Chapitre 38 : Uppercut
HELLO LES ENFANTS
Comment allez-vous?
Personnellement ça va parce qu je suis en VACANCES et que c'est clairement le feu. Et j'ai mangé des carbonades flamandes hier (damn j'adore ma région et ses spécialités culinaires)
Concernant ce chapitre : c'est le genre de chapitre qui n'étaient pas prévus dans le script initial, mais qui naissent d'une idée soudaine. Comme quoi il faut toujours se laisser de l'espace pour les inspirations ! Bonne lecture les enfants <3
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Il faut mieux avoir honte d'un éclat que d'un silence ; d'une violence que d'une abstention.
- Robert Escarbit
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Chapitre 38 : Uppercut
Vendredi 22 mars 1991
Je n'arrive pas à déterminer si parler avec Charlie m'a fait du bien ou pas.
D'un côté oui. Oui, ça m'a vraiment fait du bien de crever l'abcès, d'enfin lui parler de Farhan de voir comment il A réellement réagi plutôt que de spéculer à l'infini. Et encore une fois ... ça me fait du bien de le retrouver en tant qu'ami, et non d'ex ou quoi. Vraiment, je me demande ce qui m'est passé par la tête le jour où je l'ai embrassé. Je pense que c'était la première fois que j'avais une véritable relation saine avec un garçon depuis Morgan ... que je me sentais en confiance. Je voulais me guérir comme ça ... C'était n'importe quoi, c'est tellement mieux comme ça ...
Mais justement. Ça a réveillé tous les souvenirs de notre couple. De nos moments ensemble. Et maintenant, je les vois avec un regard différent. Ils défilent dans la tête et me donnent envie de donner des coups de poings dans le mur. Parfois même de vomir, comme si j'assistais à un spectacle répugnant. Je n'arrive pas complètement à déterminer à quoi c'est dû, mais souvent je repense à pourquoi on a rompu. Parce que Charlie n'a pas de désir pour moi, jamais il n'y en a eu. Rien que d'y repenser, mon ventre se tord. J'ai envie de casser ma plume.
J'en ai parlé avec Lauren, pour qu'elle me réexplique ce que c'était l'asexualité, pour qu'elle me répète que ça n'a rien à voir avec moi, que c'était intrinsèque à Charlie et que – je vais faire graver ça sur le fronton de ma porte – CE N'EST PAS UN PROBLEME.
J'en ai fait un problème. Qu'est-ce que ça dit de moi ... ?
***
-Comment ça se passe le Ramadan ?
La grimace de Maya arracha un petit rire à Farhan. Ils descendaient tous deux des étages après s'être croisés par hasard en sortant de leurs salles communes respectives pour le repas du soir. Maya jeta un regard courroucé à la fenêtre devant laquelle ils passèrent. Derrière les montagnes, le soleil rougeoyait toujours pour donner à la terre ses ultimes couleurs. Elle en était quitte pour encore dix minutes de jeûne.
-Dur, admit-t-elle d'un ton bougon. C'est difficile de te concentrer sur ta spiritualité quand tu as continuellement faim ... C'est la première fois que je le fais complètement, l'année dernière j'ai tenu deux semaines et demie, et je buvais quand même de l'eau entre deux ...
-Mauvaise musulmane. Je plaisante ! ajouta-t-il précipitamment quand Maya le fusilla du regard. En vrai, je t'admire, je serais sans doute incapable de jeûner plus de deux jours, c'est déjà formidable que tu t'y tiennes autant !
Maya manifesta son contentement d'un grognement indistinct. Le jeûne annuel des musulmans avait commencé depuis un peu plus d'une semaine et son caractère s'en ressentait parfois : la faim la rendait un peu plus irritable, elle qui était un modèle de pondération.
-Le pire, c'est que l'Aïd el-Fitr tombe juste après les vacances, lui apprit Maya, mortifiée. Je ne pourrais même pas être avec mes parents ...
Farhan lui jeta un retard chagriné. Il savait quelle importance avait cette fête pour les croyants : c'était le moment où tous rompaient le jeûne ensemble, une fête religieuse sacrée qui se faisait généralement en famille. Et avec tout ce qui venait de se passer, Farhan comprenait le besoin de Maya de se sentir proche de ses parents, d'avoir ce genre de moment pour se rappeler que sa famille n'était pas factice.
-Parles-en à Flitwick, peut-être qu'ils accepteront de te libérer pour l'Aïd, proposa-t-il, soucieux de lui offrir cette solution. Dis à tes parents de lui écrire, d'expliquer à quel point c'est important que tu sois chez toi ...
-Ce serait abusé, je serais à peine revenue des vacances, et il y a les BUSE ...
-Si tu en as besoin, fais-le Maya. L'Aïd, c'est spécial ... On libère bien tout le monde pour Noël et Pâques qui sont des fêtes religieuses pour les chrétiens, non ? Pourquoi pas ?
Maya parut y réfléchir et Farhan comprit qu'il avait touché une corde sensible lorsqu'elle battit rapidement des paupières, comme pour chasser les larmes. Avec douceur, il enroula un bras autour de ses épaules.
-Allez viens, ta torture quotidienne est bientôt terminée, se moqua-t-elle dans l'espoir de lui arracher un sourire. Tu as des dattes ?
-Même pas ... l'école se fiche que ce soit le fruit rituel pour rompre le jeûne ... (Elle garda quelques secondes le silence avant d'ajouter d'une voix timide : ) au fait, je me demandais si ça te dirait ... de venir voir mes parents pendant les vacances. Moi je connais ton père et ta tante et ... j'ai envie que tu les rencontres.
-Oh ..., lâcha Farhan, pris au dépourvu. Ça aurait été avec plaisir mais ... j'avais l'intention de rester à l'école pour réviser les ASPIC tranquillement ...
Et plus les jours défilaient, plus il avait hâte d'arriver à ce moment béni où Poudlard serait complètement vidé de ses élèves. Charlie, qui profitait souvent des vacances pour travailler avec son père au Ministère, ne serait pas là pour darder son regard inquiet sur lui ou tenter de lui arracher artificiellement un sourire. Tonks, très attachée à ses parents, rentrait toujours chez elle et c'était pour le mieux car il avait la sensation désagréable qu'ils s'évitaient tous deux depuis quelques semaines. Mais surtout, Maya lui avait appris quelques jours plus tôt que les deux sœurs Abbot passaient les vacances chez elles pour préparer le mariage de leur sœur aînée prévu cet été. Et son soulagement avait dû transparaître car il se souvenait parfaitement du regard méfiant de sa sœur qui avait suivi.
Maya fut si étonnée de la nouvelle qu'elle s'immobilisa au milieu de l'escalier qui menait au hall pour le dévisager.
-Sérieusement ? Tu ne veux pas rentrer voir un peu ton père ? Je pensais qu'il était malade ...
-Apparemment, il va un peu mieux. Il a fait deux inhalations en février, ça lui a fait beaucoup de bien ... Fiona a même pu accepter une mission du journal qui publie ses recettes pour partir un mois au Japon puis en Corée ... ça commençait à la démanger, aller à Jéricho ne l'a pas du tout rassasiée ...
-Oui, surtout que ce n'était pas des vacances ..., admit Maya d'un ton prudent. Mais tu ne vas pas déprimer, ici tout seul ?
-Non, affirma Farhan avec certitude. Non, au contraire, je pense que ça va me faire le plus grand bien ... Et puis il faut vraiment que je mette à réviser sérieusement mes ASPIC ...
