Chapitre 3 : Le dernier voyage
BONJOUR TOUT LE MONDE
So, comme demain et ce WE je vais être MAXI OCCUPEE (organisation des 50 ans de ma mère, c'est du BOULOT). Donc je profite que mon petit frère fasse ses devoirs pour vous livrer le chapitre !
Encore un grand merci pour vos réactions sur le chapitre 2, j'espère que cette histoire vous plaira, n'hésitez pas à me donner votre avis ! Bonne lecture (Et bon Euro ahah ! Important l'Euro).
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Le malheur et la mélancolie sont les interprètes les plus éloquents de l'amour, et correspondent entre deux êtres souffrants avec une incroyable rapidité.
- Honoré de Balzac
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Chapitre 3 : Le dernier voyage.
Samedi 1er septembre 1990
Sincèrement, je crois que j'ai rarement pris autant de plaisir à faire une valise. Mes affaires volaient littéralement partout, je bondissais dans ma chambre pour sélectionner tel livre ou tel jupe avec la musique si fort que même Miss Parfaite est venue râler. Un véritable bonheur !
J'en avais besoin, il fallait le dire. D'un moment en toute insouciance, isolée dans la bulle avant d'affronter l'école. J'ai l'impression d'avoir traversé ces dernières semaines comme dans un brouillard, littéralement. C'est peut-être pour ça que je n'ai pas écris depuis les fiançailles, j'étais comme anesthésiée. Pourtant papa est toujours furieux que je me sois permise de répondre au Ministre mais il faut dire que je ne l'ai pas beaucoup vu. Il y a eu énormément de travail. Même en temps de paix, les Aurors n'arrêtent pas.
J'ignore complètement comment va se passer cette année. Je n'ai même pas fait mon devoir de Métamorphose, je n'avais pas la tête à ça ces derniers jours et il était affreusement technique. Ça signifie certainement un retour en colle dès que j'aurais posé un orteil dans le château. Il y a les ASPIC à la fin mais à quoi bon ? Ophélia a raison sur un point, je ne sais absolument pas quoi faire de ma vie. Heureusement qu'il y a le Quidditch. On garde la même équipe que l'année dernière, à un Poursuiveur près, je suis sûre qu'on aura des chances pour la coupe. Mais Charlie se dit sans doute la même chose et il faut être honnête : c'est le meilleur joueur de cette fichue école.
Charlie ... Mille gargouilles, je vais m'arrêter là. Mrs. Glenfyre nous attend en bas, je pense qu'il est temps d'y aller et j'ai encore mon balai à ranger ... On se revoit peut-être dans le train, je risque de m'ennuyer. Comme thème du jour je propose : la dame des friandises est-elle Dumbledore déguisé ?
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Joséphine déploya ses bras de part et d'autre d'elle quand une secousse vint ébranler son équilibre. On pourrait croire que les sorciers avaient trouvé depuis des siècles un sort pour permettre un voyage en toute tranquillité dans le Poudlard Express mais visiblement, les dirigeants aimaient malmener leur progéniture. Elle attendit que le virage soit passé et que le wagon se redresse pour reprendre sa route le long du couloir. Certaines personnes se précipitaient dehors pour rejoindre un ami ou se mettre à la recherche du charriot à friandise. Il y avait deux heures que le train avait démarré : les estomacs criaient famines.
Elle évita souplement un premier année qui courait dans le couloir et jeta un coup d'œil au compartiment qu'elle venait d'atteindre. Un groupe de fille de Serpentard y avait élu domicile et leur pouffement caractéristique fit rouler les yeux de Joséphine. Elle ne s'était jamais approchée de ce genre de groupe. Peut-être avait-elle été tentée quelques fois, quand les filles de son dortoir lui proposaient de manger avec elle ou de se joindre à elles pour Pré-au-Lard. Mais chaque fois, Joséphine avait regretté. Ce n'était qu'une autre expérience de la solitude. Alors quitte à être seule et ignorée, elle préférait l'être complétement, comme ses deux premières heures de trajet passée dans un compartiment vide, allongée sur la banquette à moitié endormie après s'être levée à cinq heures du matin. Et quand elle s'était réveillée, elle avait faim.
Elle finit par trouver le charriot à l'entrée d'un compartiment de troisième année et coupa allégrement la file pour prendre des vivres. Elle piochait déjà dans sa patacitrouille quand elle découvrit sa sœur Bérénice, seule contre la fenêtre de sa cabine, les yeux dans le vague. Joséphine ouvrit la porte et s'y accouda, un fin sourire aux lèvres :
-Tu es toute seule ? Ou est ton groupe d'abeille ?
Bérénice secoua la tête avec dépit.
-C'est Ophélia qui avait un groupe d'abeille. Moi je n'ai que Maya et elle est sortie se changer.
-Hum. Patacitrouille ?
Joséphine lui tendit un paquet, un sourcil dressé. Bérénice le considéra avec la plus grande méfiance. Elle était encore dans sa jolie robe d'un vert d'eau à laquelle elle avait épinglé l'insigne de préfet flambant neuf qu'elle avait reçu courant août. Cela avait été une véritable surprise parce que la place était occupée jusque-là par une camarade de Joséphine, Elisa, mais celle-ci devait avoir été promue préfète-en-cheffe. Qu'à cela ne tienne : Bérénice devenait la première préfète de la fratrie. La digne héritière de leur père.
-Quel genre de poison tu as mis dedans ?
-Du poison, moi ? Enfin pour qui tu me prends ? Non, juste un peu de laxatif.
Bérénice soupira mais accepta la Patacitrouille en levant une main. Encouragée, Joséphine entra dans le compartiment et s'installa confortablement sur la banquette en face de sa sœur, ses jambes déployées devant elle. Elle repoussa du pied les affaires qui devaient appartenir à Maya. Bérénice mordit dans la friandise et demanda :
-Tu n'es pas avec Charlie ?
