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Chapitre 57 : Un passé qui ne passe pas

Bon Allez, on continue le jeudi ahah ! Pour bien fêter la fin de ces vacances ahah. 

Petit racontage de vie : malgré une crise d'allergie (pas merci Bella) et une sale crève (pas merci mon copain), nous avons passé avec Marion un week-end fort prolifique ! Si vous voyez ce qu'on vous a préparé ... on a bien balisé, que ce soit de son côté ou du mien. LHDI avance bien, les projets avancent bien et prennent forme ... Vraiment à deux on est inarrêtables ahah !

Cela dit, je n'ai pas trop avancé dans l'épilogue et le "Et après" donc pour l'instant je maintiens le rythme d'un chapitre par semaine ! (et comme ça, ça permettra aux vacanciers de rattraper les chapitres !) 

D'ailleurs merci pour vos réactions pour le dernier chapitre, je suis juste hyper contente qu'il vous ait autant plu ! J'avais un petit doute parce que c'était quand même très narratif mais j'ai eu des retours comme quoi mes chapitres narratifs pouvaient être lourds alors je suis heureuse comme tout que la frénésie de Joséphine vous ait touché ! 

Prêt.es à voir les suites de l'affaire? Alors chapitre ! 

Concernant le titre, il est bien évidemment emprunté à un livre de Henry Rousso Vichy, un passé qui ne passe pas, qui parle de mémoire du régime de Vichy. C'est vrai qu'en France on est assez bien placé pour avoir un passé difficile à assumer et à avaler ... Encore aujourd'hui, beaucoup trop oublient que la Rafle du Vel d'Hiv a été organisée par les autorités françaises. BREF je récupère la chose ! 

Par contre euh. Bon, je préfère le faire par prudence, allons y : 

!! TW !! 

Mention de tentative de suicide

Voilà je préfère baliser pour les plus fragiles d'entre vous. Maintenant ... Bonne lecture ! 

***

Cette place grandissante du souvenir des crimes du passé dans les sociétés contemporaines réduit parfois l'Histoire, ou plutôt ce qui est digne d'être remémoré, à une succession de méfaits et de massacres. C'est l'une des raisons qui expliquent que la mémoire à ce point une valeur quasi universelle, et l'oubli une posture condamnable. 

- Henry Rousso
Face au passé 

***

Chapitre 57 : Un passé qui ne passe pas.

Vendredi 13 juin 1991

Une semaine.

Une semaine que j'attends.

Pourquoi j'ai fait ça ? Qu'est-ce qui m'a pris ? Pour qui je me suis prise ? Comment j'ai pu croire qu'on m'écouterait ? C'est stupide ... Je suis trop impulsive, parfois. Comme une Gryffondor. Farhan a tort, je me serais parfaitement fondue dans le décor là-bas.

Allez Joséphine. Tu l'as écrit, et tu l'as envoyé dans les cieux. C'est une autre manière de hurler. Tu as tout expié. Tourne la page, maintenant. Les examens sont finis. L'avenir est devant toi.

***

-Vous y croyez à celle-là ?

Lauren contemplait les vitres de la Grande Salle avec un mélange de mélancolie et de rage. La pluie les martelait implacablement, le vent les faisaient trembler, et face aux nuages sombres et menaçant qui tapissaient le plafond et masquaient totalement la lumière, les bougies flottantes s'étaient allumées pour éclairer leur monde.

-Il a fait un temps magnifique pendant les ASPIC et maintenant qu'on est libre, on a le droit aux averses, marmonna-t-elle, blasée. J'adore l'Ecosse.

-C'est vrai que l'Irlande c'est mieux, plaisanta Farhan avec un fin sourire. Allez, l'odeur de pluie sur l'herbe verte ... ça ne te rappelle pas des souvenirs ?

-Tu as raison, je devrais repeindre mes ongles aux couleurs de l'Irlande, comme en début d'année. Et aller danser sous la pluie en chantant des chansons traditionnelles.

-In the merry month of June from me home I started left the girls of Tuam nearly broken hearted ...

Un sourire fendit le visage de Lauren, et à l'air moqueur qui se peignait sur son visage, Farhan devina de l'accent irlandais s'était renforcé avec la mélodie qui avait bercé son enfance. En face de lui, Charlie s'esclaffa, malgré la fourchette d'œuf brouillé qu'il avait ingurgité une seconde plus tôt. Il but une gorgée de jus de citrouille avant de lancer :

-Arrêtez de râler, ce ne sont que des averses. Dans cinq minutes, il n'y aura plus rien.

-Et dans deux heures ce sera de nouveau la tempête et l'apocalypse. Je voulais aller voler une dernière fois au terrain ...

La moue dépitée sur les lèvres de Lauren attendrit assez Charlie pour qu'il daigne reposer sa fourchette dans son assiette. C'était quelque chose que Farhan observait chez presque tous les septièmes années : une fois les examens passés, la pression ne s'était pas envolée. Au contraire, elle avait été remplacée par un mal encore plus lourd parce qu'il s'infiltrait efficacement dans les cœurs : la nostalgie. Chacun savait qu'il vivait ses derniers instants dans le château. Dans sa Salle Commune. Entouré chaque jour de ses amis comme d'une famille qu'on s'était choisi. Farhan et Charlie ne se quittaient presque plus depuis une semaine. C'était comme si la réalité les avait brutalement rattrapés et pris à la gorge. Une fois le Poudlard Express arrivé à quai, Charlie irait faire ses valises. Sa nouvelle vie l'attendait, à l'autre bout de l'Europe. Sans Farhan à ses côtés ... pour la première fois depuis sept ans.

Farhan déglutit nerveusement pour faire passer la boule qui venait de se loger au creux de sa gorge et promena ses yeux dans la Grande Salle en espérant croiser les yeux de l'unique personne qui était capable d'apaiser son mal. S'il arrivait à accepter que son chemin se sépare de celui de Charlie, c'était bien parce qu'il n'était pas seul sur celui qu'il empruntait ... mais il ne vit Joséphine nulle part. Elle ne descendait jamais pour le petit-déjeuner, se rappela-t-il. Elle préférait arriver en cours et se servir directement en amande dans son sac. Les petites habitudes s'étaient délicieusement installés entre eux.

Charlie capta son regard qui s'était glissé sur la table des Serdaigle et entonna à mi-voix :

-Si tu préfères passer la journée avec Jo ... ou avec Maya ...

-J'aurais tout le temps du monde cet été, rétorqua fermement Farhan en reportant son attention sur ses amis.

-Surtout si elle vient vivre avec toi à la rentrée ..., concéda Charlie.

-Qui ça ? sursauta Lauren en ouvrant de grands yeux. Jo ? Vous allez vivre ensemble ? Pour de vrai ?

Farhan sentit son visage s'embraser face aux étincelles qui pétillaient dans le regard de Lauren. La chose était restée à l'état de projet et à dire vrai, ils n'avaient pas franchement eu le temps d'en parler, pris dans la tourmente des examens. Mais il avait été sincère lorsqu'il avait proposé à Joséphine ce plan de secours qui lui permettrait de ne pas retourner chez elle. Lorsque Joséphine avait demandé du bout des lèvres si la promesse tenait toujours, il n'avait eu aucun mal à répondre par l'affirmative. Il avait pu voir de ses propres yeux le mal que sa famille avait pu lui faire. Pas question qu'elle aille ruiner tous ses efforts de ces derniers mois en retournant là-bas.

-Il n'y a rien de décidé mais ... on en parle, répondit-t-il de façon évasive.