-Tu veux réviser quoi, tu as encore eu un Optimal en Potion cette semaine ...
Maintenant que Joséphine n'est plus là pour me déconcentrer c'est facile ... Mais loin de le rassurer, cette réflexion lui plomba la poitrine et il exhala un soupir agacé. Depuis ce fameux moment devant l'infirmerie où Joséphine lui avait dit « non », elle n'était pas revenue en Potion et Farhan ne pouvait s'empêcher de trouver cette absence significative car elle suivait tous les autres cours. Très clairement, c'était lui qu'elle fuyait en séchant la Potion et il ne savait pas très bien s'il devait en être vexé ou la remercier. La voir tous les jours en classe était loin d'être un cadeau, ravivait la blessure du rejet. Chaque fois qu'il la voyait prendre ses ciseaux pour couper ses pointes ou sourire à quelqu'un, ses entrailles se nouaient douloureusement. Mais cela dit, son absence en Potion n'était pas plus agréable. Il avait lourdement conscience la chaise vide à ses côtés et son fantôme était partout autour du chaudron : littéralement, les souvenirs de leur rapprochement autour de cette table le hantaient. C'était sans doute pour les fuir qu'à chaque fois il se jetait corps et âme dans ses préparations. Et qu'à chaque fois, il ramenait une note à en faire grimacer Severus Rogue.
Définitivement, vivement les vacances. Plus qu'une semaine et demie à tenir.
-Il n'y pas que la Potion, j'ai pris pas mal de retard en Sortilège, expliqua-t-il brièvement. Et en Défense contre les Forces du mal, aussi, le prof a encore été absent toute la semaine ... on n'a même pas commencer la théorie sur le patronus, je vais devoir regarder ça seul pendant les vacances si je veux pouvoir répondre aux questions de l'examens.
-D'accord, n'en dis pas plus tu vas me stresser ! décréta Maya en agitant les mains dans tous les sens. Déjà que Berry pique une crise de colère dès qu'on arrive devant sa salle pour apprendre qu'il est absent ... Elle parle de Joséphine, mais elle est fameuse aussi quand elle s'énerve !
-Des caractères, les Abbot, souffla Farhan sans pouvoir s'en empêcher.
-Et encore, tu ne connais pas la pire. Elles se battent toutes les deux, mais leur reine c'est Ophélia.
Farhan connaissait mal l'aînée des Abbot, celle qui s'était fiancée cet été au petit-fils du Ministre de la magie, sinon que Joséphine l'appelait « Lili », qu'elle lui avait acheté des boucles d'oreille pour Noël, et que la concernant elle alternait entre condescendance et amusement. Mais surtout, il s'en voulut d'être intrigué par cet aspect de la vie de Joséphine qu'il ignorait et tenta d'ignorer le pincement au cœur que cela provoquait. Jamais elle ne parlera d'Ophélia comme elle a pu se plaindre de Bérénice ... Non, c'est fini, ça ...
Farhan se frappa le front, comme si cela pouvait repousser ses réflexions au fond de son crâne. Il faut que tu lâches, vieux, lui avait lancé Charlie après le cours de Brûlopot, l'air alarmé par son attachement persistant. Qu'il avait stupide de croire que simplement parce qu'elle le repousserait, les sentiments s'effaceraient, comme neige fondait au soleil ... la neige fondait, certes, mais l'eau qui en résultait s'imprégnait durablement dans les sols pour nourrir et alimenter ses pensées.
-Nous aussi on aurait dû avoir notre grande sœur, murmura alors Maya.
La réflexion glaça complètement Farhan et il dévisagea sa sœur, les yeux écarquillés. Son visage était marqué par les échos d'un deuil dont ils ne percevaient pas encore tous contours et il se fustigea de n'avoir pensé qu'à Joséphine alors que le lien avec Shahrazade était si évident. Leur unique souvenir commun était leur sœur aînée ... morte, certainement quelque part en Palestine. Qu'il n'avait probablement peu ou pas connu. Dont il ne gardait aucun souvenir, si ce n'était ce cri qui hantait ses cauchemars. Penser à elle lui faisait toujours un drôle d'effet, comme s'il invoquait un mirage tout droit sorti d'un rêve plutôt qu'une personne réelle.
-Parfois je me demande comment elle était, avoua Maya d'un air triste. Et quand je pense ça ... je me dis que savoir qui elle était n'a rien réglé du tout.
-Non, concéda sincèrement Farhan. Chaque réponse amènera ses questions, non ? Cette affaire, c'est une véritable hydre, on fait pousser plus de tête qu'on en coupe ... et il faudra qu'on vive avec ça, maintenant. On est habitué à vivre avec des trous dans notre vie ...
-Notre vie est un gruyère. J'ai dit ça la dernière fois à Berry, ça l'a fait rire ...
-Hé, Maya !
Farhan leva les yeux pour découvrir un jeune homme blond, certainement de la classe de sa sœur, à l'entrée de la Grande Salle. Tout sourire, il tapait sa montre avec enthousiasme.
-Le soleil va bientôt se coucher, c'est l'heure de manger ! Viens, Bérénice t'a préparer des fruits – elle veut me battre, moi je t'avais versé un jus de citrouille !
-C'est Thomas, souffla Maya à Farhan avec un petit sourire. C'est un ami, il est très gentil. Il a essayé de faire le Ramadan avec moi pour tester, mais il a tenu quatre jours.
-Petite nature. Bon appétit ...
Maya sourit en guise de remerciement, et se dépêcha de rejoindre Thomas – ou plutôt, passer devant lui pour s'engouffrer vers la Grande Salle et la nourriture promise. Le jeune homme ne parut pas vexé et à la grande surprise de Farhan lui adressa un signe amical de la main avant de suivre Maya. Il n'eut pas le temps de se remettre de son étonnement que Charlie entrait à son tour dans le Hall, mais depuis la grande porte et accompagné de Brûlopot. Leur professeur, précédé de son iconique canne, souriait aimablement à son élève qui tenait une feuille dans sa main. Il lui tapa doucement l'épaule avant de le laisser au milieu de la pièce. Charlie fixait toujours la feuille quand Farhan le rejoignit, un peu perplexe.
-Qu'est-ce que c'est ? Des devoirs supplémentaires ?
Charlie sursauta à la voix de Farhan et leva sur lui un regard hagard. Un sourire confus s'étala sur ses lèvres et il replia la feuille en quatre.
-Oh ... Pas vraiment, tu serais surpris. Ce sont des recommandations. Apparemment, ses collègues seraient intéressés par ... quelqu'un qui sait voler et qui n'a pas peur de se prendre des cognards.
-Vraiment ? Mais c'est génial, Charlie !
Son enthousiasme fut tempéré par la mine dubitative de son ami, dont les lèvres se pincèrent. Il rangea la feuille dans sa poche arrière de pantalon et expia sa nervosité d'un profond soupir.
-Jo a définitivement déteint sur toi. Elle pense pareil. Elle me harcèle. Tous les jours elle vient me voir pour me dire « tu as réfléchi à ce que t'a dit Brûlopot ? ». Je pense que je vais nous rendre service à tous les deux en la jetant dans le Lac Noir. Oui, j'aime bien cette version des choses. Elle est toute fine, assez aérodynamique pour faire un vol plané, tout droit direction l'eau.
