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Chapitre 49 : Les ombres de l'histoire

Et qui se présente devant vous avec 1K d'abonné.es ?

ça fait quelque chose ce petit chiffre mine de rien ! Infiniment merci à tous.tes de me suivre et de faire vivre mes histoires, vous êtes incroyables <3 

Et si on fêtait ça avec un chapitre qui de toute manière était déjà prévu? 

Je poste en direct depuis la belle montagne (bon aujourd'hui il faut trop moche pour skier, mais j'en ai profité toute la semaine, si bien que mon nez a cramé !). J'espère comme toujours que vous allez tous bien et que les terminales ont survécu aux épreuves du bac ! alors, comment ça a été? 

Maintenant chapitre ! Bonne lecture les enfants et profitez bien ! 

***

L'ignorance fait notre tranquillité ; le mensonge notre félicité. 

- Anatole France 

***


Chapitre 49 : Les ombres de l'histoire

Samedi 27 avril 1991

La bouteille à la mer n'a pas reçu de réponse.

Et j'en suis furieuse parce que Bérénice, elle, a reçu sa petite lettre avant-hier. Et moi rien. Je prends sur moi pour mettre mon cœur sur parchemin, parce que toute manière je sais qu'écrire mon cœur, c'est l'unique manière pour lui de s'exprimer, je fais le premier pas, et c'est Bérénice qui reçoit la lettre.

Ça se finir par un meurtre, qu'on se le dise. Joséphine ouvre pas son cœur pour des prunes. Farhan m'a déjà empêché d'en envoyer une deuxième nettement plus enflammée. Et en plus aujourd'hui il va voir son père. Et demain il révise avec Tonks. Il m'a demandé si je voulais me joindre à eux.

Déconne pas O'Neil. J'ai des principes.

***

Depuis quelques jours, Farhan avait la sensation d'être couvé. Par Joséphine qui s'était donnée pour mission de lui redonner le sourire – et il devait l'admettre, elle avait été douée en l'exercice : penser à quelqu'un d'autre qu'elle lui réussissait. Par Charlie qui craignait les répercussions des dernières révélations et surtout que Farhan l'estime responsable – mais vu l'acabit de la chose, il avait totalement oublié que son meilleur ami avait enquêté dans son dos. Bref, depuis quelques jours, Farhan avait l'impression d'avoir sans cesse une paire d'yeux inquiète qui le suivait à la dérobée. Impossible d'être seul : la brûlure du regard ne s'estompait pas.

Mais alors jamais, au grand jamais il n'avait songé être un jour couvé par Minerva McGonagall en personne.

Contrairement à une professeure Chourave assez maternelle – voire trop – ou un professeur Flitwick porté sur la bienveillance, McGonagall n'avait jamais été adepte de faire de sa classe un cocon. Et pourtant elle était là, debout devant le grand escalier du hall, un parchemin à la main et à réajuster sans cesse ses lunettes d'un geste nerveux. Pour la centième fois, elle vérifiait l'autorisation de sortie que Nolan O'Neil avait fait parvenir par hibou express pour que son fils puisse venir le visiter.

-Les visites de Ste-Mangouste se terminent à vingt heures, mais soyez là pour dix-huit heures trente O'Neil, je m'en voudrais que vous ne puissiez pas dîner, déblatéra-t-elle en redressant ses lunettes pour la millième fois.

Et c'est moi qui aie un tic. C'était Joséphine qui lui avait fait remarquer qu'il ne pouvait pas s'empêcher de toucher ses lunettes – les retirer, les essuyer, les replier. Quand il s'en était défendu, l'ensemble de ses camarades – comprenant ces traitres de Charlie et de Tonks – lui était tombé dessus pour soutenir la jeune fille. Ça m'apprendra à sortir avec Joséphine Abbot ...

-Je serais là pour dix-huit heures trente, professeur.

-Mais si vous souhaitez prolonger la visite ... Oh, vous viendrez me voir dans mon bureau, je tâcherais de vous trouver de quoi dîner ...

Farhan savait sa professeure être une spécialiste des Métamorphose, mais muer cette femme rigide et rompue à l'excellence en une mère-poule digne de Molly Weasley relevait du tour de force. Mais comme cela révélait le gouffre sinistre dans lequel il était englué et toute la pitié qu'elle devait avoir de lui, il éviterait de relever la chose.

-Ne vous donnez pas tant de peine, je serais là à temps, promit Farhan en s'efforçant de sourire. Merci pour tout ...

-C'est la moindre des choses, O'Neil, assura McGonagall avec un regard pénétrant. Et si vous avez besoin de quoique ce soit ...

-Je connais le chemin de votre bureau, ne vous en faites pas. Ça fait bientôt sept ans que je parcours cette école.

-Sept ans, oui, soupira McGonagall avec un hochement de tête. Et croyez-moi, vous avez bien grandi, O'Neil. (Sa bouche se pinça une seconde avant qu'elle ne lâche du bout des lèvres : ) et quand je vois ce que vous êtes devenu, peut-être que ... j'aurais dû céder à mon instinct, il y a trois ans. Vous auriez été bon.

Farhan mit quelques secondes à comprendre où elle voulait en venir avant d'être projeté à la fin de sa quatrième année à la fin d'un cours de métamorphose particulièrement ardu, si intense qu'il l'avait laissé frustré. Là, sa directrice de Maison l'avait appelé à son bureau, et lui qui avait été un garçon discret qui avait rarement entendu son nom sous les intonations sèches de McGonagall, s'était avancé presque tremblant de peur. Sincèrement, elle avait dû rire intérieurement de la tête qu'il faisait lorsqu'elle lui avait simplement annoncé hésiter à le nommer préfet pour l'année qui s'annonçait. La surprise et le soulagement l'avait tellement étourdi qu'il s'était à peine entendu décliner. Encore maintenant, il peinait à se rappeler les mots qu'il avait prononcé.

