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Chapitre 21 : La moitié d'un cadeau

COUCOU TOUT LE MONDE 

Je suis de fort bonne humeur aujourd'hui :

- On a eu une semaine MAGNIFIQUE en terme de temps (et c'est si rare que je tiens à le souligner), avec des vibes de printemps hyper agréable (j'ai pu me balader en veste, ouvrir les fenêtres sans être transformée en glaçon ...). 

- On a fait aussi une semaine spéciale pour la journée internationale des Droits de la femme du coup j'ai fait pleeien d'activité avec les élèves autour de ce thème donc c'était vraiment chouette ! 

- Et j'ai retrouvé ma flamme de l'écriture et ça c'est fantastique j'ai pas les mots, ça fait UN BIEN FOU

Et vous comment ça va ? 

POUR CE CHAPITRE. C'est un des tout premiers que j'avais en tête et honnêtement j'ai adoré l'écrire. J'espère qu'il vous plaira tout autant <3 Bonne lecture à tous.tes ! 

***

Ce soir-là ... - Vous rentrez aux cafés éclatants,
Vous demandez des bocks - ou de la limonade 
- On n'est pas sérieux quand on a dix-sept ans
Et qu'on a des tilleuls verts sur la promenade. 

- Roman
Arthur Rimbaud 

***

Chapitre 21 : La moitié d'un cadeau.

Dimanche 23 décembre 1990

Oh Merlin, je n'en reviens pas qu'il me force à faire ça.

Prie avec moi, cher journal, et on se retrouve dans l'autre vie !

***

Ce n'était pas dans les habitudes de Joséphine de se réveiller tôt. Alors beaucoup auraient été surpris de la voir debout à sept heures du matin, le premier jour des vacances, vêtue de sa robe de velours bordeaux et de collants noirs, déjà maquillée comme si elle s'apprêtait à sortir. C'était peu ou proue le cas. Car si elle trouvait quelque chose, elle ne comptait pas s'attarder.

Sept heure trente. Mrs. Glenfyre venait de passer réveiller sa mère. Son père, lui, était déjà en bas, voire même parti. Il faisait tout pour être opérationnel au bureau des Aurors dès huit heures et parfait très souvent de la maison avant l'aube. Et l'aube était même très loin : derrière les rideaux de Joséphine, le ciel était encore noir d'encre, même pas illuminé par un clair de lune. Non, ce n'était pas le matin, c'était encore la nuit. Et la nuit, c'était l'heure du vol.

Joséphine osa à peine respirer quand la gouvernante passa devant sa porte, accompagnée de sa mère. Elle les entendit discuter à voix basse pour ne pas risquer de les réveiller. Elle savait qu'elle n'avait rien à craindre de Bérénice, qui profitait toujours de la tranquillité du matin dans sa chambre ou dans le salon privé, ou d'Ophélia qui se levait rarement avant le soleil. Alors quand elle entendit les escaliers grincer sous les pas de sa mère, elle ouvrit sa porte. C'était le moment.

A pas de chat, sac à l'épaule et baguette à la main, elle se précipita vers le bureau de son père au premier étage. Si le rez-de-chaussée était l'espace public avec le salon d'apparat, la grande salle à manger, et les jardins, les étages étaient de la sphère du privé. Sans attendre, elle tenta d'ouvrir la porte qui lui résista. Peu surprise, elle leva alors sa baguette et des étincelles jaillirent de sa pointe, marquant son impatience.

-Alors papa, est-ce que tu es comme moi ? murmura-t-elle en passant sa baguette sur la porte. Est-ce que toi aussi, tu nous sous-estimes ... ?

Elle savait leur demeure protégée par des sortilèges : les Aurors avaient été des cibles privilégiées pendant la guerre, et une maison avec trois petites filles était si tentante ... Leur père n'avait pas laissé la moindre chance aux Mangemorts de les éprouver. Alors pourquoi protéger complètement son bureau, si sa maison était déjà imprenable ? Surtout en temps de paix ...

-Alhomora.

La serrure cliqueta, mais ne s'ouvrit pas. Joséphine n'était pas naïve à ce point, mais elle avait un plan B. Elle s'était entrainée toute la soirée à faire et défaire des sortilèges, de plus en plus complexes. Collaporta n'était pas le pire qui existait. Et elle était bonne sorcière. Excellente, même, si elle se donnait la peine. Et cette fois, elle était déterminée à se la donner. Elle resta plusieurs minutes, debout contre la porte, à la tapoter en murmurant – elle n'avait jamais été douée pour ne pas prononcer ses formules. Personne ne daigna se montrer, sauf Buckingham, le chat d'Ophélia qui feula devant elle. Heureusement, sa maîtresse n'avait pas la connexion que Rusard avait avec Miss Teigne et ne se montra pas. Et au bout de cinq minutes, le battait s'affaissa dans le dos de Joséphine et elle disparut triomphalement à l'intérieur de la pièce.

-Victoire ! chuchota-t-elle rageusement, les bras levés.

Il n'eut personne pour l'acclamer, mais la fierté qui l'étourdissait compensait amplement. Elle s'autorisa quelques pas de joie et apprécia le mouvement de sa robe autour de ses jambes. Le plus délicat était d'entrer – une fois entrée, elle était protégée. Qui songerait qu'elle était ici ? Son euphorie quelque peu calmée, elle s'avança vers l'imposant bureau placé sur une estrade, face à la fenêtre. Elle s'installa dans l'imposant fauteuil de cuire et s'amusa à s'imaginer comme son père, la tête haute, importante, le devoir chevillée au corps. Elle ne parvint pas à tenir plus de dix secondes et s'affala sur le fauteuil, mes mains croisées sur le ventre, le faisant pivoter de ses talons.

-Bon, si j'étais un Auror psychorigide, où je mettrais un tel dossier... ? souffla-t-elle en balayant la pièce du regard. Allez Jo, pense comme papa ... et vu comment on se ressemble, ça ne devrait pas être difficile ...

Elle était certaine que son père avait amené du travail ici. Son père était un grand sorcier, très bon dans les duels, très lucide, méthodique. Mais aussi un bureaucrate. Une très belle plume. La paperasse était son péché mignon. Ses collègues lui confiaient parfois leurs rapports à rédiger, même s'il n'avait pas participé à leur mission.

Et surtout ? Son père était un collectionneur. Il était incapable de jeter. Donc ... il stockait.

