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Chapitre 42 : Vivre pour soi-même

HELLO TOUT LE MONDE 

Alors je poste un peu plus tard que d'habitude mais je suis actuellement en train de chiller comme jamais après une soirée épique (mon copain a mis fin à 8 ans d'étude (3 de prépa, 3 d'école et 2 de formation) donc il fallait fêter ça dignement ! C'est incroyable, je suis trop fière de lui et J'AI PARLE ANGLAIS AVEC DES GENS (vous ne connaissez pas mon niveau en anglais ... mais c'est un miracle)). Soooo I'm late, but totally worth it. 

Et puis c'est les VACANCES (navrée pour celle.eux qui n'y sont pas ... mais ça fait plaisir comme tout quand même) 

Et puis y'avait du biathlon ce matin au Grand-Bornan (Avec une vraie surprise très émouvante d'une locale, Sophie Chauveau, qui accroche la 4e place. Vraiment ça a donné un moment CHOUPI COMME TOUT) 

Ah, et petit détail LA FRANCE EST EN FINALE DE COUPE DU MOOOOONDE. Je ne sais pas si les jeunes générations se rendent compte de la CHANCE d'avoir cette équipe nationale qui depuis 1998 a participé à 4 finales sur 7 (!) c'est vraiment fou. J'ai peur parce que Messi a les dents longues ... mais damn it j'y crois. Et longue vie à Antoine Griezmann. 

SUR CE CHAPITRE. Ne soyez pas surpris.es de l'absence de journal de Jo, elle n'a pas pris son journal chez son grand-père ! 

***

C'est un devoir quotidien
Un costume qu'il faut mettre
Pour un rôle qui n'mène à rien
Mais faut-il vraiment s'y soumettre
Jusqu'à la fin ? 



Pour être à la hauteur
De ce qu'on vous demande
Ce que les autres attendent
Et surmonter sa peur
D'être à la hauteur


- Etre à la hauteur 
Le roi soleil

*** 

Chapitre 42 : Vivre pour soi-même.

-Mais elle ne t'a rien préciser d'autre ? Juste « je dois gérer quelque chose » ?

Farhan poussa un profond soupir face à la réponse de Charlie, mais il n'était pas déterminé à laisser sa proie s'enfuir. Cette histoire s'était littéralement passée dans son dos pendant des mois : cette fois, il comptait bien être partie prenante et jouer son rôle de meilleur ami tel qu'il le devait. Quand bien même ça lui faisait toujours étrange d'imaginer Farhan avec Joséphine ...

-Non, rien d'autre, mais ça a eu l'air de l'angoisser, je n'ai pas insisté ...

-Et ça ne te dérange pas de ne pas savoir ? Nom d'un dragon, il a fallu quelque chose si ça l'a rendu malade ...

Les yeux rivés sur son grimoire de Sortilège, Farhan ne répondit rien, visiblement songeur. C'était une belle matinée d'avril : la porte qui menait à l'étroit balcon de l'appartement des O'Neil était ouverte et l'air aux saveurs printanières s'engouffrait dans la pièce. La brise soulevait les pages de leurs manuels et des parchemins qui jonchaient la table de la salle à manger, si bien que Charlie avait été forcée de les fixer avec son encrier et d'autres livres.

-Je ne sais pas ... c'est Joséphine, je me dis que ça a pu être une petite chose qui a pris de grandes proportions et la faire paniquer à l'idée de s'engager ...

-Hum, lâcha Charlie, dubitatif. Je ne sais pas ... quand je lui ai parlé, elle avait l'air ...

Il réalisa son erreur lorsque Farhan leva enfin le regard du grimoire pour le planter sur lui, un sourcil dressé. Pris en flagrant délit, Charlie tenta de désamorcer le conflit avec un sourire contrit.

-Oui ... il se pourrait que ...

-Je sais, déclara Farhan, plus résigné qu'agacé. Tu n'as pas pu t'en empêcher, pas vrai ?

-En vérité, ce n'était même pas prévu ... c'est venu ... tout seul dans la conversation. Enfin bref. L'impression que j'ai eue, c'est qu'elle voulait remettre de l'ordre dans sa vie. Peut-être que c'est juste ça, non ? Quelque chose l'a fait se remettre en question, elle s'est rappelée qu'elle avait été juste parfois horrible, capricieuse et cruelle ses dernières années et elle essaie de changer pour être digne de toi.

Charlie ne savait pas quelle partie de son explication rendait Farhan le plus sceptique : le corps ou sa conclusion. Il trempa sa plume dans l'encrier qui maintenait cloué à la table la pile de parchemin qui contenait le chapitre sur le sortilège de Fidelitas.

-Au point qu'elle s'en rende malade ... ? douta-t-il.

-Peut-être que la maladie a été fortuite. C'est toi qui as dit que ça pouvait être une petite chose qui pouvait prendre de grandes proportions ... je ne comprends pas que tu n'aies pas voulu savoir.

-Je te l'ai dit, l'idée même d'en parler avait l'air de la faire angoisser. Et ... j'étais moi-même pas très bien, au bord de la crise de nerf. On n'en avait pas besoin de deux. Je crois que j'ai juste pas eu le courage d'affronter ça.

Il redressa ses lunettes sur son nez et détourna le regard pour se replonger dans ses notes de Sortilège. Il ne paraissait même pas honteux ou penaud de sa constatation, mais Charlie était persuadé que le pli de réflexion sur son front n'avait rien à avoir avec ses révisions. Un sourire goguenard retroussa ses lèvres.

-Et ... ça fait quelques jours que vous vous êtes parlés ... tu as réfléchi un peu ?

-Je n'arrive pas à me l'enlever de la tête, rétorqua Farhan sans lever les yeux sur lui. D'autres questions ?

Le ton sec et sans réplique n'empêcha pas Charlie d'éclater de rire. Il se laissa aller sur le dossier de sa chaise avec tant de force que cela lui arracha un couinement et qu'il se retrouva en équilibre sur les deux pieds de l'arrière.

-Ah la la ... tu vas tellement craquer ...

-Certainement, admit Farhan du bout des lèvres. Merci de le souligner, je ne me sentais pas assez idiot ...

-Idiot pour quoi ?

Farhan darda un regard désabusé sur Charlie.

-Elle me jette et il suffit qu'elle revienne pour que je lui retombe dans les bras ? Ce n'est pas un peu facile ?

-Non, je ne trouve pas. Déjà parce que ça n'a pas eu l'air d'être facile pour elle ses derniers temps ... et puis je trouve plus courageux que stupide. Ce n'est pas lui retomber dans les bras, c'est vous donner une seconde chance.

