Chapitre 45 : La grande aventure
Bonjour bonjour !
Bon j'ai survécu à ma première semaine de chômage à 80% mais il faut dire que j'ai été occupée par une fuite d'eau dans mon plafond et des révisions (Une semaine avant le concours TOUT VA BIEEEEN)
Heureusement que j'ai mes soirées pour écrire parce que j'ai tendance à passer mon stress sur mon ordinateur. Malheureusement j'avance sur O&P en laissant LDP en plan en ce moment, mais comme je suis stressée je n'ai pas envie de me forcer alors que sur O&P ça coule si bien ... Bon tant que je suis pas arrivée à 4 chapitres d'avance je dirais que ça va. Ce qui arrive bientôt ...
Bon sinon comment vous allez ?
Maintenant place au chapitre. Bon j'ai conscience qu'il a un intérêt limité, et j'en suis désolée mais il s'est construit comme ça ! J'espère qu'il vous plaira quand même, bonne lecture !
***
Ah, ah, ah ! Riez, riez fort !
Vous verserez des larmes qu'ils s'aimeront encore
Dieu que c'est facile pour les imbéciles
D'être aveugle et sourd à un grand amour
D'être aveugle et sourd
(...)
Ah, ah, ah ! Quoi ces deux-là s'aiment ?
Ah, ah, ah ! On ne parle pas des mêmes
Deux enfants gâtés ne peuvent pas s'aimer
L'amour c'est pour ceux
Oubliés des dieux
Qui l'ont mérité
- « Des beaux, des laids »
Roméo et Juliette
***
Chapitre 45 : La grande aventure
Dimanche 14 avril 1991
J'ai rarement été aussi stressée pour une rentrée.
Est-ce que parce que j'ai conscience que c'est la dernière fois que je fais le trajet dans ce sens ? Que la prochaine fois que je prendrai le train après ça, ce sera pour qu'il me dépose au quai du monde des adultes et qu'il m'éjecte de l'enfance ?
Ou c'est parce que je vais revoir Farhan et que je suis nerveuse comme une gamine face à son premier béguin ?
La seconde. Définitivement, la seconde. J'ai l'impression que l'enjeu est énorme, qu'au moindre faux pas je pourrais encore tout gâcher ... On ne s'est pas revu depuis jeudi. Et même si rien de ce qui ne s'est passé jeudi n'a d'ambiguïté, j'ai peur d'arriver à la gare et de découvrir que c'était un rêve, un doux songe dont je me serais bercée, c'est véritablement ...
***
-Josie ? Ça va ?
Prise au dépourvue, Joséphine leva un regard éberlué sur Ophélia tout en rabattant son journal sur sa poitrine. Les voitures de fonction du Ministère qui les ramenait exceptionnellement voie 9¾, puisqu'aucun de leurs parents n'avaient pu se libérer pour les accompagner, avait été magiquement agrandi et elle s'était sentie assez en confiance pour se lamenter dans son journal sans risquer le coup d'œil indiscret de l'une de ses deux sœurs. Par ailleurs, Bérénice somnolait, la tête sur la vitre et la bouche légèrement ouverte. En revanche Ophélia, assise au milieu d'elles, le dos droit et les cheveux élégamment relevés en un chignon, avait les yeux grands ouverts et rivés sur Joséphine.
-Tu as l'air ... tourmenté.
-C'est parce qu'elle va retrouver Farhan, ricana Bérénice, qui ne devait pas dormir tant que cela.
-Mais de quoi je me mêle !
-Je sais juste que tu avais un étrange sourire après les essayages ...
Les poumons d'Ophélia se gonflèrent d'un cri qui se promettait d'être moitié excité, moitié indigné. Mortifiée par la discussion qui s'annonçait, Joséphine rangea son journal dans son sac et laissa ses longs cheveux la préserver de l'ire de sa sœur.
-Les essayages ? Ne me dis pas que tu as profité des essayages pour aller bécoter en douce ? Josie ! soupira Ophélia face au silence buté de sa jeune sœur. Berry, merci pour cette information capitale ...
-Un plaisir de te venger.
Elles échangèrent un sourire complice avant de toutes deux reporter leur attention sur Joséphine, coincée contre sa vitre avec pour seule protection le sac qu'elle pressait contre son ventre. Elle contempla ses sœurs, résignée.
-Je vais passer un sale quart d'heure, c'est ça ?
-Ce sera moins pénible si tu te mets à table de toi-même, ma belle, prétendit Ophélia avec un sourire machiavélique.
-Alors, c'est officiel ? enchérit Bérénice d'un ton presque avide. Farhan et toi ?
Joséphine sentit ses pommettes s'échauffer quand les derniers mots qu'elle avait écrit dans son journal lui traversèrent l'esprit. Elle avait beau être certaine à quatre-vingt-dix neuf pourcents d'avoir embrassé Farhan dans sa cabine, lui avait assuré qu'elle voulait être avec lui et avoir discuté de la façon dont ils géreraient leur nouvelle relation à Poudlard, elle maudissait ce dernier pourcent de doute qui se refusait au bonheur.
-Hum ... Jusqu'à preuve du contraire, oui ...
Ses sœurs passèrent outre la prudence de son ton pour ne retenir que le « oui ». Bérénice se fendit d'un sourire presque supérieur, comme si la chose était de son fait et Ophélia agit plus puérilement en tapant des pieds contre le tapis de la voiture avec excitation.
-Oh c'est adorable ! se réjouit-t-elle en joignant ses mains sur sa poitrine. Franchement il a l'air mignon comme tout ce garçon – et vraiment pas désagréable à regarder, à titre personnel je préfère à Charlie ...
-Il est super, Farhan, confirma Bérénice.
L'être de Joséphine se hérissa lorsqu'elle crut lire dans le regard de sa sœur « Alors ne foire pas tout cette fois ». Elle avait la pique au bord des lèvres, mais la voiture s'immobilisa avant qu'elle ne puisse la formuler et le chauffeur abaissa la vitre qui séparait son espace du leur.
-Gare de King's Cross, Mesdemoiselles, annonça-t-il d'une voix si professionnelle qu'elle en paraissait robotique.
-Merci infiniment ! s'écria Ophélia. Vous pouvez rentrer, moi je transplanerai du quai !