Evidemment, cela ne satisfit pas Lauren qui plissa les yeux en sa direction. Le salut vint sous la forme d'hululements stridents et d'un concert de claquement d'ailes annonçant l'arrivée du courrier. Et le tout s'effaça dans le chaos lorsqu'une masse marron et duveteuse d'écrasa dans le plat de bacon posé devant eux et reversa une carafe de jus de citrouille. La rivière infernale finit droit sur les genoux de Lauren, et Farhan reçut sa part lorsqu'en se redressant, le hibou secoua toutes ses plumes et que des gouttes fusèrent pour le frapper au visage.

-Errol, soupira Charlie, contrarié. J'ai déjà dit aux parents qu'il ne pouvait supporter de si longs voyages ...

-Sans déconner ? releva Lauren avec dédain.

Elle se munit de sa baguette pour nettoyer sa jupe pendant que Farhan s'épongeait le visage avec sa serviette. Une chouette, plus élégante et discrète, s'était posée aux côtés de Lauren pour lui tendre sa Gazette et s'envola ci-tôt les trois noises payées. Errol, lui, se laissait examiner par Charlie en tournant la tête dans tous les sens, déboussolé par sa chute.

-Rien ..., évalua-t-il en replaçant son aile sur son flan. J'irai le mettre à la volière avant qu'il ne reparte, il faut qu'il se repose ...

-Oublie pas ton courrier, lâcha Lauren avant de se retrancher derrière son journal, certainement pour se prémunir d'un arrosage intempestif de l'oiseau mouillé.

Cela ne tarda pas : arrosé par la pluie et le jus de citrouille, Errol s'ébroua deux minutes plus tard et les gouttes vinrent fouetter le papier et le visage furieux de Cornelius Fudge sur la une. Le poing brandit devant la caméra interpella Farhan, qui pencha la tête pour lire les gros titres. « Pour Cornelius Fudge, il n'y a « rien à commenter » sur la tribune du jour ».

-Qu'est-ce qui se passe, encore ?

-Hum ? (Lauren referma le journal pour considérer la une). Tribune page 4 ... « Un passé qui ne passe pas ». Un article qui a mis Fudge en rogne ?

-Je prends, assura Charlie d'un ton presque féroce. Vas-y, lis-nous ça et régale-nous.

Le peu de respect qu'il avait pour le Ministre, qui dédaignait ouvertement son père depuis son élection, n'était pas un mystère. Leur brève rencontre cet été aux fiançailles d'Ophélia Abbot n'avait rien fait pour adoucir Charlie. Farhan eut un sourire caustique.

-Tout est bon pour critiquer Fudge ?

-Absolument tout, confirma Charlie avec gravité.

Pour faire bonne mesure, il pointa sa baguette sur Errol dont les plumes gonflèrent sous l'effet du sortilège de séchage. Assurée de ne plus recevoir la moindre goutte, Lauren plaqua le journal à plat sur la table. La tribune prenait toute une page, à peine agrémentée de quelques photos d'illustration. Visiblement, le texte suffisait à lui-même.

-« Un passé qui ne passe pas », commença Lauren en reprenant le titre qui prenait toute la largeur de la feuille. Eloquent.

-Véridique, dû admettre Farhan. Je pense que tout ce que m'a appris cette année, c'est que rien n'est plus dur que de regarder son passé dans les yeux ...

Il souffla sur sa tasse de thé bouillante. Lauren leva sur lui un regard peiné, si peiné qu'il s'obligea à sourire et à enchérir :

-Mais si c'est un Fduge qu'on s'adresse, feu ! De quoi il s'agit ?

-Je crois que c'est une sorte de lettre ouverte, évalua Lauren avant de se mettre à lire. « C'était il y a maintenant plus de 10 ans. Le monde sorcier exultait après la chute de Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom. Notre Communauté, meurtrie, fracassée, divisée après des années de guerre, ne souhaitait qu'une chose : guérir et se réunir. 10 ans plus tard, c'est le cas. La Communauté est en paix, florissante, brillante et prospère dans l'allégresse ... pendant que dans l'ombre, les blessures que l'on a oubliées continuent de saigner en silence ».

Les mots eurent raison de la voix de Lauren qui ferma la bouche, hébétée. Farhan se laissa pénétrer par les mots, étrangement saisi. Les blessures que l'on a oubliées continuent de saigner en silence ... Instinctivement, son regard se porta de nouveau sur la table des Serdaigle. Un immense sourire aux lèvres, Maya buvait son thé en face de son ami, Thomas Fawley, et aux côtés d'une Bérénice plongée dans les lettres. Face à l'une d'entre elle, la jeune fille bondit de sa chaise et fuit la Grande Salle en courant.

-C'est drôle, on en parlait la semaine dernière ......, souffla Lauren, perplexe. Je continue ?

Farhan sentait que l'interrogation lui était adressée et s'efforça d'opiner d'un geste nonchalant. Il n'était pas le seul à avoir souffert de la guerre ... pas le seul à réclamer des comptes. Parce que c'était ce cet article exigeait, réalisa-t-il alors que les mots de Lauren s'alignaient. Pas étonnant que Fudge se refuse à commenter ... Chaque phrase était un coup de poignard.

-« Il y a deux sortes de justice qui découlent de la guerre », poursuivait Lauren, sans la moindre trace de sourire. « Les grands procès et les grandes pompes, les grands noms envoyés à Azkaban parce qu'après tout, avions-nous vraiment besoin de preuve contre Bellatrix Lestrange ? Ou contre Sirius Black, pris en flagrant délit ? Mais dès qu'il s'agissait de faire réellement son travail et de creuser les filons, la justice a semblé s'effacer et se diluer dans le nectar. Ivre de sa victoire, elle est devenue aveugle des centaines d'affaires qui elles aussi, demandaient leur grand procès, qui elles aussi, demandaient leur réponse et qui ne l'ont jamais obtenu. La justice s'est arrêtée en marche et s'est endormie, saoule et bienheureuse. Pourquoi, monsieur le Ministre ? Pourquoi, madame Bagnold ? Certaines victimes valaient-t-elles plus que d'autres ? Ou bien était-ce les agresseurs que l'on considérait différemment ? Mieux valait ménager certaines grandes familles, après avoir mis derrière les barreaux non un, mais deux des héritiers de la noble maison des Black ... »

-Tonks va adorer celle-là, ricana Charlie.

Ça expliquerait le petit sourire satisfait qui s'étira sur ses lèvres et que Farhan percevait de sa position. Et pour cause, l'article continuait d'interroger ces condamnations avec des mots qui n'étaient pas faits d'encre, mais de vitriol. Ils tombaient de la bouche de Lauren telles des bombes incendiaires.

-« Corruption, incompétence, prenez le qualificatif qui vous parait le mieux adapté, mais ne venez pas nous dire que notre société est guérie et prête à aller de l'avant, main dans la main. Parce que dans notre fuite en avant, beaucoup tomberaient en route, retenus par des cordes solides qui ne se briseront qu'une fois justice rendu. Et nous serions bien naïfs de songer que ... »

-Stop.

La voix de Lauren s'éteignit net à l'ordre de Farhan. Le texte résonnait tellement en lui qu'il en était étourdi. L'idée d'entendre et regarder ses camarades qui s'étaient rassemblés autour de la lecture de Lauren écouter l'histoire et un récit qui lui était si intime lui donnait la nausée. Ignorant les regards qui se portaient sur lui, il chaussa ses lunettes sur son nez et tendit une main à Lauren.

-Désolé ... juste ... je peux ?