La mention de son petit-ami fit froncer le nez de Joséphine. Presque aussitôt, un marasme de sentiment indistinct s'empara d'elle et bloqua complétement le fil de ses pensées. C'était la première fois, se morigéna-t-elle, agacée. Vu tes expériences précédentes ... Sérieusement Joséphine ... Tu t'attendais à quoi ?
-Il est avec les autres préfets, répondit-t-elle d'un ton vague. Ou peut-être avec Farrell. Non, attends, ce n'est pas Farrell. Je n'arriverais jamais à retenir le nom de ce garçon !
-En même temps tu ne fais pas l'effort, fit remarquer Bérénice.
-Oui je suis une personne égocentrique ... Joséphine ne pense qu'à elle, si tu connais la chanson chante avec moi.
Elle ne voulut pas le montrer mais Joséphine perçut le petit sourire qui avait effleuré les lèvres de sa sœur. Elle tourna la tête pour le dissimuler et laissa le compartiment d'emmurer dans un silence que seul brisait les emballages de Patacitrouille que Joséphine déchirait les uns après les autres. Elle avait beau dire, la présence de sa sœur restait tout de même la moins désagréable possible. Elle s'était toujours sentie plus proche de Bérénice que d'Ophélia, sans doute parce que Bérénice au moins savait se servir de son cerveau et l'optimiser un maximum. Mais ce qui la dérangeait chez sa petite sœur, c'était la place qu'elle prenait. Bérénice avait tout : la tête, la beauté, la gentillesse. C'était absolument exaspérant de la voir être montrée en modèle et exemple, d'entendre à toutes les réceptions « oui nous sommes très fiers de Bérénice ! Aucun doute que notre fille ira loin ». Elle vampirisait absolument toute l'attention et même si au fond d'elle, Joséphine se savait injuste de lui en vouloir ainsi de la rendre invisible, cela restait une rancœur tenace.
-Il est chouette, finit par lâcher Bérénice.
-Quoi ?
-Charlie. J'ai un peu parlé avec lui aux fiançailles. Il est super. Tu as de la chance.
Joséphine réprima un sourire. C'était peut-être grâce à cette rancœur que ces petites phrases étaient absolument jouissives pour elle.
-Je sais.
-Alors ne gâche pas tout en faisant ta diva, prévint Bérénice d'un ton plus sévère. Ce n'est pas parce qu'il accepte et qu'il est tolérant avec toi que tu dois en faire un punching-ball.
Joséphine ouvrit la bouche, outrée par la remontrance. Elle savait qu'elle n'avait pas un caractère facile mais s'il y avait bien quelqu'un qu'elle épargnait, c'était lui. Justement parce qu'il était la personne qui méritait le moins ses griefs. Au monde.
Elle ne saurait même pas dire comment Charlie l'avait attiré. D'un prime abord, il représentait tout ce que Joséphine haïssait : la perfection absolue. Populaire, adorable et généreux et qui plus est la battait systématiquement au Quidditch et s'en excusait presque. C'était par la voix du sport que Joséphine avait décidé de trouver une faille en observant ses entrainements pendant sa cinquième année. D'abord les séances collectives puis solitaires de Charlie. Elle avait voulu le déstabilisant en s'y mêlant, en cassant sa bulle de concentration, en attrapant le Vif d'or sous son nez pour le faire rager. Mais jamais Charlie n'avait dévié de sa route. Au contraire, il s'était pris au jeu pour se surpasser. Sans le vouloir, ils s'étaient entrainés ensemble et Joséphine avait découvert le garçon sous la perfection. Il ne l'avait pas repoussé, mais il ne l'avait pas ménagé non plus. Et à travers ses longues séances, Joséphine avait fini par comprendre pourquoi Charlie était si apprécié. Il n'écrasait personne. Il donnait de la force. Littéralement. On se sentait plus fort avec lui avec ses côtés, avec ses radiations de courage, de bonhomie et d'optimisme. Charlie faisait ressortir le meilleur de son entourage. Ça allait au-delà de la perfection.
Joséphine avait besoin de ça. Elle avait toujours respecté Charlie pour ce qu'il était. Elle l'avait aimé pour ça. Alors les allégations de Bérénice la piquaient au vif.
-Et tu te permets de me donner des conseils, forte de tes relations amoureuses qui sont, bien évidemment, fort nombreuses et réussies ? cingla-t-elle d'un ton acide.
Bérénice rougit mais n'eut pas le temps de répondre : la porte du compartiment s'ouvrit et une jeune fille entra dans la cabine en babillant :
-Incroyable le nombre de personne qu'il y avait aux toilettes ! Pénélope Deauclaire a tambouriné à ma porte, c'était insupportable, je n'ai même pas le temps de mettre mes chaussures ... Oh, bonjour Jo !
La fille lui adressa un sourire éclatant mais Joséphine resta figée sur sa banquette. Elle connaissait Maya Tabet depuis quatre ans : la meilleure amie de sa sœur, son inséparable, si inséparable qu'elle avait même passée quelques week-ends chez eux. Et pourtant, il lui fallut quelques secondes pour réaliser que c'était bien cette jeune fille qui se présentait sous ses yeux. Son visage restait le même, de sa peau mât, son nez droit et ses pommettes hautes. Ses yeux couleur café pétillaient constamment. En revanche, Joséphine se souvenait d'une avalanche de boucles noires et pas de ce foulard qui recouvrait sa tête, impeccablement noué sur son cou au-dessus de son uniforme de Poudlard frappé de l'écusson de Serdaigle.
Maya parut comprendre la réaction de Joséphine car elle échangea un regard désabusé avec Bérénice. Celle-ci haussa les épaules.
-Je t'avais prévenue. Il va falloir t'y habituer.
-Oh, ça va juste être répétitif la première semaine ... (Elle se tourna vers Joséphine, toujours souriante). J'ai eu mes premières règles pendant les vacances.
-Bienvenue dans notre cauchemar menstruel ma sœur, mais en quoi cela un rapport avec ... ça ?
Maya eut un sourire tranquille et s'assit à côté de Bérénice.