Elle poussa Bérénice pour l'enjoindre à descendre et Joséphine ouvrit l'autre portière, les joues gonfler d'un souffle qu'elle peinait à lâcher. La tension montait à mesure que l'échéance approchait. Elle n'était pas censée être si angoissée, se morigéna-t-elle en récupérant sa valise dans le coffre. Elle était censée être parcourue de la même substance délicieuse qui avait couru ses veines lorsqu'elle avait embrassé Farhan dans la cabine d'essayage, être saisie du même triomphe qui l'avait enivrée lorsqu'elle avait compris que cette fois, c'était le grand départ de leur aventure. J'ai tellement toujours pris la vie à la légère que maintenant je me retrouve paralysée quand il y a de l'enjeu ..., songea-t-elle en suivant ses sœurs dans la gare, le cœur battant. Son rythme étourdissait totalement ses sens et elle passa la barrière qui menait au quai sans se soucier un seul instant des moldus qui pouvaient l'apercevoir. La vision de la célèbre locomotive écarlate du Poudlard Express et de son panache de fumée qui se déversaient sur les sorciers massés sur son quai ne suffit pas à détourner son stress. Il augmenta même lorsqu'elle croisa Tonks qui se hissa dans le train avec sa belle chevelure rose, et Lauren, son bel insigne sur la poitrine, qui entrainait Charlie de force, certainement avant qu'il ne puisse oublier que lui aussi était préfet et que ses obligations l'amenaient au début du train. Son regard croisa brièvement celui de Joséphine et il leva la main. La jeune fille faillit lui répondre, pensant à un simple salut, mais Charlie la gratifia en réalité d'un pouce approbateur et mutin avant de suivre Lauren. Et loin de l'encourager, cette marque plongea un peu plus dans la tourmente. Nerveuse, elle se retourna pour découvrir que Bérénice s'était déjà échappée des griffes d'Ophélia et que cette dernière contemplait la locomotive avec une certaine mélancolie.
-Tu as envie de venir avec nous ? se moqua Joséphine, désireuse de se changer les idées.
-J'en suis quitte pour deux mois de préparatifs harassants à être déchirée entre mes envies, ma mère et ma belle-mère. Crois-moi je donnerais tout pour monter dans ce train et réapparaître comme une fleur le jour du mariage.
-Une fleur avec une magnifique robe.
Un sourire comblé fendit la mine nostalgique d'Ophélia. Cela avait nécessité des cris et que leur père raisonne leur mère, mais elle avait fini par gagner la robe de sa vie, un bustier finement orné de pierreries qui soulignait sa taille fine et finissait en une ample jupe d'ivoire qui la drapait comme une princesse. Elégante et raffinée, comme la future mariée. Bérénice en avait été d'autant plus heureuse que c'était elle qui avait déniché celle-ci.
-Tu te rends compte ? souffla Ophélia, toujours un peu rêveuse. Quand tu reviendras, il ne restera plus qu'une semaine avant le mariage ... Ce sera notre dernière semaine ensemble ... Après j'irai vivre à Londres avec Cassius ...
-Tu vas adorer Londres ... toute la vie mondaine que tu as rêvée, prendre en main ta maison – ta maison, Lili ! insista-t-elle en secouant la main de sa sœur. Tu vas pouvoir faire ce que tu veux, du piano à pas d'heure, retirer les immondes tapisseries de ton salon, avoir une immense pièce avec tous tes vêtements !
-Et une autre pour mes chaussures, s'esclaffa-t-elle, amusée. Cassius me les a déjà réservés ...
Une ombre traversa son visage et fit trembler le sourire sur ses lèvres. Elle considéra Joséphine avec une pointe de désarroi.
-Il a préparé la nurserie, aussi.
Joséphine papillonna des yeux, interdite. Par automatisme, son regard tomba sur le ventre terriblement plat de sa sœur et celle-lui lui donna une tape sèche sur l'épaule.
-Mais non, enfin ! Je prends mes dispositions pour que ça n'arrive pas, qu'est-ce que tu crois ?
-Des dispositions ? se récria Joséphine, incrédule. Attends, tu n'attends le mariage pour ... ?
Elle fut incapable d'achever sa phrase. La seule fois où le sujet de la sexualité avait été abordé dans la famille, c'était pour que leur mère les enjoigne à se préserver pour leurs époux afin de rendre l'instant spécial et unique. Imprégnée comme elle l'était des préceptes maternels, il lui avait semblé naturel qu'Ophélia obéisse à la règle. Et pourtant, la délicate rougeur sur ses joues lui assurait le contraire.
-Je voulais, expliqua-t-elle dans un filet de voix. Mais j'ai fini ... par me laisser tenter. (Elle écarta nerveusement une mèche de cheveux blonds qui lui barrait le front). Mais cesse de regarder mon ventre, je fais tout pour ne pas tomber enceinte, crois-moi. Je suis déjà bien assez terrifiée par la perspective ...
-Terrifiée, carrément ?
-Pas toi ? rétorqua Ophélia, les sourcils haussés. Attends, un petit monstre va venir transformer ton corps de façon irréversible, jouer au ballon avec ta vessie et te déchirer les entrailles pour sortir. On dit que c'est la pire douleur du monde ... de la torture, ni plus ni moins. Des bébés tuent leur mère pour naître, et quand la mère survit, ils leur aspirent son âme. C'est ça : les bébés sont des vampires !
Joséphine resta coite, un peu estomaquée. Elle avait toujours su que sa sœur avait un rapport très prudent à la maternité mais ces paroles lui semblaient plus virulente que le simple « je vais profiter avant que la grossesse de bousille mon corps » dont elle avait l'habitude. Puis Joséphine réalisa qu'elle n'avait personne d'autre à qui parler ainsi. Qui écouteraient ses craintes de se voir être réduite à l'état d'esclave par la maternité ? Leur mère si traditionnelle ? Ses amies qui souvent rêvaient mariage et enfants ? Seulement, Joséphine n'avait aucun réconfort pour sa sœur. Elle aussi doutait de ses capacités à être une mère ... Ophélia dut sentir son indécision, car elle sourit courageusement et éluda la conversation d'un geste nonchalant de la main.
-Enfin bref, tout ça pour dire que nos vies auront bien changées, quand tu sortiras du train. Je me marierai et toi ...
-C'est encore le grand trou noir sur la manière, la coupa Joséphine avant qu'Ophélia ne complète sa phrase. Mais je trouverais quoi faire ...
-C'est ça qui te rend si nerveuse ? demanda Ophélia d'un ton compatissant. Te dire qu'il ne te reste que deux mois pour te trouver un avenir ?
-Oh ! Non, Berry a vu juste, c'est totalement Farhan.