Les paupières de Farhan cillèrent, mais il parut réellement soupeser la formulation avant d'incliner la tête, comme pour donner le point à Charlie. Un petit sourire s'étira même sur ses lèvres.

-Donc ... ça ne te poserait vraiment aucun problème ?

Charlie sentait la question arriver depuis quelque temps, mais n'avait pas toujours pas préparé de réponses à la fois sincère et entendable. L'inclinaison réciproque de Joséphine et Farhan lui sautait à présent aux yeux et il avait trop envie de les voir heureux pour ne serait-ce qu'émettre la moindre protestation. Jusqu'à dire qu'il acceptait la chose sans broncher ? L'aigreur s'était envolée, mais l'inconfort demeurait et tous les jours il se fustigeait d'avoir céder à la pression et d'être sorti avec Joséphine en premier lieu. Là-dessus, elle avait une nouvelle fois raison : si elle ne l'avait pas embrassé la première, Charlie doutait qu'il l'aurait regardé de cette façon là ...

-Disons ... qu'il faudra peut-être juste établir quelques règles et que tout ira bien. Genre ce que tu feras dans la chambre avec elle, je ne veux rien savoir, compris ?

-Je ne suis pas sûr que je t'en aurais parlé quoiqu'il arrive ..., évalua prudemment Farhan. Tu n'as rien su pour Alice ...

Certes, admit Charlie pour lui-même et il accorda silencieusement le point à Farhan. Son ami n'avait pas de tabou, mais une certaine réserve sur son intimité. Maintenant qu'il y songeait c'était peut-être avec Joséphine qu'il devrait imposer des règles ...

-Bien. Alors tous les signaux sont au vert pour moi ... A toi de voir ce que tu veux faire.

Farhan sourit faiblement en guise de remercîment, mais son regard paraissait soucieux. Sa plume vint tapoter nerveusement son parchemin devant lui.

-Dis, ça fait longtemps qu'on n'a pas parlé de ça ... mais ça va toi ?

-Moi ? s'étonna Charlie. Par rapport à quoi ?

-La « raison » (Farhan prit soin de mettre le mot entre guillemet avec ses doigts) qui t'a fait rompre avec Jo.

-Ah, ça !

Il avait été tellement loin de l'allusion qu'il lui fallut un moment pour parfaitement comprendre de quoi Farhan parlait. Etrange comment un changement qui l'avait bouleversé en début d'année avait complètement reculer dans ses priorités jusqu'à se fondre insidieusement en lui, faire corps avec sa chair sans même qu'il le réalise pleinement. Instinctivement, il sonda son corps, son ventre et son entrejambe notamment, toujours tiède, déserté de la moindre passion. Le soulagement trembla en lui lorsqu'il réalisa que loin de l'incompréhension des premiers jours, c'était davantage un froid sentiment d'indifférence qui l'habitait.

-Honnêtement, avec tout ce qui s'est passé ces derniers mois, ça m'est passé par-dessus la tête, avoua honnêtement Charlie. Ça fait une éternité que je n'y ai pas réfléchi ... c'est une bonne chose, non ? Je m'y suis fait. De toute façon qu'est-ce que j'y peux ?

-Vraiment ?

Charlie se palpa la poitrine, comme s'il pouvait vérifier physiquement ses allégations.

-Je crois ... je ne dis pas qu'à un moment ça ne semblera pas bizarre d'être un garçon qui n'arrive pas à avoir du désir pour qui que ce soit ... peut-être qu'un jour une fille s'intéressera à moi et je devrais lui expliquer ça et ce sera compliqué ... Mais pour l'instant, ça va. J'ai des choses plus urgentes à penser, de toute manière.

-Tu penses vraiment que tu pourrais sortir avec quelqu'un ? interrogea Farhan, l'air assez surpris. Si elle – ou il d'ailleurs – accepte le fait que tu sois asexuel ?

La question laissa Charlie pantois et il repensa à toutes ses fois ces derniers jours où la phrase « mais pourquoi je suis sorti avec Joséphine ? » était venu le hanter. Il cligna plusieurs fois des yeux et demanda :

-Pourquoi tu dis ça ? Vraiment, je ne t'en veux pas de le dire, je comprends mais ... pourquoi ?

Farhan parut vaguement embarrassé, si embarrassé qu'au lieu de repousser ses lunettes dans ses cheveux il les retira lentement de son nez pour replier patiemment les branches, l'air de rassembler ses pensées.

-Bien ... ça va peut-être briser les règles que tu t'étais imaginé mais ... pour moi si tu as rompu avec Joséphine, ce n'est pas parce que tu étais asexuel. C'est parce qu'elle réclamait une attention que tu étais incapable de lui donner.

-Farhan, elle était jalouse comme tout ... Prépare-toi, d'ailleurs ...

-Parce qu'elle se sentait délaissée, précisa Farhan sans relever la pique. Elle est comme ça, plus on l'ignore, plus elle hurle. Je ne dis pas que c'est de ta faute, elle en demandait certainement trop ... mais ne va pas me dire que tu étais cent pourcent investi dans votre relation, je sais que c'est faux. Donc je pense que la sexualité ne sera pas le seul problème que tu auras dans un couple. Je ne suis pas sûr que le schéma classique t'aille particulièrement.

-Je ne suis pas fait pour l'amour, c'est ce que tu essaies de me dire ?

-Je ne sais pas, concéda-t-il avec réticence. Charles, je crois sincèrement que tu es la personne la plus généreuse que je connaisse. Quand tu aimes quelque chose ou quelqu'un, tu t'investis avec passion ... Regarde-toi avec les Créatures Magiques !

Il tapota de nouveau frénétiquement le parchemin de sa plume, traçant une myriade de point noir par-dessus ses notes de Sortilège.

-Peut-être qu'un jour, quelqu'un sera capable de provoquer la même passion chez toi, acheva Farhan. Ce qui veut dire que tu cherches une perle rare ... Mais que si ce n'est pas le cas, ce sera une relation vouée à l'échec parce que dans ton cœur, mille choses passeront avant elle.

Charlie médita quelques secondes l'exposé de Farhan, un peu perplexe. Il n'était pas sûr de parfaitement se reconnaître dans cette description et le fit savoir en ironisant :

-Donc je vais devoir finir ma vie avec toi, non ? Je m'investis dans notre « relation ». Je me suis même frotté à Jo pour toi, si ce n'est pas beau ...

Farhan le contempla, stoïque, la tête tenue par son poing refermé.