-Je suis musulmane et dans ma religion, les filles se voilent dès qu'elles deviennent femme.
Joséphine haussa les sourcils devant la description. Très personnellement, pendant ses premières règles, elle n'avait pas du tout eu la sensation de devenir femme. Au contraire, elle avait été épouvantée par ce sang, seule dans les toilettes du troisième étage, paniquée à l'idée de devoir traverser l'école avec du papier dans sa culotte pour contenir l'hémorragie. Rien d'honorifique, rien d'extraordinaire : juste du sang et une douleur insupportable dans le bas-ventre.
-Je sais que vous êtes peu à avoir la foi chez les sorciers, poursuivit Maya. Mais mes parents sont moldus, tu comprends ? Ils m'ont élevé comme ça, dans la croyance en Allah.
-Dieu, en arabe, précisa Bérénice devant l'air interrogateur de Joséphine.
Joséphine savait que Maya était d'origine Syrienne – ou Egyptienne ? Bon sang, Bérénice l'avait répété trente fois ... Elle savait aussi qu'elle croyante et qu'au nom de cette religion elle avait jeuné tout un mois l'année dernière, mais ce foulard restait inexpliqué pour elle.
-D'accord mais pourquoi te voiler ?
-Personnellement, je le vois comme un acte d'humilité. Pas d'apparat, rester sobre, se concentrer sur l'essentiel – la spiritualité. Et en plus d'être religieux c'est ... je ne sais pas, culturel ? Depuis que je suis toute petite, j'attends le jour où je pourrais porter le voile comme ma mère ... ça veut dire que je passe un cap, tu comprends ?
-Mais selon un certain dogme, le voile servirait surtout à cacher les traits de la femme aux yeux de l'homme afin de la protéger, ajouta Bérénice d'un ton pincé.
Maya poussa un profond soupir et rajusta une mèche de cheveux qui s'était échappé de son voile.
-Je t'ai déjà dit que ce n'était pas comme ça que je le voyais.
Mais c'était ainsi que Joséphine le percevait également. Elle se souvenait des magnifiques cheveux de Maya, noirs, brillants, torsadés en boucles parfaitement dessinées. C'était criminel de dissimuler une telle chevelure. Elle échangea un regard incrédule avec Bérénice qui leva les yeux au ciel – si bien que Joséphine eut l'impression de se regarder dans un miroir. Maya le capta et conclut avec un calme qui frisait la nonchalance :
-Et si vous ne comprenez pas, ça ne me fera pas changer d'avis. C'est ma vie, mon choix. Je pense qu'on peut comprendre que j'aie envie de faire ce que je veux ?
Joséphine prit la remarque contre elle puisqu'elle était connue pour n'écouter personne et n'en faire qu'à sa tête. Elle observa Maya qui rangeait tranquillement les affaires qu'elle avait poussé, l'air épanoui, serein et dut admettre qu'à sa place elle aurait agi de même. L'important, c'était ce qu'elle souhaitait et qu'elle soit prête à le faire malgré la réprobation et l'incompréhension qu'elle semblait générer rendait Joséphine plus admirative qu'autre chose.
-Tu as raison, c'est ta vie. Si quelqu'un ose te faire une remarque, viens me voir – y compris si c'est Berry.
-Jo !
-Merci Jo, sourit Maya. Je savais que tu comprendrais, toi au moins.
-Ce n'est pas que je ne comprends pas, protesta Bérénice, accablée. C'est juste ... je trouve ça régressif.
-Et pour la millième fois, ça dépend si tu fais les choses pour la bonne raison.
Le cœur de Joséphine manqua un battement et elle crut entendre à son oreille la voix de Charlie dans la semi-pénombre de sa chambre. Je ne veux pas que tu le fasses pour de mauvaises raisons ... Elle ferma les yeux une seconde le temps de chasser les souvenirs et finit par se lever de sa place joncher d'emballage de Patacitrouille qu'elle ne prit pas le temps de jeter.
-Je vous laisse, je vais essayer de trouver mon préfet de copain.
-Attends, je t'accompagne, réagit précipitamment Bérénice en bondissant sur ses pieds. Je vais aller me changer.
Elle se dépêcha de prendre son uniforme impeccablement plié dans sa malle et suivit sa sœur en dehors du compartiment. Joséphine attendit qu'elles soient à bonne distance pour dévoiler un sourire mesquin à sa sœur.
-Si tu te permets de faire des remarques sur mon couple, laisse-moi en faire sur ton amie. Si tu n'acceptes pas ses choix et sa différence, tu vas la perdre.
-Ce n'est pas ce que je ne l'accepte pas, râla Bérénice. C'est juste ... je ne comprends pas l'utilité du hijab.
-Quoi ?
-C'est comme ça qu'on appelle ce voile. Je ne vois pas d'autres intérêts que de se cacher aux yeux des hommes et je trouve la morale absolument discutable et complétement moralisatrice – pour nous, toujours le sexe faible sur lequel on tape ! Et ça me fend le cœur parce que Maya est une femme qui a énormément à montrer, énormément à donner, je n'ai pas envie qu'elle commence à cacher son potentiel parce qu'on existe dans un système où les femmes sont naturellement rabaissées !
Joséphine laissa échapper un grand sourire au discours enflammé de sa sœur. C'était pour ce genre d'engagement qu'elle était malgré tout incapable de la détester : Bérénice savait utiliser son cerveau pour en déduire les bonnes choses. Et la première chose qu'elle avait déduite, c'était qu'il n'y avait aucune raison pour qu'elle vaille moins qu'un homme. Joséphine était certaine que cette résolution était née de toute les fois où son père avait semblé regretter de ne pas avoir de fils ...
-La seule chose que ça cache pour l'instant, ce sont ses cheveux, rappela Joséphine. Si ça a une incidence sur sa personnalité je comprendrais que ça t'inquiète, mais moi ce que j'ai vu c'était une femme forte sûre de ses convictions.
Bérénice lui jeta un regard circonspect.
-Depuis quand tu es si sage, toi ?