Joséphine prit le temps de quadriller le bureau des yeux, du plafond lambrissé à la belle bibliothèque qui prenait tout un pan du mur. L'autre partie était tapissées d'étagères et de tiroir de bois sombre et vernis. Son regard se porta de nouveau sur la surface plane du bureau, impeccablement rangée, les plumes alignées d'une façon presque irréelle. Finalement elle tomba sur la seule note de personnalité, une photo de famille dans un cadre finement ouvragé. Ses sourcils se dressèrent. Elle était jeune, sur cette photo – à peine dix ans. Elle se tenait droite, fièrement devant son père qui posait tendrement une main sur son épaule. Bérénice avait des trous dans la dentition. C'était une photo sorcière ... et pourtant ils se mouvaient à peine. Cette photo était artificielle et appartenait au passé. Joséphine caressa le bureau et sa main s'infiltra rapidement dans les espaces de rangement plutôt que de s'y attarder. Malheureusement, il s'agissait beaucoup de document personnels – carnets de familles, assurances, courriers.

-Pas là, décréta-t-elle finalement en se levant d'un bond. Le bureau c'est personnel, j'ai compris ... Bon, voyons les étagères ... Non, pas là ... non ... Oh Merlin !

Elle venait de tirer une vieillerie des étagères : un nouveau cadre photo, le cadre d'argent poli plus ancien. Elle reconnut aisément son grand-père Maximilian Abbot à sa moustache en accordéon, plus brune, plus fournie et à sa mâchoire carrée. Il enlaçait d'un bras sa femme, une magnifique sorcière aux longs cheveux que Joséphine imaginait du même cuivre que les siens. Elle portait une tenue de sport et sa deuxième main tenait un balai. Sa grand-mère Odélia. Peut-être un des modèles de Joséphine sur terre et parfois elle maudissait le ciel de ne pas l'avoir connu. Mais même son père n'avait pas eu cette chance ... elle était morte quelques heures après lui avoir donné naissance. Ça l'avait coupé de tout : dans sa carrière de Quidditch triomphante chez les Pies de Montrose, de son expérience de maternité qui s'épanouissait à peine, de son couple avec Max qui avait été fort et passionné. L'image d'Odelia tira par ailleurs sur le col de son mari pour l'embrasser à pleine bouche. Joséphine faillit grimacer, avant de songer qu'elle devait avoir l'air exactement de ça chaque fois qu'elle embrassait Charlie.

-Voilà qui remet des perspectives ..., songea-t-elle en rangeant la photo à sa place exacte. Bon, les dossiers des Aurors ... Papa, tu ne vas pas me dire que tu ne gardes aucunes traces de tes interventions ... ? Tu es un nostalgique, je suis sûre que tu t'enfermes ici pour relire tes exploits ...

Joséphine fouilla. Elle fouilla comme elle n'avait plus fouiller depuis qu'elle avait compris qu'Ophélia avait un petit-ami. Elle en avait retourné sa chambre pour trouver sa correspondance et arracher son secret. Et après elle en voulait à Bérénice d'avoir ouvert son journal ? ricana-t-elle intérieurement. Elle n'avait fait que l'imiter, en fin de compte ... Il lui fallut une dizaine de minutes et une frayeur quand elle entendit derrière la porte quand elle mit enfin la main sur les premiers dossiers intéressants. Le rapport d'une attaque de Mangemort au Chemin de Traverse en 1970.

-Oh, Jackpot ! se réjouit-t-elle. Et en plus c'est par ordre chronologique ! Oh dis-moi papa que tu as été à Belfast, dis-moi dis-moi dis moi ...

Joséphine parcourut tous les dossiers, un par un, frénétiquement et très vite une date lui sauta aux yeux. Une date ... et un mot. « LA MON HOUSE HÔTEL – 17 février 1978 ». Elle n'attendit pas pour l'extirper et pour le feuilleter rapidement, sans en croire ses yeux. Son cœur se mit à tambouriner dans sa poitrine.

-J'y crois pas, lâcha-t-elle, abasourdie. Oh Merlin ...

Elle n'en espérait pas tant. Elle espérait un indice, un détail, quelque chose qui pourrait compromettre son père, les mettre sur la piste ... pas carrément le rapport d'enquête. Joséphine sortit sa baguette et dupliqua le dossier. La copie alla rejoindre immédiatement ton sac, et elle rangea soigneusement l'original là où elle l'avait trouvé. Son sourire ne quittait pas ses lèvres et elle avait l'impression de retrouver la même flamme bienfaitrice qui s'était embrasée lorsque Nolan O'Neil avait ouvert le test de génétique.

Avant de partir du bureau de son père, elle lui jeta un dernier regard, le cœur battant. Entre deux dossiers, elle avait trouvé deux autres photos de famille, disséminées un peu partout. Chaque Abbot cachait son cœur quelque part ... peut-être avait-il trouvé celui de son père.

***

Farhan avait éprouvé toutes les difficultés à s'endormir – et les tasses de thé qu'il avait ingurgité pour calmer ses nerfs n'avaient en rien aider. Et même quand le sommeil était venu, il était resté léger, volatile. Ce qui expliquait qu'il sursaute au premier grincement et se redresse dans son lit, les yeux à moitié ouverts, complétement sonné. Dans l'encadrement de porte se tenait une vision si terrifiante qu'il se demanda un instant s'il n'était pas en plein cauchemar.

-Oh, tu es réveillé ! remarqua Joséphine Abbot avec un grand sourire. Parfait !

Et sans attendre son assentiment, elle poussa la porte et entra dans sa chambre. Farhan la regarda faire, interdit, l'esprit paralysé par la fatigue. Le tour de la pièce fut vite fait et elle se tourna vers Farhan pour ouvrir triomphalement les bras.

-Couvre-moi de paillette de la tête aux pieds !

-Hein ? Qu'est-ce que tu fous là ?!

Farhan était très heureux que son cerveau se réveille et il tira nerveusement sa couverture sur son torse – nu. Très étrange, il s'était endormi en tee-shirt ... et à sa plus grande horreur, il le vit gésir sur le sol près de son lit. A côté de sa peluche dragon qu'il trainait depuis qu'il était petit. Fort heureusement, la chambre était encore dans la pénombre et Joséphine ne paraissait pas le remarquer. Visiblement très fière d'elle, elle fouilla dans son sac pour en sortir un dossier.

-Tu m'as demandé des résultats, j'ai répondu présent.

-Jo, il est huit heures du matin ! Il fait encore nuit, bon sang ! Et pour l'amour du ciel, qu'est-ce que tu fiches dans ma chambre ?!

-Arrête de te plaindre, répliqua Joséphine en roulant des yeux. Tiens ! Cadeau de ton enquêtrice-en-cheffe ...

Elle jeta le dossier sur les couvertures et s'assit sur le bord de son lit sans la moindre vergogne. Farhan sentit ses yeux s'écarquiller en une question muette et elle le gratifia d'un sourire sarcastique.

-Pas de panique O'Neil, c'est ton père qui m'a laissée rentrer. J'avais des courses à faire à Londres, je me suis dit que j'allais passer te donner ça ... Allez, ouvre ! C'est mon cadeau de noël.