Il mima la trajectoire de sa main qui finit dans un « SPLASH » jouissif et cette fois une sincère hilarité s'empara de Farhan – il devait admettre que la perspective était plus que tentante et qu'il rêvait de voir la tête de Joséphine percer la surface et recracher l'eau, furibonde. Charlie esquissa un sourire, visiblement soulagé d'avoir pu le faire rire, même si c'était aux dépends de la jeune fille. Farhan avait craint d'avouer son histoire à son meilleur ami – et plus que tout, il avait craint la phrase « je t'avais prévenu ». Ils avaient tourné autour, mais jamais Charlie ne l'avait prononcé et Farhan devait admettre qu'il était d'un soutien infaillible à ses côtés, un soutien dont il ne l'aurait jamais cru capable ... et depuis, il se sentait honteux d'avoir craint sa réaction au point de lui cacher cette partie-là de sa vie.
-Enfin bref, son harcèlement a malheureusement payé, et j'ai craqué, soupira Charlie en se frottant la tempe. Je ne sais pas ce que je vais faire de ça, honnêtement ... Je n'ai jamais pensé à devenir autre chose qu'un joueur de Quidditch.
-Ça ne fait pas de mal de s'ouvrir des perspectives, non ? C'est ce que tu me disais quand tu voulais me convaincre de devenir médicomage plutôt qu'apothicaire.
-C'était surtout Tonks, ça, se défendit-t-il, l'air vexé. Moi j'ai toujours compris que tu veuilles reprendre la boutique de ton père ... et c'est peut-être pour ça que tu peux comprendre que je ne peux pas faire faux-bond à mes parents, Fa'.
L'argument atteint sa cible et Farhan inclina la tête pour lui signifier. Oui, il pouvait comprendre la loyauté qui liait Charlie à ses parents, les responsabilités qu'il éprouvait envers sa famille. Il avait les mêmes entraves ... et pourtant, il ne pouvait s'empêcher de se sentir frustré que Charlie s'aliène ainsi.
-Contacte-les, on ne sait jamais, proposa-t-il finalement, faute de mieux. Ecoute ce qu'ils ont à te proposer ...
-C'est ce que je vais faire, je crois ... Oh la la ... (Il venait de lever la tête vers l'escalier qui montait vers les étages). La tête d'Aidan ...
Un groupe d'élève descendait visiblement de la bibliothèque, des livres sous les bras, comprenant Leonard et Brett, leurs camarades de chambrée et Aidan McColley. Celui-ci avait effectivement le visage fermé, la mâchoire contactée alors que le rire gras des autres garçons roulait dans l'air.
-Il pète un câble à cause du Quidditch, se souvint Charlie, l'air embarrassé. Jo a un mot de l'infirmière pour ne pas jouer...
-Elle a carrément un mot de Pomfresh ?
-Qu'est-ce que tu veux que je te dise, ça devait être un peu sérieux sa maladie ...
L'estomac de Farhan se contracta et il revit en un éclair son air pâle devant l'infirmerie, sa main crayeuse s'accrocher au mur pour ne pas tanguer. Pour la millième fois, il se demanda, mu d'un fol et vain espoir, si ce n'était pas cet état de faiblesse qui avait forcé sa décision ... Il n'eut même pas besoin de se moriginer : les éclats de voix du groupe de garçon leurs parvenaient enfin et se chargèrent de chasser Joséphine de son esprit.
-Arrête, McColley, tu as bien deux ou trois détails croustillants, non ? Tu les as déjà entendus chez vous ? Avec sa copine ?
-Oh, Merlin, lâcha Farhan, révulsé en comprenant le sujet de la conversation.
Charlie avait lui aussi réalisé et leur jeta un regard féroce qu'aucun ne vit. Elle ne plaisait pas davantage à Aidan dont la mâchoire se crispa encore plus si c'était possible. Il accéléra le pas pour se porter en tête du groupe, provoquant le rire de Leonard qui leva les yeux au ciel.
-Oh, je sais que c'est ta sœur mais ça doit faire bander, non ? Imaginer deux filles dans un plumard à côté ...
-Justement, c'est ma sœur, rétorqua vertement Aidan. Donc je boucherais plutôt les oreilles ...
-Sérieux ? s'étonna un Serdaigle qui les suivait. Tu n'es pas un peu curieux ?
-On s'en fiche, c'est ma sœur ...
-C'est que tu dois être un peu comme elle, hasarda Leonard, goguenard.
A peine arrivé sur le sol dallé du Hall, Aidan s'immobilisa net et l'un de ses amis faillit lui rentrer dedans. Il pivota brusquement vers Leonard, les bras serrés sur ses lèvres. Le Gryffondor avait beau être perché une marche au-dessus, Aidan le surplombait nettement avec sa haute stature et ses larges épaules.
-Excuse-moi ? marmonna Aidan d'un ton menaçant.
Pour sa défense, Leonard, malgré sa taille de gringalet complètement écrasée par l'ombre d'Aidan, ne se laissa pas démonter. Un sourire goguenard que Farhan détestait depuis toujours se peignit sur ses lèvres.
-Bah écoute, désolé de me poser la question. Ta sœur jumelle est lesbienne, c'est peut-être dans tes gènes ... (Il donna un coup de coude à un garçon de Serdaigle derrière lui). Si j'étais toi, la prochaine fois je me méfierais dans les vestiaires de Quidditch.
Le joueur en question lui jeta un regard outré, visiblement dégoûté par l'allusion. A côté de Farhan, Charlie avala sa glotte, suffoqué et lui-même traita intérieurement Leonard de tous les noms. Tous concentré sur leur propre indignation, ils n'anticipèrent pas la réaction d'Aidan. Tous qu'ils entendirent, ce fut le fracas des livres qui s'éparpillèrent sur le sol et le craquement sec lorsque son poing s'abattit sur la pommette de Leonard. En une fraction de seconde, le Gryffondor était à terre, sonné, la bouche en sang et un terrible silence emplit le hall, uniquement meublé par la respiration lourde d'Aidan dont le poing était toujours brandi.
Une seconde de silence, avant que les cris n'emplissent le hall.
Par solidarité, Brett, son meilleur ami, se jeta sur Aidan avec un cri de rage. Celui-ci riposta, l'écarta rapidement avant que Leonard ne se relève, furibond, prêt à en découdre. Charlie hurla à Aidan d'arrêter, à Leonard de s'écarter, mais ses suppliques demeurèrent sourdes, noyés dans le reste. Les amis de Serdaigle restèrent quelques marches au-dessus, criant des encouragements pour Aidan qui malgré son infériorité numérique, tenait ses deux adversaires en respect. Mais ça ne lui suffisait pas : chaque fois, ses poings s'abattait avec une sorte de fureur sauvage qui laissa Farhan sans voix. Il n'avait même pas songé à porter la main à sa baguette. La scène lui paraissait trop dangereuse pour qu'on rappelle à ces garçons qu'ils étaient des sorciers et qu'ils pouvaient faire des dégâts bien plus graves avec la magie.
-Charles ... Charlie, il faut aller chercher un prof, là !
Mais Charlie semblait aussi figé que lui, complètement estomaqué par le terrible courroux d'Aidan qui continuait de se battre férocement sous les acclamations de ses amis. Certaines têtes curieuses, alarmées par les cris, sortaient du Hall mais pour venir grossir la foule des supporters en bas de l'escalier. Très vite, une foule trop dense pour qu'ils puissent intervenir leur barra la route. Agacé, Farhan tenta de se frayer un chemin à travers un groupe de deuxième année qui sautillaient, excités, et cria à Charlie :
-Va chercher un prof, bon sang !
-Il n'y en aucun d'arriver dans la Grande Salle !