Gêné par le souvenir, Farhan se contenta de lui adresser un sourire crispé, la remercia une dernière fois avant de faire volte-face, un souffle bloqué au milieu de sa poitrine. Il se fit vaguement la réflexion que ce qui l'embarrassait, c'était qu'elle avait sans doute raison, mais il ravala ses sentiments lorsqu'il découvrit que Charlie l'attendait au bord des portes de chêne, son insigne de préfet luisant sous les éclats du soleil.

-Mon histoire a transformé McGonagall en mère-poule, annonça Farhan sur le ton de l'humour. C'est qu'elle doit être sacrément frappante ...

-Sinistre, rectifia Charlie d'un air nonchalant. On parle quand même d'une guerre et tu mêles à ça l'une des créatures les plus rares et les plus dérangeante qui existent ...

-Et ça a attendri McGonagall. On aura au moins réussi cet exploit.

-Elle t'en a parlé à ton entretien ?

Farhan secoua la tête. Les traditionnels entretiens d'orientation avaient eu lieu durant les deux premières semaines après la rentrée et le sien s'était réduits à cinq minutes et à l'injonction de McGonagall d'enfin ramener un Optimal en ASPIC de Potion à Gryffondor. Selon elle, il y avait une éternité qu'une telle chose n'avait pas été réalisé. Le deuxième exploit de sa scolarité était peut-être à sa portée.

-Et toi ? interrogea Farhan. Elle ne t'a pas dissuadé de changer de voie, ça va ?

L'entretien de Charlie avait eu lieu hier, pendant un cours où Farhan avait été en Potion avec Joséphine. Et malgré la présence de sa petite-amie à ses côtés, son meilleur ami n'avait pas quitté ses pensées pendant deux heures. Il avait douté que McGonagall, fière des qualités sportives de Charlie et très traditionnel, accepte de le voir gâcher ses talents pour une carrière plus aléatoire. Mais le sourire qui se dessina sur les lèvres de Charlie, il avait eu tort de s'en faire.

-Non, non, au contraire ... elle m'a tout de suite soutenu, ça m'a rassuré ... D'autant que ma mère a dit qu'elle se rangerait à son avis.

-Alors la route est ouverte, non ?

Quelque chose vint crisper les traits de Charlie et Farhan se surprit à s'emporter :

-Oh s'il te plait, Charles ! Est-ce que tu peux m'apporter ma première bonne nouvelle depuis la rentrée en m'annonçant que tu as trouvé ta voie et que tu es super content ? Regarde, McGonagall est d'accord, ta mère sera d'accord avec elle, tout va bien, non ?

-Euh, oui, articula Charlie, un peu pris au dépourvu. Oui, oui, tout va bien. Tout se goupille bien ...

J'aurais dû être préfet, songea Farhan, désabusé devant le ton incertain de son meilleur ami. Même s'il admettait qu'à défaut de mener jusqu'au bout son équipe, Charlie s'impliquait très sérieusement dans ses devoirs de préfets pour la première fois depuis qu'il avait reçu l'insigne. Mais Farhan ne doutait pas que Lauren l'ait menacé : après tout, libéré du poids du capitanat, il n'avait plus aucune excuse.

-Et je sais que ce n'est pas évident ..., ajouta Charlie avec plus d'aplomb. Mais tout va bien chez toi aussi, d'accord ?

-Pardon ? rétorqua Farhan, un peu surpris. On a vécu la même semaine, tu as entendu les mêmes choses que moi ?

-Et je sais à quel point ça a pu être bouleversant ... mais comprendre ce qui s'est passé il y a douze ans ne changera rien aux faits. Ça ne ramènera ni Shahrazade, ni tes parents ...

C'était dit avec une infinie douceur et pourtant les mots heurtèrent le cœur de Farhan comme un carreau d'arbalète. Sa bouche s'assécha brutalement et il se retrouva soudainement incapable de trouver quoi répondre. Heureusement, Charlie avait mûri ses paroles :

-Mais pour ce qui est de ce qui t'attend, ça sent le soleil. Vraiment, ton avenir est brillant. Tu as récupéré une sœur adorable dans ta vie. Ton père va sortir de l'hôpital en bonne santé. Tu vas le rejoindre à la boutique cet été et l'améliorer comme tu l'as toujours rêvé grâce à ta bourse de Potion. Et tu sors avec Joséphine et je suis presque à l'aise avec ça.

Si le début du discours avait réussi à vaincre sa paralysie, la fin le fit carrément éclater de rire et fit voler en éclat tout le spectre qui s'était abattu sur lui à l'évocation de ce qui s'était déroulé douze ans plus tôt.

-Presque ? releva-t-il, l'œil brillant. Tu m'as donc menti ?

-Disons que j'ai encore un mini-petit-chose qui peut me gêner, concéda Charlie en pinçant l'index et le pouce. Tout petit.

-Et qu'est-ce donc ?

Le fait qu'ils puissent en discuter avec une telle légèreté paraissait toujours démentielle à Farhan mais chaque fois qu'il l'interrogeait, son meilleur ami prétendait parfois oublié qu'il était un jour sorti avec Joséphine. Charlie hésita une seconde avant d'avouer, penaud :

-La raison pour laquelle elle t'a repoussé la première fois. Mais je me doute que ça rentre dans les règles, que tu ne vas rien me dire si elle ne le veut pas et je vais pas l'exiger, hein ! C'est entre vous, c'est votre histoire ... C'est juste que ça m'intrigue.

Farhan prit le temps d'apprécier toutes les nuances de l'aveu – comment il continuait de s'inquiéter sainement pour Joséphine, la façon dont il gardait une appréciable distance, son respect de leur intimité. C'était savoureux et réconfortant, jusqu'à qu'une pointe vienne le piquer en plein cœur.

-Pour tout te dire ... j'en sais pas plus, avoua Farhan, embarrassé.