-Tu es amoureux de moi, c'est ça ?

-Mais non !

-C'est bien ce que je pensais. Tu me prends littéralement comme un de tes frères, et je me mets dans la case « famille » qui doit être au même niveau que les Créatures Magiques. Ecoute, Charles, je ne dis pas que tu ne trouveras jamais l'amour ... je dis juste que toi tu le cherches avec un grand A. Et que si ce n'est pas un grand A, ça ne va pas marcher.

-Et toi ? Tu l'as trouvé avec un grand A ?

-Trop tôt pour le dire, répliqua Farhan sans se laisser démonter par le ton mordant de Charlie. Mais moi j'ai un tempérament à lui laisser le temps de grandir ... toi si ça ne fonctionne pas direct, ça va te lasser et tu vas faire comme avec Jo à fuir chez Hagrid pour avoir des moments plus agréables.

Charlie roula des yeux, un peu exaspéré par l'image que cela renvoyait de lui. De toute manière, Farhan semblait avoir enfin fini son exposé et consulta sa montre, brusquement soucieux. Il referma son grimoire sur sa plume pour marquer la page.

-Je vais peut-être descendre, ça fait une heure qu'ils sont seuls à travailler, je vais aller voir comment ils s'en sortent ...

-Quoi ? Non, assis ! exigea Charlie en pointant un doigt sur lui. On n'est pas venu pour que tu nous surveilles, on est venu pour que tu prennes le temps de réviser !

-Dit-il alors qu'il me parle de Joséphine depuis une heure !

Charlie se drapa de sa dignité en carrant les épaules et relevant le menton. D'un geste moqueusement dédaigneux, il referma son propre manuel.

-Si ma présence te dérange, laisse-moi t'en débarrasser ! Madame ma mère lady Molly du Terrier m'attend dans notre château pour débarrasser le grenier !

-Le grenier où il y a la goule ?

-Pourquoi penses-tu qu'elle a besoin de moi ?

Farhan secoua la tête, mais cela ne suffit pas à masquer sa mine amusée. Il finit par se rassoir sur sa chaise et par rouvrir son grimoire docilement. Charlie ne s'estima satisfait que lorsque ses lunettes retrouvèrent leur place sur son nez et rangea enfin ses affaires dans son sac qu'il rejeta sur son épaule.

-Bonjour à la famille, marmonna Farhan quand il fut prêt à partir.

-Je n'y manquerais pas !

Il descendit les escaliers grinçants quatre à quatre pour se retrouver dans la boutique d'apothicaire. A la caisse, Lauren sursauta lorsqu'elle le vit émerger des lourds rideaux d'un vert depuis longtemps délavé qui masquait le chemin de l'appartement.

-Tu m'as fait peur, j'ai cru que c'était Farhan !

-Hum. Bah s'il descend, vous avez mon autorisation pour le frapper. Je rentre chez moi, on se revoit demain ?

Lauren acquiesça distraitement, occupée à compter la monnaie qu'elle devait rendre sur le gallion d'un vieux sorcier. Charlie salua vaguement Tonks occupé dans la réserve et Aidan qui remplissait les bocaux de poudre de corne de licorne. L'organisation avait peiné à se mettre en place, mais Farhan avait été patient les deux premiers jours pour leur expliquer les ficelles du métier. De plus, il avait eu l'œil pour réparer les facilités de chacun et leur assigner un poste en accord avec leurs capacités. Tonks, Lauren et lui se relayaient dans la réserve où des compétences parfois fines en Potion étaient requises, Aidan et Charlie s'occupait davantage du réassort et de la gestion des stocks. Lauren ne se déshonorait pas en calcule et était très organisée, ce qui faisait du comptoir un poste parfait pour elle. Petit à petit, ils trouvaient leurs marques et une fois la machine lancée, ils avaient pu se plonger sereinement dans les révisions.

Enfin, plus ou moins. Car plus Charlie avançait, moins il voyait quoi réviser.

L'appréhension du transplanage passa vite lorsqu'il se retrouva face au Terrier, sa maison si bancale mais si charmante, au milieu des marais et des poulets de basse-cours qui lui coururent entre les jambes. Généreux, il prit le temps de prendre une bonne poignée de grain dans un tonneau attenant à la maison et leur lança joyeusement avant de rentrer.

-C'est moi ! annonça-t-il joyeusement en mettant un pied dans la cuisine.

Elle n'était habitée que de sa mère, déjà à l'attaque derrière les fourneaux, baguette et couteaux à la main et les jumeaux, étrangement assis de chaque côté de la table avec un grimoire devant eux et la plume à la main.

-Pas trop tôt, lança sa mère en découpant un poireau. Je commençais à me dire que j'allais attendre ton père ... Tiens, tu n'oublieras pas ça demain !

Avec stupeur, Charlie découvrit sur la table de la cuisine entre Fred et George deux marmites complètes d'un ragout aux délicieuses odeurs d'épices, garni de carottes et de pomme de terre. Il huma l'alléchant fumée, incrédule.

-Mais maman, toute cette bouffe !

-C'est pour vous demain midi, expliqua Molly avec un sourire fatigué. Au moins vous n'aurez juste qu'à faire réchauffer ...

-Merci ...

-C'est la moindre des choses que je puisse faire ... pauvre Farhan il n'empêche, un si gentil garçon ... c'est si généreux à toi d'aller l'aider dans cette boutique, je suis sûre qu'il en est très touché ...

Charlie esquissa un sourire confus sans répondre. Il avait craint que ses parents ne comprennent pas sa décision d'aller aider gratuitement Farhan, mais au contraire cela les avait confortés dans l'idée qu'ils avaient élevé un garçon bien élevé.

-Tiens s'est arrivé pour toi, ajouta-t-elle en désignant une lettre posée sur le rebord de fenêtre. Un hibou que je ne connais pas ... Oh et j'ai fait des pâtés aussi pour vous demain, je les ai rangé dans le cellier ...

-Et nous on a été obligé de lorgner dessus toute l'après-midi sans pouvoir y toucher, marmonna l'un des jumeaux, dépité.

-Tu pourras y toucher lorsque tu iras travailler avec ton ami dont le père est malade, Fred Weasley ! Maintenant, finis-moi tes devoirs !

-Mais maman, c'est compliqué, gémit Fred. En plus Rogue va nous mettre une mauvaise note quoiqu'il arrive, à quoi ça sert ?

Molly le fit taire d'une œillade féroce et Fred rentra la tête dans les épaules avant de redresser brusquement son grimoire devant lui pour se soustraire au regard de leur mère. Charlie l'interrogea silencieusement, perplexe et elle poussa un grognement de dépit.