Farhan jura et se dépêcha d'écarter une fille de Poufsouffle, de façon si rude qu'elle le fusilla du regard. Fort heureusement, Charlie se réveilla et vint lui prêter main forte : comme la mer Rouge devant Moïse, la foule d'élève s'ouvrit lorsque la fière tête rousse entra dans leur champ de vision. Farhan se précipita dans son sillage et le son des combats se rapprocha, les coups, les respirations sifflantes, les grognements caractéristiques. Mais à peine avaient-ils atteint les premières loges qu'une nouvelle voix vint se mêler au marasme :
-Mais ça ne va pas, vous avez perdus la tête ?! McColley, arrête ! Aidan ! Aidan, putain, arrê...
La voix s'étouffa, assourdie par un coup et lorsque Farhan dépassa enfin Charlie, il vit une silhouette élancée mais beaucoup plus fine s'écraser au sol dans un tournoiement de cheveux cuivré. Une Abbot, certainement – laquelle, Farhan s'en fichait éperdument, mais son sang ne fut qu'un tour lors qu'il remarqua Aidan, l'air choqué, le poing toujours armé après avoir heurté la fille. Son apparition parut déclencher une accalmie stupéfaite dont Farhan profita sans réfléchir. Faisant fi de l'absurdité de la chose ou du fait que le Serdaigle le surplombait d'une tête, il se précipita vers lui et le repoussa des deux mains avec rage. Aidan, pris au dépourvu par l'élan, se retrouva écrasé contre le mur et un éclair de surprise traversa son regard lorsqu'il découvrit Farhan devant lui. La colère battait à ses tempes mais il fut assez lucide pour sortir sa baguette lorsqu'Aidan tenta de l'écarter d'un geste irrité. La pointe s'enfonça dans sa gorge si fort que cela lui arracha une grimace, mais Farhan n'en eut cure. Le Serdaigle ainsi mit en respect, il put ainsi baisser les yeux sur la jeune fille inerte sur laquelle Charlie venait de se pencher et sa colère redoubla.
C'était Joséphine.
-O'Neil, dégage, grommela Aidan néanmoins, l'œil furieux.
-Non mais ça ne va pas ! Tu as vu dans quel état tu t'es mis et tu veux que te laisses ?! Regarde ce que tu as fait !
De sa main libre, il désigna Joséphine qui se redressait maladroitement avec l'aide de Charlie, une main pressée contre sa mâchoire. Ses lèvres étaient maculées de sang, comme l'intérieur de sa bouche, découvrit Farhan, horrifié, lorsqu'elle l'entrouvrit pour laisser échapper un gémissement de douleur. Dans son épouvante, sa baguette s'enfonça un peu plus dans la gorge d'Aidan et dans un vague instant d'étourdissement, il s'imagina jeté un maléfice à bout portant, uniquement porté par colère qui courrait ses veines. Il se maîtrisa d'une profonde inspiration et regretta le temps où McGonagall était venue lui demander s'il se sentait d'être préfet. A l'époque, il avait répondu un grand non, mais aujourd'hui il aurait aimé être celui qui avait le pouvoir de punir Aidan McColley. Une vague lueur de remord brilla dans le regard vert du Serdaigle.
-Je ... je n'avais pas vu que c'était elle, je ...
-Et bah ça te met dans un état de te faire traiter d'homo, lâcha froidement Farhan, quelque peu calmé. Je me ferais un plaisir de dire à Lauren à quel point tu trouves ça insultant ...
Aidan ouvrit la bouche, puis la referma, visiblement incapable d'argumenter. Les braises de sa terrible colère brûlaient toujours dans son regard, mais cette fois il était adressé aux deux garçons qui se relevaient péniblement. Brett avait le nez qui saignait et son œil semblait touché, et Leonard avait une ecchymose qui apparaissait déjà sur sa joue. Mais la seule qui comptait pour Farhan c'était celle qui fleurissait dors et déjà sur la mâchoire de Joséphine.
-Ne pensez pas que vous allez vous en sortir indemne, leur lança Farhan, encore dégoûté par leur obsession malsaine et leurs insultes.
-Tu vas nous faire quoi, O'Neil ? ricana Brett, visiblement peu impressionné.
De nouveau, la baguette frémit au bout de ses doigts, piquée dans son orgueil, à deux doigts de céder à l'élan de la magie. Il s'en fallut de peu pour que Brett se retrouve dans un état encore plus lamentable et définitivement, heureusement que ces rustres avaient oubliés tous leurs cours de magie, poussé par les hormones. Difficilement, Farhan parvint à garder sa baguette pointée sur Aidan mais serra le poing pour masquer à quel point il frémissait de rage.
-Moi, rien, admit-il à contrecœur, écœuré. Mais Charlie va régler votre cas.
-Moi ? s'étonna son ami en redressant la tête.
Il était toujours penché sur une Joséphine groggy, la soutenant alors qu'elle tentait de se redresser malgré sa bouche qui saignait entre ses doigts et une tête dans laquelle devait encore résonner le coup d'Aidan. Déjà à fleur de peau, Farhan trouva les ressources pour s'agacer encore.
-T'es préfet, non ?
-Oh ! (Il toucha l'insigne qui ornait sa poitrine en dessous de celui de Capitaine). Ouais, c'est vrai.
Joséphine lui lança un drôle de regard et tenta visiblement d'articuler quelque chose. Farhan n'entendit que des gargouillis indistincts, mais Charlie parut percevoir un sens car il lui jeta une œillade exaspérée.
-Oui bon ça va, marmonna-t-il avant de s'éclaircir la voix. Une retenue, pour tout le monde.
Farhan comme Joséphine ouvrirent de grands yeux éberlués devant la sanction et Charlie se sentit obliger d'ajouter d'un ton plus fort :
-Et vous faites perdre vingt points chacun à Gryffondor !
Les Gryffondor présents dans la salle protestèrent contre la sanction que s'empressa d'appliquer le sablier du hall : le cliquetis des rubis qui s'envolèrent dans la partie haute fut couvert par le tempêtement des élèves.
-Mais c'est McColley qui a cogné le premier !
-Ils m'ont insulté !
-Va débattre de ça avec ta sœur, réplique Farhan et Aidan eut le bon goût de s'empourprer.
-De toute façon moi j'enlève vingt points à Serdaigle !
Farhan vit avec stupeur Elisa Strettins, la préfète-en-cheffe, émerger de la foule. Elle avait toujours été relativement froide et effacée, mais cette fois une véritable fureur animait son visage et Aidan sembla rentrer sa tête dans ses épaules à l'apparition de sa petite-amie.
-On s'en fiche de qui a insulté, ou cogné le premier, cracha-t-elle avec mépris. Quoiqu'il arrive, c'est un comportement stupide qui mérite sanction. N'essayez même pas de partir ! prévint-t-elle à l'adresse de Brett et Leonard qui venaient de poser un orteil sur une marche. On va attendre un professeur ensemble ici, et vous allez sagement leur répéter ce que vous avez dit, d'accord ?
-Mais rien ! protesta Leonard d'une voix pâteuse.
Elisa roula des yeux avec exaspération avant de toiser la foule d'un air mauvais. Tous comprirent le message et peu à peu ils rentrèrent de nouveau dans la Grande Salle en commentant la scène avec animation. Ignorant son petit-ami qu'il tenait toujours en joue, Elisa se tourna vers Farhan qui surveillait toujours les deux Gryffondor du coin de l'œil.
-Je vais gérer, annonça-t-elle avec hauteur. Vous, occupez-vous de Joséphine, plutôt ...