-Vraiment ? s'étonna Charlie, les yeux écarquillés.

-Vraiment.

-Farhan, j'ai un côté commère qui ne s'assume pas et tu viens de le mettre au supplice, gémit-t-il, incrédule. En deux semaines, vous n'avez pas pris le temps de mettre ça à plat ?

-Quand ? Au début où tu n'as pas la moindre envie d'invoquer le moindre nuage, ou lorsque j'ai appris qu'un parasite magique qui habitait ma grande sœur a probablement tué mes parents ?

L'exprimer à voix haute lui écorcha la langue et quelque part au fond de lui un morceau de son être s'effrita. Il avait beau utilisé toutes les palabres possible, l'idée que sans ce parasite, sans ce déchainement de magie qui assaillait Shahrazade, sa famille n'aurait pas disparue lui tordait le ventre. Mécaniquement, les larmes lui montèrent aux yeux et il inspira profondément, bloqua son souffle et lorsqu'il le relâcha le voile humide se rétracta.

-Si c'est aussi grave qu'on pense, je préfère en parler quand je serais psychologiquement prêt.

Charlie ne paraissait pas être dupe sur la sérénité avec laquelle il avait prononcé cette phrase et tenta de le rassurer :

-Ce n'est peut-être rien ...

-Tu y crois ? Honnêtement.

Le silence de Charlie était éloquent, et Farhan décida de s'y fier. Par certain aspect, il avait parfaitement cerné Joséphine et il avait même la sensation qu'il en avait plus compris sur elle depuis qu'ils avaient rompu.

-Avec elle, ce n'est jamais rien, maugréa Charlie en guise de non-réponse.

-Là-dessus on est d'accord ... Bon, je vais y aller. A ce soir ?

-Bonjour à ton père !

Farhan répondit par un vague signe de la main avant de s'élancer dehors. A mi-pente, il jeta un dernier regard par-dessus son épaule pour voir que McGonagall, loin d'avoir disparue, s'était ostensiblement rapprochée de Charlie et qu'ils discutaient tous les deux en gardant un œil sur lui. Las, Farhan rejeta sa tête en arrière et pria le ciel pour que cette visite le remettre assez d'aplomb pour qu'enfin il convainque d'avoir digéré la nouvelle et que cette incessante surveillance cesse.

***

Ste-Mangouste, l'hôpital pour maladie et blessure magique, était une véritable fourmilière. Véritablement, Farhan ne voyait pas d'élément plus ressemblant. Une ruche, à la limite. Une ruche avec mille alvéoles dont ressortait des petites abeilles bourdonnantes, occupées et préoccupées, toutes unie dans le même but de satisfaire un idéal supérieur. Farhan supposait que le bien-être du genre humain et de la Communauté magique était une reine parfaitement acceptable ... simplement, l'activité et le bourdonnement constant de l'endroit l'angoissait. C'était l'ambiance parfaite pour le faire valser dans les souvenirs, et malgré son désir ardent d'éclaircir sa mémoire, ce n'était pas le moment pour lui. Surtout que depuis qu'il avait mis le nez dans son passé, les vieux dédales de l'hôpital revêtait une nouvelle signification pour lui. Derrière le sourire de chaque guérisseur, il espérait presque reconnaître celui qui avait sauvé la vie de Maya douze ans plus tôt et pouvoir lui faire part de toute sa reconnaissance. Sans l'obstination de cet homme à refuser de voir une enfant mourir, c'est toute sa famille qui aurait pu y passer.

Farhan fut donc plus que soulagé d'atteindre la chambre de son père au service des Empoisonnements par potions et plante. Il croisa une sorcière, le bras empêtré dans un filet du diable en plein hall alors qu'un guérisseur faisait apparaître de puissants jets de lumières de sa baguette à en aveugler les passants. Merlin, jamais il n'aurait pu être guérisseur, peu importe ce qu'avaient pu lui dire ses professeurs. Il finirait recroqueviller quelque part dans une réserve en position fœtale au moindre coup de pression. Il était tout éblouie lorsqu'il passa la porte, étourdis par l'agitation qui régnait dans l'hôpital et la seconde où il tira la poignée de porte, tout fut confus autour de lui :

-Retirez-moi ça ! Retirez-moi ça, ça me coupe le sang !

- ... vous avez vu, j'ai réussi ... Oui, je suis très fier ... et vous, comment vont vos petits ? Vous en aviez trois, si ma mémoire ne me fait pas défaut ?

-Madame, détendez-vous !

-... bientôt mariée ? Ça alors, déjà ? Elle a toute la vie votre petite ! Ah, après si elle a trouvé le bon ... ah, pas forcément le bon ...

-Mais ça va m'étrangler ! Vous m'aveuglez ! A l'aide, quelqu'un de compétent !

Tout le monde de Farhan se stabilisa dès que la porte se referma derrière lui et face au silence assourdissant qui s'empara de la pièce, il comprit que les chambres étaient certainement insonorisées pour protéger les patients des tracas. Il eut à peine le temps de se sentir soulagé que la première chose qui le happa fut un regard vert qui le cloua sur place. Pendant quelques secondes, il enveloppa totalement son univers : son monde tourna vert, comme un flash glacial. Ne t'en fais pas, petit ..., souffla Nolan du plus profond de sa mémoire de sa voix apaisante comme une berceuse. Le monde n'est pas toujours tout vert ... je l'avais oublié ... c'est bon de se rappeler qu'il n'est pas tout vert, pas vrai ?

-Puceron ?