-Mais pourquoi ?
Joséphine se trémoussa, embarrassée. Elle ne sut si c'était parce qu'Ophélia avait été sincère sur ses peurs ou si elle éprouvait juste le besoin de verbaliser son anxiété, mais elle se retrouva à balbutier :
-Bien ... Je ne sais pas, je ne sais pas quoi faire. Normalement je monte me chercher un compartiment pour avoir la paix, mais est-ce que je ne suis pas censée l'attendre, passer le trajet avec lui ? J'en ai envie, mais je n'ai pas envie de le coller ... et je me sens stupide de me poser toutes ses questions ! J'ai l'impression d'être une gamine !
Ophélia rejeta sa tête en arrière pour éclater de rire, à gorge déployée, si bien que certains parents tournèrent la tête vers elle, interloqués.
-Josie, c'est ce qui se passe quand veut bien faire les choses : on stresse. Vois ça comme une bonne chose, ça va dire que c'est du sérieux. Mais détends-toi ! Tu vas voir, tout va se faire naturellement ... D'ailleurs, il est riche, Farhan ?
-Pauvre. Endetté.
-Dommage pour toi. (Elle tapota sa joue avec condescendance). Il va falloir que tu te trouves un travail. Je reviens, je vais saluer Liam Robards ! Ne bouge pas !
Elle s'infiltra dans la foule avec la souplesse d'un serpent pour rejoindre l'homme en question, que Joséphine reconnut comme le fils d'un collègue de leur père chez les Aurors, celui chez qui ils avaient passé le Nouvel An. L'homme qui n'avait pas quitté Ophélia du regard de la soirée, se rappela-t-elle, amusée de voir les étoiles dans ses yeux lorsque sa sœur se présenta devant lui avec un sourire éclatant. Les mains jointes sur sa valise, Joséphine les observa quelques secondes, à se demander vaguement si ce Liam avec lequel elle parlait si facilement n'aurait pas été un meilleur choix que son Cassius au nez en forme de poire. Plongée dans ses pensées, elle sursauta lorsqu'on vint lui effleurer le bras avec un :
-Hey.
Farhan. Joséphine reconnut la voix avant même de pivoter nerveusement sur elle-même et de le découvrir face à elle, un léger sourire aux lèvres. Il s'était rasé de près, constata-t-elle, presque déçue, et avait déjà revêtue son uniforme de Gryffondor. Elle eut à peine le temps de prendre en compte ses détails et du stresse qui lui perforait le ventre que Farhan se pencha sur elle pour poser ses lèvres sur les siennes. Aussitôt, tous les doutes, les questions et les peurs absurdes se s'effacèrent dans l'esprit de Joséphine, dissous par la chaleur et la simplicité du baiser. Avant qu'il ne songe à s'écarter, la jeune fille passa une main derrière sa nuque et savoura la sensation de ses lèvres qui se mouvaient contre les siennes. Son ventre si noué une seconde plus tôt s'était mué en véritable chaudron qui menaçait d'entrer en ébullition et l'impression perdura lorsqu'elle s'écarta pour planter son regard dans celui de Farhan.
-Donc ce n'était pas un rêve, souffla-t-elle avec un sourire incertain. Merci de me le confirmer.
-Je te rassure, j'avais besoin de me l'assurer aussi ...
Joséphine faillit lâcher un soupir de soulagement face à l'aveu plein d'aplomb et d'une pointe de dérision de Farhan. En effet, c'était agréable d'entendre qu'elle n'avait pas été la seule à appréhender les retrouvailles. Je ne suis pas stupide, je suis normale. Le sourire qui s'étira sur ses lèvres fut plus assuré.
-Parfait. Et qu'est-ce qu'on fait maintenant qu'on est plongé dans la réalité jusqu'au cou ?
-Et bien je suppose qu'on monte dans le train, proposa Farhan en levant les yeux sur la locomotive rouge. Lauren et Charlie sont dans le wagon des préfets, mais si tu es d'humeur je pense qu'on doit pouvoir retrouver Tonks quelque part.
-D'humeur ? répéta-t-elle, le nez froncé.
Je te jure que si me traite de tempête, on va mal démarrer notre aventure, O'Neil. Farhan la contempla, le coin des lèvres frémissant en un sourire qu'il se refusait de laisser éclater.
-Je te rappelle qu'avant ces vacances, la dernière fois que je vous ai vu interagir tu lui envoyais un geyser d'eau en pleine figure.
-Oh ..., se souvint Joséphine, prise d'une illumination. Oui, j'ai fait ça ...
-Hum, hum.
Cela semblait appartenir à une autre vie ... Elle se revoyait parfaitement pointer sa baguette sur le visage déformé par la fureur de Tonks, avide de faire cesser ses cris de la manière la plus cinglante que possible. C'était l'acte qui avait amené leur retenue et depuis... L'estomac de Joséphine se contracta de nouveau et elle repoussa l'idée au fond de son esprit.
-Justement, tu as vu le moindre geyser pendant les vacances ? ironisa-t-elle.
-Et sincèrement, j'aimerais avoir un jour les raisons d'un tel miracle ...
Un jour. Mais pas tout de suite, O'Neil, laisse-moi profiter un peu avant de plonger ... Joséphine s'efforça à sourire pour ne pas laisser le trouble la paralyser. Un peu nerveuse, elle laissa sa main descendre le long du bras de Farhan pour effleurer la sienne. Farhan y baisser les yeux et après une seconde de battement, leurs doigts finirent par s'emmêler, exactement comme dans le couloir à la différence que cette fois, ils étaient en plein jour et que ce n'était plus une expérience mais un accomplissement. Ce simple geste desserra l'étau dans la poitrine de Joséphine.
-Va dans le train, je vous rejoins, proposa-t-elle finalement. Je dois attendre Lili.
-Lili est là !
-Oh par Merlin ...
En effet, Ophélia était triomphalement revenue, avec la célérité d'un requin face à l'odeur du sang et la même avidité dans le regard. Elle observa Farhan, puis remarqua leurs mains enlacées avec un ravissement presque indécent qui exaspéra Joséphine.
-Excuse-moi, promis je te la laisse dans une seconde, minauda Ophélia avec un adorable sourire. Mais avant je dois absolument dire au revoir à ma sœur.
-Oh c'est pas vrai ..., râla Joséphine, anticipant l'humiliation.