Elle avait parlé d'une voix douce, mais ferme et Farhan réalisa brusquement qu'à présent c'était lui qu'elle voulait désamorcer. Il était la dernière étincelle, celle qui pouvait à nouveau tout embraser. A regret, il baissa sa baguette et Elisa parut soulagée.
-Merci, O'Neil ..., murmura-t-elle en tapotant son bras.
Farhan ne répondit rien et se contenta de baisser le regard sur Charlie et Joséphine, toujours à terre. La jeune fille semblait encore sonnée, prostrée sur les dalles, et se tenait toujours la mâchoire d'une main, les lèvres maculées de sang. Charlie l'examinait, un brin répugné.
-Oh la la, je pense qu'il t'a fait sauter une dent pour que ça saigne autant ..., hasarda-t-il en étudiant les taches écarlates sur le sol et sa chemise. On va aller à l'infirmerie ...
-L'infirmerie, quelle brillante idée, ironisa Farhan à voix basse.
Il y avait cinq minutes qu'il aurait dû courir à l'infirmerie avec elle, ragea-t-il intérieurement, mais plutôt que de l'exprimer, il aida Elisa et Charlie à redresser Joséphine, mais transie de douleur, elle s'affalait à chaque fois comme une poupée de chiffon avec un gémissement qui lui faisait cracher encore un peu de sang. Elisa se fendit d'un petit cri dégoûté lorsqu'elle fut atteinte et Charlie se résolut à hisser Joséphine dans ses bras. Trop sonnée pour protester, la jeune fille se laissa faire, non sans avoir lorgner Charlie d'un air circonspect. Leur malaise évident aurait pu être risible si Farhan n'avait pas eu d'autres soucis en tête. Sans attendre, il les précéda dans le couloir, prêt à ouvrir les portes, la baguette toujours serrée dans sa main.
-Un instant, j'ai cru que tu me demandais de leur en coller une, révéla alors Charlie après avoir descendu une volée de marche. Quand tu m'as dit de leur régler leur compte ...
-Tu me prends pour un homme de Neandertal ? rétorqua Farhan en levant les yeux au ciel.
-J'en sais rien. Honnêtement, j'ai vraiment cru que tu allais en coller une à Aidan avant que tu ne sortes ta baguette.
Farhan s'efforça de ne pas ralentir pour masquer que la réflexion de Charlie le troublait. En un éclair, il se revit pousser Aidan des deux mains sur sa poitrine, d'avoir été presque réveillé de la force de l'impact du Serdaigle sur le mur. Ses doigts se resserrèrent nerveusement sur sa baguette.
-Si j'en avais collé une à Aidan, c'est moi qui me serais fait mal, fit-il valoir finalement, faute de mieux.
Un drôle de bruit se fit entendre derrière et il lui fallut jeter un coup d'œil derrière son épaule pour constater que c'était Joséphine qui riait – enfin, qui tentait de rire en maintenant sa bouche fermée et en bloquant sa mâchoire de sa main. Charlie leva les yeux au ciel.
-Mais si elle rigole, c'est qu'elle ne doit pas aller si mal ... Tu m'ouvres ?
Il désigna du menton la porte de l'infirmerie au fond et Farhan se dépêcha de traverser le couloir. Il évita soigneusement de poser les yeux vers le morceau de mur sur lequel il s'était adossé avec Joséphine trois semaines plus tôt, l'endroit exacte où elle l'avait rejeté. Agacé par ses propres pensées, il secoua la tête et teint la porte à Charlie qui s'engouffra dans l'infirmerie. La pièce était d'un calme olympien, si on exceptait les rideaux agités par la brise qui venait des fenêtres ouvertes. Nerveux, Farhan fit rapidement le tour, jusqu'à passer sa tête au bureau désert de Pomfresh.
-Elle n'est pas là, annonça-t-il en revenant dans la salle.
Charlie jura. Il avait installé Joséphine sur un lit et celle-ci c'était précipitée vers une tasse pour recracher une quantité pharamineuse de sang qu'elle gardait dans la bouche depuis plusieurs minutes. Farhan grimaça lorsque quelque chose de plus volumineux teinta contre la porcelaine et il comprit qu'une dent faisait certainement partie du lot.
-Quel enfer, haleta-t-elle en s'essuyant la bouche d'un revers de main. Aïe ...
Elle porta de nouveau la main à la mâchoire où s'étalait une ecchymose là où Aidan l'avait frappée. Charlie avait pâli d'une teinte devant le spectacle.
-Nom d'un dragon, il ne t'a pas loupé ...
-Tu crois ? couina péniblement Joséphine. Aïe ...
-Reste tranquille ...
Mais la jeune fille le fusilla du regard, un regard voilé de larme qui s'accumulèrent lorsqu'un nouvel élan de douleur la traversa. Elle cracha de nouveau un caillot de sang dans la tasse. L'estomac de Farhan se retourna et il se détourna prestement du spectacle pour s'engouffrer dans le bureau de Pomfresh, presque au bord de la nausée. Pourtant il avait toujours plutôt bien supporter la vue du sang, il avait déjà soigné des plaies que Charlie s'était faites à l'entrainement sans broncher ... ça devait être Joséphine, conclut-t-il en agrippant un mortier sur l'une des étagères. C'était voir Joséphine se tordre de douleur, prostrée pour échapper à la souffrance qui le mettait dans un tel état de fébrilité. L'idée répandait un goût de fer dans sa bouche tant ça signifiait que son lien avec elle était loin d'être coupé, qu'un rien pouvait le tendre à nouveau et lui arracher le cœur. Il aurait aimé être indifférent voire pire, se réjouir de sa douleur comme certains avait l'air de le faire dans la foule. Mais non, visiblement il était quelqu'un de trop bien pour juste exulter face à la souffrance d'une autre ...
Résigné, il passa dans la minuscule pièce attenante au bureau qui servait de réserve à Pomfresh. Certaines potions étaient déjà préparées – potions de forces et de sommeil qui se conservaient relativement bien – mais le baume qu'il cherchait avait une durée de vie de quelques jours. En revanche, il parvint à trouver tous les ingrédients en un coup d'œil. Des pâquerettes séchées dans un bocal, de l'huile de rose dans une fiole soigneusement étiquetée, du dictame ... Il était en train de broyer le tout dans un mortier lorsqu'une voix indignée monta depuis la salle principale.
-Mais qu'est-ce qui s'est passé ?!
Le « encore » était lourdement sous-entendu au bout de sa phrase et Farhan entendit Charlie se répandre en explications confuses qui arrachèrent des « humpf » désapprobateur à Pomfresh. Profitant qu'elle se renseigne, Farhan acheva sa mixture et fut un véritable bond lorsque l'infirmière apparut dans l'encadrement de porte, terrible avec son poing sur la hanche et en contre-jour.
-O'Neil !
-Vous n'étiez pas là ! se défendit Farhan en pressant le mortier contre lui. Je vous ai avancé le travail ...
-Et ça ne vous donne pas le droit de fouiller dans ma réserve ! Donnez-moi ça ! Qu'est-ce que vous avez mis dedans ?
-Ce qu'il faut ...
A contre-cœur, Farhan lui tendit le mortier et elle l'attrapa d'un geste sec. Suspicieuse, elle examina le contenu de son œil d'aigle, mélangea encore, ajouta quelques gouttes de dictame et finit par jeter un coup d'œil à Farhan. Le jeune homme fut rassuré de constater qu'elle semblait s'être calmée et qu'une lueur appréciatrice brillait même dans ses prunelles.