Ce n'était pas Nolan, mais ça y ressemblait si fort que cela suffit à ramener Farhan les deux pieds sur terre. Autour du regard vert se recomposa le visage à moitié familier d'Aolyssius Abbot, ses traits volontaires si semblables à ceux de Joséphine, jusque dans la ligne anguleuse de la mâchoire. Il était posté devant une fenêtre, vêtue d'une longue cape ouverte sur son uniforme d'Auror. En face de lui, un bâton de patacitrouille à la main, Fiona se contorsionnait pour pouvoir le contempler, interloquée. Farhan relâcha son souffle lorsqu'il repéra enfin son père, non dans son lit mais confortablement installé sur le fauteuil habituellement réservé aux visiteurs.

-Peut-être qu'on peut oublier les surnoms ... pendant quelques minutes, décréta Farhan, totalement déboussolé.

-Aurais-tu honte de qui tu es ? sembla s'offusquer Fiona, une main sur le cœur. Ou de moi ?

Non mais je refuse que tu m'appelles « Puceron » devant le père de ma copine ! Et c'était incroyable qu'il désigne cet homme par cette périphrase alors que sa simple vue le bouleversait tant par des raisons qui n'avaient strictement aucun rapport avec Joséphine. Mille gargouilles, ce regard. Ce regard qui continuait de le transpercer, même si après trente secondes il s'était rivé sur la fenêtre.

-Fiona, arrête, la rabroua gentiment Nolan avant de faire un geste allant d'Aloyssius à Farhan. Mon grand, j'ai cru comprendre que tu avais croisé Mr. Abbot chez Elvezia Guipure ... c'est ...

-Je sais qui c'est, le coupa Farhan, un brin sèchement avant de se reprendre. Bonjour ...

La prudence dans sa voix sous-entendait une interrogation. Aloyssius ne prit pas la peine de le regarder pour y répondre :

-Je suis passé devant la chambre alors que je revenais d'une intervention ... une jeune femme a été blessée par un loup-garou, la pauvre ... Rien de grave, d'après les guérisseurs, nous sommes intervenus à temps ... L'un des disciples de Greyback, sans doute. Ils pullulent depuis dix ans ...

Farhan faillit lui faire remarquer qu'il était bien bavard sur cette affaire pour un homme qui avait refusé de répondre sur une qui était vieille de douze ans, mais les mots restèrent coincés dans sa gorge. Une affaire de créature magique, encore. Décidément, les années n'avaient pas effacé cette étiquette pour Aloyssius Abbot. L'Auror récupéra un dossier posé sur la table de nuit et le coinça sous son bras avant d'incliner la tête à l'adresse de Nolan.

-Enfin, je suis ravi d'apprendre que vous sortez demain ... Si vous avez besoin que quoique ce soit, n'hésitez pas.

-Pour vous faire pardonner d'avoir douté de ma qualité de père ? ironisa Nolan avec un fin sourire. Ou me remercier d'avoir jeté un sortilège repousse-moldu que vous aviez visiblement oublié ?

-Mes collègues, rectifia Aloyssius, le nez froncé. Moi je supervisais ...

-Vous avez failli m'arracher la tête.

-Alors disons que je m'excuse pour cela. Et je vous remercie d'avoir ... pallier à nos manquements. Pour le sortilège et pour le reste. Il y a longtemps que j'aurais dû vous le dire ...

Il parut hésiter une fraction seconde avant de tendre une main à Nolan. L'apothicaire la contempla un instant, les sourcils haussés avant de la saisir, le regard planté dans celui de l'Auror.

-Mieux vaut tard que jamais, marmonna Fiona entre ses dents.

-Comme vous le dites, madame, convint Aloyssius en inclinant la tête. Sur ce, bon après-midi ... Et Farhan, bon courage pour la fin d'année et tes examens ...

Cette fois, son regard qui lui transperçait le front fut accompagné d'un sourire, bref et à peine esquissé sur ses lèvres avant qu'il ne prenne la porte. Les cris du couloir s'élevèrent de nouveau jusqu'à ce que le battant ne se referme. Farhan contempla la poignée trembler dans un cliquetis, le cœur au bord des lèvres.

-Et bien si celle-là je m'y attendais, soupira Nolan dans son dos. Je pensais que c'était toi qui arrivais et lorsque je l'ai découvert dans l'encadrement de la porte ...

-Au moins il reconnait ta valeur, même si ça lui a pris douze ans ... Puceron ?

Farhan pivota d'un quart de tour pour que sa vision englobe les visages perplexes de son père et de sa tante tout en gardant la porte dans le coin de son œil. Il se revit arracher sa plume des mains d'une Joséphine en colère, mais surtout mortifiée que son père ne prenne pas de lui répondre. Et toujours vexée que son père daigne le regarder lui ...

« Moi je supervisais ». Merlin ...

Sans que Farhan ne l'ait décidé, sa main se posa sur la poignée de porte.

-Je reviens dans une seconde, annonça-t-il fébrilement. Une seconde !

-Mais Farhan !

Fiona n'était pas levée de sa chaise qu'il s'était élancé dans le couloir. Il était toujours aussi bondé, mais la femme au filet du diable avait été envoyée ailleurs et heureusement, Aloyssius Abbot était un homme de haute stature : Farhan n'eut aucun mal à le localiser au fond du couloir, une seconde avant qu'il n'emprunte l'escalier. Le jeune homme se précipita à sa poursuite, bouscula une pauvre infirmière au passage et arracha la porte qui menait à l'escalier si violemment qu'elle rebondit contre le mur lorsqu'il l'ouvrit. Il descendit une volée de marche avant de percevoir l'ombre de l'Auror dans la cage d'escalier.

-Mr. Abbot !

Il l'entendit, ce petit soupir qui sembla se répercuter à l'infini. Il couvrit même l'échos de ses pas qui martelaient le béton avant qu'il ne s'immobilise quand Aloyssius fut enfin en vue, debout sur un pallier inférieur, son regard vert planté sur lui. C'était Ophélia qui avait hérité de ses prunelles, mais le regard d'Ophélia était si joyeux et mélancolique à la fois ... rien de l'intensité glacée que véhiculait celui de son père. Ils se fixèrent en chien de faïence quelques secondes, séparés d'une volée de marche que Farhan répugnait à avaler. Il savait que dès qu'il les descendrait, il perdrait l'avantage de la hauteur. Et il avait besoin de surplomber l'Auror pour se donner du courage.