Papa qu'est-ce qui t'a pris ? gémit intérieurement Farhan, mortifié. Il n'osait pas départir une de ses mains de la couverture, ni faire le moindre mouvement, malgré le regard de Joséphine pudiquement intéressé par sa petite chambre. Faute de mieux, il se contenta de baisser les yeux sur le dossier posé à côté de lui. Son sang se glaça dans ses veines.

« LA MON HOUSE HÔTEL – 17 FEVRIER 1978 »

-Jo ... C'est quoi ça ?

-Le rapport, répondit immédiatement Joséphine sans le regarder, mais un sourire extatique aux lèvres. Le rapport, rien de moins que le rapport de cette fameuse nuit du 17 février !

-Tu te fous de moi.

-Non ! Mon père garde des archives dans son bureau, des affaires qu'il a administrées ou auxquelles il a participé ! Allez, fais pleuvoir les paillettes O'Neil !

Ses pieds tapèrent le sol avec frénésie. Farhan en aurait souri, si son champ de vision ne s'était pas réduit au simple dossier sur ses draps. La pudeur en fut balayée et il se pencha, détacha une main de sa couverture et l'effleura du bout des doigts. Il les écarta immédiatement, comme brûlé. Il était tenté, il avait envie d'arracher la pochette et de découvrir le contenu de ses pages – quelque chose après la déception de la veille. Mais il s'était rétracté dès qu'il avait touché les pages. Un visage s'était mis à flotter dans son esprit.

-Vire ça de ma vue ! Je vais ... je vais attendre Maya.

Il était plus virulent qu'il l'aurait souhaité et Joséphine en parut heurtée. Son sourire s'estompa légèrement sur ses lèvres et ses iris se mirent à flamboyer. Abandonnant l'idée de river son regard sur la pièce, elle pivota vers Farhan, indignée.

-Tu te fiches de moi ! C'est une blague ! Hé, je veux savoir !

-Et moi je veux attendre Maya, rétorqua Farhan avec plus d'aplomb qu'il n'en ressentait. Et on a dit que j'avais le dernier mot sur cette affaire.

Les paupières de Joséphine se plissèrent et elle le considéra longuement. Farhan avait conscience d'avoir l'air légèrement ingrat, mais son esprit n'avait pas complètement émergé de sa nuit et la vue du dossier venait de le bouleverser. Bon sang, elle m'a écouté ... et à la lettre. « Si tu sens que tu peux faire quelque chose, vas-y ». Ecrire ça à Joséphine Abbot ... D'une efficacité redoutable. La jeune fille finit par bondir sur ses pieds, le visage quelque peu fermé.

-Habille-toi O'Neil. On va faire les magasins.

Farhan papillonna des yeux, abasourdi. La seule chose qu'il trouva à rétorquer fut :

-Mais t'as vu le monde au Chemin de Traverse ?!

-Londres est l'une des plus grandes villes du monde ? On va bien trouver un endroit qui ne te rend pas agoraphobe ... Allez, habille-toi. Je t'attends en bas. A moins que tu veuilles tourner en rond en attendant Maya ... A ta guise.

Sans le moindre regard pour lui, elle sortit de la pièce, comme une tornade furieuse. Farhan resta longuement statique, la couverture pressée contre lui, le regard rivé sur le dossier. Lentement, son esprit émergea et prit conscience d'une multitude de détail – sa valise éventrée sur le sol, le fait qu'on ne percevait pas le moindre centimètre de moquette sous le désordre, et qu'un caleçon gisait près de sa chaise de bureau. Et surtout que, malgré la pénombre, Joséphine Abbot devait avoir perçu tout cela de son regard expert.

Qu'il lui avait envoyé une lettre hier soir, simplement mu par le désespoir. Et qu'elle était là le lendemain avant l'aube avec des résultat. Et très clairement, il ne supporterait pas d'attendre sans rien faire.

-Bordel, jura-t-il en repoussant ses couvertures. Bordel de bordel ...

Il se dépêcha de s'habiller et de descendre dans la cuisine, où Joséphine s'était approprié le vieux fauteuil de velours. Là, la lumière était allumée et Farhan put constater qu'elle portait une robe de velours bordeaux aux manches longues, plutôt près du corps si on exceptait la jupe fluide sous laquelle elle avait croisé les jambes. Une médaille d'or brillait sur son sternum. Ses cheveux restaient lâchés, et elle était maquillée avec cette main toujours habile qui la mettait en valeur sans trop en faire. Ses lèvres peintes d'un rose relativement discret sourirent quand Farhan entra dans la cuisine, déjà en manteau et nouant son écharpe autour de son cou.

-Tu n'es pas resté torse nu par ce temps ? fit-elle mine de s'étonner. Quel dommage ...

-Et mince, tu as remarqué, railla Farhan pour cacher sa gêne. Bon, on y va ? Avant que le Chemin de Traverse se blinde ...

Joséphine bondit sur ses pieds avec un sourire. Farhan profita qu'elle se rhabille pour écrire une lettre à Maya. Sa main trembla sur sa plume et il s'efforça de faire court pour ne pas donner l'occasion à l'angoisse de monter. Bon sang, elle a peut-être une piste, songea-t-il en lâchant Stanford dans le ciel, suffoqué. Il se détourna rapidement du hibou et précéda Joséphine dans l'escalier. La boutique était déjà bien remplie et son père tenait la caisse avec sa bonhomie habituelle. Farhan se dépêcha à ses côtés pour persiffler dans un murmure :

-La prochaine fois, est-ce que tu peux éviter de faire monter une fille dans ma chambre ?

-Je ne pouvais pas quitter la caisse, se défendit tranquillement Nolan en encaissant les gallions d'une cliente. Et je ne voyais le danger, c'est ton amie, non ?

Amie c'est un grand mot, rectifia Farhan, embarrassé. Il ne pouvait pas réellement l'exprimer à voix haute car Joséphine venait de le rejoindre, tout sourire. Elle avait enfilé un bonnet crème sur ses cheveux cuivrés.

-Encore merci monsieur O'Neil ! Dites, vous savez si c'est possible de faire du change rapidement chez Gingrotts ? Si on va faire les courses du côté moldu ...

Les sourcils de Nolan se dressèrent et Farhan s'empressa de couper court à la conversation. Il voyait déjà son père s'interroger – l'interroger lui, sur elle, sa présence – et l'idée lui tordait le ventre.

-Oui, il y a moyen. Viens, je vais te montrer. A toute papa !

Il prit fermement Joséphine par le bras pour l'extirper de la boutique et entendit son père crier dans son dos :

-Rentre pour le repas ! Fiona vient te chercher ...

-Te chercher ? s'étonna Joséphine en sortant sur le Chemin de Traverse. Tu t'en vas ?