-Figure-toi qu'ils m'ont ramené un gnome dans leur chambre ! Elle est complètement saccagée, les cours d'Astronomie de George ont même été déchiré !

-Il ne devait pas avoir grand-chose dedans ...

Mais Molly lui jeta un nouveau regard acéré qui lui fit ravaler ses plaisanteries. Elle se remit à couper les poireaux avec tant de vigueur que la planche de bois sous eux se couvrit d'entaille.

-Donc jusque la fin des vacances, c'est devoir en bas, puisqu'ils ne savent faire que des bêtises dans leur chambre ! Moi qui pensais que le Quidditch les avait assagis ... que nenni, McGonagall m'a encore envoyé une lettre la veille des vacances ... insolence pendant son cours ... insolence ... Charlie chéri, tu peux aller vérifier si Ginny et Ron font bien leurs exercices d'écriture dans le salon, s'il te plait ? Ron fait encore tant de faute, il faut qu'il soit au point pour entrer à Poudlard ...

-Tout de suite ... (Il récupéra la lettre et jeta un petit regard à George en passant devant lui). Un gnome, pff ... amateurs. Vous auriez ramené un Niffleur, là j'aurais été impressionné.

-Charlie, ne leur donne pas des idées !

Dans le dos de leur mère, George lui adressa un clin d'œil et Charlie se dépêcha de passer dans le salon avant d'attiser l'ire maternelle. En effet, sur la petite table du salon, les benjamins s'adonnaient calmement à leurs exercices d'écriture. Ginny recopiait Lapina La babille en attaché, la langue pincée entre ses petites dents, quand Ron conjuguait une liste de verbe aux temps du passé, avec une prise si molle sur la plume que Charlie s'étonnait de voir les lettres se tracer.

-Ce n'est pas ça, ici, indiqua Charlie en relisant. C'est une forme irrégulière ...

-Mais à quoi ça sert de savoir ça ? s'agaça Ron. L'année prochaine je vais apprendre la magie, ça ne me servira à rien de savoir conjuguer !

-Et comment tu comptes bien prendre tes cours de magie, si tu fais des fautes partout ?

-Et alors ? Du moment que je comprends, c'est le principal, non ?

Charlie soupira profondément, momentanément incapable de répondre car il se souvenait parfaitement s'être posé les mêmes questions au même âge. Lui aussi avait été peu intéressé par les savoirs élémentaires étant jeune : les calculs, l'orthographe ... tout cela l'avait ennuyé et dès que sa mère avait le dos tourné, il avait couru rejoindre son père dans le jardin.

-Si tu finis tes exercices en ayant tout bon, tu m'aideras avec la goule tout à l'heure, proposa-t-il plutôt en lui ébouriffant les cheveux.

-Et moi ? protesta Ginny, vexée. Moi aussi je peux me battre avec la goule, je suis grande !

-Même deal : je veux pouvoir lire Lapina La babille et la souche qui gloussait comme si je lisais le conte orignal. Et que ça saute !

Enthousiasmée, Ginny se remit immédiatement à écrire soigneusement ses lettres sur son morceau de parchemin. Ron parut plus blasé, mais se replongea docilement, la joue écrasée contre son poing. Charlie profita de l'accalmie pour ouvrir la lettre. La cire qui la scellait était belle, épaisse et bleue et l'écriture qui la parcourait ronde et soignée. Un « Aah » de compréhension jaillit de ses lèvres lorsqu'il vit la signature.

Bonjour Charlie !

Je suis désolée de te déranger, tu dois certainement être très occupé pendant des vacances avec les révisions des ASPIC, mais j'aurais un petit renseignement à te demander. Dimanche prochain, c'est l'anniversaire de Maya et je me disais que ça pourrait lui faire plaisir d'aller voir Farhan ! Joséphine rentre la veille de chez notre grand-père, je pense que pourrais lui demander de nous faire transplaner jusqu'au Chemin de Traverse, ça permettra d'éviter de dépenser des mornilles dans le Magicobus ...

Mais j'ai un peu peur de déranger Farhan, comme il travaille à la boutique et tout ... je ne sais pas, il ouvre le dimanche ? Est-ce que ça vaut vraiment le coup ? Et est-ce qu'il n'a pas oublié que c'était son anniversaire ? Parce que si j'amène Maya et qu'il n'a pas de cadeau ou quoi ... Enfin bref, tu en penses quoi, c'est jouable ? De meilleur ami à meilleure amie.

J'espère en tout cas que tu passes de bonnes vacances et que tu profites bien de ta famille.

Bérénice

-File-moi ta plume, exigea immédiatement Charlie à Ron.

Sans attendre sa réponse, il lui prit des mains, ce qui occasionna un cri indigné de la part de son jeune frère.

-Mais je pensais que je devais vite finir !

-Mais moi j'ai un rôle d'entremetteur à jouer. Ginny, parchemin !

Sa sœur fut plus docile en sortant de sous la table un morceau chiffonné, mais qui avait pour mérite de n'être ni déchiré si trop abîmé. Charlie ne pinailla pas sur la qualité et lissa le parchemin sur sa cuisse pour lui donner un aspect plus présentable.

-Votre contribution ne sera pas oubliée, promit solennellement Charlie avant de se mettre à écrire.

Salut Berry ! Quel plaisir de recevoir une lettre de ta part !

Bien sûr que non, ça ne dérangera pas Farhan ! Pour tout te dire, moi et quelques amis de septième année on est venu l'aider pendant les vacances, justement pour qu'il se permette des pauses. Alors celle de dimanche, on va l'obliger à la prendre et il ne devrait pas trop protester si c'est pour l'anniversaire de Maya ! Au contraire, tu nous donnes une occasion en or.

Ne t'en fais pas pour le cadeau, je lui rappellerai subtilement. On en avait déjà parlé pour tout te dire ... Tu aurais peut-être un tuyau pour nous ?

Et oui n'allez pas dépenser votre argent de poche dans le Magicobus ... Je ne pense pas que Joséphine fera de difficulté pour vous escorter, elle adore montrer à quel point elle maîtrise le transplanage, ça a été l'une des premières aux leçons. Et puis elle cherche toujours une occasion pour fuir votre maison, non ? Joue là-dessus et c'est gagné !

Donc on se dit à dimanche Berry ! Révise bien en attendant.

Charlie

Charlie ricana en relisant sa lettre. Il avait lourdement insisté sur Joséphine, peut-être, mais il doutait que Bérénice comprenne réellement ... Je vais te faire craquer avant la rentrée, mon petit, songea-t-il en repliant soigneusement la lettre. L'histoire était en marche ...