-Je suis désolé de vous déranger, entonna-t-il finalement. Mais j'ai besoin de comprendre ...

-Je crois savoir, oui ...

Mais le pourri, il l'admet en plus. Ça, ça ne passerait pas par l'oreille de Joséphine. Si elle apprenait qu'il ignorait sciemment sa lettre, elle serait capable de fuguer pour lui faire payer. Ce fut extrêmement difficile pour lui de repousser l'image de sa petite-amie au fond de lui. Il se sentait blessée à travers elle, heurté pour elle de cette crasse négligence. Mais il n'avait pas à s'immiscer dans leur relation, ce n'était pas son problème.

Non, son problème, c'était la rétention d'information que faisait cet Auror depuis le début de cette affaire. Et maintenant qu'il se tenait devant lui avec cette certitude, ça le mettait hors de lui. Il agrippa la rambarde de l'escalier de façon compulsive. C'était ça, ou enfoncer sa main dans sa poche pour trouver sa baguette.

-Vous déconnez ? cingla Farhan, incrédule. J'ai ... j'ai envoyé des courriers au Ministère, vos filles vous ont interrogé en toute franchise, j'ai utilisé tous les moyens légaux et moraux que j'avais en ma possession et vous ...

-Tu n'as pas compris ? le coupa Aloyssius, un sourcil dressé. Pourtant tu as l'élément pour comprendre mon silence, non ? Allez, Farhan. O'Neil m'a dit que tu étais intelligent.

Farhan serra la rambarde jusqu'à ce que ses jointures deviennent exsangues, jusqu'à ce qu'elle s'imprime dans sa paume. Il n'avait pas le droit de lui parler comme s'il le connaissait. Ce n'était pas parce que Nolan lui avait dit deux ou trois éléments ou qu'il avait fouillé sa mémoire petit qu'il pouvait se le permettre.

-Vous ne vouliez pas parler de l'Obscurus, comprit-t-il néanmoins avec un certain dépit. C'est ça, la clef ?

Le coin de la bouche de l'Auror tressaillit et Farhan faillit en frémir en échos. Il ne savait pas si c'était les descriptions de Joséphine qui rejaillissait sur sa perception, mais la moindre expression lui semblait être un aveu énorme. Le fait qu'il détourne le regard à ce moment précis lui parut aussi d'une importance disproportionnée. Ses lèvres tremblèrent à peine lorsqu'il murmura :

-L'Obscurus ... je serais curieux de savoir comment vous avez fait pour le découvrir ...

-Les blessures de Maya. Ma petite sœur.

Cette fois, Aloyssius ferma les yeux et un drôle de sourire passa sur ses lèvres. A dire vrai, il tenait davantage du rictus et Farhan finit par secouer la tête, agacé d'avoir à analyser les moindres faits et gestes comme s'ils s'agissaient de réponses.

-Oui, la magie de l'Obscurus laisse des traces caractéristiques ... Des sortes de griffures ...

-Comme sur la gorge de Maya, oui, l'interrompit Farhan, un brin agacé. Ma petite sœur. Dont j'ai été séparé.

-Oh ! lâcha Aloyssius, l'air un peu surpris. C'est sur ça que tu veux des réponses ? Navré mais je ne peux pas t'en donner ... je suis Auror, moi. Je m'occupais des Mangemorts qui avaient assaillis l'hôtel, mais de la façon dont les enfants étaient placés ... ça, il faut demander au service de l'enfance, ils avaient un bureau à Ste-Mangouste à l'époque ... La seule hypothèse que je peux te donner, c'est que c'est lui qui s'est occupé de ta petite sœur blessé et celui du Ministère de toi. Pour tout te dire ce n'est pas moi qui aie récupéré la petite Maya, c'est un de mes collègues ... j'en avais à peine connaissance, encore moins du fait que c'était ta sœur ...

Séparés dans la confusion. C'était le plus plausible dès le début mais l'entendre confirmer enfin provoqua mélange acide de déception et de dépit dans les entrailles de Farhan.

-Très bien, reconnut-il à contrecœur. L'Obscurus, alors. Vous étiez au courant quand vous êtes intervenus ?

Aloyssius darda de nouveau son regard sur lui et au fond de ses prunelles quelque chose vacilla. Farhan tenta de ne pas y accorder d'importance, mais la vérité fut que son cœur manqua un battement.

-C'est la raison pour laquelle on est intervenu, confia-t-il alors d'un ton très calme. Nous savions qu'une petite fille Obscuriale était à Belfast ... et surtout que les Mangemorts la cherchaient.

-La cherchaient ?

-Ils n'ont pas attaqué cet hôtel par hasard, Farhan. C'est ta sœur qu'ils voulaient. Une vieille idée que Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom a emprunté à Grindelwald ... Un Obscurus est une manière comme une autre de provoquer le chaos. Une source intarissable de magie qui attaque aveuglément ... qui détruit et sème la désolation sur son passage.

Farhan ne s'attendait pas à apprendre quelque chose de la bouche d'Aloyssius Abbot, alors cette nouvelle faillit le faire s'écrouler à la renverse. Sa prise sur la rambarde devint plus que nécessaire : elle était vitale.

-Alors c'est à cause d'elle qu'ils ont attaqué l'hôtel ? souffla-t-il, bouleversé.

-On a eu l'information et on devait l'empêcher ... malheureusement, quand on est arrivé, les Mangemorts avaient déjà tué une réceptionniste et filaient vers votre chambre ... Nous les affrontions lorsqu'une explosion a secoué l'hôtel.

-La crise de Shahrazade ...