-Chez ma tante en Irlande. Je ne supporte pas Londres avant les fêtes, c'est si ... peuplé ...Tu es arrivée à temps ... Juste comme ça, ton père t'a donné le dossier ?

-Non, je l'ai volé, déclara-t-elle d'un ton badin.

-Je me disais bien ...

Il ne chercha même pas à la réprimander ou à marquer de la réprobation. Elle avait volé son père et même si Farhan savait que c'était plus par curiosité que par bonté d'âme, il lui était reconnaissant. Il s'était imaginé passer les vacances à broyer du noir, à hésiter sur la démarche à suivre, perdu à l'idée de se confronter au La Mon House Hôtel. C'était l'une des raisons qui l'avait poussé à écrire une lettre à Fiona, juste après celle qu'il avait envoyé à Joséphine. Demander l'asile pour éviter la foule. Avoir un pied à Belfast où cas où il trouverait le courage. Mais le dossier changeait la donne et éclaircissait son horizon. Alors bonté d'âme ou pas, Joséphine en devenait son héroïne.

-Merci, finit-il par lâcher quand ils passèrent le Chaudron Baveur après que Joséphine ait changé ses gallions en livres.

Elle lui jeta un bref regard, presque suspicieux.

-Pourquoi ?

-Pour le dossier. Et ... pour les magasins. Tu as raison, je n'aurais pas supporté d'attendre chez moi.

Un faible sourire retroussa ses lèvres. Le soleil commençait à se lever sur Londres et les lampadaires Charing Cross Road clignotaient pour s'éteindre enfin. Demeurèrent néanmoins les lumières de noël installées sur les devantures, les fils électriques et qui continuaient de flamboyer dans le semi-obscurité. Les tas de neiges s'étaient transformées en bloc de glace poussés contre les bâtiments pour dégager les trottoirs mais Farhan sentit tout de même ses orteils geler dès ses premiers pas. Il nicha son nez dans son écharpe aux couleurs de Gryffondor.

-Tu as des cadeaux de noël à aller chercher, c'est ça ?

-Pour ma grande sœur, confirma Joséphine en hochant la tête. Elle a géré pour les parents, je peux au moins la remercier comme ça ... Il y aurait une bijouterie dans le coin ?

-Tu n'achètes rien pour Bérénice ?

Les lèvres de Joséphine se tordirent et Farhan s'en voulut momentanément d'avoir entrainé la conversation sur un sujet aussi brûlant. Il ne voyait pas la jeune fille pardonner si facilement à sa jeune sœur d'avoir osé mettre le nez dans ce qu'elle avait de plus intime. Elle ne manqua pas par ailleurs pour faire ironiquement remarquer :

-Je pense que tu dois savoir qu'elle a déjà pris son cadeau de noël. Tu ne crois pas ?

Il sentit bien à son ton coupant que ce n'était pas la peine d'insister sur le sujet. Intimidé, Farhan préféra baisser la tête et se diriger sur la route. La capitale anglaise n'était pas particulièrement plus dégagée que le Chemin de Traverse, mais au moins il connaissait quelques petites ruelles pour échapper à la foule et guida Joséphine dans certaines d'entre elle pour se retrouver dans Covent Garden. Quitte à subir le peuple, le froid et les magasins, autant le faire dans un quartier plutôt agréable. L'aube blanche illuminait les vieilles pierres et les lampions tendus au-dessus de leur tête vacillaient tranquillement au gré du vent. Farhan remarqua rapidement que Joséphine ralentissait très souvent et il finit par s'arrêter au milieu du passage alors qu'elle dévorait l'opéra du regard. Elle en profita même pour lire avec attention le panneau touristique.

-Attends, première visite de Londres ? devina-t-il.

-Je ne suis pas beaucoup sortie de Cornouailles, avoua Joséphine en détachant son regard du texte explicatif. On va tous les ans à Brighton parce que ma grand-mère a une magnifique villa sur la côte, mais c'est tout ...

-Tu habites en Cornouailles ? Avec les lutins ?

-Hé ! (Elle pointa un index menaçant sur lui). Ne fais pas l'analogie entre moi et les lutins ! On cohabite en Cornouailles mais je hais ces petites créatures diaboliques !

Farhan laissa échapper un petit rire et reprit sa marche en avant, Joséphine cette fois à ses côtés, une main dans la poche et l'autre souplement posée sur la lanière son sac.

-Je m'en garderais bien. Moi je sais que tu es un hippogriffe.

-Ah, ah, fit mine de s'esclaffer Joséphine levant les yeux au ciel. Et toi tu es quoi ? Attends, je vais deviner ! J'ai assez trainé avec Charlie pour connaître deux ou trois choses ... Un demiguise ? Le truc qui ressemble à un singe, hyper clairvoyant et qui devient invisible ?

Farhan cligna des yeux et riva son regard sur les hauteurs de Apple Market, visible au bout de la rue. Les verrières du bâtiment étaient blanchies par les rayons du soleil, des effluves de marron braisés leur parvenaient, et la foule qui se pressaient à l'intérieur angoissa Farhan l'espace d'un instant. L'idée de devenir réellement invisible lui paraissait alors des plus délicieuses.

-Demiguise, c'est pas mal, admit Farhan avec un bref haussement d'épaule. Sans le côté singe ...

-Parce que moi j'ai l'air d'un aigle ou d'un cheval ? ironisa Joséphine. On ne parle pas d'apparence, là ... Il faut voir plus loin. Comme le demiguise ! Alors cette bijouterie ?

-Je crois qu'il y en a une plus loin ... Tu veux lui acheter quoi ?

Joséphine haussa les épaules.

-Je ne sais pas, je fais à l'instinct. Ophélia aime les bijoux de toute manière, elle a cache une tonne dans sa chambre. Dans un coffre depuis que j'ai tenté de lui en voler à douze ans.

Farhan faillit faire remarquer que c'était décidément un truc de sœur de se voler des affaires, mais Joséphine avait l'air de bonne humeur et il n'avait pas l'intention de l'entamer. Son esprit peinait déjà à s'en sortir avec l'image du dossier des Aurors qui continuait de le hanter ; essuyer la tempête, c'était de loin au-dessus de ses forces. Une bijouterie fut visible au coin de la rue et Joséphine y entra la première. Farhan faillit grimacer devant le luxe et la classe affichée de ce lieu, loin de sa simplicité et du joyeux désordre qui régnait dans la boutique de son père. Là, tout était carré, les bijoux soigneusement éclairés et déposés sur des coussins de velours et de soie. Un vendeur en costume leur adressa un signe aimable de la tête et retourna conseiller un élégant monsieur qui inspectait les bagues. Même Joséphine renifla d'un air dédaigneux.

-Oh mon Dieu, souffla-t-elle, presque catastrophée. C'est horriblement ... frigide comme endroit.