Sans un mot, Lauren lui glissa le journal, les lèvres pincées. Le regard qu'elle échangea avec Charlie ne lui échappa pas. Fébrile, il tenta de les ignorer en se plongeant dans le texte. Le cœur du propos, sur l'amnésie générale de la Communauté qui avait creusé leur identité, le frappa en plein ventre. Remets-toi ... il ne s'agit pas de toi ... tout ne tourne pas autour de ton histoire ... Même si cette année avait eu une fâcheuse tendance à le faire. Farhan prit une profonde inspiration pour maîtriser ses émotions, et relâcha lentement son souffle tout en passant au dernier point de la démonstration. Un véritable appel à la Communauté, mais notamment au Ministère, à se regarder dans le miroir. La crise n'avait pas été prise à temps, et la guerre s'était incrusté dans le quotidien des sorciers sans que rien ne soit fait. Puis pour compenser une politique injuste avec des Aurors qui emprisonnaient, combattaient et même tuaient à tour de bras, sans sommations. Combien d'innocents pris dans la tourmente ? Et enfin ...

On veut nous faire croire qu'on sait tout. Que tout est réglé. Mais la violence a toujours engendré la violence. Qui serait resté neutre face aux déchainements des Mangemorts, des marques des Ténèbres qui prenaient littéralement la place des étoiles dans le ciel, aussi nombreuses, aussi scintillante ? Qui serait resté impassible face à la guerre qui se déchainait et qui chaque jour prenait en intensité ? Qui a fait les frais de cette machine infernale qui était lancée à pleine vitesse, jusqu'à ce qu'un bébé nous sauve la mise ?

Ne nous faites pas croire que tout s'est bien déroulé. Que le Ministère n'a pas participé à ce terrible engrenage, cette insupportable surenchère. La violence a toujours engendré la violence. C'est une règle universelle. Le Ministère et tous les décideurs ont une responsabilité dans la guerre, et il serait enfin le temps de l'admettre. Commettre des erreurs, c'est humain. Dans un contexte si troublé, c'est inévitable. Mais quand les erreurs font des victimes, le pardon doit être accompagner d'une réparation.

Maintenant que la Communauté est en paix, les institutions solides et tout danger écarté, il est enfin temps de s'atteler à ce chantier invisible et ignoré depuis trop d'année. Des comptes, monsieur le Ministre. Des comptes pour tous ceux qui ont été oubliés.

La dernière phrase résonna à l'infini dans l'esprit de Farhan. Et puis peu à peu, elle prit un sens différent, des sonorités différentes et se nourrit de toute la colère sourde qui émanait de l'article pour former une toute nouvelle phrase qui tonna en lui.

Je vais la tuer.

La brève impression au premier mot s'était muée au fil de la lecture en certitude. La fin sur les erreurs possibles des Aurors avait totalement bloqué son sentiment. Et lorsque ses yeux descendirent plus bas, jusqu'à la signature, si discrètement imprimés au bas de ce discours qui prenait une place monstre, ses doigts se crispèrent sur le coin de la feuille.

-Nom d'un farfadet ...

-Quoi ?

D'un geste nerveux, il pointa la signature, les derniers mots de cette tribune sanguinaire qui demandait à corps et à cris des comptes. Lauren s'y pencha. Ses yeux s'écarquillèrent.

« J.O. »

-Oh ..., lâcha-t-elle, prise de court. C'est vrai que c'est bien son style mais ... Tu crois ... ?

-Je ne crois pas, j'en suis sûr.

-Sûr de quoi ? s'étonna Charlie.

Farhan lui lança le journal, avec un peu trop de brutalité car même l'habile Charlie peina à le rattraper avec grâce. Rouge de confusion, il l'étala de nouveau sur la table et baissa les yeux sur la signature. Le regard blasé qu'il adressa à Farhan fit monter la tension d'un cran.

-Ce sont des initiales, Farhan. On ne peut pas en vouloir à l'auteur d'un texte pareil de garder l'anonymat, je doute que Malefoy soit ravi ... Et au cas où tu aurais oublié, elle s'appelle Joséphine Abbot.

Sa façon de s'exprimer, très calme, pour désamorcer la nervosité, ne fit que l'irriter davantage.

-Et peut-être que tu ne l'as jamais su, mais son deuxième prénom c'est Odélia. Joséphine Odélia. Abrégé ? J.O.

La bouche entrouverte de Charlie se referma immédiatement. Ça aurait pu être comique. Mais la colère qui montait dans la poitrine de Farhan l'empêchait d'en profiter.

-C'est peut-être ..., commença Lauren.

-Une coïncidence ? Vraiment, tu le crois ? Ses initiales, une conversation qu'on a eue pas plus tard que la semaine dernière ? Et ce style, cette rage, mais s'il vous plait, évidemment que c'est signé Joséphine Abbot !

Face à sa voix qui s'emballait, il serra les dents et ravala ses mots. En conséquence, son poing se serra sur la table à en blanchir ses jointures. Il l'avait senti. Dès la première ligne, dès les premiers mots. S'ils avaient sonné en lui, c'était parce qu'il les connaissait. Et il connaissait leur rage. Il la voyait s'embraser au fond d'iris noisette chaque fois qu'il était question d'Aloyssius Abbot. Un ricanement amer faillit lui déchirer la gorge.

Des comptes, monsieur le Ministre. Bien joué, Jo, tu as failli m'avoir.

-Farhan, même si c'est Jo qui a écrit ça ..., déclara prudemment Charlie. Et alors ?

Farhan darda sur son meilleur ami un regard totalement incrédule.

-Et alors ? Et alors ? Tu ne vois vraiment ce qui me dérange là-dedans ?

-Elle ne te cite pas une seule fois, rappela Lauren en tapotant le journal. Elle ne prend même jamais d'exemple, elle reste très générale dans ses propos ... Farhan ... c'est vraiment rien de plus que ce qu'on pense tous, non ? C'est plutôt ... bien de mettre le Ministère face à ses responsabilités. Je trouve ça plutôt courageux de sa part ...

Courageux ? L'idée répandait un goût de cendre dans sa bouche. Il fixa la signature, ces deux petites lettres qui la trahissaient ouvertement, la dernière ligne, puis le titre. « Un passé qui ne passe pas ». Les effluves mentholés de son thé parvinrent à lui donner la nausée. Non, son nom n'était cité nulle part, Lauren disait vrai. Mais il avait la sensation que son histoire suintait, dégoulinait des mots. Ils reflétaient tellement ce qu'il avait ressenti au plus intime de lui-même ... les voir étaler sur le papier, c'était comme si on les lui avait arrachés. Elle les lui avait arrachés. Il se prit la tête entre les mains, les oreilles bourdonnantes. Malgré les arguments de Lauren et Charlie, la colère pulsait toujours dans sa poitrine. D'autant qu'elle s'entremêlait à ce sentiment moite de gêne honteuse qu'il avait ressenti lorsque Joséphine l'avait repoussé, dans l'infirmerie. Celui du garçon naïf et amoureux ... qui s'était avoir par l'être aimé.

-Elle n'avait pas le droit ... je te jure ... comment j'ai pu oublier quelle tempête elle pouvait être ... ?

Comment avait-il pu croire qu'il était assez pour faire simplement cesser les vents infernaux de Joséphine Abbot ? Son cœur dégringola dans sa poitrine, et se fracassa au fond de son être comme l'illusion dont il s'était bercé.

-Farhan, tu te souviens quand tu me disais de ne pas voir que le mal dans tous les actes de Jo ? intervint Charlie. De me mettre en colère, juste parce que c'est elle et qu'on attend toujours le pire d'elle ?

-Charlie, je te jure que si tu continues à faire celui qui la connait mieux que moi ...

-Ce n'est pas ce que je dis ! Tu l'as mieux cerné que moi, depuis le début, c'est une certitude ! Et c'est pour ça que tu as compris avant tout le monde qu'absolument tous ses actes n'étaient pas induits par la seule volonté de créer le chaos !