-Certainement provoqué par notre intervention, conclut péniblement Aloyssius. D'après les blessures sur les corps, l'explosion de magie a emporté quelques moldus ... en plus de tes parents et d'elle-même, selon toute vraisemblance.

Ses prunelles s'étaient mises à luire d'un éclat un peu spectral, vivifiés par les souvenirs. Néanmoins, le reste de sa posture restait rigide et professionnelle : ses mains étaient nouées dans son dos, ses épaules étaient fièrement carrées pour faire ressortir l'insigne d'Auror sur sa poitrine. Sa voix très calme n'avait rien de glaciale, mais gardait des traces métalliques de rigidité.

-Farhan, si je n'ai pas ouvert la bouche concernant l'Obscurus, c'est que son existence était un secret classé mais surtout ... parce que je ne pouvais pas admettre devant mes filles que j'étais implicitement responsable de la mort d'une famille et de tant de gens.

-Responsable ... ?

-Je te l'ai dit : sans notre intervention, les Mangemorts se seraient emparés d'elle de façon presque pacifique. L'hôtel n'aurait pas explosé, et tous ses moldus auraient peut-être eu la vie sauve ... Dans notre jargon, on appelle ça une bévue. Non seulement si la situation n'avait pas été aussi critique pour le Ministère, nous aurions pu être mis à pied mais en plus ta sœur et toi avaient le droit de nos demander des comptes pour cela.

Ça n'était pas venu à l'idée de Farhan de réclamer des comptes à un Auror pour avoir tenté d'arrêter une bande d'adorateur de magie noire venus enlevé sa sœur. Cela lui semblait même incroyable qu'Aloyssius Abbot puisse se sentir coupable pour la crise de sa sœur qui, contrairement à ce qu'il avait pu croire, n'était pas simplement responsable de la mort de ses parents mais aussi des autres victimes du La Mon House Hôtel.

Ils sont venus pour elle ... et elle les a tous tué ... Pas elle, se reprit-il immédiatement, au bord de l'effondrement. L'Obscurus. Elle, elle était malade. Elle, elle avait été une victime comme tous les autres ... la victime principale. La victime qui n'était jamais apparue nulle part. Restait-il vraiment un corps une fois que l'Obscurus avait vidé son hôte de son énergie ? La question lui donnait la nausée.

Peu à peu, les pièces se remirent en place dans l'esprit de Farhan. Faire entrer de la rationalité dans ses révélations chaotiques apaisèrent quelque peu ses tourments. Ses parents avaient cherché de l'aide pour guérir Shahrazade : les maux de sa sœur avaient bien pu être porté à l'oreille de personne mal intentionnées comme les Mangemorts ... Et devant le chaos provoqué par les affrontements avec les Aurors, sa magie avait explosé, la tuant elle, ses parents et quelques moldus sur le coup. Le rapport était incomplet, martelait Joséphine : Aloyssius avait-il vraiment pu évoquer l'Obscurus classé secret ? C'était d'une impitoyable logique.

-Tout va bien ?

Farhan releva la tête pour découvrir qu'Aloyssius avait grimpé quelques marches, une main tendue vers lui qu'il suspendit dès qu'il vrilla ses yeux sur lui. Lentement, ses doigts se replièrent dans sa paume et sa main vint retrouver sa position initiale derrière son dos, mais il ne redescendit pas. Une lueur soucieuse s'était allumée dans son regard et Farhan s'imaginait avoir blêmi si fort qu'on pouvait craindre une attaque. Le jeune homme inspira profondément et s'efforça de se redresser, la main toujours fébrilement accrochée à la rambarde.

-C'est tout ? s'assura-t-il d'un ton ferme malgré son cœur battant. C'est tout, la fin de l'histoire ?

-Telle que je la connais, oui ... Vraiment navré, je ne doute pas que ça doit être extrêmement douloureux à entendre ... parfois, l'ignorance est préférable ...

-Vos filles ne seraient pas d'accord avec vous.

Farhan avait lâché la chose sans réfléchir, mais elle provoqua un sourire sur les lèvres d'Aloyssius, délicatement teinté de cynisme. Nom d'un Farfadet, que Joséphine pouvait lui ressembler ...

-Le sang n'est pas de l'eau, reconnut-t-il en inclinant la tête. Je serais moi-même incapable de suivre mon propre conseil ... jeune, j'avais ce besoin viscéral de tout savoir et de tout comprendre. Et je ne doute pas qu'un tel sentiment puisse être exacerbé lorsqu'il s'agit de sa propre histoire ...

-Je n'ai jamais voulu savoir ..., laissa échapper Farhan, dépité. Jamais, pas une fois en douze ans ...

-Mais un jour, ça finit par nous rattraper ... Ma mère est morte en me donnant naissance. J'ai toujours songé que ne pas la connaître atténuerait la douleur d'avoir grandi sans elle. Ce sont des illusions dont on se berce pour maintenir notre monde en paix ... mais tout ce qu'on fait, c'est maintenir notre tête sous l'eau.

La sincérité désarmante avec laquelle il prononça ses mots eut raison de l'équilibre de Farhan. Avec une lenteur calculée, il se laissa glisser à terre sur les marches, à bout de force. Il réagit à peine lorsque l'Auror grimpa les dernières marches pour se hisser à sa hauteur et s'assoir à ses côtés. C'était surréaliste.

-Notre passé nous influence c'est certain, et d'une certaine manière il peut nous façonner et nos définir mais il ne faut pas qu'il nous bouffe, conclut Aloyssius avec une certaine sollicitude. Ton père m'a dit que tu avais un bel avenir devant toi ... ne le gâche pas en ressassant ton passé. C'est naturel de vouloir comprendre ... mais maintenant, il faut avancer.

-Pas facile d'avancer quand on nous met des bâtons dans les roues ...

-Ce n'était pas mon intention. Je voulais protéger ma famille de mes impaires. C'est ce que j'ai toujours fait.