Farhan s'esclaffa au terme employé, comme si la boutique était une dame hautaine à la chasteté incontestable. Elle ne s'en dirigea pas moins vers les vitrines pour les considérer avec un certain intérêt. Le tour fut rapidement fait : elle revint vers Farhan en demandant, un brin contrarié :

-Est-ce que tu m'as emmené ici parce que tu penses que j'ai des goûts de petite bourgeoise propre sur elle ?

-Euh ... Tu m'as demandé une bijouterie.

-Et est-ce qu'il n'y en aurait pas une qui ne fait pas étalage de luxe et de classitude ? Merci, j'ai déjà chez moi pour ça ...

Farhan poussa un profond soupir quand il remarqua le regard outré du vendeur et celui presque colérique du client. Avant que l'un des deux ne s'attaque à la jeune fille pour ses propos, il l'extirpa manu militari, lui arrachant un glapissement. Elle faillit même trébucher sur les marches givrées qui donnaient dans la rue et le foudroya du regard, l'air prête à lui faire payer sa rudesse.

-Quand même incroyable que tu éprouves le besoin d'avoir un journal, déplora-t-il immédiatement plutôt que de la laisser parler. Avec le peu de filtre que tu as ...

-Hé ! (Elle lui tapa sur les doigts de la main qui tenait son bras et il la lâcha précipitamment). Tu sous-estimes ma capacité à souffrir en silence !

-Non, je la crois inexistante.

-Mais qu'est-ce que t'en sais ? rétorqua-t-elle vertement. N'essaie pas de me faire croire que tu me connais, O'Neil. On s'est adressé la parole pour la première fois il y a quelques semaines ...

Farhan ne répondit rien, tout occupé qu'il était à ne laisser paraître aucun trouble. De toute manière, Joséphine se fichait de sa réaction : elle avait rejeté ses cheveux en arrière et avait repris sa marche en avant dans la rue. Un peu sonné, Farhan la regarda prendre quelques mètres d'avance, l'observant comme il avait pu l'observer pendant ses jeunes années. Pourtant si la scène était la même, les émotions étaient des plus différentes. Son cœur ne battait plus la chamade, ni sa poitrine réduite à une cage étouffante, ou sa langue de plomb dans sa bouche. Tout cela avait été réduit en centre quelques semaines plus tôt, lorsqu'elle avait pour la première fois fait intentionnellement exploser son chaudron. Non, c'était beaucoup plus au niveau de l'esprit que tout se passait à présent. La plupart du temps, il ne la comprenait pas. C'était un comportement étrange pour lui qui avait été élevé sous le signe de la bienveillance. En revanche, parfois pendant de brèves secondes, il avait l'impression d'entrapercevoir la lumière qui l'éclairait, la rendait transparente, humaine et enfin compréhensible. Quelque chose qui ne l'obligeait pas à tout justifier d'un « c'est Joséphine ». La première fois qu'il avait eu cette sensation, c'était lorsqu'il l'avait trouvée dans les serres, couverte de larme et de mascara. Vulnérable, Joséphine s'était fendue et enfin il avait eu l'impression de lire à travers elle – parce qu'il avait toutes les cartes, sa rupture avec Charlie et surtout sa cause. C'était peut-être ça que cachait Joséphine dans son journal. Les cartes pour la comprendre.

-Oh ! C'est mieux, ça !

La voix enthousiaste l'arracha à ses réflexions et il vit la jeune fille plantée devant une devanture faite de boiserie et de décoration de noël plutôt vintage. La boutique ressemblait plus à un antiquaire qu'à une bijouterie, mais Joséphine y entra sans réfléchir, les yeux étincelants. Farhan la suivit, presque blasé. Elle aime les mystères ... elle veut avoir l'impression de chercher un trésor. L'intérieur lui fit meilleur effet que celui de la précédente boutique : tout semblait de bric et de broc, sentait la poussière et les vieilles choses – et c'était une odeur plus rassurante que l'espace aseptisé de la bijouterie. Joséphine s'était immédiatement mise à fouiner avec ravissement dans les étagères surchargées de tas d'objet. Il y avait quelques bijoux – anciens, certains baroques et surchargés, d'autres des plus simples. Parfois des boites à musiques que certains enfants essayaient, ou des lampes vintage art-déco ou encore un meuble qui aurait eu sa place à Buckingham Palace. Avec un certain amusement, Farhan finit par comprendre que Joséphine ne connaissait pas la moitié des éléments qui existaient ici : elle se trouva intriguée par une vieille machine à écrire et joua avec cinq minutes avant d'enfin s'intéresser aux bijoux.

-Ma grand-mère Melinda avait quelque chose dans ce goût-là, apprit-t-elle à Farhan en prenant entre ses doigts un lourd collier de bronze poli.

-Celle qui habite à Brighton ?

-Ouais. Et toi, c'est ta diva de tante qui habite en Irlande ?

Il était si surpris qu'elle lui retourne la question qu'il oublia de répondre. Elle insista en le fixant du regard, la main caressant négligemment une belle tapisserie affichée près des bijoux.

-Euh ... Oui, ma tante Fiona. Elle a gardé la maison de ses parents près de Belfast, à Greenisland. C'est plus sur la côte.

-Oh ! (Farhan pensait qu'elle s'extasiait sur l'histoire, mais elle le détrompa en arrachant son bonnet de ses cheveux pour le remplacer par un chapeau à large bord entouré d'un ruban de soie et qui lui donnait des airs de grandes dames). Là, je ressemble à grand-mère Melinda ..., estima-t-elle en s'observant dans un miroir ouvragé. Et pourquoi je l'aimerais bien, la tante Fiona ?

Mais elle retient vraiment tout, s'étonna Farhan, qui se souvenait à peine avoir laissé échapper une telle phrase. Il se souvenait que Maya avait décrit les Serdaigle comme le royaume des ragots où Joséphine était leur reine, il ne devrait pas être surpris qu'elle retienne les détails les plus anodins. Mais le détail le concernait lui.

-Reste déjeuner, tu comprendras je pense.

L'invitation le fit rougir – mais ça pouvait parfaitement être du fait de la chaleur étouffante qu'il faisait à l'intérieur. Joséphine avait par ailleurs ouvert sa cape pour révéler sa robe bordeaux et gardait une main leste sur le chapeau. Un léger sourire s'esquissa sur ses lèvres et elle ménagea son suspens quelques secondes.

-C'est d'accord. Ça mange quoi un Irlandais ?

-Pas différemment d'un Anglais.

-Alors c'est quoi la différence ?

-Ce qu'on boit.

Cette fois, Joséphine éclata de rire et arracha le chapeau de sa tête pour le remettre à sa place. Ses cheveux chargés d'électricité statique s'élevèrent presque magiquement autour de son visage.