-Non je te l'accorde, ce n'est le chaos qu'elle veut créer, martela Farhan avant de saisir l'article pour le montrer à Charlie. Tu sais pourquoi elle a fait ça ?

De nouveau, il échangea un regard avec Lauren. La préfète semblait avoir perdu sa langue et se détourna quand Farhan la toisa, la défiant de lui apporter une réponse. Même Charlie baissa les yeux. Ils ne savaient pas. Evidemment qu'ils ne savaient pas. Farhan lâcha La Gazette qui alla recouvrir la table de ses innombrables feuillets.

-Moi, je sais. Et je te jure que je vais la tuer.

Avant de laisser la gêne et la colère le clouer sur place, il se leva, enjamba le banc et traversa la Grande Salle, les poings serrés dans les poches. Un coup d'œil à la table de Serdaigle lui indiqua que non seulement Joséphine n'était pas descendue, mais qu'en plus Maya avait elle aussi quitté la place. Seul son ami, Thomas Fawley, était resté attablé devant son verre de jus de citrouille et un épais livre. Il leva un regard surpris lorsque Farhan vint se planter devant lui, les muscles du visage trop atrophiés pour ne serait-ce que se forcer à sourire.

-Euh ... bonjour, lança Thomas, déconcerté. Je peux t'aider ? Farhan, c'est ça ?

Ses yeux glissèrent discrètement jusqu'à la place qu'occupait Maya quelques minutes plus tôt. Il sait, fort bien. Et loin de l'apaiser, la constatation le tendit comme un arc. Il sait. Pour lui, lire entre les lignes de l'article serait aussi clair que de l'eau de roche et il saurait ce qu'il avait au fond de son cœur. Joséphine Odélia Abbot. Ses doigts s'enroulèrent autour de sa baguette cachée dans sa poche.

-Tu peux m'ouvrir la Salle Commune des Serdaigle ?

***

-Mille gargouilles ...

Joséphine contemplait La Gazette déployée sur son lit, les yeux écarquillés. C'étaient ses mots, déformés en lettres d'imprimerie, transféré du parchemin au papier, qui s'étalaient furieusement devant ses yeux. Mais ce n'était pas le pire. Le pire ce n'était même pas ce dossier, consistant et interminable que La Gazette avait écrit dans la foulée, listant toutes les affaires obscure et irrésolue et qui mériteraient réouverture. Non, le pire c'était cette enveloppe que Bérénice lui avait amené en catastrophe. Une enveloppe écarlate, des coins de laquelle s'échappait un mince filet de fumée grise. C'était aussi ce que Bérénice fixait, catastrophée.

-Je n'en reviens pas, lâcha-t-elle, les yeux écarquillés. Tu as vraiment réussi à le faire sortir de ses gongs ...

-Une beuglante. Il m'a envoyé une beuglante.

C'était sans doute la plus grande surprise de la matinée. Plus que celle de se faire furieusement réveillée par sa petite sœur avec un journal au visage, y découvrir son article alors qu'elle avait perdu espoir. Son père lui avait envoyé une beuglante. Avant que je le fasse. Quelle ironie.

Repoussant l'enveloppe fumante, elle saisit le journal et reparcourut son article. Elle avait beau l'avoir envoyé, à moitié sur un coup de tête. Simplement emportée par la fièvre et les idées qui s'étaient percutées dans sa boite crânienne à l'en étourdir. Pourtant il n'avait jamais pris de forme concrète dans son esprit, autre que les parchemins parcourus d'une écriture tremblante. Ce papier sous ses doigts lui était étranger. Et pourtant c'étaient bien ses mots, ses phrases et ses pensées qui s'étalaient à la face du monde entier.

Par Merlin. Ils m'ont publiée.

La fierté affrontait férocement le désarroi dans sa poitrine. Elle s'était attendue à être prévenue. Et surtout, à pouvoir prévenir. Farhan et Bérénice en premier lieu. Elle n'avait pas eu ce luxe : c'était même sa sœur qui lui apprenait la chose. Mais depuis qu'elle était entrée dans la pièce, elle n'avait pas le moindre regard sur l'article. Seulement sur la Beuglante.

-Ouvre-la Josie, l'enjoignit-t-elle nerveusement. Tu sais ce qui va se passer si elle explose ... (Elle passa une main nerveuse dans sa chevelure cuivrée). Par Merlin, qu'est-ce que tu as bien pu écrire pour que papa ose une beuglante ? Il a horreur d'étaler son linge sale en public !

-Tu n'as pas lu ... ?

-Quoi ? Non, tu veux rire ? J'ai vu la beuglante et je suis montée directement avant qu'elle n'explose dans la Grande Salle !

Une sagesse d'action digne d'une Serdaigle. Malgré ses doigts accrochés au journal, Joséphine parvint à prendre sur elle et lui tendre. Pas la moindre émotion traversa son visage : froide et analytique, ses yeux parcoururent les lignes avec la régularité d'un métronome. Sa lecture achevée, elle haussa un sourcil.

-Je vois ... (Un léger sourire ourla ses lèvres lorsqu'elle rendit La Gazette à Joséphine). C'est ... édifiant.

-Tu sais, tu as le droit de le dire si c'est nul.

-Je ne pense pas que La Gazette publierait un article « nul » dans ses meilleures pages, rétorqua Bérénice, et son sourire s'accentua. C'est juste ... je ne te pensais pas capable d'écrire quelque chose d'aussi sensé. Beau et destructeur oui, c'est certain et j'ai pu le constater dans ton journal. Mais là c'est aussi construit et argumenté.

-Il ne me manquait plus que ça, une analyse de style de ma petite sœur ..., bougonna Joséphine, blasée.

Bérénice soupira et s'assit aux côtés d'elle. Entre elles, la Beuglante répandait une fumée de plus en plus danse.

-Arrête Josie. Sincèrement, je trouve que c'est un très bel article. Tu dis des vérités que personne ne veut voir.

Joséphine garda le silence quelques secondes, le temps que les mots de sa sœur imprègnent son esprit. Depuis qu'elle avait eu ses mots entre les mains, son cœur battait la chamade, mais le compliment de la si exigeante Bérénice le faisait dérailler. Elle eut à peine le temps de savourer la sensation : la fumée qui s'échappait de l'enveloppe écarlate s'était teintée de noir. Joséphine la saisit, et son estomac se plomba. La chaleur du papier devenait à peine supportable sur sa peau.

-Bon, instant de vérité, souffla-t-elle en s'efforçant de repousser l'angoisse. Prête à entendre papa hurler pour la première fois ?

-Oh que oui, affirma Bérénice, déterminée. Feu.

Elle posa une main sur son épaule, un renfort silencieux qui donna la force nécessaire à Joséphine de prendre sur elle et d'enfin glisser ses doigts sous le papier pour ouvrir l'enveloppe. Il suffit d'une petite ouverture pour qu'elle s'anime : la Beuglante s'échappa de ses mains, prit son envol pour se flanquer devant elle, l'ouverture noire ouverte comme une bouche parée d'un rouge à lèvre écarlate. L'impression troubla Joséphine, qui frémit lorsque la voix tonna dans le dortoir :

-MAIS OU AVAIS-TU LA TÊTE ?!

Bérénice pointa immédiatement sa baguette sur la porte pour insonoriser la porte. Tout juste à temps : les oreilles de Joséphine bourdonnaient déjà, agressée par cette voix qu'elle peinait à reconnaître.

-Parce que tu penses qu'on n'a pas tous compris qui était derrière tout ça ? Tu te penses si maligne, ma pauvre chérie ... Comme tu es transparente, comme tu es prévisible !