Charlie continua de surveiller Ron et Ginny quelques minutes, pointa quelques erreurs, puis retourna dans la cuisine où les jumeaux avaient disparus, ne laissant comme trace de leur passage que des boules de parchemins qu'ils semblaient s'être envoyés toute l'après-midi et des avions de papier.

-Infernaux, marmonna Molly, toujours occupée à préparer sa soupe.

-C'est toi qui les as mis au monde, répondit Charlie en scellant sa lettre d'une cire de mauvaise qualité. Où est Percy ?

-Il travaille sagement dans sa chambre, lui.

-Et pourquoi on a besoin d'aller dans le grenier ?

-Pour aller chercher les anciennes d'affaire des jumeaux, répondit sa mère, l'air subitement soucieuse. Je commence un peu à faire l'inventaire de ce qu'on aurait à acheter pour Ron à la rentrée ...

Charlie, qui venait de s'installer à la table, leva un regard éperdu sur sa mère.

-Maman, tu as bien regardé Ronnie ? Il fait presque leur taille, déjà ... Elles sont déjà trop petites, les affaires de Fred et George pour lui ... surtout que je n'ose imaginer dans quel état ils sont ... ni ce qu'il risque de trouver dans leurs poches ...

-Et bien les anciens uniformes de Bill ou de Percy, tu as raison, ils lui iront mieux ... (Elle poussa un profond soupir). Quand je pense que je vais être obligée de lui acheter un chaudron ... George a fait fondre le sien, j'ai été obligé de lui donner ton ancien ...

Le tracassement visible de sa mère noua les entrailles de Charlie. Pour tromper la nervosité, il se mit à éplucher une pomme qui contenterait certainement la faim qu'avait fait naître la délicieuse odeur des marmites. Sa mère dut lire la gêne dans son silence car elle lui adressa un petit sourire.

-Mais on trouvera un moyen, on a toujours trouvé un moyen, assura-t-elle en caressant ses cheveux. Il faudra peut-être juste se serrer un peu la ceinture en septembre ... Heureusement que tu auras ton propre salaire, une bouche en moins à nourrir ! Tu seras même certainement mieux nourri que nous, tu n'as pas à t'en faire ...

C'était dit sur le ton de la plaisanterie, mais Charlie n'eut pas le moindre sourire. Il considéra longuement sa mère, son sourire de façade qui masquait mal son inquiétude grandissante. La rentrée était toujours un moment sensible pour la famille : les fournitures scolaires grignotaient les rares économies de la famille, leur père était forcé de faire des heures supplémentaires trois mois après cela, et leur mère d'éclaircir la soupe. Si en plus des frais supplémentaires étaient à attendre pour Ron ... Charlie planta la pointe de son couteau dans sa pomme, tiraillé.

-Et si ... le salaire n'était pas si haut que ça ?

-Mais qu'est-ce que tu racontes, mon chéri ? lança distraitement sa mère.

-Bien ... si je ne deviens pas de joueur de Quidditch à la rentrée ...

Sa mère se méprit complètement sur ses doutes : avec un « oh » peiné, elle se détourna de sa soupe pour venir embrasser bruyamment la joue de son fils.

-Mais enfin, n'importe quoi mon grand ... Ils seraient fous de ne pas te prendre avec toutes les éloges qu'on fait de toi ... Tu vas finir Poudlard invaincu, ça montre à quel point tu es un Attrapeur brillant, non ?

-Il me reste un match, rappela Charlie, le cœur battant la chamade. Mais ce n'est pas de ça que je veux parler ... si je ne devenais pas Attrapeur ? Si ce n'était pas ce dont j'avais envie ?

Les mains de Molly se crispèrent sur ses épaules et quand il osa affronter son regard, il fut l'incompréhension dans ses yeux. Ses lèvres tremblèrent, mue par l'indignation ou la déception, mais avant même qu'elle n'ait pu laisser échapper un cri, la porte s'ouvrit sur le crâne dégarni et le sourire affectueux de son père.

-Bonsoir les Weasley !

-Arthur ! Charlie dit qu'il ne veut pas être Attrapeur !

-QUOI ?

Le cri monta d'à peu près toutes les pièces de la maison : Fred et George descendirent en catastrophe de leur chambre, un Percy intrigué dans leur sillage et Ron et Ginny se précipitèrent dans la cuisine, les yeux écarquillés. Charlie se plaqua la main contre le front alors que la tempête de protestation se faisait entendre autour de lui :

-Mais Charlie, tu ne peux pas nous faire ça ! On racontait déjà à Lee Jordan qu'on aurait des places gratuites pour venir te voir l'année prochaine !

-Mais qu'est-ce que tu veux faire d'autre ? s'étonna Percy. Il n'y a que là que tu es vraiment bon ...

-Si tu ne joues pas au Quidditch, je pourrais avoir ton balai ?

-Mais Ron enfin, c'est une loque son balai ! C'est pour ça, tu as peur de ne pas avoir un balai assez bon et de ne pas être pris ? Papa, on peut lui acheter un balai ?

-Silence !

Charlie mit quelques secondes à comprendre que cet ordre si ferme et sonore qui couvrit les voix de ses frères et sœurs venait de son père. Arthur Weasley n'avait pas eu le temps de fermer la porte ni d'enlever sa cape mais dardait sur chacun de ses enfants un regard bleu courroucé. Charlie vit enfin quels yeux il pouvait lui-même avoir lorsqu'on le chatouillait ...

-Remontez dans vos chambres, exigea-t-il. Percy, emmène Ginny et Ron ...

-Pourquoi moi ? protesta-t-il en lorgnant les benjamins avec mépris.

Mais un regard de Molly le dissuada de protester davantage et il prit à contrecœur les mains des deux plus jeunes. Ron se dégagea vite, appréciant peu être traité comme un bébé et Ginny pépia de sa voix pleine d'innocence « Pourquoi Charlie ne veut plus attraper de Vif d'or ? ». Fred et George suivirent en jetant à Charlie un regard déçu qui lui déchira le cœur.

-Parfait, soupira Arthur en refermant la porte derrière lui. Ce sera plus confortable entre nous ... Alors, fils, qu'est-ce que tu as à nous dire ?

Charlie hésita face à la mine complètement déboussolée de sa mère, et celle impassible de son père. Il profita du silence prolongé de son fils pour se dévêtir, s'assoir en face de lui sur la table, et planter son regard bleu sur lui. Contrairement à Farhan, il n'enlevait que rarement ses lunettes qui reflétaient la lumière chaude de la cuisine.