La conviction brûlante de l'Auror ébranla Farhan et il ne put s'empêcher de couler sur lui un regard ouvertement dubitatif. Aloyssius le perçut et se fendit d'un ricanement qui résonna sinistrement dans la cage d'escalier.

-Je vois. Tu es dans la classe de Joséphine, c'est cela ? Mille gargouilles ce que tu as pu entendre ...

-Rien de plus que ce qu'elle a essayé de vous dire, rétorqua Farhan d'un ton mordant.

-Vous êtes donc proches à ce point... ?

Cela devait être une seconde nature d'Auror d'interroger ainsi de façon subtile, comme ça l'était d'avoir les yeux qui traînaient partout en quête d'un mouvement suspect ou d'un indice. La mâchoire de Farhan se contracta et il secoua la tête, refusant d'entrer dans son jeu.

-Si vous avez des questions, c'est à votre fille qu'il faut les poser.

-Oui avec ce que tu traverses, je comprends que tu ne veuilles pas être pris entre deux baguettes ... Néanmoins en recoupant les informations que j'avais avec ma discussion avec ton père, j'ai compris que vous aviez gagné la bourse de Potion ensemble ...

-Et quoi ? soupira Farhan.

Honnêtement, il doutait que Joséphine fasse quoique ce soit de cette bourse. Il n'était pas dupe : si elle s'était activée ce jour-là, c'était pour lui et rien que pour lui et se l'imaginer répandit une incroyable sérénité dans ses veines. Evidemment qu'on a du sens. Le père de Joséphine pinça des lèvres.

-Et rien. Il y a juste longtemps que je n'avais pas eu l'occasion d'être fier d'elle.

Farhan aurait voulu avoir la liberté de pouvoir hurler, en cet instant précis. Jusque-là, l'Auror ne lui avait pas fait mauvaise impression : oui, il était distant et parfois presque froid, mais c'était de la déformation professionnelle. Il lui avait répondu avec respect et sincérité et il l'admettait, le fait que des années plus tard il se sente responsable de la crise de Shahrazade et de la dislocation de sa famille témoignait d'un bon fond. Mais cette simple phrase lui donnait envie d'envoyer sa tête contre le mur. En toute mesure, bien sûr.

Il ne sut par quel miracle il parvint à réprimer tous ses cris, tous les arguments qui lui permettrait de prouver à quel point il n'avait pas besoin d'un stupide concours pour être fière d'une fille comme Joséphine Abbot. La seule chose qui parvint à insidieusement passer ses filtres fut :

-Vous savez, la valeur de quelqu'un ne se mesure pas à sa réussite scolaire.

La mâchoire d'Aloyssius se crispa et un nerf tressauta sur sa joue. Avec cette expression butée, il lui évoquait si fort Joséphine que ça en était perturbant.

-On ne peut pas en vouloir à un père d'exiger le meilleur pour ses enfants, répliqua-t-il d'un ton plus dur.

-Non, je ne veux pas me retrouver au milieu du duel, glapit Farhan en bondissant sur ses pieds. Vraiment si vous avez des choses à dire à Joséphine, répondez à sa lettre : je ne suis pas un hibou ! Sérieusement, répondez-lui : la prochaine fois, ce sera certainement une beuglante qu'elle vous enverra.

La menace, loin de décontenancer Aloyssius, lui arracha un petit rire sans joie.

-Oh mille gargouilles, elle en serait bien capable ...

-Evidemment qu'elle en serait capable alors évitez-vous cette peine.

Et il n'en revenait de devoir convaincre le père de sa petite-amie des bienfaits de la communication alors que c'était une chose si naturelle chez lui. Avait-il vraiment eu l'intention d'ignorer la lettre de Joséphine pour s'éviter une conversation crispante ? Pas étonnant que la jeune fille ne sache pas parler avec un tel modèle ... Nerveux, il remonta sur le pallier supérieur.

-Je vais rejoindre mon père, si vous n'avez plus rien pour moi ...

-A part des excuses ? murmura Aloyssius, sans bouger des marches.

-Gardez vos excuses pour Joséphine, répliqua Farhan avec lassitude. Me concernant, vous n'avez fait que votre travail. Vous n'y êtes pour rien pour ce qui est arrivé à Shahrazade ... c'est de la faute de personne.

C'était certainement pour cela que c'était si difficile à digérer. Personne à blâmer, personne à qui déverser sa douleur et sa haine. C'était un simple concours de circonstance qui avait emporté treize vies. La seule leçon que Farhan retenait de cette histoire, c'était que la guerre était le mal absolu sur cette terre. Elle avait empoisonné Shahrazade en Palestine et l'avait fait exploser en Irlande. Sa sœur aînée était le sacrifice ultime sur l'autel de la guerre.

Laissant un Aloyssius resté visiblement crispé et songeur par sa dernière réplique, il s'apprêta à poser son pied sur une marche et s'interrompit brusquement, troublé par un dernier flash totalement incongru. Lentement, il ramena sa jambe contre sa jumelle.

-Vous m'avez donné une peluche dragon. Ce soir-là.

L'Auror tourna sa tête d'un quart vers lui. Son expression était à moitié masquée et pourtant l'étonnement était perceptible.

-Tu l'as gardée ... ?

-Oui, reconnut difficilement Farhan, gêné.

-Alors tu pourras la rendre à Joséphine. Je l'ai prise parce que c'était un cadeau de mon père auquel elle n'avait accordé aucun intérêt jusque là ... et à quelle crise nous avons eu le droit lorsqu'elle a réalisé qu'elle avait disparue ...

-Elle avait cinq ans, rappela âprement Farhan.

Mais il l'admettait, apprendre que la peluche qu'il avait serré contre lui toute son enfance avait un jour appartenu à Joséphine lui faisait un drôle d'effet. Il pouvait presque prévoir sa réaction lorsqu'il lui raconterait et un faible sourire s'étira sur ses lèvres. C'était un sacré coup du destin ...