Les mots étaient lâchés comme des bombes dans son cœur. Et pourtant la blessure suprême ne furent pas le contenu, mais la voix que les enrobaient furieusement et les faisaient cingler aux oreilles de Joséphine. Loin d'être masculine, elle avait des accents criards et aigus qui attestait bien les mots d'une femme.

-Comment OSES-TU, Joséphine Odélia Abbot t'attaquer ainsi à ta propre famille ? As-tu pensé une seule seconde à ta pauvre sœur ? Ophelia doit épouser le petit-fils de Cornelius Fudge ! C'est sa belle-famille que tu as déchiré de tes griffes ! La pauvre est morte de honte, elle s'est enfermée dans sa chambre en lisant l'article ! C'est son futur nom que tu salis !

-C'est maman, murmura Bérénice, accablée.

Joséphine hocha gravement la tête. Après le plomb qui venait douloureusement alourdir son estomac, une boule brûlante vint lui enserrer la trachée.

-T'attaquer au Ministre en personne ! Même de ta part, je dois dire que je suis déçue ... Tu en veux donc à ton père a ce point ? Après tous les sacrifices qu'il a fait ? Un homme honorable qui s'est battu contre les forces du mal et tu OSES l'accuser lui, ses collègues et son corps de métier d'avoir mal agi ? D'avoir laissé le mal nous gangrener ? D'avoir FAIT du mal ? Après tout ce qu'ils ont subi pendant la guerre ! Toutes ses fois où ils ont risqué leurs vies ! Avec le nombre de fois où ton père a frôlé la mort et où j'ai tremblé chez nous en vous tenant contre mon sein ! Mais te rends-tu comptes des âneries que tu profères simplement pour faire du mal à ton père ? Tu as toujours été une enfant capricieuse mais là force est d'admettre que tu atteins des sommets ma chérie. Je t'ai soutenu, défendu. J'ai attendu, espérant que la maturité viendrait avec l'âge, avec la perspective de la fin de Poudlard. Je vois que mes espoirs étaient vains. Tu as fracassé mes espoirs. Il est temps que je me rende à l'évidence. Tu es une gamine immature qui cherche l'attention par tous les moyens.

Non, ne pleure pas, s'intima Joséphine alors que les larmes venaient lui brouiller la vision. Son corps avait instinctivement réagi face à ces mots qui restaient une blessure au fond d'elle. Bérénice également, en resserrant sa prise sur son épaule.

-Tu ne te rends pas compte dans quels draps tu t'es mise. Ton père que dont tu décris tant les actions t'aime encore assez pour couvrir tes arrières parce que tu risques d'être attaquée pour diffamation avec cet ignoble article mensonger, petite maligne ! Par la future famille de ta sœur ! Alors abstiens-toi de prendre la plume de nouveau par pur esprit de contradiction, ça ne te mènera que devant un tribunal ! Je rédige d'ors et déjà une lettre d'excuse et de rétractation que tu auras tout intérêt à signer si tu tiens à ta famille. Nous allons avoir une longue discussion à ton retour, jeune fille. J'ai été patiente, maintenant ça suffit. Tu embarrasses ton aînée, tu me déçois profondément et tu heurtes ton père. Bien joué, j'espère que tu es fière de ton petit effet. Parce que la fête est finie, Joséphine Abbot.

Sur cette promesse menaçante, la lettre se déchira en mille morceaux, ne laissant que des chiquettes, des cendres et un silence de plomb. Alors que leurs lourdes respirations étaient le seul meuble de la pièce, Bérénice le fendit d'une tremblante inspiration. Sa main était soudée à l'épaule de Joséphine.

-Ne l'écoute ... enfin pas tout, elle ne sait pas, elle ne comprend pas pourquoi tu fais ça, à quel point c'est juste ... Je te promets, moi je soutiens totalement ton article ... Enfin ... à part pour Lili ...

-Je n'y avais pas pensé, avoua Joséphine dans un filet de voix.

Avant de fondre en larme face à l'intensité de la nervosité, elle se leva d'un bond pour faire les cent pas et piétiner les restes de la beuglante de ses pieds nus. Elle ne savait pas réellement pourquoi les larmes montaient, mais elles avaient été présentes dès que l'article s'était étalé devant ses yeux. Elle était un chaudron plein à raz-bord d'une potion où bouillonnaient des éléments contradictoires.

-Je n'y ai pas pensé, répéta-t-elle, sincèrement désolée. Qu'on allait me traiter de gamine immature et que ça allait être le grand retour en triomphe de la tempête Joséphine, ça je m'y attendais mais j'ai oublié ... ça m'a complètement échappé que ça pouvait emporter Lili ...

-Il faut dire que son fiancé ne brille pas par son charisme, on a vite fait de l'oublier, tenta de plaisanter Bérénice.

Joséphine lui tourna le dos, la mâchoire serrée. Elle n'était pas d'humeur à rire. Elle s'en voulait terriblement d'avoir pu blesser sa sœur aînée dans sa quête de vérité. D'avoir oublié la situation dans laquelle elle se trouvait. Son visage fermé chez Madame Guipure, alors que les préparatifs de son mariage l'oppressaient, lui revint à l'esprit. Elle aurait dû y penser ...

-Tu penses que ça veut dire quoi le « la fête est finie » ? interrogea-t-elle plutôt Bérénice.

-Que ça risque de ne pas être drôle au moment de rentrer à la maison, évalua-t-elle avec prudence. Tu vas être cloîtrée à la maison, elle va contrôler tous tes faits et gestes ...

-Mais elle pense sincèrement qu'elle a le pouvoir de faire ça ? Je suis majeure Berry !

-Elle a l'air remonté ... C'est vraiment surprenant que ce soit elle qui réagisse ainsi, elle n'a jamais élevé la voix, jamais contre personne ... On se focalise sur papa, mais elle non plus on ne l'a jamais entendu crier. C'est une lady, maman ... C'est son éducation Rosier, une sang-pure, elle non plus en fait pas de vague c'est surprenant qu'elle ose envoyer une beuglante ... Je me demande ce que grand-mère Melinda aurait dit ...

-C'est vrai que ce n'est pas d'elle que j'attendais une réaction, convint Joséphine, morose. Ce n'est même pas pour ça que j'ai envoyé ce papier, j'ai juste pensé ... enfin ... qu'il pouvait être bon, remuer enfin les choses. Faire enrager papa, c'était du bonus. Comprendre pourquoi il avait parlé de « bévue »...

-Mais c'est maman qui rétorque ? poursuivit Bérénice, estomaquée. Avant papa, avant Lili ? Qu'on arrête un peu, Lili aussi aurait été capable de t'envoyer une beuglante si elle était vraiment vexée ! Et cette histoire une lettre de rétractation, presque au nom de notre famille ? Je veux bien que tes actions rejaillissent sur notre nom, mais pour l'instant ton article est anonyme et franchement qui a compris que tu cachais derrière tout ça à part nous ? Une lettre de rétractation ? Ce serait une lettre de revendication, mais à quoi elle ... ?

Elle s'interrompit brutalement, et son regard s'écarquilla sur sa sœur. Elle semblait en tel état de choc que Joséphine sentit son pas ralentir au point de s'immobiliser.

-Quoi ?

-Rosier ... Ste-Mangouste ..., chuchota-t-elle, tétanisée. Les papiers de l'adoption de Farhan et Maya, tu les as encore ?

-Par Merlin, Berry, maintenant ?!

-Josie !

Joséphine soupira, exaspérée, mais pointa la valise qui dépassait vaguement de sous son lit. Bérénice n'eut pas à fouiller longtemps pour dégager la liasse de parchemin qui l'intéressait et fouiller frénétiquement dedans. Installée à même le sol sans plus un regard ni pour sa sœur ni pour la beuglante qu'elle piétinait, elle venait à peine de mettre la main sur le graal quand quelques coups légers furent frappés à la porte. Elles sursautèrent dans un même ensemble. On venait de briser leur bulle d'émotivité et de concentration.