Car à peine avait-elle prononcé ses mots qu'Ophélia la capturait dans une étreinte qui n'avait rien de naturel, une étreinte à lui en broyer les côtes et forte d'une multitude de petits mots d'amour à en faire vomir un ange. « On se revoit bientôt ma petite sœur chérie, oh prends soin de toi, sois sage, d'accord ? Pas comme les précédentes années ... ». Les mots ne s'interrompirent pas mais Joséphine se laissa faire : elle savait qu'elle s'exposait à pire si elle se débattait.
-Qu'on se le dise, je te déteste, persiffla-t-elle néanmoins à son oreille. Ça va se payer, Lili.
-Je demande l'immunité pour mon mariage, murmura Ophélia d'un ton malicieux.
-Dans tes rêves. (Joséphine s'apprêtait à se dégager, mais se ravisa à la dernière seconde). Mais cela dit ... Prends le temps. Pour l'après-mariage, je veux dire. La nurserie peut bien prendre la poussière pendant quelques années ... ne l'utilise pas si tu n'es pas prête à le faire.
Les gestes frénétiques et exagérés d'Ophélia se figèrent dans son dos et lorsqu'elle s'écarta, un étrange sourire flottait sur ses lèvres. Elle réajusta tendrement, mais avec la main de la perfectionniste, la frange sur le front de Joséphine avant de définitivement libérer sa sœur.
-Ecris-moi, je vais avoir besoin de soutien ses prochaines semaines. (Elle se pencha sur le côté et adressa un signe à Farhan) Et j'espère te revoir cet été !
-Pas un mot aux parents ! siffla Joséphine entre ses dents.
-Contre l'immunité de mon mariage !
-Vendu, céda-t-elle.
Satisfaite, Ophélia lui souffla un baiser et s'enfonça de nouveau dans la foule à la recherche de Bérénice. Moitié amusée, moitié mortifiée par la scène, Joséphine pivota souplement vers Farhan avec un grand geste pour l'endroit où sa sœur venait de disparaître.
-Vraiment, remercie le ciel de t'avoir envoyé Maya. Regarde ce que tu aurais pu avoir !
Le sourire qui retroussa les lèvres de Farhan avait quelque chose de figé, et Joséphine s'en voulut presque immédiatement d'avoir évoqué le sujet. Maintenant, le mot « sœur » ne renvoyait plus qu'à Maya. Il renvoyait également à Shahrazade, cette mystérieuse enfant certainement morte en Palestine et qu'il n'avait pas connu. Se demandait-il en contemplant Ophélia si sa propre grande sœur aurait pu être comme elle ? Avant que la nostalgie et les questionnements de l'enveloppe totalement, Joséphine saisit sa main et l'entraîna vers la porte la plus proche.
-Allez viens, on va rejoindre Nymphadora ...
Il y avait longtemps qu'elle n'avait plus prononcé le prénom à voix haute et elle devait admettre que ça lui plaisait. Elle comprenait pourquoi Tonks cherchait à s'en détacher, mais à titre personnel elle adorait les sonorités du prénom et l'effet sur sa langue. Nymphadora. C'était joli. Farhan lâcha un petit rire crispé en suivant Joséphine dans le train. Il attendit d'avoir hissé sa valise sur la plateforme pour lâcher avec prudence :
-Hum ... On n'a pas parlé de ça mais, hum ... les crises de jalousie ...
Joséphine grimaça. Evidemment, la dernière fois que Farhan l'avait vue évolué en couple, c'était avec Charlie au moment où sa confiance en elle au plus bas la poussait à réclamer toujours plus d'attention. Et contrairement aux apparences, Joséphine sentait que Farhan était d'un tempérament moins flexible que Charlie sur ce point. Qu'à la moindre crise, il la remettrait vertement à sa place. Elle se sonda intérieurement, invoqua à elle l'image d'une Nymphadora Tonks rayonnante qui ne pouvait s'empêcher de passer son bras sous celui de Farhan, sa meilleure amie, sa confidente. Ses doigts s'agitèrent compulsivement contre ceux de Farhan, marquant une certaine gêne, mais considérablement réduite face au sentiment acide qui l'avait poussé à s'emporter contre Charlie.
-Ce n'est pas la même relation et pour être totalement honnête je ne pense pas être la même qu'en début d'année, évalua Joséphine, songeuse. Les règles ont un peu changé.
-Désolé, soupira Farhan.
-Oui alors je vais te frapper chaque fois tu prononces ce mot. Tu t'excuses beaucoup trop.
Un sourire contrit s'étala sur les lèvres de Farhan. Ils s'étaient avancés dans le couloir bondé et ne pouvaient évolués tous les deux de face. Il prit les devants, mais malgré la foule et leur valise, ne renonça pas à serrer sa main.
-Oui mais là, c'est vraiment justifié. Tu as raison, c'est ... une nouvelle histoire, je suis idiot d'attendre quelque chose, de vouloir comparer ... et je ne compare pas, attention. Je préférais juste, je ne sais pas ... en parler avant ?
La nervosité se sentait dans la façon dont il serrait ses doigts et Joséphine réprima un sourire. Elle attendit d'être immobilisée devant un compartiment où Tonks étaient installée, déjà occupée à travailler contre la fenêtre, pour faire face à Farhan et laisser s'épanouir le petit sourire moqueur.
-Bien. Tu comptes m'ignorer pour aller composer des Potions ? Ou me donner la sensation que je passe après ton hibou ?
-Tu es dure ...
-J'ai été dure avec Charlie, admit-t-elle à contrecœur. Et ce n'est pas impossible qu'un jour je le soit un jour avec toi, pour une raison ou pour une autre. Comme ce n'est pas impossible que ça n'arrive pas parce que ...
-Nouvelle Joséphine, nouvelle histoire, compléta Farhan en inclinant la tête. Table rase.
-J'aimerais bien tenter, oui ... Après tout, c'est une histoire de seconde chance, non ?
Farhan la considéra quelques instants, quelques instants où son petit doigt tapa contre le sien pour marquer sa réflexion, avant de lentement acquiescer. Soulagée, Joséphine s'approcha pour presser ses lèvres contre les siennes en guise de remerciement silencieux, et loin de la repousser, malgré la foule et quelques regards curieux qui avait pu se poser sur eux, il enlaça sa taille pour lui rendre son baiser. Ils avaient très vite opté pour une relation ouverte, frustrés des semaines de tension où il avait fallu un couloir vide pour qu'ils puissent se tenir la main. Quitte à faire l'objet de rumeur, Joséphine l'acceptait mieux quand cela concernait quelque chose qui la rendait heureuse. Secrètement, elle avait craint que Farhan n'assume pas totalement, qu'il soit trop prude pour l'embrasser en public mais le baiser avalait tous ses doutes.