-Ça, je t'avoue que ça m'intéresse ! Mais je pensais que les arabes ne buvaient pas ...

-Les musulmans, rectifia Farhan, désespéré.

-Ce n'est pas pareil ?

-Non. Les arabes c'est un peuple. L'islam, c'est la religion. Maya et moi sommes arabes ; elle est musulmane et moi pas. Enfin j'aurais dû l'être mais je ne suis pas pratiquant.

Joséphine hocha longuement la tête, l'air contente d'avoir saisi la nuance. Sa bonne volonté radoucit quelque peu Farhan. Elle n'était pas parfaite mais elle au moins essayait de comprendre. C'était déjà plus que beaucoup. Il se souvenait avoir tenté d'expliquer toutes les nuances à Alice, son ancienne petite-amie, mais celle-ci avait persisté à prendre des raccourcis qui l'avait crispé.

Il la sentait prête à continuer son interrogatoire, poussée par la curiosité mais elle fut coupée nette dans son élan. Elle se figea face au présentoir à bijou, si brusquement que Farhan y jeta un coup d'œil, un peu surpris. C'était un étalage de camée, des broches ou des pendentifs, aux couleurs poudrés douces et à la nacre étincelante. Celui avait visiblement attiré l'œil de Joséphine était de couleur azur, très douce et représentait trois femmes à la mode grecque délicatement ciselées sur la nacre, si finement que leurs voiles semblaient flotter autour de leurs jambes. Elles dansaient et couronnaient la femme centrale de gerbes de fleurs.

-Ça représente quoi ? demanda Joséphine, fascinée.

-Les trois Grâces, répondit à sa place une vendeuse d'un air affable. Les déesses du charme, de la beauté et de la créativité ... Le symbole de la vie à croquer à pleine dents ... Tenez.

Elle prit le camée entre ses mains, découvrant une chaine d'argent vieilli aux fins anneaux. Dans le dos des grâces était gravé les mots « CARPE DIEM » d'une élégante et désuète écriture.

-Vivre l'instant présent, traduisit Farhan, à la grande satisfaction de la vendeuse.

-On a appris son latin, apprécia-t-elle. Je l'ai trouvé dans une brocante la semaine dernière, je peux vous le faire à ...

-Je le prends, décréta Joséphine d'un ton sans appel.

Et il était évident que ce ne serait pas pour sa sœur, constata Farhan, amusé. Il s'en fallut de peu pour qu'elle ne l'arrache des mains de la pauvre vendeuse ; heureusement, celle-lui le lui tendit avant, ravie.

-Parfait, je vais vous chercher un paquet ...

-N'oublie pas ta sœur, souffla Farhan à l'oreille de Joséphine.

Elle s'écarta d'un pas, visiblement indisposée par la proximité. Le regard un peu hagard, elle semblait émerger d'un rêve. Avec ses cheveux ébouriffés par le bonnet et l'électricité statique et ses joues rougies par la chaleur ambiante, c'était comme si elle revenait d'une danse bucolique entre les arbres avec les trois Grâces, à fêter la vie et la créativité. Elle remplaça une mèche derrière son oreille, troublée.

-Oh ... c'est vrai. Madame, mettez-moi avec la paire de boucle d'oreille la plus moche de votre boutique !

Farhan expia un soupir de désespoir, mais la vendeuse pouffa, visiblement charmée. Plutôt que la plus laide, elle dégota sur le présentoir de charmant anneau d'or chatoyant sertie de pierres jaunes-orangées que Farhan imaginait aisément aux oreilles d'une aristocrate. Mais arrivée à la caisse, le sourire de Joséphine mourut sur ses lèvres. Elle sortit ses livres, un peu décontenancée par la nouveauté et n'eut pas besoin de l'aide de Farhan pour voir l'évidence : elle n'avait pas assez.

-Il vous en manque quinze, confirma la vendeuse, peinée. Ou disons dix, je vois que le camée vous tient à cœur et j'aime savoir mes objets entre les mains de gens qui savent les apprécier ... mais je ne peux pas descendre en-dessous ...

Joséphine pinça des lèvres et contempla les billets entre ses doigts, visiblement déchirée. La dureté dans son regard indiquait très clairement que, malgré l'égoïsme dont elle était targuée, c'était au camée qu'elle était prête à renoncer. Et la résolution eut raison de Farhan. Il plongea sa main dans sa poche et en sortit un billet de dix livres sans la moindre hésitation.

-Si c'est tout ce qu'il vous faut ...

-O'Neil ! protesta Joséphine, indignée.

-Dis juste « merci », Jo, insista Farhan d'un ton qui n'admettait aucune réplique. Ça paie la moitié du camée, alors prends ça pour la moitié d'un cadeau de noël.

-Très généreux, jeune homme, minauda la vendeuse en encaissant avant que Joséphine ne proteste davantage. Je vous fais un paquet pour les boucles d'oreille ?

-Non merci, marmonna Joséphine en lorgnant Farhan. J'ai assez eu la charité pour aujourd'hui ...

Il se contenta de lui adresser un petit sourire devant lequel ses yeux se levèrent au ciel. La vendeuse leur tendit un petit sac avec un immense sourire et ils se dépêchèrent de fuir l'ambiance étouffante de la boutique. A peine eurent-ils faits deux pas sur le trottoir que Joséphine déchiquetait déjà le petit sachet de ses ongles pour en extirper le camé. Elle le passa autour de son cou avec empressement et s'observa dans le reflet d'une vitrine. Elle n'avait pas pris le temps de dégager ses cheveux et la chaine était étirée par l'écharpe, mais Joséphine s'estima satisfaite de l'achat en souriant largement. Cette fois, le cœur de Farhan manqua un bref battement. Il l'observait depuis la première année et ce sourire comblé, simple et heureux appartenait définitivement à cette période de sa vie.

-D'accord. Merci pour la moitié de cadeau, O'Neil, claironna-t-elle, rayonnante. Je le trouve vraiment très joli ... évocateur. Poétique. Je ne sais pas, il fait ... sens, pour moi. Tu vois ?

-Le pire, c'est que je crois que oui ... Bon, tu es prête ?

-A quoi ?

Farhan sourit.

-A découvrir ce que boivent les Irlandais.

***

L'irlandais buvait du thé à la menthe, avait appris Joséphine, déçue. C'était ce que Farhan avait commandé en premier au pub irlandais où il l'avait emmené, au cœur de Covent Garden. Il fallait néanmoins admettre qu'il était alors dix heures et que même à cette heure-ci, elle n'était pas d'humeur à ingurgiter la moindre goutte d'alcool – contrairement à certain client du pub. Elle promena son regard sur l'espace, assez intriguée par son environnement. Elle n'était entrée qu'aux Trois Balais mais celui-ci était dans un style différent. Du même bois que le pub de Pré-au-Lard avec son long bar agrémenté de tabouret, l'ambiance était néanmoins marqué par la tradition celtique. Un immense triskèle était peint sur un mur, quelques drapeaux étaient plaqués fièrement aux fenêtres. Vers onze heures, Farhan la rejoignit avec deux bières, bien plus sombres et plus troubles que celles qu'elle pouvait boire aux Trois Balais. Elle en goutta une gorgée. Elle avait un arrière-goût de café qui chantait sur ses papilles.