-Disons que ... J'ai réfléchi ses derniers temps, entonna Charlie avec l'impression de poser les pieds sur un champ de mine. Et figurez-vous qu'il n'y a pas que le Quidditch qui m'intéresse ... enfin, j'ai adoré y jouer toute ma scolarité, c'était sympa ... Mais depuis que c'est devenu sérieux, quand je suis devenu Capitaine ... ça me plait moins. Enfin, je me sens moins investi.

Le mot fit étrangement échos à la conversation qu'il venait d'avoir avec Farhan et il ne put s'empêcher de faire le lien avec sa préoccupation du moment. L'amour était-il de la même veine que son avenir ? Fallait-il qu'il ait le coup de cœur absolu pour pleinement s'investir ? Finirait-il par dépérir en jouant au Quidditch comme il l'avait fait en sortant avec Joséphine ?

Molly cligna des yeux, un peu décontenancée.

-Je pensais que tu avais toujours rêvé d'être Attrapeur ...

-Non ... enfin oui. Oui, moi aussi je le pensais ... mais en fait je viens de réaliser ... que c'est plus le rêve des autres que le mien. Celui des gens autour de moi, le vôtre ...

-Le nôtre ? répéta son père, surpris. Mais on ne t'a jamais imposé cela, on t'a toujours laissé libre de tes propres choix !

-Oui, c'est vrai ! concéda Charlie, de plus en plus mal à l'aise. Mais ... je ne sais pas vous avez ... des attentes sur moi, non ? Je passais après Bill, il fallait bien que je fasse aussi bien que lui ! Alors quand je me suis mis à performer au Quidditch, je me suis dit que c'était ce qu'il fallait que je fasse pour être à la hauteur de vos attentes ...

Les mots n'avaient jamais été son point fort et là encore il eut l'impression d'avoir un discours confus, loin des sentiments qui l'animait. Et il comprit que sa maladresse pouvait être destructrice lorsqu'il vit les yeux bruns de sa mère s'embraser.

-De nos attentes ?

L'énervement rendait sa voix sifflante et Charlie faillit céder au petit garçon en lui en se recroquevillant sur lui-même. Il lui fallut prendre une profonde inspiration pour prendre courage et rassembler ses idées diffuses pour répondre.

-Je vois bien que vous attendez tous que je devienne professionnel ... pour le prestige, pour m'élever au-delà de notre condition, pour que j'ai un avenir meilleur ...

-Evidemment que c'est ce qu'on veut ! s'écria Molly sous le signe de l'évidence. Charlie, regarde les comptes d'apothicaire que je suis obligée de faire pour acheter des fournitures à Ron ? Tu penses que je veux que tu vives la même chose, que je te laisse renoncer à un juteux contrat qui te permettrait de vivre de ta passion et dans le confort ?

-Maman, je ne vais pas être Attrapeur pour te faire plaisir ... Enfin, je t'aime mais ...

-Ce n'est pas ce que je te demande, Charlie ! Mais ne m'accuse pas d'avoir des attentes et d'être fière de ce que tu fais ! Enfin, c'est mon devoir de mère ...

-Molly, tenta de la tempérer Arthur.

Il posa une main sur son bras mais elle le repoussa roidement, visiblement exaspérée par la conversation. Charlie eut l'impression de se retrouver face à Joséphine : un mur buté et crampé sur ses positions qu'il ne serait pas aisé de faire bouger d'un pouce. Mais cette fois, il était décidé à tenir bon. S'il avait été un jour prêt à abandonner Joséphine, il n'avait pas la moindre volonté de faire de même avec sa mère.

-Maman, tu ne peux pas vivre nos succès par procuration ...

-Non, je ne vis pas vos succès par procuration, rectifia sèchement sa mère. Vos succès sont mes succès, parce que vous êtes ma plus grande réussite, mon unique raison d'être fière, mon unique raison de vivre enfin. Qu'est-ce que j'ai d'autre ? Qu'est-ce que je suis d'autre, sinon votre mère, Charlie ? Tu peux me dire ? Vous êtes ce qui fait fonctionner mon monde. Ne m'enlève pas ça.

-Et tu ne serais pas fière de moi si j'étais autre chose qu'Attrapeur ?

Sa mère ferma et referma la bouche plusieurs fois avant de se détourner au motif de surveiller ses légumes qui mijotaient derrière elle. Son expression contrariée, Charlie la connaissait par cœur : il la voyait dans le miroir chaque fois qu'il se contemplait après un désagrément. Il lui ressemblait si fort par le visage ... Sauf son regard, qu'il tenait de son père. Et là encore, il reconnut parfaitement l'inquiétude qui le faisait briller.

-Fort bien, céda Arthur, compréhensif. Et tu pensais à quoi ... ?

-Et bien ... le professeur Brûlopot a dit qu'il me verrait bien m'occuper de créature magique.

De dos, sa mère eut un ricanement délicatement teinté d'incrédulité et de mépris, mais ne pipa mot. Charlie préféra l'ignorer et s'adresser à son père :

-Il dit que j'ai un don avec eux, exactement comme au Quidditch.

-Mais ça paiera moins que le Quidditch, fit remarquer tranquillement son père. Ta mère a raison là-dessus, tu dois penser à ton confort matériel ... Voir plus loin que toi. Pense au moment où tu auras une famille ...

Les mots le laissèrent de marbre. S'il suivait la théorie de Farhan et qu'il fonctionnait au coup de cœur, alors l'idée d'avoir sa propre famille, sa propre femme et ses propres enfants ne lui inspiraient aucune envie. Au contraire, l'idée d'un jour devenir père, d'avoir un jour la responsabilité de jeunes pousses fragiles dépendantes de lui qui le clouerait au sol serait plus à même de provoquer de l'angoisse.

-Je ne suis pas obligé d'avoir une famille ...

Il fallait qu'il apprenne à transformer ce qu'il pense en paroles plus acceptable. Parce que dès qu'elle entendit ses mots, Molly Weasley fit brutalement volte-face, les yeux écarquillés. L'espace d'un instant, Charlie vit la cuillère en bois qu'elle tenait fendre l'air pour le heurter entre les deux yeux, mais elle resta finalement ancrée dans son poing aux jointures blanchies.

-Parce qu'en plus tu vas me priver de petits-enfants ?!

-Chérie, pourquoi avons-nous fait sept enfants si ce n'est pour s'assurer qu'au moins l'un d'entre eux nous donnerait des petits-enfants ? objecta tranquillement son mari. On peut bien en dispenser Charlie ...