-Quoique ... je trouve un intérêt certain aux compartiments vides, chuchota-t-elle, presque contre ses lèvres.
Le sourire qui vint ourler celui de Farhan indiqua très clairement que l'allusion le tentait. Pourtant il s'écarta et vint poser une main sur la poignée de porte.
-Mais j'ai promis à Tonks que je passerai le trajet avec elle.
Joséphine fit mine d'être outrageusement déçue et exaspérée, et entra le menton relevé dans le compartiment dont Farhan venait d'ouvrir la porte. Tonks ne réagit pas à leur arrivée, ni à leurs rires et répondit à leur bonjour par un « hum » concentré, plongée dans un épais grimoire de Défense contre les Forces du Mal. Il fallut que Farhan et Joséphine s'installent sur la banquette en face de la sienne pour qu'elle daigne lever la main à défaut de lever les yeux.
-Un, pas de bécotage. Deux, je refuse de tenir la chandelle. Trois, Abbot ce n'est pas parce tu es maintenant la copine de Farhan que ça va m'empêcher de t'envoyer un maléfice si tu te permets le moindre écart. Quatre, pas de gloussement. Tonks travaille pour devenir Auror.
-Je change d'avis, finalement, prétendit Joséphine en dressant un sourcil. Ça va être trop dur de tenir ma langue face à elle.
Tonks baissa son grimoire pour poser les yeux sur elle, les paupières plissées par la réflexion.
-Je cherche une blague à faire sur vous et le mot « langue », mais mon cerveau est un peu trop parcouru de formules.
-Pas de blague, exigea Farhan avec un regard d'avertissement. J'arrive, je vais juste trouver Maya...
Il quitta rapidement le compartiment, laissant Tonks et Joséphine face à face. La Serdaigle se trémoussa un peu nerveusement, attendant que la Poufsouffle profite de leur isolement pour se fendre d'un avertissement quelconque, mais elle se contenta de tourner une page de son grimoire, les sourcils froncés. Après quelques minutes de silence, Joséphine croisa les bras sur son ventre et se jeta à l'eau :
-Merci.
-De quoi ? s'étonna Tonks sans la regarder.
-De ne pas m'avoir demandé si je lui ai dit.
Tonks cilla et se désintéressa enfin de son grimoire pour lever un regard étrange sur Joséphine. Elle tapota le bord de sa couverture, l'air indécis.
-Disons que ... je comprends parfaitement que tu n'aies pas voulu commencer votre histoire avec ça. Après ce qui s'est passé ces dernières semaines ... tu as le droit de juste profiter, sans prise de tête. Tous les deux, à dire vrai.
Joséphine lui adressa un regard reconnaissant, auquel Tonks répondit par un faible sourire avant de reporter son attention sur son livre. Elle tourna une nouvelle page et ajouta d'un ton neutre :
-Même s'il va falloir lui dire un jour parce qu'il ne comprend toujours pas comment on peut rester dans un même compartiment sans s'écharper.
-Il suffira de lui dire que j'ai renoncé à t'appeler « Nymphadora » et que depuis tu me trouves agréable.
-N'exagère pas, Abbot. Je suis certaine que tu as fait exprès de prononcer mon prénom.
-Evidemment.
-Je te déteste.
-C'est réciproque.
Elles se sourirent. Et lorsque Tonks replongea son nez dans son grimoire et Joséphine dans son journal, le sourire persista.
***
Charlie s'était attendu à subir les assauts de Poudlard durant la première semaine qui suivrait la reprise. Farhan l'avait prévenu : Joséphine et lui ne se cacheraient pas, leur histoire avait été déjà trop complexe pour qu'ils se rajoutent cette tension. Malgré la gêne que cela pouvait provoquer, Charlie n'avait pas bronché, compréhensif. Cependant, il n'avait pas forcément prévu que la vague l'engloutirait dès le Poudlard Express. En réalité, dès l'instant où il avait mis un pied dans le compartiment des préfets : il avait à peine passé la porte que la préfète de Poufsouffle, Alice Miller – qui se trouvait en plus être l'ancienne petite-amie de Farhan – lui avait demandé si elle avait vraiment vu Farhan embrasser Joséphine Abbot sur le quai. Charlie avait observé un peu les forces en présence – Bérénice qui s'était contenté d'un sourire entendu, Elisa Strettins dont les amies étaient le cœur brûlant des rumeurs de l'école, ou Lauren qui apprenait la chose puisqu'elle avait passé les derniers jours des vacances dans son Irlande natale. Heureusement, son amie avait été d'un précieux soutien en coupant Alice d'un « si tu as des questions, c'est à Farhan qu'il faut les poser ». Ça n'avait pas empêché son homologue de Poufsouffle, un certain Reggie Stones à qui il avait dû adresser deux mots dans toute sa scolarité, de le rattraper à la fin de la réunion alors qu'ils se déversaient dans le train :
-Mais sérieux, Weasley ? Ton ex-copine et ton meilleur ami, t'accepte ?
-Pourquoi je n'accepterais pas ? rétorqua Charlie avec une certaine lassitude.
-Mais c'est trop gênant de se dire que ton meilleur ami se tape ton ex !
-Se tape ? s'étrangla Bérénice derrière lui. Non mais pourquoi tout de suite « se tape » ?
-Tu comprendras quand tu seras plus grande, chantonna tranquillement Elisa.
Bérénice lorgna la préfète-en-cheffe du coin de l'œil et à côté de Reggie, Alice Miller s'empourpra. C'était une jeune fille mignonne aux cheveux châtains et raides, aux joues rebondies relevées par un joli sourire, dont un tempérament égal qui s'était accordé à merveille avec celui de Farhan, à l'époque.
-Sérieux, ils couchent déjà ensemble ... ?
-Mais non ! protesta Charlie, exaspéré.
-Et quand bien même ce serait le cas, en quoi ça vous regarde ? attaqua Lauren d'un ton acide. Sérieux Miller, t'as demandé l'autorisation de Farhan avant de te mettre avec Mike Richkins ?
Alice vira à l'écarlate. Et pour cause, Charlie se souvenait parfaitement avoir été celui qui avait appris qu'elle s'était mise en couple avec son camarade de Poufsouffle, deux mois après sa rupture avec Farhan. Il se remémorait bien avoir été surpris de la sobriété de la réaction du jeune homme qui s'était contenté d'un « tant mieux pour elle ».
