressa les paupières et un long souffle jaillit de ses lèvres, le genre qu'il lâchait pour expier toutes les mauvaises émotions qui lui saturaient le cœur. Devant sa vulnérabilité manifeste, Maya ajouta prudemment :

-Je te jure qu'elle n'aurait rien fait si je ne ...

-Je sais, tu me l'as répété au moins mille fois en une semaine, la coupa-t-il en rouvrant les yeux, dépité. Mais je n'ai pas attendu votre plan foireux pour qu'il y ait un problème, vois-tu ...

-Son article ? Allons Farhan ... On n'est pas cité une seule fois. Je l'ai trouvé très bien ... Tu devrais être fière d'elle. Elle a une plume magnifique.

-Ce n'est pas tant son article ..., protesta faiblement Farhan. C'est surtout quand j'ai compris dans la foulée qu'elle enquêtait encore ...(Il secoua la tête). Mais ce n'était pas gratuitement. Ce n'était pas un caprice ... J'ai cru ... j'ai dit des choses horribles ... Mais elle avait raison. Putain, elle avait raison ...

-En plus elle n'enquêtait plus vraiment, Berry m'a dit que c'était elle qui avait ressorti les dossiers quand elle a réalisé qu'ils pouvaient être signé par sa mère.

-En plus, répéta Farhan, dépité.

Maya eut un petit sourire et tapota doucement sa joue avant de laisser retomber la main. Mais seulement pour nouer ses doigts à ceux de Farhan et reprendre leur marche sur les berges du lac. Elle n'était pas là pour juger : seulement pour conseiller et soutenir. Et mille gargouilles qu'elle espérait avoir poussé Farhan sur la bonne voie.

-Donc notre décision est arrêtée ? reprit-t-elle en s'éclaircissant la gorge. Je veux dire pour moi ça a du sens de m'en remettre à la justice divine, je suis croyante ... mais toi ...

-Tu n'étais pas la seule de croyante. Maman l'était aussi. Certainement qu'elle avait converti papa. Alors si leur justice est celle d'Allah ... ainsi soit-il. (Il pressa la main de Maya). Et puis pour moi c'est la seule manière de mettre un point définitif à cette affaire. Simplement ... accepter ce qui s'est passé, et le fait qu'aucune de nos actions n'auraient pu changer notre destin.

Maya hocha la tête, plus sereine avec l'idée maintenant qu'elle avait fait des ricochets en compagnie de son frère et l'avoir harcelé pour qu'il renoue avec sa petite-amie. Dans son ventre, la boule était toujours présente, mais moins lourde, moins brûlante et n'irradiait plus jusque son âme. Main dans la main avec son frère, elle avança sur son chemin et laissa derrière eux le désert infini et vain. La boucle était bouclée.

***

Alors, je vous écoooute?

Pour celle.eux qui ne suivent que moi, je viens de faire une petite référence à notre univers partagée avec ma chère , autrice de L'héritage d'Ilvermonry. Pour certain.es vous le savez, de cette fanfiction est née un journal, La voix du chaudron que vous avez pu voir apparaître ici !

Bien évidemment je vous invite fortement à allez lire cette merveilleuse fanfiction pleine de personnage complexes et attachant, d'une intrigue bien ficelée et écrite d'une plume fine, évocatrice et sublime !

Pour la décision de Maya et Farhan, j'espère que vous la comprenez. Ce n'était vraiment pas simple à imaginer, à justifier ...

Maintenant je vais vraiment essayer de trouver un calendrier de post. BONNE SEMAINE LES ENFANTS et bon retour aux universitaires ! 

ET je retourne à cet étouffant d'ADS Ecosse ! 

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