-Oui ? lança Joséphine, prudente.

-C'est Thomas Fawley, répondit une voix masculine mal assurée de l'autre côté du battant.

-Dégage-le, répliqua Bérénice sans état d'âme, perdue dans les parchemins.

-Ton copain est là, ajouta Thomas. Je peux le faire entrer ?

Le froissement infernal des feuilles de parchemins cessa, indiquant que Bérénice aussi venait de se figer à l'annonce. Joséphine enfouit le visage entre ses mains, le cœur battant à tout rompre. Vraiment, tout son être aspirer à fondre en larme, prendre son balai et fuir dans les montagnes pour hurler. Tout lui tombait dessus alors qu'elle venait tout juste de se réveiller un quart d'heure plus tôt. Elle n'était pas prête à affronter les conséquences de ses actes. Ses actes la dépassaient.

-Evidemment, murmura-t-elle en baissant les bras, écœurée. Evidemment que maman n'est pas la seule à avoir deviner ... clairement je n'ai pas été aussi maligne que je l'avais pensé ...

-Tu ne lui avais pas dit... ?

-Non, j'en ai parlé à personne ...

Bérénice soupira et ramassa les parchemins qui l'intéressaient avant de se relever, les épaules rejetées en arrière en une position digne et fière.

-Pas la chose la plus réfléchie qui soit ... mais très bien. (Elle hésita quelques secondes, le regard rivé sur la porte). Ça va aller ?

-J'ai une terrible envie de sauter avec mon balai par la fenêtre. Mais ... (Elle prit une tremblante aspiration et lissa son tee-shirt de pyjama). J'ai écrit cet article. Je l'ai envoyé à La Gazette. Alors maintenant il faut que j'assume, non ?

-Il n'a aucune raison d'être en colère ..., entonna Bérénice, gênée.

-Je doute qu'il soit monté dans ma tour pour m'embrasser et me féliciter, ricana amèrement Joséphine. Allez, file. Merci pour la beuglante.

Bérénice resta un instant sur place, indécise. Il fallut que quelques nouveaux coups timides résonnent pour qu'elle s'ébroue et quitte la place, les parchemins pressés contre sa poitrine. La porte s'ouvrit en un cliquetis qui sembla déchirer le silence. Joséphine profita de ses quelques secondes de répit pour souffler, marcher, expier sa nervosité grandissante. Elle était à fleur de peau, à peine habillée d'un long tee-shirt de Quidditch et d'un short, les yeux encore brûlant de sommeil après avoir veillé tard. Elle n'était pas en état. Pas en état d'affronter l'ouragan qu'elle avait provoqué. Pas en état d'affronter Farhan.

Quelques mots murmurés échappèrent à Joséphine, jusqu'à ce qu'enfin le profil de Farhan ne se découpe dans l'embrasure. La jeune fille se crispa d'entrée, dans l'attente. Après le venin de sa mère, sa maigre capacité à encaisser les coups était bien entamé. Et un coup d'œil sur le visage fermé de Farhan lui indiqua qu'elle n'était pas au bout de ses peines. Elle aurait voulu éviter son regard, fuir encore une seconde, repousser cette confrontation dont elle ne voulait pas, mais lorsque ses prunelles sombres la happèrent, elle fut paralysée, comme un lapin pris dans les phares. Pas de douceur, pas de langueur cette fois. Elles avaient la dureté de l'onyx. La mâchoire contractée, il jeta quelque chose sur son lit. Joséphine n'eut pas besoin de dessin. Elle savait pertinemment.

-Qu'est-ce que je t'avais dit ? lâcha-t-il d'une voix qui vibrait de colère.

Le ton n'était pas haussé et le timbre encore mesuré, et pourtant elle roula comme le tonnerre dans l'air. Joséphine croisa ses mains dans son dos et ses doigts s'unirent à s'en blanchir les jointures.

-Une chose, Joséphine, reprit Farhan sans attendre sa réponse. Je t'ai demandé une seule chose, une seule et unique chose pendant que je t'épaulais, te prenais par la main pour que tu remontes la pente et te prouver de toute les manières du monde que je tenais à toi. Une seule et unique chose : que tu ne m'impliques pas dans tes règlements de compte avec ton père.

-Je ne sais pas si tu as pris la peine de le lire en entier, commença-t-elle en relevant le menton. Mais ...

-... je ne suis pas cité. Pas une seule fois. Tu sais quoi ? Je m'en fiche. C'est quand même mon histoire que tu utilises, elle qui t'a donné la base pour tout ça. C'est le prétexte que tu as choisi pour faire dérailler ton père et ça je ne peux pas l'accepter, Joséphine.

-Je n'ai pas écrit ça simplement pour faire dérailler mon père, rétorqua-t-elle, indignée. J'ai écrit ça parce que ... parce que ...

L'éloquence la fuyait lamentablement et dans un mouvement désespéré, elle attrapa une plume qui gisait sur sa table de nuit. Toutes les sensations qui bouillonnaient dans ses veines affleurèrent à ses doigts dans l'espoir de jaillir sur l'encre et d'enfin s'écouler. Si seulement elle pouvait les tracer dans l'air ... Faute de quoi, elle passa sa seconde main dans ses cheveux pour garder le fil de ses pensées.

-Je devais l'écrire, c'est tout. J'ai pensé à toutes nos conversations, à toutes nos réflexions, à mes réflexions de moi à moi qui étaient restées dans ma tête et c'est juste sorti, comme ça. Ça avait besoin de sortir. De se concrétiser. Et sans comprendre comment je me suis retrouvée avec cet article dans les mains et je me suis simplement dit que je ne pouvais pas le laisser dans le tiroir. Qu'il y avait des choses vraies, des choses à ouvrir. Il y avait quelque chose à faire. Je devais le faire.

-Pourquoi ?

Pourquoi. Elle aussi s'était posé la question, tous les jours depuis qu'elle avait laissé Athéna prendre son envol avec entre ses serres le fruit d'un coup de tête. Son plus brillant coup de tête, songeait-t-elle toujours. Mais peut-être aussi son plus explosif. C'était justement parce qu'elle avait tout ce temps pour s'interroger que les mots lui vinrent si facilement :

-Mais ... mais parce que c'est juste ! Enfin c'est surtout injuste, tout cet obscurantisme autour de la guerre ! Entre les Malefoy qui s'en sont sortis, la grand-mère de Lauren enfermée arbitrairement, et des histoires comme la tienne sur laquelle on met des verrous, pourquoi tant de verrous ? Je n'ai pas le droit d'avoir une voix qui m'est propre, de voir par-dessus toi ? Parce que ça te dépasse, Farhan ! Ce n'est pas juste toi et tes parents, pas moi et mon père ! C'est un vrai problème qui gangrène la Communauté Sorcière, peu importe ce qu'on nous dit ! C'est à l'origine de tes maux, c'est à l'origine des miens et ceux de combien d'autres ? Je n'ai pas le droit de mener ce combat ? De juste être révoltée ?

-Révoltée, ça je veux bien l'entendre, ricana Farhan, dépité.

L'amertume qui transperçait les mots attinrent Joséphine avec un brin trop de violence. Une de ses mains se referma sur sa poitrine, agrippant le tissu et surtout, bien caché dessous, le camé aux trois Grâces qui ne la quittait jamais. Il était là, la vieille ombre, le vieux serpent de mer dont jamais elle ne parviendrait à se débarrasser. Que sa résurgence émane de Farhan ne rendait la chose que plus douloureuse.