-Je ne suis pas atterrie à Serdaigle pour rien, petite sœur. Oh la la ...
Elles venaient d'arriver à hauteur d'un compartiment duquel s'échappait des cris et éclats de voix qu'on entendait des mètres en amont. Curieuse, Joséphine ralentit le pas et passa un coup d'œil à l'intérieur. La première chose qu'elle perçut avec un grand déplaisir fut la chevelure rose de Nymphadora Tonks, de Poufsouffle. Elle était debout, les bras croisés sur sa poitrine et échangeait un regard perplexe avec le meilleur ami de Charlie, celui dont elle n'arrivait pas à imprimer le nom. Mais l'origine des voix se tenait devant eux en la personne de trois têtes rousses, dont deux parfaitement identiques qui se tenaient en retrait, hilares.
-... caché mon rat ! Si vous ne faites rien, je vais aller voir McGonagall dès la sortie, moi, pour qu'ils soient collés ! disait le troisième, plus âgé et qui portait des lunettes.
-Et qu'est-ce que tu veux qu'on fasse, qu'on les torture ? rétorqua Tonks, visiblement exaspérée. Farhan vous a déjà dit que Charlie était dans le compartiment des préfets ...
Farhan ! Retiens, Joséphine ! Le garçon à lunette tapa du pied contre le sol et darda un regard assassin sur les jumeaux écroulés contre la banquette. Le pauvre semblait au bord des larmes.
-Il va mourir étouffé par votre faute !
-Mais non, je suis certain qu'il ne va pas mourir étouffé, tenta de la rassurer Farhan. D'ailleurs ils vont te le rendre.
-Pourquoi ? s'enquit l'un des jumeaux.
Les deux ressemblaient fort à Charlie, remarqua Joséphine, amusée. Alors que celui à lunette était plus fin, élancé, les jumeaux étaient déjà larges d'épaule pour leurs douze ans et abordait un sourire malicieux qui n'était pas sans rappeler leur frère aîné.
-Il a voulu nous voler nos pétards du Dr. Filbuste, on a bien le droit de lui voler son rat ! Pourquoi on le lui rendrait ?
-Parce que si ce n'est pas le cas je vous pends par les pieds ?
Pour appuyer ses dires, Joséphine s'avança et s'accouda à la porte du compartiment tout sourire, sa baguette tournoyant dans sa main. Elle fut ravie de voir les cheveux de Tonks passer du rose au rouge, marquant un changement d'humeur de sa part. Elles ne s'étaient jamais réellement appréciées en raison de leur concurrence et de leur tempérament complétement aux antipodes. Et il se pouvait bien que Joséphine se soit moquée à plusieurs reprise de la maladresse de Tonks, mais qui à Poudlard ne le faisait pas ?
Joséphine adressa un sourire carnassier aux jumeaux, qui s'étaient figés sur la banquette. Elle n'avait pas encore eu l'occasion d'être officiellement présentée à la famille de Charlie mais nul doute au vu de leur tête qu'ils savaient pertinemment qui elle était.
-Et même si je me doute que ces deux-là ont le cœur trop tendre pour mettre la menace à exécution, moi ça ne me dérange pas. On peut même imaginer des choses plus amusantes ... Qui veut un nez en forme de groin ?
-Abbot ! persiffla Tonks.
Les deux jumeaux avaient pâli et s'entreregardèrent, inquiets. Farhan enfonça le clou en assénant :
-Les gars, sérieusement, je ne suis pas sûr que Charlie trouvera ça très drôle. Ça le décevra plus qu'autre chose, à dire vrai. Vous le connaissez, il n'aime pas qu'on fasse du mal aux animaux.
Intelligent d'appeler à l'approbation du grand frère, concéda Joséphine en remarquant que les garçons avaient l'air subitement horrifié. Charlie devait être porté en modèle dans sa famille. Un enfant parfait, comme Bérénice. Farhan s'accroupit devant les garçons pour être à leur hauteur et les jugea du regard avec un petit sourire.
-Alors. Il est où ce rat ?
-Sous notre banquette, maugréèrent-t-il en chœur.
-Mais il va s'étouffer ! s'étrangla leur frère, horrifié. Je le dirais à maman !
-Je ne suis pas sûre que de là où elle est, elle puisse faire quelque chose, douta Tonks, visiblement soulagée que le conflit ait trouvé une issue. Bon, Abbot, qu'est-ce que tu fais là ?
Elle la fixa, un sourcil haussé, les bras croisés contre sa poitrine. Dos à elles, Farhan s'était penché et soulevait la banquette à l'aide de sa baguette. Une fois l'ouverture faite, le frère à lunette se précipita et en ressortit avec un rat au pelage terne qui émit des couinements effrayés.
-Croûtard !
-Merci, non ?
-Jo, soupira Bérénice en la tirant. Viens, allez. Charlie n'est pas, ils l'ont dit.
-Mais promis dès qu'il revient on te l'envoie, lança Tonks avec un sourire étrange.
Elle jeta un regard de biais à Farhan qui se redressait, les mains et les genoux pleins de poussières. Un mouton s'était même niché dans ses cheveux noirs. Il adressa à Tonks un sourire crispé et le frère à lunette marmonna un « merci » qui sonnait plus pour la bonne forme. Le rat pressé contre sa poitrine, il sortit du compartiment, le nez en l'air, suivi des jumeaux qui prirent exactement la même position en exagérant son pas volontaire. Même Bérénice ne put retenir un éclat de rire devant la scène et faucha le coude de sa sœur.
-Allez, viens ! Peut-être que d'ici les toilettes tu trouveras quelqu'un à transformer, je te sens déçue !