-Non, admit Alice du bout des lèvres. C'est juste que ... Joséphine Abbot, quoi.
-Bah quoi, Joséphine Abbot ? grinça Bérénice.
Lauren et Charlie échangèrent un bref regard alors qu'Alice pinçait des lèvres. Avait-elle perçu à un moment que Farhan avait toujours été fascinée par Joséphine ? L'avait-elle pris contre elle qui était son contraire – discrète, souriante, avec quelques rondeurs qui tranchaient avec les lignes anguleuses de Joséphine ?
-Disons que ce n'est pas la fille que je m'attendais à voir avec Farhan, lâcha Alice avec un haussement d'épaule.
-Et puis c'est surtout pour toi, Weasley, renchérit Reggie, l'air effaré. Vraiment, mon meilleur pote avec mon ex, je pèterais un plomb !
-Oui bah c'est le problème de Charlie, trancha Lauren d'un ton sévère. Et si Charlie n'a rien à dire, personne n'a rien à dire !
Elle darda particulièrement un regard sur la mine fermée d'Alice. La pauvre jeune fille n'avait pas l'aplomb nécessaire pour se battre face à la véritable lionne que pouvait être Lauren et se contenta d'un soupir. Elle donna un coup de coude à Reggie et ils rebroussèrent chemin jusqu'au fond du train où les septième année de Poufsouffle s'étaient certainement réunis. Les Serpentard étaient éclipsés dès qu'Elisa avait levé la séance et cette dernière restait derrière eux, discrètement mais Charlie savait qu'elle tendait l'oreille. Il n'oubliait pas que c'était d'elle qu'étaient parties les rumeurs concernant Lauren.
-Alors je suis au courant après Alice Miller, comprit celle-ci avec une pointe de mépris. Après avoir passé mes vacances à travailler dans la boutique d'O'Neil, je m'attendais à plus de considération ...
-Elle ne m'a rien dit non plus, je l'ai deviné, leur apprit Bérénice avec une pointe de fierté. Vous auriez vu sa tête en revenant des essayages ...
Charlie lui servit un regard d'avertissement et Bérénice fronça les sourcils, mais n'ajouta rien. Quelques pas plus tard, Elisa se glissa dans un compartiment d'où s'élevait des éclats de rire crispants et Lauren attendit que la porte se referme pour lancer :
-Parfait, maintenant on est entre nous. La vérité maintenant, Weasley ... ça ne te fait vraiment rien ?
-Rien, n'exagère pas, concéda sincèrement Charlie. Je n'irais pas jusque dire que ça me dérange, mais je ne dis pas que ça ne va rien me faire de les voir se prendre la main ou se bécoter devant moi ...
-Peut-être qu'ils resteront discrets, hasarda Bérénice.
Charlie lui jeta un regard dubitatif. La discrétion n'était pas le fort de Joséphine et il doutait sincèrement qu'avec tous ses problèmes, Farhan s'impose des barrières avec elle. Cela dit, il admettait les avoir observé évoluer ensemble à l'anniversaire de Maya : chaque fois qu'ils s'étaient parlés, quand ils étaient sortis sur le balcon pour fumer, les regards qu'ils avaient échangés. Et ce qu'il savait, c'était que le sentiment qui avait prédominé était une sensation de triomphe à l'idée que ses plans étaient sur de bon rails et que la joie était au bout du tunnel pour Farhan. Certes, cela avait été parfois accompagné d'un petit pincement au cœur, mais il ne doutait pas qu'il finirait par s'effacer avec le temps.
-Le principal, c'est que ça se passe bien, conclut Charlie de façon honnête. On s'est fixé des limites avec Farhan pour éviter de se gêner mutuellement, normalement tout ira bien.
-Comme quoi ?
-Comme le fait que je n'ai pas le droit d'émettre le moindre petit avertissement concernant Joséphine. Et il n'a pas le droit d'évoquer ce qu'il ... fait avec elle. Plus de bécotage dans la salle de bain ... Des petites choses comme ça.
Ils avaient énuméré les règles jusqu'à ce qu'à en faire un jeu, jusqu'à en énoncer des absurdes qui les avait fait écrouler de rire sur la table. Ça avait été une bonne soirée, se souvint Charlie avec une certaine nostalgie. Ils étaient allés boire un verre au Chaudron Baveur avant de finir la bouteille de Whisky-Pur-Feu de Nolan dans l'appartement. Leurs tentatives de crêpes avaient été désastreuses et ils avaient fini par manger des pâtes au fromage à même la casserole, à rire, discuter et proposer de nouvelles règles plus absurdes les uns que les autres. Farhan s'était endormi dans le fauteuil, un sourire aux lèvres et Charlie s'était fait la réflexion qu'il y avait une éternité qu'il n'avait pas été si détendu. Qu'ils n'avaient pas passé un moment sans évoquer le moindre problème. Pas de craintes d'orientation, pas de spectre amoureux désagréable, pas de quête d'identité. Juste deux amis devant une casserole de pâte et un verre d'alcool.
-Vous pensez que je peux le dire à Maya sans me prendre une réflexion ? interrogea Bérénice.
-Laisse Farhan lui dire, opposa Charlie avec un sourire contrit. Je sais que c'est ta meilleure amie, mais eux ils ont des liens à souder et c'est le genre de confidence qui peut aider ...
-C'est quand même incroyable cette histoire, souffla Lauren, qui avait été de fait mise au courant pendant les vacances. Et qu'est-ce qu'il va se passer d'ailleurs ?
-Qu'est-ce que tu veux qu'il se passe ? soupira Bérénice, défaitiste. On a épuisé toutes nos pistes ... Si Fiona n'a rien trouvé à Jéricho, qu'est-ce qu'on pourrait faire de plus ?
Charlie sentit un poing invisible lui heurter l'estomac. La vérité c'était qu'il restait une piste, un dernier fil à suivre pour sortir du labyrinthe. Jusque là, Brûlopot s'en était chargé seul ... et puis Farhan avait apporté un autre point qui avait fait tiquer Charlie.
-Il paraît que votre père se souvient parfaitement de Farhan, lança-t-il à Bérénice.
Le beau visage de la jeune fille se renfrogna.