-Merci, fit-t-elle alors que Farhan reprenait place en face d'elle. Et pour le camée aussi. Tu n'étais pas obligé mais ... oui, j'apprécie.

Farhan esquissa un petit sourire et prit une gorgée de sa bière sans sourciller. Joséphine dressa un sourcil, un peu surprise. D'un prime abord, elle aurait plutôt cru le jeune homme du genre à ne boire que du jus de citrouille. Mais aussi à dédaigner la cigarette et pourtant ... Farhan reposa sa bière et la fit lentement tourner dans son verre. Il avait appuyé sa joue contre son poing, l'air soudainement las après leur matinée à cavaler dans Convent Garden.

-C'est moi qui dois te remercier, assura-t-il avec un grand sérieux. Vraiment. Tu as volé ton père pour l'affaire ...

Joséphine esquissa un vague geste pour balayer la remarque mais Farhan riva son regard sur elle pour insister :

-Je t'ai envoyé la lettre sans y croire, j'avais juste ... je ne sais pas, comme je t'ai dit je savais que ne serait pas celle qui me répondrait « oh mon dieu je suis désolé, t'en fais pas on va trouver une solution ».

-Non, j'ai trouvé la solution, confirma Joséphine en levant son verre avec un sourire mutin. T'as raison, je suis la meilleure.

-Je n'ai pas dit ça. Mais tu ne vas pas avoir de problème ... ?

-Non, j'ai pris mes précautions. C'est une copie, l'originale est restée bien au chaud ... Et au pire ? Tant pis.

Son flegme fit froncer les sourcils de Farhan. Joséphine ne put retenir un petit sourire qu'elle cacha dans une gorgée de bière – mais le sourire était presque aussi amer que la boisson. Il n'y avait rien à sauver sans sa relation avec son père : elle n'avait pas eu le moindre scrupule à forcer son bureau. Farhan parut hésiter : il caressait son verre d'une main et jetait des petits regards furtifs. Cette fois, Joséphine laissa épanouir son sourire.

-Une petite question en tête, O'Neil ? Qu'est-ce qui se passe avec mon père pour que je me fiche de le voler ?

-Quelque chose comme ça, admit-t-il. Mais je comprendrais que tu ne veuilles pas répondre ...

L'échappatoire était appréciable. Joséphine fut tentée de la saisir, avant de réaliser que les mots se bousculer au bord de ses lèvres, fourmillaient dans ses doigts. C'était peut-être la fatigue ou l'alcool, ou le fait qu'elle demeurait touchée par le camée, mais elle s'entendit finalement répondre :

-C'est ... un peu long, comme réponse. Prépare-toi.

Elle prit une gorgée de bière pour se donner courage et d'un geste machinal, elle effleura le camé sur son sternum. Elle l'avait vu, elle l'avait voulu, c'était aussi simple que ça. Comme le carnet qu'elle avait vu chez Fleury et Bott et qui était devenu son journal intime. Joséphine apprécia les reliefs délicats sous ses doigts, presque apaisée.

-Je suis née dans une famille particulière. En soit, les Abbot ne sont pas riches, ni bourgeois. Mon grand-père est quelqu'un de très simple, sa femme était Attrapeuse chez les Pies de Montrose ...

-Sérieux ?

-Je te jure ... Elle jouait même pour l'équipe d'Ecosse, avant sa grossesse. La seule personne dans mon arbre généalogique qui aime le Quidditch ... Bref, mon père est né dans un milieu aux valeurs assez humbles. C'est l'intellect qui faisait sa gloire. C'est quelqu'un de vraiment brillant ... Contrairement à ma mère, elle c'est une vraie Sang-Pure jusqu'au bout des ongles. C'est elle qui a amené toute la fortune de la famille, c'était la petite chouchoute de son père. Elle a hérité de tout, y compris de notre maison en Cornouailles. Ça ne les a pas empêchés de s'aimer, mes parents. Jusqu'au premier enfant.

Joséphine prit une nouvelle gorgée de sa bière. Farhan écoutait, sans la fixer : parfois il regardait par la fenêtre, ou le fond de son verre, mais elle sentait qu'il était très attentif. Une manière de ne pas l'acculer.

-Sur l'éducation, ils n'étaient pas d'accord. Ma mère voulait qu'on fasse des études puis qu'on se marie. Surtout qu'on se marie, à dire vrai, qu'on devienne une femme avant de devenir ... nous ? Non, mon père voulait nous voir réussir, mais réussir scolairement. Alors pour prouver à ma mère que sa voie était la bonne, il s'est montré intransigeant avec nous. Bon, chez ma grande sœur il n'y avait pas grand-chose à aller chercher, mais Bérénice et moi ... (Elle se fendit d'un petit ricanement). Tu ne te souviens peut-être pas, mais j'étais la meilleure de la promo dans les premières années ...

-Si, affirma Farhan avec douceur. Je me souviens.

Joséphine s'efforça de ne pas paraître étonnée, mais ses interrogations moururent dans l'œuf quand il enchérit avec l'ombre d'un sourire :

-Et Tonks t'a dépassé.

-Mais tu sais pourquoi ? répliqua Joséphine, piquée au vif.

Ses doigts s'étaient crispés sur sa bière. Elle avait l'impression que toute la mauvaise énergie de l'époque revenait bouillonner dans son ventre et réduisait son monde à l'étroitesse de sa cage thoracique.

-Mon père nous poussait à donner le meilleur de nous-même. Et si tout était supportable tant que j'étais la première de la classe, ça s'est gâté. En troisième année, j'ai commencé à marquer le pas. Le niveau s'est élevé, pas mes capacités de travail. Je me reposais sur mes lauriers, j'avais commencé le Quidditch. Je préférais flâner que de travailler et de toute manière, mes résultats restaient bons. Mais pas excellent. Et l'excellence, c'était ce que visait mon père pour moi. Alors il a commencé à sévir. Au début c'était de l'inquiétude, mais c'est devenu étouffant. « Tu as un copain ? Tu es trop jeune pour ça, les études d'abord », « Qu'est-ce que tu fais au lieu de travailler ? », « Est-ce qu'il faut que je te prive de Quidditch pour qu'enfin tu retrouves ton niveau ? ».

Se rappeler les mots de son père lui plantait des aiguilles dans le cœur. La gorgée qu'elle pris fut plus longue et lui brûla la gorge.