-Heureusement que vous êtes bon, O'Neil. Maintenant, sortez de ma réserve.
Elle désigna la porte d'un grand mouvement du bras et Farhan s'empressa de lui obéir, trop heureux qu'elle n'ait pas simplement jeté son baume à la poubelle au motif que c'était un élève qui l'avait réalisé. Il eut à peine le temps de poser de nouveau les yeux sur Joséphine que Pomfresh le dépassait souplement pour la masquer à ses yeux. A la lumière du jour, sa mine semblait plus inquiète qu'énervée et ce fut avec une infinie douceur qu'elle appliqua le baume sur la mâchoire de Joséphine qui tressaillit.
-Ça devrait soulager la contusion, évalua-t-elle avant d'examiner sa bouche. Ouvrez ... Ouh la mais il vous a déchaussé deux dents !
Joséphine referma précipitamment la bouche avant d'acquiescer silencieusement, mortifiée. Un frisson parcourut l'échine de Farhan lorsqu'il songeait à la violence du coup qu'elle avait dû recevoir pour que deux de ses dents sautent comme ça. Pomfresh eut un sourire face à l'air défait de Joséphine.
-Ne vous en faites pas, je vais vous les rechausser magiquement. Il me faudra juste le temps de faire la potion qui va les ressouder ... O'Neil, rendez-vous utile et faites-moi ça.
Farhan en fut tellement surpris qu'il se contenta pendant quelques secondes d'écarquiller les yeux avant de lancer stupidement :
-Mais vous venez de me virer de votre réserve !
-Je dois replacer les dents et vous êtes le seul élève en qui je peux avoir confiance pour ça, rétorqua-t-elle tranquillement sans cesser d'examiner Joséphine. Et Weasley, profites-en pour aller me chercher un professeur. Je veux qu'ils puissent constater son état pour en prendre compte dans leurs sanctions ... parce que sanction il y aura, assura-t-elle en plantant son regard dans celui de Joséphine. Ça, je vous le promets ...
Charlie et Farhan s'entreregardèrent une seconde et le préfet chercha même les yeux de Joséphine, mais la jeune fille les gardait rivés sur le couvre-lit qu'elle avait tâché de sang. Elle était livide, encore plus pâle que lorsque Farhan l'avait vu sortir de l'infirmerie ce fameux jours trois semaines plus tôt. Mu d'un élan contradictoire qui le poussait vers elle tout en lui ordonnant de la fuir, Farhan finit par trouver une voie médiane en s'engouffrant sans un mot dans la réserve, les dents serrées. Pomfresh lui donna la recette et il se mit au travail. Chaque geste, chaque odeur qui venait chatouiller ses narines ou vapeur qui venait effleurer son visage l'apaisa un peu plus. Pendant dix merveilleuses minutes, il parvint à oublier Joséphine dans la pièce d'à côté, la surprise dans le regard d'Aidan lorsqu'il s'était retrouvé plaqué contre le mur, la crainte sourde dans le regard d'Elisa lorsqu'elle lui avait demandé de partir.
Ce n'était pas que Joséphine, réalisa-t-il alors que la scène se déroulait une derrière fois sous ses yeux. Il n'avait pas attendu de savoir que c'était elle pour vriller.
Sans savoir s'il devait être soulagé ou inquiété par la constatation, Farhan acheva sa potion qui avait pris une belle couleur émeraude. Sans pouvoir s'en empêcher, il ajouta une feuille de menthe dont les arômes achevèrent définitivement le tranquilliser. Une fois finie, il s'appuya contre la table avec un profond soupir pour extraire les dernières traces de nervosité de son corps, guidée par l'odeur fraiche qui amenait de la sérénité à chaque inspiration. Il se redressa brusquement lorsque Pomfresh entra dans la pièce, trop furieuse pour réaliser pleinement sa présence.
-Si je leurs mets la main au collet, marmonna-t-elle en versant la potion de Farhan dans un verre. Pas étonnant qu'ils ne soient pas venus se soigner ici, tiens ... Qu'ils se trainent leur œil au beurre noir, qu'est-ce que ça peut me faire ... et bien évidemment, il fallait que ça tombe sur elle ... je vous jure cette école ...
Eructant toujours, elle prit le verre et retourna dans la pièce principale. Après un instant d'hésitation, Farhan la suivit. Joséphine avait déjà une meilleure allure : les épaules redressées, elle s'était assise en tailleur au fond du lit. Le sang avait été nettoyé des draps et de ses vêtements et les seuls vertiges du coup étaient une joue anormalement gonflée sur laquelle s'étalait le baume. Pour ne pas que ses cheveux trempent dedans, elle avait été obligée de ses attacher sur sa nuque. Le cœur de Farhan manqua un battement lorsqu'il réalisa que son regard était planté sur lui, mais elle le baissa vite lorsque Pomfresh lui mit la potion sous le nez.
-Allez Abbot. Gardez cette potion dans votre bouche dix minutes, ça enracinera de nouveau vos dents ...
-Dix minutes ?!
Leurs cris incrédules se mêlèrent et dans la foulée, leurs regards s'aimantèrent, tellement rendus sincères par l'étonnement que s'effaça le temps et les événements pour permettre à Farhan d'éclater de rire. Joséphine plissa les yeux, Pomfresh lui jeta un regard réprobateur, mais rien ne parvint à entamer son hilarité.
-Vous voulez qu'elle se taise pendant dix minutes ? comprit Farhan en parvenant à se calmer.
-Non mais je rêve, persiffla Joséphine, les dents serrées. Et je suppose que tu vas en apprécier chaque sec ... Aïe ...
Elle grimaça, visiblement tiraillée par le reste d'une douleur et Pomfresh lui jeta un regard éloquent en lui tendant le verre. Résignée et avec un regard noir pour Farhan, Joséphine le saisit. Visiblement satisfaite de sa bonne volonté, Pomfresh hocha la tête et s'en fut dans le couloir, certainement en quête d'un professeur à qui elle pourrait faire subir toute sa désapprobation. Sceptique, Joséphine porta le verre à son nez. Elle papillonna des yeux et un étrange sourire ourla ses lèvres.
-Evidemment ...
Farhan fronça les sourcils avant de se souvenir de la feuille de menthe qu'il avait ajouté par automatisme. Ils échangèrent un regard, bref, mais assez long pour que le cœur de Farhan remonte dans sa gorge. Le pire fut qu'il était agrémenté d'un léger sourire sur leurs lèvres et en son sein il sentit le lien se tendre à l'extrême pour la première fois depuis des semaines. Il ne sut comment il trouva la force de s'arracher, mais il y parvint. En revanche, il eut du mal à complètement effacer le petit sourire qui flottait sur ses lèvres, malgré le silence étrange qui s'était insinué entre eux.
-Merci, lança finalement Joséphine d'un ton résolument neutre. Pour la potion ...
Farhan fit un immense effort pour ne pas tourner la tête vers elle. Le souffle bloqué au creux de ses poumons, il se donna l'air nonchalant en s'adossant contre le mur, les yeux rivés sur les rideaux qui oscillaient de façon hypnotique.
-Pas de quoi.
-Je ne sais pas ce qui m'a pris de vouloir intervenir. Je descendais manger et ça me bloquait le passage, je suppose ... Je n'ai jamais vu Aidan dans cet état-là. (Elle s'interrompit une seconde, visiblement perplexe). Tu as parlé de Lauren. C'est pour ça qu'il s'est battu ?