***
Mais malheureusement, le train était d'un calme olympien. Joséphine retourna dans son compartiment, écrivit quelques absurdes idées dans le journal qu'elle tenait depuis l'âge de quatorze ans, dormit encore une heure avant que le train ne daigne ralentir. Quand elle se prépara à sortir, la cage de sa chouette à la main et sa malle dans l'autre, elle dut se rendre à l'évidence : Charlie n'était pas passé la voir. Il se dépêcha pour être la première près des diligences et pouvoir l'attendre de pied ferme, assise sur sa malle massive et emmitouflée dans sa cape : il bruinait en Ecosse. Elle qui était habituée au climat clément de Cornouaille, elle ne s'était jamais habituée à la rigueur des Highlands. Maya et Bérénice étaient parti depuis dix minutes et il ne restait que trois diligences quand Charlie finit par apparaître, reconnaissable avec sa silhouette massive, escorté de Farhan et de Tonks. La jeune fille aux cheveux rose avait même renoncer à se protéger et sautait dans les flaques comme une enfant, aspergeant copieusement tous ceux qui s'approchaient d'elle. Cela fit rire Charlie et Joséphine sentit son sang bouillir dans ses veines. Elle se maîtrisa d'une grande inspiration et attendit que son petit-ami tourne le regard vers elle. Cela finit par arriver, quand Farhan et Tonks montèrent dans une diligence et que Charlie embrassa une dernière fois l'espace du regard. De là où elle était, Joséphine vit son visage se figer. Il redescendit la marche qu'il venait de monter.
-Allez-y, je vous rejoins !
-Mais j'ai tes bagages !
-Je sais que tu es un homme fort, Farhan. A toute.
Malgré les protestations à peine audibles du Gryffondor, la diligence se mit en mouvement et Charlie retourna vers Joséphine, les mains dans les poches de sa cape. La jeune fille ne daigna pas bouger d'un pouce, immobile comme une statue de glace sur sa malle. Elle ne sentait déjà plus le bout de ses doigts et se retint d'aller se blottir contre Charlie pour chercher un peu de chaleur.
-C'était bien chez les préfets si tu y as passé sept heures, lança-t-elle dès qu'il fut à sa hauteur.
Charlie se passa une main sur la nuque, l'air embarrassé. Il n'avait pas éprouvé le besoin de rabattre la capuche sur son front et la pluie plaquait ses mèches rousses contre ses joues.
-Il y avait pas mal de sujet à discuter, on a passé au moins trois heures là-bas ... et après j'ai rejoint Farhan et ...
-Je suppose que vous aussi vous aviez beaucoup à discuter ? ironisa Joséphine. Parce que tu ne vas pas passer toutes tes nuits avec Farrell pour le reste de l'année, pas vrai ?
Elle avait volontairement écorché son prénom et elle vit le déplaisir que cela coûtait à Charlie à la façon dont il plissa les yeux. Elle regretta presque de s'être engagée dans cette voie-là : s'il y avait bien une situation dans laquelle Charlie pouvait devenir agressif, c'était bien celle où on s'attaquait à ceux qui lui étaient chers. Et son meilleur ami l'était indéniablement. Ils étaient presque aussi inséparables que Maya et Bérénice. Elle qui ne s'était jamais réellement lié à personne, elle n'avait jamais compris cette relation. Peut-être même qu'elle était jalouse de cette relation et que la raison pour laquelle elle ne s'intéressait pas à Farhan, c'était qu'il lui disputait l'attention de Charlie de façon bien trop vive.
Ils restèrent quelques instants silencieux, sous la pluie. Joséphine avait l'impression qu'un mur s'était érigé, que Charlie fuyait son regard, sa présence. Faisait mine de ne pas la voir. Ça lui était insupportable. Elle bondit sur ses pieds, franchit la distance qui les séparaient pour poser ses lèvres glaciales sur les siennes. Charlie répondit à peine à son baiser et son cœur acheva de se morceler. Cela ressemblait à s'y méprendre à leur premier baiser, aussi glacial, aussi ... statique.
Elle s'en souvenait comme si c'était hier, de ce baiser froid sous la neige. Elle s'était sentie forte et fière ce jour-là : après une expérience des plus désagréables, elle n'avait jamais cru qu'elle serait capable de faire le premier pas avec un garçon. Mais Charlie avait réinstauré une certaine confiance en elle qui s'était pourtant pris un mur face à son inactivité. Le mur était de nouveau là et lui paraissait encore plus haut et infranchissable.
Joséphine s'écarta d'un souffle et fixa intensément le visage de son petit-ami.
-Quoi ?
-Comment ça « quoi » ?
-Comment ça « quoi » ? répéta-t-elle, incrédule. Attends, tu ne viens même pas voir pendant sept heures de temps alors que je t'attendais, tu me regardes à peine, quand je t'embrasse tu fais le mort, tu m'ignores et tu me demandes ça ?
Charlie parut gêné par la tirade et poussa un profond soupir. Les élèves passaient autour d'eux en leur lançant un regard curieux mais Joséphine les ignora royalement pour concentrer son attention sur Charlie.
-Si c'est pour ce qui s'est passé la dernière fois, tu peux me le dire, asséna-t-elle, déterminée. Mais parle, par Merlin !
La dernière fois. Joséphine devait être honnête avec elle-même : leur première fois ne s'était pas passée comme dans un rêve. Ça avait même plutôt été un cauchemar, constitué de tâtonnement, de raideur et d'une petite douleur qui l'avait pénétré dans les entrailles. Ils avaient mis une éternité à se mettre en route. Charlie avait mis une éternité à se mettre en route. Joséphine avait mis ça sur le compte du stress et de la peur d'être découvert mais à présent qu'il fuyait si prestement son regard, elle se demandait si ça n'avait pas été elle le problème. Son impatience. Son humeur lunatique. L'idée lui donnait envie de se jeter de la tour d'Astronomie.
-C'était moi ? voulut-t-elle s'assurer d'une voix qui commençait à trembler. J'ai mal fait quelque chose ?
-Quoi ? Oh mais Jo ... Non, bien sûr que non.
Il lui caressa le bras et son regard se posa enfin franchement sur elle, doux, rassurant.
-C'est plutôt moi qui devrais m'excuser ... C'est juste ... je ne voulais pas que ça se passe comme ça. Je voulais que ce soit une belle expérience et ...