-Non, lâcha-t-elle froidement. Non, ne fais pas ça. Ne me ressors pas Joséphine la Tempête qui provoque le chaos sur son passage sans considération. Pas toi. Pas maintenant.

-Je suis désolé, répliqua Farhan en écartant les bras, l'air de se dédouaner. Je n'ai pas envie, moi aussi j'ai combattu cette thèse et Merlin que j'ai dû faire des efforts pour trouver un sens à tout ce que tu es capable de faire, Jo ! Mais là ça ressemble à s'y méprendre à juste une immense tornade qui n'a réfléchi à rien, qui agit et balaie sans prendre en considération les autres !

-C'est faux. Ce n'est pas ça, j'ai juste ... une conscience ...

-Une conscience ? répéta Farhan, incrédule.

De nouveau, un rire étrange lui déchira la gorge et il fit quelques pas dans la pièce, dépassé, à court de mot. Il tourna le dos à Joséphine quelques secondes et la ligne de ses épaules s'éleva alors qu'il prenait une importante respiration avant de tout relâcher dans l'air. Joséphine patienta. Elle le connaissait assez pour savoir qu'il avait besoin de ses petits exercices respiratoires pour reprendre le contrôle de ses nerfs ... peut-être que c'était la porte ouverte à une conversation plus calme et au fond d'elle le soulagement éclata. Quelques secondes plus tard, Farhan se retourna de nouveau sur elle. Son visage était toujours empreint d'une impressionnante gravité, mais la colère crépitait moins dans ses iris.

-Très bien, reprit-t-elle d'un ton résolument égal. Tu es révoltée ? Parfait. C'est tout à ton honneur. Jo, je ne t'en veux pas pour le fond. Tu as raison. Tu as tellement raison, jusqu'au moindre mot. C'est d'une justesse à couper le souffle. Et j'aurais apprécié pouvoir te le dire si seulement tu m'avais laissé le lire avant que l'aie envoyé.

-Je suis désolée. J'aurais dû c'est vrai. Mais ...

-Mais ? insista Farhan, implacable.

Joséphine ferma les yeux, déstabilisée. C'était presque pire, cette fausse sérénité, cette colère froide et logique. D'autant que l'aveu qu'elle s'apprêtait à faire n'était pas du genre à apaiser les tourments :

-Je ne pouvais pas prendre le risque que tu m'empêches de l'envoyer, avoua-t-elle finalement, à moitié honteuse. Je voulais voir ce que ça valait. Ce que je valais, quelque part. Je pensais ... qu'on me préviendrait, que j'aurais le temps de t'en parler, de t'expliquer ... et là Bérénice me réveille il y a vingt minutes et je vois que ... que ...

Sa voix dérailla légèrement, laissant apercevoir le flot d'émotion qui menaçait d'avoir raison d'elle et que cette conversation ne faisait qu'alimenter. Joséphine allait finit par imploser, elle le sentait, physiquement et émotionnellement. Farhan aussi devait le voir, le sentir. Il la contempla longuement. Elle chercha désespérément une lueur de pitié dans ses yeux sombres, un début de compréhension qui allégerait la tension de ses traits. Mais rien de tout ça. Non, son visage n'était qu'un masque. Ses prunelles lasses et courroucées à la fois.

-Ça ne fait qu'étayer ce que je dis. Tu l'as envoyé sans réfléchir, en ne pensant qu'à toi. Et ne me fais pas croire que c'était juste pour savoir ce que tu valais. C'est peut-être ce dont tu essaies de te convaincre pour te rassurer, mais on sait tous les deux que c'est faux. Je te connais, je connais ton venin, et je l'ai lu dans chaque mot. Cette lettre ouverte, tu l'as écrite en ayant ton père dans chacune de tes pensées. Ce n'est pas une plume que tu tenais, c'est un poignard.

-Tu parles comme ma mère, remarqua-t-elle, dégoûtée.

-Et bien peut-être que parfois tes parents ont raison, Jo ! Que parfois oui tu te comportes comme une enfant de cinq ans, comme parfois tu te laisses emporter ! Nom d'un farfadet, tu imagines la réaction de Maya lorsqu'elle lira ça ? Alors qu'on pensait enfin laisser cette histoire derrière nous, tu remues le couteau dans la plaie ?!

Il frappa le journal qui gisait toujours sur ses draps et dans le mouvement, quelques feuilles de parchemins volèrent à terre. Et comme malgré tout ce garçon était d'une politesse désarmante, il se baissa pour ramasser ... et attrapa avec les parchemins que Bérénice fouillaient quelques minutes plus tôt, observa Joséphine, horrifiée. Les yeux de Farhan parcoururent vaguement les lignes, irrité.

-Ne me dis pas que c'est le rapport de ton père ...

-Farhan ...

-Tu fouilles encore ? C'est pour ça que tu as écris cet article, une quatrième raison ? Ta conscience, savoir ce que tu vaux, régler tes comptes avec ton père et encore – encore ! – fouiller dans mon histoire ?!

La colère froide et fatiguée semblait laisser place à la fureur. Joséphine aurait pu se défendre, arguer que c'était Bérénice qui avait voulu fouiller les papiers, elle qui les avait sortis ... Mais les mots tombèrent en cendre sur sa langue. Ça aurait été incroyablement hypocrite. Elle les avait consultés des dizaines de fois depuis que Brulôpot leur avait appris pour l'Obscurus de Shahrazade. Non, elle n'était pas innocente sur ce point.

-Ce n'est pas clair. Il manquait quelque chose.

-Ce n'est pas à toi d'en décider, cingla-t-il vertement.

-Mais à toi non plus ! Ce n'est pas à toi de choisir la vérité Farhan ! Elle existe, elle est là c'est juste que personne ne veut la voir !

-Ma sœur est morte et a probablement tué mes parents, qu'est-ce que tu veux que j'apprenne de plus horrible que ça ? s'écria Farhan, hors de lui. Mais à quoi tu joues, qu'est-ce que tu cherches ? Tu veux impliquer ton père à tout prix, c'est ça ? L'envoyer à Azkaban, pour régler à la fois ton problème et le mien ?

Ne pleure pas. Pourtant la frustration menaçait de faire déborder les larmes et Joséphine mourrait envie de mordre dans son poing à sang pour les réprimer. Faute de quoi, elle s'exclama :

-Pas du tout ! Farhan, ça aurait été n'importe quel autre Auror, n'importe quelle autre personne au monde que j'aurais continué de trouver ça louche, que j'aurais continué d'être obsédé par ce détail, ce ... Les signatures Farhan, je suis désolée ça ne s'invente pas qu'une même personne ait signé vos dossiers !

-Tu penses quoi, justicière et courageuse parce que tu es à la recherche de la sainte vérité ? Mais arrête, Joséphine, arrête ! ça n'a rien de courageux, tu n'as jamais rien eu de courageux, c'est pour ça que le rouge n'est pas ta colère et que la révolution est mauvaise pour toi ! Tu veux qu'on regarde notre passé en face ? Mais regarde-toi, tout respire la lâcheté ! Tu envoies ça seule dans ton coin, sous un pseudonyme comme pour espérer que tout passe inaperçu ! Mais assume !

-Mais j'assume ! Regarde, j'assume devant toi, je te l'aurais dit, je t'en aurais parlé !

-Après coup, répliqua Farhan avec aigreur. Je suis désolé Joséphine, ça ne compte pas. Si je comptais vraiment, si j'étais réellement important dans ta vie, tu m'aurais montré cet article. Si je comptais, tu arrêterais de fouiller dans ma vie comme tu le fais depuis le début de l'année. Ce que tu as fait, ce n'est pas plus différent que de venir devant Maya et moi et de nous annoncer qu'on est potentiellement frère et sœur ! Tu nous as mis devant le fait accompli ce jour-là, Jo. Tu as bouleversé nos vies alors que ... Tu as été ... c'était horrible, d'accord ? Et là tu recommences sauf que ...