Sa diction était laborieuse et qu'elle se force à parler malgré son inconfort manifeste embarrassa Farhan. Il n'était pas certain de vouloir soutenir une longue conversation avec elle, mais simplement l'abandonner à son sort alors qu'elle venait de se prendre un coup qui lui avait démoli la mâchoire lui semblait injuste.
-Leonard a sous-entendu que si Lauren était lesbienne, il devait être gay ...
-C'est pour ça qu'il s'est battu ?! Non mais quel ...
Dans son indignation, elle étira trop la bouche et étouffa un cri de douleur. Alerté, Farhan posa de nouveau les yeux sur elle pour la voir s'enfoncer les ongles dans son cuir chevelu, comme si cela pouvait détourner la souffrance de ses dents.
-Tu ferais mieux de boire la potion ..., conseilla-t-il.
-Je suis sûre que c'est une immense machination pour pouvoir avoir dix minutes de paix ...
-Me concernant ça fait trois semaines que j'ai la paix. Alors sois sans crainte et bois ta potion, Joséphine.
Les mots lui avaient échappé, mais il ne s'en voulut pas le moins du monde, même quand Joséphine sembla se crisper. Il ne voulait pas lui laisser l'occasion de normaliser leurs relations, d'enclencher une conversation badine qui la ferait de nouveau entrer dans son système après tout le mal qu'il se donnait pour l'en faire sortir.
-Désolée ...
Farhan lui jeta une œillade circonspecte, incapable de déterminer si elle s'excusait pour la situation présente, pour l'avoir repoussé, ou pour tout ce qui s'était passé entre eux. Mais la jeune fille ne parut pas vouloir détailler plus ses sentiments : à peine avait-t-elle prononcé ce mot qu'elle portait le verre de potion à ses lèvres. Sa bouche se tordit quand ses vertus agirent sur ses dents et ses gencives, mais elle la garda hermétiquement close et se permit même de crisper ses mâchoires. Pour passer le temps – et certainement éloigner son attention de Farhan – elle se mit à tresser ses cheveux, des minuscules tresses qu'elle tissait à l'aveugle, le regard dans le vide. Farhan se trémoussa contre son mur, gêné.
-Si tu veux que je m'en aille ...
Joséphine haussa mollement les épaules sans le regarder en ce qu'il interpréta comme un « à ta guise ». Asphyxié par la situation, il était en train de se résoudre à s'arracher à sa position et à partir quand un filet de lumière éclaira la gorge de Joséphine. Il s'était soigneusement attelé à ne pas la détailler, mais ce n'était que maintenant qu'il remarquait la présence du camée sur sa poitrine. A moitié cachée par sa chemise dont les premiers boutons étaient défaits pour laisser apparaître sa clavicule, il n'en était pas moins reconnaissable par son aspect baroque et la pierre azur dans lequel il était gravé. En un instant, Farhan se retrouva plongé dans le souvenir de cet après-midi d'hiver, dans cette boutique suffocante où Joséphine avait eu un véritable coup de cœur pour le bijou. C'était lui qui en avait payé la moitié ... « la moitié d'un cadeau », avait-il assuré avec naturel, sans arrière-pensée. La moitié d'un cadeau qu'elle portait toujours au cou et qu'elle caressa d'un geste distrait.
Heureusement, Joséphine paraissait trop concentrée pour remarquer son intérêt – qui en plus pouvait aisément se confondre avec un regard malsain. Et avant qu'elle ne puisse s'en rendre compte, la porte de l'infirmerie s'ouvrit à la volée. Rougissant, Farhan y darda son regard en s'attendant à voir Pomfresh. Elle était là, bien sûr, mais accompagnée de Charlie, Aidan et des professeurs Flitwick et McGonagall. L'air pincé de sa directrice de Maison l'obligea à se décoller du mur pour se redresser, mais elle ne lui accorda pas un regard pour s'adresser à Joséphine.
-Comment vous vous sentez, Abbot ?
Joséphine battit des cils, et coula un regard de coin sur Farhan sans le regarder directement en une demande discrète. Un sourire faillit frémir sur ses lèvres mais il parvint à garder son sérieux.
-Elle a une potion dans la bouche, professeur. Elle doit encore la garder quelques minutes.
McGonagall dressa un sourcil et Farhan vit son regard étinceler. Flitwick fut moins discret et un petit rire aigu lui échappa. Charlie n'eut lui pas le moindre sourire. Le visage fermé, il se posta à côté de Farhan les bras croisés sur sa poitrine, toisant toujours Aidan du coin de l'œil. La vue du Capitaine de Serdaigle lui ôta toute envie de rire et raviva la colère qu'il l'avait animé lorsque la fureur d'Aidan s'était aveuglement abattue. Il se tenait derrière les professeurs, les épaules voûtées. Il s'était ouvert la lèvre dans la rixe mais avait de manière générale meilleure mine qu'avait pu avoir Leonard et Brett ou même Joséphine. L'injustice de la chose brûla dans la poitrine de Farhan.
-Bon, je suppose que ça ne l'empêchera pas d'écouter, hasarda Flitwick, plus sérieux. McColley a quelque chose à vous dire ...
Il vrilla sur Aidan un œil chargé de reproche. Les dents serrées, le Capitaine s'avança et s'éclaircit la gorge sans adresser un regard à Joséphine qui le fixait, silencieuse et méfiante.
-Oui ... Euh. Jo, je suis vraiment désolé que le coup soit arrivé sur toi ... Ce n'était vraiment pas mon intention de te frapper. Ni de te faire du mal. Pardon.
Sa façon de présenter les choses, comme si elles étaient arrivées par accident, révulsa Farhan mais il garda son indignation coincée derrière ses dents. Ce n'était pas à lui de juger de la recevabilité des excuses ... Mais s'il en jugeait par la mine exaspérée de McGonagall ou celle dédaigneuse de Charlie, il n'était pas le seul. Flitwick et Pomfresh, eux, contemplèrent Joséphine, attendant sa sentence. La jeune fille resta immobile, une main sur l'une de ses tresses et l'autre crispée sur le camée, le considérant à travers ses cils. Il s'écoula quelques secondes pendant lesquelles elle parut simplement intégré les excuses sans les assimiler. Puis elle se dressa sur ses genoux pour faire face à Aidan et lui cracha la potion à la figure. Sans même avoir le temps d'esquiver, le Serdaigle se retrouver couvert d'un mélange de mixture émeraude et de sang.
Et Farhan sut que c'était précisément ce qu'il avait attendu, dès qu'Aidan avait passé la porte, que c'était la raison secrète pour laquelle il n'avait pas réagi à sa venue. Il savait que Joséphine lui règlerait son compte, à sa façon. Il n'y avait pas de plus belle manière : de la même façon qu'il avait éclaté de rire à la mention des dix minutes, cette fois il explosa en se tenant les côtes, vite suivi par Charlie qui se permit même d'applaudir bruyamment.
-Fantastique !
-Abbot ! s'étrangla Flitwick.
Lui-même avait été aspergé par la potion et épongea la marque émeraude sur son épaule en la tapotant de sa baguette. En revanche, personne ne vint en aide à Aidan qui crachota et s'essuya passivement les yeux et lorsqu'il parvint à les ouvrir, Joséphine se tenait toujours face à lui, dressée sur ses genoux, des éclairs crépitants dans ses iris noisette.