-Je sais, Josie m'a dit. Du coup dans la foulée je suis allée l'interroger innocemment en prenant Maya en prétexte, mais il m'a encore soutenu qu'il ne se souvenait du La Mon House hôtel et du sort d'une petite fille arabe.
-Si c'est Farhan tout il se souvient, normal que Maya ne le lui ait rien évoqué ? hasarda Lauren, songeuse. Peut-être qu'il se souvient de l'attaque, mais pas des détails.
-Mon père ? douta Bérénice avec un ricanement. Je ne sais pas, il a une telle mémoire, il est tellement perfectionniste ... et d'après Josie, il l'a reconnu du premier coup d'œil, alors que Farhan a grandi de douze ans. Il semblait même ému.
-Et c'est inhabituel ?
Bérénice garda le silence quelques secondes, troublée. Charlie savait que des trois Abbot, elle était la plus proche de la figure paternelle, par le caractère mais aussi par l'affect.
-Mon père est quelqu'un d'extrêmement réservé, reconnut-t-elle du bout des lèvres. Ça va avec son métier d'Auror de garder ses émotions pour lui ... Josie n'a jamais pu l'accepter, mais je m'y suis faite, j'ai appris à voir son amour autrement. S'il a vraiment laissé échapper quelque chose face à Farhan ... je comprends que ça trouble Josie. Mais est-ce que ça signifie vraiment quelque chose, je ne sais pas ... après tout, ça doit secouer comme histoire.
Lauren hocha la tête et chercha le regard de Charlie. L'estomac noué, il le garda planté devant lui pour éviter qu'elle lise son désarroi dans ses prunelles. Les fils qui reliaient Aloyssius Abbot au cœur du labyrinthe commençaient à se multiplier, et malgré la prudence de Bérénice, Charlie voulait voir en sa réaction une preuve supplémentaire de son application. Brûlopot saura-t-il dénouer ce mystère ?
Charlie était en train de l'espérer de toute ses forces lorsqu'une des portes d'un compartiment s'ouvrit devant lui. Avec un certain déplaisir, il vit les sourires goguenards de Leonard et de Brett émerger dans le couloir.
-Hé Weasley ! C'est vrai ce qu'on raconte ?
-O'Neil a réussi à choper ton ex ?
-Je ne sais pas si je dois dire « bien joué » ou « quel enfoiré » !
-Non mais vous pensez vraiment que je vais en parler avec vous ? se récria Charlie en bombant le torse.
Il passa une main dans le dos de Lauren qui s'était raidie à l'apparition de leurs camarades de Gryffondor et la força à accélérer le pas pour les dépasser. Les dents serrées, la préfète s'exécuta, visiblement toujours prête à leur faire payer le fait d'avoir commenté sa vie sexuelle face à son frère. Bérénice, elle se contenta de lâcher :
-Non mais ça va déjà vite ! Ils auraient quand même pu être discrets sur le quai ...
-Et bien tu vois, moi j'espère qu'il se sont roulés une belle pelle, objecta Lauren avec un regard noir derrière son épaule. Après tout ce qu'ils vivent, moi je suis heureuse qu'ils puissent profiter ...
-Surtout Farhan.
Lauren papillonna des yeux et se détourna quelque peu. Le geste interloqua Charlie et une vague interrogation se déploya dans son esprit au moment où Lauren redressait le menton pour asséner :
-Qu'ils parlent, qu'ils parlent ... ils sont tombés sur les personnes les plus imperméables aux racontars.
-C'est clair, admit Charlie avec un petit rire. Joséphine s'en nourrit et Farhan est tellement au-dessus de ça ...
-C'est pour ça que c'est surtout pour toi que je m'inquiète, Weasley. Parce que beaucoup ne vont pas oser se frotter à Joséphine ou auront des scrupules face à Farhan donc c'est vers toi qu'ils vont tous se tourner. Promis je couvre tes arrières.
Elle leva le poing et Charlie y toqua le sien avec un sourire. Oui, ils se couvraient leurs arrières depuis le début de l'année. Ils étaient enfin devenus le couple de préfet soudés qu'ils auraient dû être depuis deux ans et pour Charlie c'était comme s'il était arrivé à une sorte d'accomplissement dans la fonction. Il n'avait pas épousé une vocation, mais il avait trouvé une amie.
-Hé, Charlie !
-Oh c'est pas vrai, marmonna-t-il entre ses dents, exaspéré.
Il se retourna, s'attendant à voir un énième élève qui viendrait lui demander des explications concernant un certain baiser qui avait lieu sur le quai de la gare. Mais ce n'était qu'Oliver Dubois qui se faufilait difficilement entre les élèves du fait de sa carrure, un bras levé pour attirer l'attention de son capitaine. Un sourire attendri retroussa les lèvres de Charlie.
-Je vous rejoins, ça peut être long, indiqua-t-il à Lauren.
-Comme ses discours, maugréa-t-elle avant de filer prestement avec Bérénice dans son sillage.
Olivier parvint enfin à rejoindre Charlie et faillit ce faisait projeter une pauvre deuxième année de Serpentard contre les parois. La petite lui jeta un regard noir avant de détaler, le nez en l'air.
-Toujours un grand succès avec la gente féminine, Dubois, se moqua gentiment Charlie.
Il s'en voulut dès qu'il remarqua le visage écarlate de son gardien. Lui avait détesté les questions de ce type, qu'on attende de lui qu'il ait un jour une petite-amie. Maintenant qu'il y songeait, Joséphine avait totalement raison sur ce point : c'était parce qu'il avait totalement intégré ces espoirs qu'il avait un jour répondu à son baiser. Ce n'était pas à lui de faire peser le même poids sur les épaules d'Olivier ...
-Cela dit, va à ton rythme, se reprit-t-il alors avant d'enchaîner : Que me vaut l'honneur ? Tu viens me présenter tes plans des vacances ?
-Oh, j'allais attendre l'entrainement pour ça, assura Olivier avec un haussement d'épaule. Je voulais savoir si toi, tu y avais pensé, qu'on ait pas des idées en doublon ...
-Pour tout te dire, Dubois ... Pendant les vacances, j'ai aidé un ami dans la boutique de son père. Situation d'urgence. Je n'ai pas eu trop le temps de penser à autre chose à part ça et les ASPIC ...
Olivier eut l'air vaguement compatissant, mais Charlie retint surtout la lueur fiévreuse qui s'alluma dans son regard lorsqu'il réalisa qu'il pourrait présenter absolument tous ses plans ses entraves. Cet amour de la stratégie rendait Charlie perplexe, mais il supposait que c'était cette petite nuance qui ferait d'Olivier un bien meilleur capitaine que lui.