-Et le contrat comme Attrapeur, il va le déléguer à ses frères aussi ?

-Mais maman, qu'est-ce qui te dérange à la fin ?!

-Je refuse que tu gâches ta vie ! Je refuse que tu finisses comme ton père et moi, dans une maison trop petite, à angoisser tous les jours parce que l'argent manque, que tu vives sur la paille avec tes animaux !

-Et si j'ai envie de vivre sur paille avec des animaux ?

-Tu mérites mieux que ça !

Charlie s'était à peine rendu compte qu'il s'était dressé sur ses pieds pour faire face à sa mère. Pendant quelques instants, ils se fixèrent férocement par-dessus la mine dépitée de son père et leurs respirations lourdes meublèrent le silence pesant. Arthur finit par toussoter légèrement comme si cela pouvait faire disparaître la pression.

-Ecoute fiston ... explique-toi, peut-être que ta mère acceptera plus facilement si tu lui exposes ton projet ...

-Mais pourquoi je dois me justifier ? protesta Charlie, mortifié. C'est ma vie, non, mon choix ? Vraiment croyez-moi je suis désolé de vous décevoir, et c'est vrai que si j'avais été Attrapeur professionnel j'aurais pu vous aider financièrement ...

-Financièrement ? Mais enfin Charlie, cet argent aurait été le tien, jamais nous ne l'aurions accepté ... on ne va pas vivre sur la charité de nos enfants ...

-Mais Bill ...

-... fais des économies pour lui, bien évidemment, assura son père. Il faut qu'il paye son loyer, sa taxe d'étranger en Egypte, financer ses voyages ... jamais nous avons envisagé de vous demander la moindre noise. C'est à nous d'assumer les dépenses ...

Charlie dévisagea son père, complètement perdu.

-Mais alors où est le problème ?!

-Peut-être qu'il n'y en aura pas, hasarda Arthur avec un sourire crispé. Allez, explique-nous. Que t'a dit ton professeur ?

Il insista lourdement sur son dernier mot en toisant sa femme. Il espérait certainement que le fait que l'idée vienne d'une figure d'autorité adoucirait la proposition. Molly se fendit d'un reniflement qui, pour elle, sonnait comme une approbation et Charlie consentit à résumer la conversation qu'il avait eu avec Brûlopot et Joséphine. Au milieu de son récit, il fit apparaître la liste de contact que son professeur lui avait fourni pendant ses vacances.

-Certains domaines de la Magizoologie demande du cran et des compétences en vol, expliqua-t-il alors que sa mère examinait le parchemin, les yeux plissés. Tout ce que m'a donné le Quidditch ... Apparemment, je serais très demandé comme profil ...

-Et qu'est-ce que tu ferais, exactement ? cingla sa mère, l'air néanmoins moins agressive.

-Je n'ai pas vraiment décidé ... je pensais contacter ses Magizzologues pendant les vacances et voir ce qu'il me proposait. Regarde, celle-là gère tout un élevage d'hippogriffe dans le sud du pays ... j'avais adoré étudier cet animal en début d'année, je suis le seul que Brûlopot a laissé grimper dessus. C'était vraiment incroyable ...

L'exaltation qui transparaissait dans sa voix fit frémir un sourire sur les lèvres de son père.

-Et tu penses que ça te plairait, plus qu'être Attrapeur professionnel ? s'enquit son père d'un ton neutre.

Charlie soupesa ses propos. Ceux qui lui vinrent n'émanait pas réellement de lui : Joséphine et Farhan s'était chargé de poser des mots sur un désir inavouable. Ses doigts noués devant lui se tordirent.

-J'adore être Attrapeur ... mais dans sa conception basique. Voler à perdre haleine et prendre tous les risques pour attraper une petite balle qui vole ... ça, j'adore. Je suis peut-être fou, mais frôler le danger me fait sentir vivant. En revanche, depuis que je suis Capitaine ... Gérer les égos et les états d'âme des joueurs, planifier les séances, la stratégie pas que pour moi mais pour l'équipe entière ... ce n'était pas pour moi.

Ses parents échangèrent un regard perplexe et Charlie se sentit obliger d'insister :

-Vraiment, l'expérience ne m'a pas plu, et quand je serais professionnel, la pression sera cent fois pire. Ce n'est pas la vie que je peux, avec le regard de tous les fans braquer sur mes moindres faits et gestes ... je vais passer ma vie à jouer un rôle. Je n'ai pas envie de passer ma vie à être quelqu'un d'autre ... je veux être Charlie.

Ses derniers mots se noyèrent dans un filet de voix penaude, celle du petit garçon qui craignait l'ire et la remontrance parentale. Il venait de dilapider ses dernières cartouches et il ignorait totalement comment réagir si la réticence ses parents demeurait. Allait-il passer le reste de ses vacances face à la réprobation brûlante de sa mère ? Aurait-il dû tout faire dans leur dos ? Non, se dissuada-t-il immédiatement. Le but était d'être lui-même pour lui-même, enfin. Et Charlie Weasley avait une sainte horreur du mensonge et des faux-semblants. Il était enfin temps de se libérer.

Le regard qu'échangèrent ses parents sembla charger de paroles qu'ils n'osèrent pas prononcer. Cela devait être l'avantage d'être une partie l'un de l'autre depuis plus de vingt ans : se comprendre sans un mot. D'un même ensemble, ils se tournèrent vers Charlie. Si l'attitude de son père était toujours aussi calme qu'un étang, elle semblait avoir coulé sur sa mère. Sa colère semblait s'être muée en une sorte de tristesse toute maternelle qui avait empli son regard lorsqu'elle comprenant qu'un oisillon quittait le nid.

-Ecoute mon chéri, entonna-t-elle avec prudence. Je ne voudrais juste pas que tu joues ton avenir sur un coup de tête ...

-Alors ce qu'on voudrait, c'est que tu prennes le temps de réfléchir, ajouta son père avec bienveillance. On est déjà touché que tu partages tes aspirations avec nous ... peut-être que tu pourrais également consulter le professeur McGonagall ? Elle suit ton parcours depuis ton entrée à l'école, c'est certainement la mieux placée pour te guider.

-Je comptais le faire, on doit avoir des entretiens à la rentrée, leur assura Charlie. Mais vraiment, ce n'est pas un caprice. J'ai même mis du temps à accepter d'envisager cette voie mais ... ça m'attire vraiment, vous comprenez ? Vraiment, ça peut allier tout ce que j'aime dans la vie : l'adrénaline, le vol, prendre soin de mon entourage et du monde ... Je peux avoir un métier qui certes, paiera moins ...