-Tu n'as pas tout gâché, le coupa Joséphine en devinant la fin. C'était la première fois Charlie, on tâtonnait tous les deux. Ce n'est pas grave si elle s'est mal passée. Ça veut dire que les autres seront meilleures ...
Charlie sembla hésiter, sa tête oscillant doucement sur ses épaules. Joséphine se rapprocha de lui, sans le quitter des yeux, sans lui laisser l'occasion de se défiler. Elle le sentait lui échapper et elle détestait cela. Pas qu'elle aimait le contrôle, mais elle s'accrochait à la stabilité que pouvait lui apporter Charlie dans sa vie qui était complétement chaotique. Elle avait besoin de cette stabilité. Elle avait besoin de Charlie. Elle avait besoin qu'il lui dise qu'elle était belle, qu'elle comptait. Qu'il donne un sens à sa vie. Elle glissa sa main jusque la sienne et serra ses doigts froids.
-Est-ce qu'on peut juste ... passer et grimper dans une diligence ? Je commence à mourir de froid.
Un sourire tremblant se dessina sur les lèvres de Charlie et il baissa les mains sur leurs mains jointes.
-Je vois ça, tu es gelée. Allez viens, on y va.
Il passa un bras autour de ses épaules et de l'autre main vint agripper la malle. Joséphine commença enfin à se détendre pour la première fois depuis qu'elle était montée dans le train et Charlie acheva de la rassurer en plaquant un baiser sur ta tempe. Elle grimpa la première sur la diligence et put enfin repousser sa capuche trempée. Ils étaient presque les derniers élèves sur le parvis de la gare et la diligence s'avança avec eux seuls à son bord. Tremblante de froid, Joséphine se laissa aller contre Charlie et ferma les yeux. Les quelques siestes dans le train n'avaient en rien altéré sa fatigue.
-Mal dormi ? devina Charlie.
-Non, je me suis juste réveillée hyper tôt, je n'avais pas préparé ma valise. J'ai mis la musique à fond, ça a réveillé Bérénice.
-Mais quelle petite peste tu es, s'amusa-t-il en repoussant une mèche humide sur son front.
-J'avais besoin de motivation.
Charlie répondit par un petit rire avant que les cahotements de la calèche ne soient les seuls troubles du silence. Bercée ainsi, Joséphine aurait presque pu s'endormir sur l'épaule de son petit-ami avant qu'il déclare à mi-voix :
-Encore désolée pour le train. Mais Farhan panique quand il est seul avec une fille.
Joséphine ouvrit un œil.
-C'est ça ton excuse ? Servir de chandelle à ton meilleur ami ? Par ailleurs je suis persuadée qu'il peut trouver mieux que Tonks.
-Tu ne le connais même pas. Si ça se trouve c'est un enfoiré.
-Je ne pense pas que tu serais ami avec un enfoiré. Et même un enfoiré peut trouver mieux que Tonks.
Joséphine se savait inutilement cruelle avec la Poufsouffle mais c'était plus fort qu'elle. A l'image de Bérénice, Tonks avait une aura de sainteté et de perfection absolument détestable. Si dans les premières années, sa maladresse maladive l'avait empêché de briller alors que les dons naturels de Joséphine lui permettaient d'être première de classe sans même travailler. Leurs destins s'étaient croisés en quatrième année quand le niveau s'était brutalement élevé et que les capacités de travail de Tonks lui avait permis de trouver une certaine constance. Joséphine ne lui avait jamais pardonné, car en plus de ça, ses capacités de Métamorphomages fascinaient toute l'école et sa camaraderie en faisait quelqu'un de très apprécié. Un autre style de perfection que Bérénice, mais le résultat était toujours le même : à la lutte, Joséphine perdait.
-Je t'avoue que ... j'avais peur que tu m'en veuilles, après la dernière fois, poursuivit Charlie, l'air sincèrement contrit. Que ...
-Tu subisses les foudres de l'ouragan Joséphine ?
Les mots qui laissèrent un goût amer dans la bouche. Avec Charlie, elle tentait de réprimer son côté fougueuse parfois injustement méchante ou froide, justement parce qu'il était peut-être l'unique personne au monde à ne pas le mériter. Il avait toujours été agréable avec elle, comme il l'avait été avec tout le monde et ça changeait agréablement des personnes qui l'ignoraient ou fustigeaient son comportement. Charlie l'avait trouvée drôle, lui. Il l'avait vu. Il la soutenait. C'était important pour Joséphine, assez pour qu'elle s'y accrocher et se bride.
-Je te fais si peur que ça ? demanda-t-elle dans un murmure.
Charlie laissa échapper un petit rire.
-Mais à qui tu ne fais pas peur, Joséphine ?
Les doigts de Joséphine se crispèrent dans ses poches et elle se redressa pour s'appuyer cette fois sur la paroi de la diligence, vexée. Charlie soupira et passa une main sur son épaule.
-Jo, arrête. Je ne savais juste pas comment tu allais réagir ... et je trouve que tu le fais avec beaucoup de maturité. Je suis fier de toi.
Mais même le compliment traversa son esprit sans s'y attarder, sans la toucher. Sa réaction lui paraissait naturelle : s'il y avait bien un domaine où elle pouvait être indulgente, c'est celui-ci. Avec un frisson de dégoût, elle se souvint de la première fois où elle s'était retrouvée seule avec un garçon – loin d'être l'expérience la plus romantique de sa vie ... Cependant, la façon dont Charlie avait géré cela, en la fuyant, appelait à tout sauf à sa compassion. Elle fixa l'extérieur qui défilait sous la pluie. Ils étaient en train de longer le Lac Noir et les premières tours du château étaient visible si elle se tordait le coup.
-Dans ces cas-là, il faut parler, pas fuir.
-Jo, il faut admettre que tu n'as jamais été très douée pour parler ... Regarde, avec ton père tu ne voulais pas revenir dessus alors que ça t'avait affecté.