-Très bien, c'est pas grave, j'ai travaillé pour deux ! Pour sept, même ! J'en profite, c'est ma dernière année sans examen, l'année prochaine j'ai les BUSE ... Quoi que cela dit, je serais capable de rater les BUSE pour me concentrer sur la coupe ...
-Attention Dubois, les grandes équipes demandent des ASPIC correctes, au moins trois Efforts Exceptionnels et cinq matières travaillées ...
-Tu ne devrais pas avoir de problème, toi, évalua Olivier.
Charlie faillit lâcher un petit rire incrédule et il le masqua derrière un léger sourire incertain. D'un geste compulsif, il effleura son insigne de Capitaine sur son pull et le décrocha par automatisme avant de le tendre à Oliver. Le jeune homme contempla l'objet doré dans sa main les yeux écarquillés.
-Attends, qu'est-ce que tu me fais, là ?
-Allez, prépare-toi. Tu seras un Capitaine exceptionnel, Dubois.
-Quand tu partiras, précisa Olivier d'un ton buté.
-Si je dois être parfaitement honnête ... je suis déjà un peu parti, dans ma tête.
L'incompréhension qui brillait dans le regard d'Olivier arracha un soupir à Charlie. Il referma ses doigts sur l'insigne et serra le poing.
-Ecoute, Olivier ... je ne serais pas Attrapeur professionnel. J'ai envoyé des lettres à de grands Magizoologistes pendant les vacances, j'attends les réponses ... C'est ça ce que je veux faire de ma vie. Je sais ce que tu vas dire, le coupa-t-il quand Olivier ouvrit la bouche. Et ça ne me fera pas changer d'avis. (Il prit l'insigne entre deux doigts). Dans les faits, tu es déjà le Capitaine, Olivier. Tu fais les discours, tu prépares les tactiques et parfois j'oublierais de prévoir l'entrainement si tu n'étais pas sur mon dos.
-Je pensais en être agaçant, murmura Olivier dans un filet de voix. Chaque fois je me disais que j'abusais mais j'étais tellement imprégné que je revenais à la charge sans réfléchir ...
-Et c'est ça être un bon Capitaine.
Il lui présenta de nouveau l'insigne qui brillait de tout son éclat sur sa paume. Il n'éprouvait aucun regret à s'en débarrasser ainsi. Il n'aurait jamais dû être à lui. McGonagall l'avait donné à un mirage, à un être factice en carton que la réalité était en train de désintégrer. En tendant l'insigne à Olivier, Charlie avait la sensation que justice était faite. Comme Olivier se contentait de le fixer comme s'ils s'agissait de la septième merveille du monde, Charlie s'avança et l'épingla sur son uniforme. Sonné, Olivier le laissa faire avant d'effleurer l'insigne du bout de ses doigts, incrédule.
-Tu es sûr ?
-Je serais honoré de jouer sous tes ordres, Capitaine, assura Charlie d'un ton solennel.
-Et McGonagall ?
-Je m'occupe de McGonagall.
Et à dire vrai, Charlie doutait qu'elle désapprouve ... en dehors du fait qu'elle risquerait de trouver Olivier campant devant son bureau tous les jours. Les joues du Gardien rosirent et un sourire confus s'étala sur ses lèvres. il s'agrandit à mesure qu'il réalisait ce qui s'était véritablement passé et Charlie le sentit sur le point de lui sauter au cou. Fort heureusement, il sut garder sa dignité et retourna dans son compartiment avec la démarche d'un jeune faon tout fier de courir en tête du troupeau. Charlie s'esclaffa en faisant volte-face ... et se retrouva nez à nez avec une Joséphine Abbot qui le contemplait avec un drôle de sourire. Elle tenait son uniforme sous son bras et Charlie comprit qu'elle allait certainement se changer.
-Avoue que tu as fait ça pour remplacer une rumeur par une autre, lança-t-elle immédiatement avec mordant.
-Lauren t'a dit ?
-Ouaip. T'inquiète Weasley, je vais les frapper. Ils ne te toucheront pas.
La conviction et l'ardeur avec laquelle elle prononça ses mots diffusa une chaleur bienfaisante dans sa poitrine. Peut-être qu'une partie de lui craignait d'évoluer avec Joséphine et Farhan en couple à ses côtés, mais ce genre de réaction lui faisait comprendre que ce n'était pas pour l'écarter. Au contraire, cela clarifiait leur situation et leurs sentiments et Charlie était touché que Joséphine soit capable d'un semblant d'instinct de protection à son égard. Pour le lui montrer, il passa un bras autour de ses épaules.
-Je n'en doute pas. Je sais quel genre d'hippogriffe tu es.
-Fais attention Weasley, prévint Joséphine en plissant les paupières. J'ai un copain maintenant.
-Ouais, je le connais. Il n'est pas jaloux, t'inquiète.
-Lâche-moi.
-Tu n'es pas un peu fière de moi que j'ai passé le flambeau à quelqu'un qui le méritait plus que moi ?
-Très fière, assura-t-elle moqueusement en pinçant sa joue. Ça c'est un bon petit Septimus !
-C'est bon ! glapit Charlie en se dégageant. Va-t'en, va te changer !
Joséphine éclata de rire et se dépêcha de filer souplement, son uniforme sous le bras, les yeux pétillants. Après des semaines à se croiser que des mines sinistres et des prunelles éteintes, c'était agréable de voir la vie faire briller de nouveau le regard de ses camarades. Et même s'il n'avait souvent qu'une responsabilité minime dans cet éclat, cela faisait naître une flamme de bonheur au creux de sa poitrine. Ce nouveau trajet signait pour lui le début d'une toute nouvelle aventure et il s'était tout étourdis d'impatience qu'il y posait le pied.
***
Voilà ! J'espère que ça vous a plu !
Et sachez que je suis assez contente de pouvoir écrire un couple aussi simplement. Genre juste "sortir avec" et les faire s'embrasser sur le quai de la gare tranquillement, se tenir la main. C'est quand même vachement bien quand c'est simple.
(Oui le Simoria, je vous regarde. Même si vous vous avez eu plus de 900 de commentaires quand vous vous êtes embrassés et que je vous aime d'amour et que je vais peut-être venir vous voir un peu avant de retourner aux révisions (il me reste pas grand-chose pour finir le chapitre 30)).
Bon week-end les enfants profitez bien et keur sur vous !
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