-Je n'en ai strictement rien à foutre ! déclara-t-elle d'une voix vibrante de colère. Que tu ne m'aies pas reconnue, que tu ne voulais pas me faire de mal mais rien ! Tu t'es comporté comme un imbécile à cogner sur tout ce qui bougeait, comme un animal ! Et encore les animaux qui se comportent comme ça on les pique ! Tu t'es cru à l'entrainement ou quoi ? Je ne suis pas un cognard, McColley ! Et tu penses que tu vas t'en sortir avec un « désolé » ?!
-Mais qu'est-ce que tu veux que je dise d'autre ? protesta-t-il vertement. Vraiment, je suis désolé, je ne voulais pas te faire mal !
-Tu ne voulais pas me faire mal, me voilà rassurée donc, ironisa Joséphine d'un ton acide. Maintenant tu m'as planté ton poing dans le visage et en me faisant péter deux dents. Donc tu m'as quand même fait mal. Qu'est-ce qu'on fait avec ça ?
-Pardon ...
Joséphine le contempla quelques secondes, les traits crispés en une mine dégoûtée et courroucée. L'espace d'un instant, Farhan crut qu'elle allait se jeter à sa gorge ou de nouveau lui cracher à la figure. Mais tout son corps finit par s'affaisser et elle se replia au fond de son lit en détournant les yeux.
-Excuses refusées. La prochaine fois réfléchis avant de cogner.
-Jo, arrête ...
-Vous l'avez entendue, l'interrompit Pomfresh d'un ton sec. Laissez-la tranquille maintenant, je dois soigner sa mâchoire. Filius, s'il te plait ...
Flitwick semblait mortifié par la scène et Farhan ne pouvait pas le blâmer. Aidan était l'une des étoiles de Serdaigle, une carrière propre et digne des honneurs. Qu'il s'abaisse à ce genre d'instinct devait outrageusement le décevoir ... Il finit néanmoins par emmener Aidan hors de l'infirmerie. Le jeune homme jeta un dernier regard à Joséphine, occupée à l'ignorer, puis à Charlie et Farhan au fond de la pièce. Là, ses yeux flamboyèrent un instant et il se détourna, révulsé. Charlie haussa les sourcils lorsque la porte se referma derrière lui.
-Mais il s'attendait à quoi, à ce qu'on le défende ? Il trouve que c'est défendable ?
-Je vous remercie de vous en êtes abstenu Weasley, railla McGonagall avant de se tourner vers Joséphine. Et même si je dois désapprouver la manière, je dois dire que vous ne me décevez jamais sur ce point, Abbot.
Un timide sourire s'étira sur les lèvres de Joséphine. Pomfresh leva les yeux au ciel avant de désigner la porte.
-Gardez-le moi, celui-là. Je le veux pendant une semaine, qu'il se rende compte que c'est moi qui dois nettoyer après ses conneries. Qu'il soigne un peu au lieu d'agresser.
-Tu l'auras même deux semaines, Pompom, assura McGonagall. Et j'ai prévu d'envoyer les deux autres chez Mrs. Pince, qu'ils apprennent un peu la portée des mots ... Et il faut que j'aille rédiger les lettres aux parents ... Remettez-vous bien, Abbot.
Elle lui adressa un hochement de tête avant de partir de l'infirmerie, la tête haute. Pomfresh rouspéta de nouveau dans ses dents et nettoya rapidement la potion recrachée par Joséphine qui avait aspergé les draps et le sol en plus d'Aidan. La jeune fille parut vaguement penaude lorsque l'infirmière retourna vers la réserve en fulminant.
-Ce n'était pas forcément cool pour elle, admit-t-elle du bout des lèvres avant de s'empourprer quand les regards de Charlie et Farhan se posèrent sur elle. Ni très glamour maintenant que j'y pense ...
-Tu veux dire ? C'était magnifique.
Farhan s'en voulut presque d'avoir laissé échapper ses mots, mais ils étaient tant sincères qu'ils s'étaient insinués à travers ses filtres. Les filtres auxquels Joséphine s'était attaquée et qui la concernant semblaient encore trop fragile ... Elle-même parut surprise et après une seconde où elle le fixa, éperdue, un nouveau sourire retroussa ses lèvres.
-Merci. Un plaisir.
De nouveau, elle effleura le camée, fit couler la chaine entre ses doigts et chaque cliquetis des chainons fit manquer un battement au cœur de Farhan. Résolument, il détourna les yeux ... pour les poser sur la mine affreusement entendue de Charlie, qui semblait déterminé à se fondre silencieusement dans le mur pour leur laisser de l'intimité. L'idée contracta douloureusement l'estomac de Farhan et il se détacha rapidement pour déclarer :
-Bon, on va te laisser ... Euh. Prends soin de toi.
Il ne s'attarda pas sur la réaction de la jeune fille et se dépêcha de quitter la pièce, tendu comme un arc. Il fut presque rassuré d'entendre les pas de Charlie le suivre – moins lorsqu'il l'entendit ajouter d'un ton presque malicieux :
-Oui, Joséphine, prends soin de toi ... Aïe !
Farhan jeta un coup d'œil derrière son épaule pour constater qu'il venait de recevoir un oreiller sur sa nuque. Il se retourna sur Joséphine, le doigt levé l'air prêt à la sermonner, mais Farhan eut trop peur du sermon en question pour le laisser faire : ni une, ni deux, il l'attrapa vertement par le col et le traina hors de l'infirmerie. Heureusement que Charlie le laissa faire, car en temps normal il n'avait pas la carrure pour emporter une carcasse comme la sienne. En temps normal, tu n'as la carrure pour pousser Aidan McColley avec tant de force non plus ..., précisa une petite voix au fond de lui. Elle fut ponctuée du petit rire de Joséphine qui résonna dans l'infirmerie et qui lui donna envie de rentrer sous terre lorsqu'il referma la porte sur elle. Une fois que ce fut fait, il lâcha Charlie et le fusilla du regard.
-Non mais ta discrétion ! râla-t-il en se mettant en route.
-Tu as vu la tienne ! J'ai failli vous laisser ...
-La ferme.
-Mais merci. Parce que ça me semblait encore un peu bizarre, mais assister un peu à ce qui se passe ... on va dire que je commence à toucher du bout des doigts la compréhension de la chose.
-Charlie, soupira Farhan en se massant la tempe. Il n'y a qu'une chose à comprendre. Elle m'a jetée. D'accord ? Ici même !
D'un geste du menton, il désigna le mur qui menait à l'infirmerie. Le rappel coupa les fanfaronnades de Charlie qui lui adressa un regard peiné.
-C'est vrai ... excuse-moi. (Il eut un silence pesant qu'il finit par briser en murmurant : ) Vivement les vacances ...
Cette fois, Farhan baissa la tête, vaincu. Oui, vivement les vacances. Définitivement il n'y aurait qu'une distance, une rupture nette et définitive qui pourrait lui permettre d'extraire Joséphine Abbot de son cœur.
***
Alors votre verdict?
Il n'était pas prévu dans le script et il était peut-être un peu cliché mais il me sert bien je trouve, à la fois pour faire reprendre contact entre Jo et Farhan mais aussi pour la suite !
Voilà ! Bonne vacances les enfants (et courage à ceux qui n'y sont pas), à la semaine prochaine pour O&P <3
PS : je profite pour dire (Anna l'a fait plusieurs fois sur ses chapitres) que Annabethfan et moi-même serons présentes au salon du livre jeunesse à Montreuil le dimanche 4 décembre, si vous souhaitez faire un petit saut pour qu'on puisse se voir, ce sera avec le plus grand des plaisirs !
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