Farhan ferma les yeux et se passa une main sur le visage. La colère commençait à se fendiller sur son visage et derrière ce vernis éclatait une profonde lassitude et un éclat blessé au fond de ses prunelles.

-Ce n'est pas possible, ce n'est pas possible ..., souffla-t-il, la main vissée sur la tempe. L'article j'aurais pu ... t'écouter, me calmer, je n'en sais rien ... mais que tu fouines encore, Jo ... encore, encore et encore ... tu t'arrêteras quand ? Lorsque Maya fera une dépression nerveuse et qu'on finisse tous les deux broyés ? Hein ?

Joséphine voulut répondre, se défendre, mais tout resta bloqué dans sa gorge. Lorsque Farhan la considéra de nouveau, son regard avec quelque chose d'inédit, comme s'il la contemplait pour la première fois.

-Je pensais que c'était différent, lâcha-t-il d'une voix rauque. Peut-être que j'ai été trop naïf ...

-Non, souffla Joséphine, brusquement paniquée. Non, non, bien sûr que non ! Oui je réfléchis toujours, oui je pense toujours qu'il y a une pièce qui t'échappe mais ... Farhan, malgré ça je me taisais, pour toi, pour Maya, je ... Si je voulais vraiment faire dégoupiller mon père, si vraiment j'avais voulu continuer à fouiller je t'aurais cité, d'accord ? Je ne l'ai pas fait, ça ne m'a pas même pas effleuré l'esprit ... Je te jure, pas un seul instant ...

-C'est ça. (Il désigna de nouveau le journal du menton). Tu as une drôle de façon de te taire ...

Elle perdait pied. Rien de ce qu'elle pouvait lui dire ne pourrait le convaincre. Aucun argument ne trouvait de résonnance. Tout ce qu'elle semblait prouver allait dans le grand sens de Joséphine la Tempête. Mais c'est faux ... c'est tellement faux ... Pourquoi ... Berry l'a dit, c'est peut-être la meilleure chose que j'ai produite, pour un bien tellement plus haut que moi, pourquoi ... Et s'il avait raison ? opposa une autre voix, sournoise, restée en sommeil depuis trop longtemps. Et si c'étaient des illusions dont elle se berçait pour masquer un cœur égoïste ? Joséphine voulut repousser cette idée, ce poison qu'elle pensait avoir réussi à expurger toute sa vie, mais il prit solidement racine dans son esprit, empoisonnant totalement ses capacités de réflexion. Ils avaient réveillé ses vieux démons. Déjà elle se sentait tanguer.

-Farhan ..., laissa-t-elle échapper, dépassée, désespérée. Arrête, s'il te plait. Je t'aime.

Son ultime recours, la dernière chose qui demeurait solide et claire dans le chaudron bouillonnant qui lui servait d'enveloppe corporelle. Mais comme tous ses arguments, il glissa comme de l'eau sur Farhan. Imperméable, impassible, il se contenta de longuement secouer la tête. A chaque mouvement, le cœur de Joséphine tombait un peu plus, mais le coup fatal était à venir. Cette fois, Farhan ne pouvait se contenter de se taire. Les actes devaient s'accompagner de mot. Des mots terribles.

-Si c'est ça ta façon de m'aimer, je préfère qu'on s'arrête là.

Ils chutèrent de ses lèvres et aussitôt ses yeux brillèrent et il recula, comme s'il ne faisait pas totalement corps avec ses propos. Mais avant de craquer, avant d'être tenté, avoir de laisser échapper quoique ce soit d'autre que cette résolution, il baissa la tête et partit. Comme ça. En silence.

Pour laisser Joséphine seule avec ses démons qui la déchiraient de l'intérieur.

Après un instant de désœuvrement, elle se mit à suffoquer. Elle ne comprenait pas toutes les implications, les mots avaient du mal à s'imprimer durablement dans son esprit. Ils tanguaient, volatiles, se percutaient dans sa boite crânienne. Une seule réalité émergeait du chaos. Elle était en train de perdre Farhan.

-Non, s'étrangla-t-elle.

Le premier qui jaillit fut fondu dans un souffle. Le second accompagné d'un coup de pied dans les parchemins et le rapport de son père. Le troisième étouffé dans un oreiller dans lequel ses ongles s'enfonçaient désespérément. Elle n'avait réussi à ne produire que deux belles choses de cette année, deux choses qui l'avaient transcendée, qui l'avait dépassé, qui lui avait enfin permis de voir par-delà elle-même. Cet article et Farhan. L'un détruisait l'autre. Le théorème de base était donc vrai. Joséphine détruisait tout ce qu'elle touchait. Rien de bien ne pouvait émaner d'elle.

Elle traversa sa chambre comme une tempête. Bientôt les morceaux furieusement déchirés de La Gazette vinrent tapisser le sol. Les restes fumants de la beuglante furent jeté par la fenêtre. Elle donna un grand coup de pied dans son chaudron et son contenu – des livres, des outils, des fioles – alla se répandre sur le sol et subir sa noire humeur. Ce fut un miracle que dans sa bulle de mauvaise pensées, Joséphine perçoivent qu'on tambourinait à sa porte.

-Jo ? appela Bérénice derrière le battant. Josie, c'est moi je peux entrer ... ? Je viens de voir Farhan descendre ... Josie, il faut qu'on parle, c'est urgent ... Maya est avec moi. Je peux entrer ? Josie !

Ce ne fut qu'en essuyant ses joues que Joséphine réalisa que les larmes les avaient depuis longtemps dévalés. Recroquevillée à même le sol contre son lit, elle hoqueta, seule au milieu du chaos. L'idée que Bérénice la voit dans cet état ne fut qu'ajouter à son désarroi. Perdue, elle promena ses yeux au milieu de sa chambre dévastée, entre les chiquettes de parchemins et les fioles brisées. Ce fut le moment que choisit le soleil pour revenir dans sa vie, traverser de ses rayons implacable les grandes fenêtres de la chambre des Serdaigle et venir se fractionner en mille leurs d'or sur le tranchant de son petit couteau de potion.

Un grand calme s'éprit d'elle et elle tendit le bras pour récupérer l'objet, fascinée et apaisée par la façon dont le soleil courrait sur sa lame en fonction de l'inclinaison. Elle joua quelques secondes et fit apparaître sur les murs des taches de lumières que ses yeux suivirent tel un chat.

Puisqu'elle en était là, songea-t-elle en testant la pointe du couteau sur son doigt. Il était temps d'en finir.

***

C'est le moment où je vais me cacher quelque part parce que vous me détestez ...? 

Malgré cette fin, qui, j'en suis sûre, doit vous effrayer quelque peu, j'attends vos avis sur le chapitre avec nervosité ... 

La fin est tellement lourde que je n'ose pas vraiment faire de commentaire, mais je voulais revenir sur l'article. Alors même si tout le monde me dit que j'aurais dû être journaliste (sportive ahah), je me trouve extrêmement nulle en style journalistique (contrairement à Anna qui a vraiment la plume pour ça, vraiment à chaque fois qu'elle fait un article c'est la meilleure partie du chapitre). BREF tout ça pour dire qu'à chaque fois je ne me sens jamais s'écrire un article au complet et ça a été le cas ici. J'espère que ça ne vous a pas dérangé de n'avoir que des extraits et que j'ai su faire passer l'essentiel du propos dans ces brides et dans la narration ! 

Bon ... sur ce ... A la prochaine? 


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