Les lèvres de Joséphine se tordirent quand elle se souvint du savon que lui avait passé son père après qu'elle ait osé chercher des noises au Ministre de la magie en personne. Des mots qu'elle avait entendus cent fois, qui étaient censé passé comme de l'eau sur elle mais chaque fois ils allumaient un véritable brasier. En parler, c'était l'alimenter.
-J'étais peut-être affectée, admit-t-elle sans quitter les tours du château des yeux. Mais je sais me gérer, Charlie.
Charlie garda le silence et dans l'embarras qu'elle devinait, elle sentait qu'il ne savait pas quoi répondre à cela. Qu'il était même plutôt dubitatif. S'il savait ... s'il savait comme je serais si je ne savais pas me gérer. D'un geste machinal, elle passa son pouce sur son poignet et tenta de deviner les veines sous la peau.
-Si tu le dis, soupira Charlie.
Fatiguée, Joséphine ne préféra pas renchérir et observa plutôt le château qui se dessinait à leurs yeux, émergeant lentement du rideau de pluie qui ne faisait que s'intensifier. La diligence finit par s'arrêter au pied de la grille et Charlie porta galamment sa malle pendant que Joséphine enveloppait la cage de sa chouette Athéna dans sa cape. La pauvre hululait régulièrement et battait des ailes mais ils parvinrent assez vite au Hall où tous les bagages étaient entreposé en attendant que les elfes de Maison ne les montent dans leurs chambres. Joséphine libéra Athéna de la cape et fouilla son sac pour trouver un Miam-hibou qu'elle goba tout rond.
-Elle est vraiment très belle, lança Charlie en laissant le bout de son doigt s'infiltrer dans la cage pour caresser les plumes crèmes du haut de la tête d'Athéna. Je trouve que vous êtes assorti au niveau des couleurs.
-Pourquoi penses-tu que je l'ai choisie ?
Elle se souvenait parfaitement du jour où elle était entrée dans l'animalerie du Chemin de Traverse, dès qu'elle était rentrée de Poudlard à la fin de sa troisième année. Ses parents avaient été réticent à l'idée de leur acheter un animal tant qu'elles étaient jeunes, peut-être trop irresponsable pour avoir un animal entre leurs mains. Mais ils avaient accepté d'acheter un chat à Ophélia le jour de ses quatorze ans et Joséphine avait pu à son tour passer la porte de l'animalerie. Elle fonctionnait à l'instinct et avait eu un coup de cœur pour cette chouette effraie au visage blanc et aux plumes d'un panel de couleur allant du caramel au brun qui n'étaient pas sans rappeler, en effet, sa propre couleur de cheveux. Bérénice aussi avait choisi un hibou deux ans plus tard et Joséphine reconnut l'oiseau, perché sur sa malle à côté du chat noir de Maya, Bastet.
-Mais en parlant d'animaux, tes frères ont coincé le rat d'un autre de tes frères sous une banquette.
-Je sais, Farhan m'a raconté. Fred et George ne vivent que pour embêter Percy, je te jure ... Parfois ça me fait rire, mais mettre en danger Croûtard c'est trop pour moi.
Joséphine eut un petit sourire, un brin crispé. Elle se souvint de l'air horrifié qui s'était peint sur le visage des jumeaux quand Farhan leur avait rappelé que Charlie ne supportait pas qu'on s'en prenne aux animaux et qu'il serait déçu d'eux. C'était cette possible déception que les avait fait craquer, et cela prouver à quel point leur estime pour Charlie était grande. Et la façon dont Percy s'était précipité vers son grand frère pour avoir son aide et son appui était tout aussi significative.
-Tu es leur modèle, c'est dingue ...
-Oh non, leur modèle c'est Bill, rit Charlie. Mais comme Bill n'est plus là, ils se rabattent sur moi, je suis un lot de consolation. Allez viens ... on va assister à notre dernier banquet.
Joséphine le suivit, dubitative sur la réponse qu'il lui avait servi. Il s'apprêtait à rentrer dans la Grande Salle mais hésita brusquement sur son seuil avant de se tourner vers sa petite-amie. La jeune fille dressa un sourcil, interloqué, avant que Charlie ne se décide à se pencher vers elle pour l'embrasser. Joséphine, toujours un peu contrariée, décida de ne pas réagir, de garder ses lèvres closes et statiques contre celles du Gryffondor. Mais le baiser fut si bref que cela ne parut pas déboussoler Charlie qui s'écarta avec un sourire penaud.
-Encore désolé. La prochaine fois, je parlerais.
-Tu as intérêt.
-Oui madame.
Avec un dernier sourire, Charlie s'éloigna dans la Grande Salle et Joséphine y entra également, soulagée par la chaleur qui y régnait et par celle qui persistait sur ses lèvres après le baiser de Charlie. Elle avait dû forcer, mais les morceaux se recollaient lentement et une fois assise à la table des Serdaigle, elle se mit à respirer un peu plus librement. Elle n'avait pas vraiment regardé où s'assoir : elle avait pris le premier visage connu qu'elle avait croisé et il se trouvait que c'était Aidan McColley, le Batteur de l'équipe de Serdaigle. Joséphine eut un sourire entendu lorsqu'elle découvrit un badge étincelant sur sa poitrine.
-Mais quelle surprise absolument déconcertante, Capitaine McColley !
-Le droit absolument divin de pouvoir te botter les fesses si jamais tu arrives en retard aux entrainements, plaisanta Aidan avec un sourire fier.
Il caressa l'insigne de sa paume, la poitrine bombée. C'était un garçon athlétique aux cheveux d'un blond vénitien qui tirait souvent vers le roux et au visage pâle. Son nez était légèrement tordu depuis qu'il s'était pris un cognard deux ans auparavant et qu'il ait refusé de quitter le terrain malgré l'hémorragie et la douleur. Ça leur avait valu une victoire, néanmoins. A côté de lui, sa petite-amie Elisa Stretton parlait aux autres camardes de dortoir de Joséphine. Chacune d'entre elle lui jeta un petit coup d'œil avant de se replonger dans leur conversation. Aidan lui adressa un petit sourire contrit.