-Elle me donne parfois l'impression d'avoir encore avoir cinq ans ... Très bien, ajouta-t-il lorsque Farhan ouvrit la bouche, exaspéré. Tu n'as pas à être au milieu du duel, c'est bien vrai ...

Il le contempla quelques secondes, d'un regard bien moins incisif et scrutateur que précédemment.

-Je dois admettre que je suis admiratif de Nolan O'Neil. Elever mes enfants avec l'aide de ma femme a été une épreuve et je ne suis pas certain que nous en touchions le bout ... alors seul avoir fait du si bon travail avec toi ... jusqu'à t'inculquer l'accent irlandais, quel tour de force.

Farhan prit le temps de mûrir sa réponse. Il n'était pas certain d'être parfaitement à l'aise avec le compliment, d'autant qu'il sous-entendait une nouvelle fois que sa volonté n'avait pas endigué la mauvaise pente qu'avait pu prendre ses filles – et par ses filles, Farhan savait qu'il entendait Joséphine. Néanmoins, il ne pouvait ignorer la fierté qu'il éprouvait à voir la qualité paternelle de Nolan être reconnu par un homme qui l'avait dénié dès leur rencontre.

-Nolan a été un père génial ... mais parce qu'il m'a laissé tracer ma propre route. Il m'a guidé tout en me laissant faire mes propres choix. On ne peut pas toujours tout contrôler, monsieur Abbot.

Farhan savait qu'il venait de poser l'orteil sur la limite avec cette pique et avant que l'Auror ne puisse formellement s'en agacer, le laissa sur place en gravissant les marches quatre à quatre. Son cœur faillit s'arrêter de battre lorsqu'il parvint au pallier supérieur et qu'il croisa les regards inquiets de Nolan et Fiona qui, invisibles depuis leurs hauteurs, n'avaient pas dû perdre une miette de la conversation qui les avait animés. Affolé, Farhan leur fit sèchement le signe de retourner vers le couloir et ils s'y précipitèrent tous les trois. Ce ne fut qu'une fois retournés dans le calme de la chambre de Nolan que Fiona l'enveloppa dans une étreinte qui sentait le tabac et le jasmin.

-Oh mon Puceron, c'est vrai qu'on t'a tellement bien élevé ...

-Je l'ai bien élevé, toi tu as sapé tout mon travail ! se récria Nolan, indigné. C'est de ta faute qu'il fume !

-Et c'est grâce à moi qu'il traitera sa copine comme une princesse, ce n'est pas toi qui allais lui parler préservatif, Nolan Philip O'Neil ! Oh !

Farhan venait de ramener sa tante sur lui et de la serrer à lui rompre les os. Quelques instants plus tard, Nolan vint les rejoindre pour souder dans une étreinte. Farhan réalisa à peine que les larmes qu'il contenait inconsciemment depuis qu'il avait poursuivi Aloyssius avait dévalé ses joues, retombant avec le stresse et la tension. Ils ne s'étaient pas permis de craquer lors du récit de Brûlopot, lorsque le corps et l'esprit de Maya avait lâché. Parfois, quelqu'un devait prendre sur soi et cette fois-ci cela avait été lui. Les rares larmes qu'il avait lâchées, il les avait gardé secrètes. Mais cette fois, elles avaient aussi le goût du soulagement. Peu importe ce qui arriverait, c'étaient les dernières qu'il consacrait à son passé.

-Vous savez ce qui le pire ? hoqueta-t-il dans le cou de Fiona. C'est que s'ils n'étaient pas tous morts, si Shahrazade n'avait pas eu sa crise, je n'aurais pas pu grandir avec vous ... et ça, ça me brise le cœur ... je me sens horrible ...

-Oh Puceron ..., murmura Nolan, hébété. Arrête, ne te dis jamais ça ...

-Les choses sont ce qu'elles sont, Farhan, renchérit Fiona en lui caressant les cheveux. Dans cette situation, le « si » est le pire mot possible ... ne t'empoisonne pas l'esprit avec. Là-dessus, l'Auror de glace a raison. Tu as eu tes réponses, Puceron. Elles sont douloureuses et elles arrivent à retardement, mais mieux tard que jamais...

-Il faut que tu avances, maintenant, d'accord ? On va avancer tous ensemble ... Et avec mes poumons presque flambants neufs, on ira très loin, tu verras. Tu iras très loin ...

-Avec la charmante Joséphine, on espère ? Oh allez, dis tout à ta tante préférée !

Farhan lâcha un rire étranglé et laissa son père et sa tante l'amener vers le lit, lui mettre une tasse de thé dans les mains et l'abreuver de paroles vaines de sens simplement destinées à occuper son esprit. A dire vrai, ses yeux s'étaient asséchés ci-tôt l'étreinte dénouée et deux minutes plus tard il se retrouva à rire la gorge déployée lorsque Fiona leur raconta comment Felicia la colombienne l'avait surprise en venant la rejoindre à Seoul. Visiblement, sa tante avait enfin trouvé un être capable de l'accompagner dans toutes ses errances et pour l'heure, rien ne pouvait prendre Farhan plus heureux.

Sonné, euphorique et soulagé, il essuya la larme qui perlait au coin de son œil et sourit à sa famille. Oui, il était enfin temps d'avancer. Il avait les meilleures personnes possibles pour le faire à ses côtés ... et ça comprenait une certaine tempête qu'il avait hâte d'aller embrasser en revenant à Poudlard. 

***

Alors votre verdict? 

Maintenant je retourne à l'écriture de l'avant-dernier chapitre d'O&P, qui s'écrit à un rythme ... plutôt soutenu. Ouais, je vais avoir fini en moins de temps qu'il en faut pour dire ouf. 

Bonne semaine, à la semaine pro et à dans deux semaines <3 

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