-Et peut-être dangereux et instable, murmura sa mère dans ses dents.

-... mais qui me passionnera réellement. C'est vraiment ça dont j'ai besoin. De vibrer pour ce que je fais.

Il toisa son père en prononçant cette phrase, qui parut soudainement absorbé par leur horloge magique. Il comprenait les réserves de sa mère : oui, ses enfants étaient sa seule réussite. « Maman » était son métier, sa raison de vivre. C'était pour eux qu'elle vibrait. Qu'elle s'inquiète concernant sa vie future, il pouvait vivre avec... en revanche, son père avait fait comme Bill le choix de la passion. Il fallait réellement être mordu pour accepter un poste sous-payé au Bureau du Détournement de l'Artisanat Moldu ... S'il avait un soutien à aller chercher, c'était du côté paternel.

Arthur redressa ses lunettes sur son nez et remarqua que le regard de son fils était toujours planté sur lui, indécis. Il finit par céder avec un soupir.

-Qui suis-je pour te dire de ne pas suivre ta passion ...

-Arthur ! s'indigna sa femme.

-Mais Mollynette, c'est vrai, j'ai été un très mauvais exemple ! Ce n'est pas ma carrière qui clame « l'argent avant la passion » !

-C'est le meilleur exemple qu'on pouvait avoir, assura Charlie. Je le suivrais jusqu'au bout de ma vie.

Arthur eut un sourire fier qui se fana très vite lorsque sa femme darda un regard réprobateur sur lui.

-Je me rangerai à l'avis du professeur McGonagall, trancha Molly, résignée. En attendant, si tu nous prouvais tes talents merveilleux avec les créatures magiques avec la goule, hum ? Je vais chercher le livre de Lokhart, il saura sans doute nous donner un conseil ...

Elle jeta un petit regard à Charlie, un regard dans lequel se battait tant d'émotion qu'il ne put toutes les identifier. L'inquiétude et la désapprobation lui semblait familière, mais c'était autre chose qui faisait briller son regard. Un soupçon de fierté ? Charlie voulait le croire, au moment où elle disparut dans le salon en pestant entre ses dents contre les affaires de Ron qui trainaient et les taches de crayons de couleur avait laissé sur la table. Son père se leva pour tapoter doucement son épaule.

-Et bien, ça s'est relativement bien passé, évalua-t-il avec un sourire. Crois-moi, quand Bill lui a annoncé qu'il partait pour l'Egypte, on en a eu pour des heures de cris ... Tu ne comptes pas partir du pays, pas vrai ?

-Euh ... je n'y ai pas réellement réfléchi ...

Son père lui jeta un long regard pénétrant, un regard qui lisait en lui comme dans un livre ouvert et qui percevait la lueur aventureuse au fond de son cœur, celle qui rêvait de déployer ses ailes et de répondre à l'appel du monde.

-Et bien on n'est pas sortis de l'auberge, soupira-t-il en se dirigeant vers le salon.

Non, admit Charlie avec une pointe de culpabilité. Cela lui rappelait qu'il ferait bien d'envoyer une lettre à Bill ... une lettre gribouillée de plates excuses et d'adoration. Il avait eu raison sur lui, sur toute la ligne. Seulement lui, il avait refusé de l'écouter.

Il n'était pas sûr de pouvoir affirmer que la conversation avait ôté un poids de ses épaules, mais il se sentit indéniablement plus en paix avec lui-même lorsqu'il se présenta devant l'escalier. Il s'apprêtait à grimper la première marche lorsqu'il constata que cinq paires d'yeux étaient braqués sur lui. Charlie eut un mouvement de recule et découvrit ses frères et sœurs dispersés sur les marches. Les jumeaux s'étaient bien évidemment accordé les places les plus proches de la porte et Percy se tenait le plus haut possible, comme s'il voulait se donner l'air nonchalant mais qu'il ne pouvait s'empêcher d'être curieux.

-Tu vas refuser d'être un célèbre Attrapeur pour élever des hippogriffes ?! comprit Fred, incrédule.

-Tu as trop trainé avec l'oncle Bilius, décréta Percy avec une pointe de jugement. Tu deviens aussi fou que lui ...

-Ou Bill a cogné trop fort sur toi quand tu étais bébé ?

-Tu me feras monter sur un hippogriffe ? réclama Ginny, les yeux pleins d'espoir. Ou mieux, un dragon ! Tu aimes les dragons, non ?

-Oui, quitte à refuser les Faucons de Falmouth, fais-le pour les dragons, maugréa George, le poing contre la joue.

-On aura un dragon de compagnie !

-Essaie convaincre maman, tiens !

-Hé les moustiques ! lança Charlie en se composant une mine menaçante. Papa n'avait pas dit « dans vos chambre » ?

Son expression parut suffire : les jumeaux grimpèrent l'escalier quatre à quatre tout en poussant Ginny et Ron sur leur passage qui les suivirent maladroitement. Les portes claquèrent les unes après les autres pendant que Charlie montait les marches avec un petit sourire. Percy était le seul à ne pas avoir fui. Il y avait longtemps que Charlie ne lui faisait plus peur, bien au contraire. Il ne lui restait même plus beaucoup de centimètres avant de le rattraper, constata Charlie en parvenant à sa hauteur. Il l'observa à travers ses lunettes d'écaille dont une branche était tordue.

-C'est vraiment ce que tu vas faire ? s'assura-t-il avec une pointe de dédain. Tu pourrais être un Attrapeur riche et célèbre, et tu vas ramasser la bouse de dragon ?

-Et sois heureux que je ne la livre pas directement à Fred et George, elle finirait dans ton lit, plaisanta Charlie.

Percy leva les yeux au ciel et décolla son épaule du mur pour retourner dans sa chambre, le menton relevé.

-Et bien je n'ai plus qu'à être préfet l'année prochaine pour relever le niveau ...

-C'est ça, Perce, murmura Charlie à la porte qui claquait. C'est ça ... 

***

Alooors? 

C'est une discussion qui me paraissait essentielle  ! J'essaie de construire progressivement les choix de Charlie, peut-être que ça vous semble long, mais c'est parce que vous connaissez la finalité et qu'elle vous semble évidente. Mais concernant les choix d'avenirs, je pense que vous le savez tous.tes : rien est évident pour un adolescent de 18 ans. 

Allez, bonnes vacances les enfants ! N'oubliez pas le concours, vous avez encore une bonne semaine ! 

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