-Oh laisse, tu sais bien comment elles sont. Parlons Quidditch, plutôt. Prête pour rafler la coupe cette année ?
-Plus que jamais. C'est la dernière, pas vrai ?
Aidan acquiesça, déterminé. Il était entré avant elle dans l'équipe, dès sa deuxième année quand Joséphine était arrivée en quatrième année, et c'était bien pour cela que la désignation en Capitaine n'avait pas fait de suspens. Il était l'un des rares à apprécier la jeune fille mais Joséphine avait parfaitement consciente d'être moins détestable au Quidditch. C'était un moment où elle pouvait se défouler de la manière la plus saine possible et cela aseptisait complétement son comportement. Contrairement à son dortoir où elle s'était mise une partie des filles à dos après avoir fait une tentative de filtre de paix en deuxième année qui avait fini par exploser, brûler les rideaux, le parquet de leur chambre, la penderie d'Elisa et les manuels de Scarlett. Leur chambre avait embaumé l'œuf pourri le reste de l'année scolaire et il se pouvait que Joséphine ait omis de s'excuser.
Elisa lui jetait par ailleurs un regard circonspect. C'était une jolie fille aux boucles blondes, sérieuse, intelligente, volontaire. Elle méritait ce badge de préfète-en-cheffe qui brillait à présent sur sa poitrine, même Joséphine devait l'admettre. En plus de ne pas lui avoir pardonné l'incident, Elisa, qui sortait avec Aidan depuis la cinquième année, admettait mal leur amitié et Joséphine devait admettre qu'elle ne faisait rien pour la rassurer et prenait un malin plaisir à provoquer sa jalousie. Elle adressa un sourire éclatant à son Capitaine.
-Alors, on a juste un Poursuiveur à remplacer, c'est ça ?
-C'est ça mais je pensais prendre de l'avance pour l'année prochaine aussi. Tu pars, moi aussi et je ne suis pas sûre que Tommy reprenne son poste l'année des ASPIC, ça va piquer ... Du coup je pense quand même faire de larges essais pour tous les postes, histoire de tâter le terrain.
-Va regarder le vol des premières années aussi, proposa Joséphine en hochant la tête. L'année prochaine ils seront en âge de postuler ...
Aidan cligna des yeux.
-Je n'y avais pas pensé, mais super idée ... merci Jo !
Elisa roula des yeux dans un geste absolument méprisant et Joséphine retint un sourire mesquin. La peur de la préfète était idiote, Aidan n'avait d'yeux que pour elle et Joséphine n'en avait que pour Charlie. Elle balaya par ailleurs la pièce du regard pour le voir assis au milieu de la table de Gryffondor, au milieu de ses amis, Farhan à sa droite. Il riait à gorge déployé à la blague du garçon devant lui et Joséphine remarqua les regards qui se tournaient dans sa direction, avides, admiratifs. Le sourire qui avait failli fleurir mourut ses lèvres et elle entendit à peine Aidan poursuivre :
-De toute façon c'est notre dernière année ... Plus le choix, Jo : il faut donner toutes nos forces dans la bataille. Serpentard garde leur équipe quasiment identique : il y a juste un changement de Capitaine, il me semble ... mais c'est Gryffondor qui va m'inquiéter, Weasley les fait vachement progresser depuis deux ans ... Dubois, c'était une sacrée trouvaille. Et lui on ne va pas se mentir, Weasley est capable de faire gagner son équipe à lui tout seul, c'est un sacré phénomène. Comment il la sent cette saison, lui ?
-Hein ?
Joséphine reporta son attention sur Aidan, déboussolée. Charlie était en train de parler à une fille de leur année et elle avait voulu vérifier que ce n'était pas Lauren McColley – la sœur jumelle de son Capitaine – de qui Charlie était bien trop proche. Aidan, désabusé, s'apprêtait à répéter sa question quand soudainement, le silence total se fit dans la salle. Au centre de la table des professeurs, Albus Dumbledore venait de se lever. Le tabouret et le Choixpeau avait été installé sur l'estrades, prêt à accueillir le professeur McGonagall et les nouveaux élèves qui peuplerait les couloirs de Poudlard pour les sept prochaines années.
D'une façon assez brutale, le cœur de Joséphine remonta dans sa gorge. C'était une image familière : la Grande Salle animée, drapée aux couleurs des quatre maisons et à l'écusson de Poudlard, Dumbledore, le plus grand sorcier de tous les temps, promenait son regard bleu étincelant et bienveillant sur eux. Joséphine n'avait jamais eu de contact avec son professeur mais le respecter pour ce qu'il était, pour ses manières excentriques que certains trouvaient indigne d'un sorcier tel que lui mais qui ne faisait que renforcer l'admiration de Joséphine. Pour la première fois depuis ce matin, elle se rendit compte que c'était la dernière fois qu'elle contemplait cette image, qu'elle écoutait un discours de rentrée, qu'elle allait assister à une répartition. Que ses sept années s'étaient écoulées et qu'elle n'avait pas vu venir la fin. C'était comme se prendre un mur en pleine face.
Dumbledore ouvrit les bras à la salle, un grand sourire faisait frémir son imposante barbe.
-Chers anciens, je suis ravi de vous retrouver pour une nouvelle année trépignante dans cette école. Mais avant toute chose, j'aimerais que vous accueilliez avec moi la nouvelle génération de petit sorcier. Que la Répartition commence !
-C'est parti, soupira Joséphine, à part elle. Cette fois, c'est la dernière ...
***
Voilà ! j'espère que ce chapitre vous aura plu et vous aura permis d'appréhender un peu mieux le personnages de Joséphine (qui est l'un de mes préférés soit dit en passant). Je sais que vous avez encore du mal à la cerner !
On se revoit :
- Dans une semaine pour le chapitre d'O&P (oui oui je sais vous l'attendez)
- Dans deux semaines pour le prochain chapitre "un chaudron sans passion" !
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