-Ça m'a paniqué, avoua-t-elle dans un filet de voix. Je ne comprenais pas ce qui n'allait pas, alors que les années d'avant j'étais ... parfaite. Alors les disputes ont commencé. Je pensais que me voir pleurer l'attendrirait, lui ferait comprendre que j'étais à bout ... Mais il restait inflexible. Mon père avait l'impression que je gâchai mes talents et que j'allais gâcher ma vie ... ça m'a fait entrer dans une sorte de dépression, je crois. Là, mes résultats ont carrément chuté. Je me suis déconnectée de tout, persuadée qu'en effet, je gâchais ma vie, que je n'allais jamais réussir à rien en restant celle que j'étais. J'étais face à un dilemme : rester moi, ou être celle que mon père voulait que je sois. Jusqu'à ce qu'un jour je dise stop. Et en arrêtant de l'écouter de lui, j'ai juste arrêté d'écouter les autres.

Sa bière était vide quand elle acheva son explication et les prunelles sombres de Farhan était plantées sur elle, intenses. Visiblement, il mit quelques secondes à comprendre que Joséphine avait cessé de s'épancher et finit par cligner des yeux, un peu ahuri.

-Whao. C'est ... solide, comme démonstration.

Joséphine s'esclaffa doucement et passa un doigt sur le bord de son verre.

-Et oui. Et voilà comment j'ai choisi ma voie qui n'était ni celle de ma mère, ni celle de mon père et que je suis devenue le mouton noir des Abbot.

-Je vois. Ça explique pas mal de choses ...

Cette fois, le rire de Joséphine se fit légèrement amer. Elle admettait que sa relation avec son père et sa dépression de troisième année éclaircissait des brides de son comportement actuel, mais elle se refusait la plupart du temps à se justifier. Plutôt que de le faire davantage, elle darda un regard mutin sur Farhan et préféra engager la conversation sur un sujet plus léger, susceptible de lui ouvrir la poitrine oppressée.

-A toi, maintenant. Puisque tu en as parlé, est-ce qu'il y a quelque chose de suspect avec la charmante Nymphadora Tonks ? Oh, allez ! insista-t-elle quand Farhan blêmit, l'air brusquement catastrophé. J'ai répondu honnêtement, moi ! Et je n'avais jamais raconté ça à Charlie, en plus ...

-Vraiment ? s'étonna Farhan.

Joséphine haussa les épaules avec indifférence. Charlie n'avait jamais demandé. Charlie s'était contenté de la prendre telle qu'elle était, à dompter la tempête sans comprendre d'où venaient les vents. Elle posa son menton sur ses doigts noués, un léger sourire aux lèvres, le regard planté sur Farhan qui semblait s'enfoncer de plus en plus dans sa chaise. Il jeta un coup d'œil à leurs verres vides et marmonna :

-Je pense que ça appelle à une autre bière ...

-Oh, j'approuve. Mais je veux quand même une réponse quand tu reviendras.

-C'est ça, grommela Farhan en se levant.

Quand il revint cinq secondes plus tard, il avait déjà largement entamé son verre, assez pour que Joséphine dresse un sourcil suggestif. Il ignora sa remarque muette et prit une nouvelle gorgée, comme pour noyer sa gêne.

-Très bien, céda-t-il de mauvaise grâce. Tonks et moi, on s'est très vite lié. Je ne sais pas, on a les mêmes valeurs, on est enfant unique, on a vite trouvé des points communs ... Mais c'est juste resté une très bonne amie. Je suis même sortie avec sa meilleure amie, Alice Miller, pour te dire à quel point je ne la voyais pas ...

-Mais elle t'a vu.

C'était évident et elle ne masqua pas son ravissement. L'embarras de Farhan, la façon dont il semblait chercher son courage dans son verre déjà à moitié vidé, comment Tonks s'accrochait à ses pas ... Il pencha doucement la tête sur son épaule. Un étrange sourire s'était dessiné sur ses lèvres et Joséphine se demanda si, intérieurement, Farhan n'avait pas été un peu flatté par l'intérêt de Tonks.

-Apparemment. Mais elle a attendu que je rompe avec Alice pour me le dire. Elle m'a intercepté à la fin d'un cours de Métamorphose, pour être sûre qu'elle ne serait pas là et ... Je ne pense même pas qu'elle avait des sentiments, c'est juste que dans une amitié fille-garçon, on finit tous par se poser la question. Et elle se l'est posée. Elle voulait savoir alors ... Je venais de rompre, j'étais paumé, alors ... je l'ai laissé m'embrasser.

L'image qui venait à l'esprit de Joséphine était absolument distrayante et elle planta ses dents dans sa lèvre inférieure pour retenir son hilarité.

-Et elle embrasse si mal que ça ?

Elle reçut un coup de pied sous la table et ouvrit de grands yeux outrés, vite démentis par un éclat de rire. Farhan l'observa en secouant la tête, comme il le faisait souvent pour lui faire comprendre qu'elle le dépassait complètement.

-Ce n'est pas ça, assura Farhan d'un ton ferme. J'avais ... juste l'impression d'embrasser un membre de ma famille. Tonks, c'était devenu comme ma sœur, ou aussi proche qu'elle pouvait l'être. Ça lui a fait le même effet ... D'ailleurs on a vite dépassé ça, on est revenu à nos rapports normaux. Si tu m'avais demandé maintenant combien de fille j'ai embrassé, je ne suis pas sûr que j'aurais pensé à Tonks tellement ça ne signifie rien ...

-Et alors ? Combien de fille t'a embrassé, en comptant Tonks ?

Farhan leva les yeux au ciel devant la question et l'air malicieux de Joséphine.

-Deux.

-Alice et Tonks, compta-t-elle avec un sourire carnassier. Deux Poufsouffle ... il s'agirait de diversifier, Farhan.

La lumière tamisée jouait peut-être, mais Joséphine avait la nette impression que Farhan rougissait. C'était très difficile à évaluer avec son teint olivâtre et sa capacité certaine à toujours garder une expression neutre. Elle l'avait remarqué pendant qu'elle racontait l'histoire avec son père : Farhan réagissait peu. Il écoutait bien, c'était un fait : pas de jugement, pas de curiosité mal placée, pas de surréaction. Parfois, elle avait juste la sensation qu'il se mettait dans une bulle où juste le son passait pour se couper du reste et elle n'arrivait pas à savoir si elle appréciait ou non. Il porta de nouveau son verre à ses lèvres, mais non sans lancer avant :

-Et toi ? En comptant Charlie, bien sûr ...

Joséphine aurait dû s'attendre au retour de bâton et pourtant la question provoqua une tension au niveau de ses épaules. Sous les manches de sa robe, elle sentit la chair de poule hérisser ses bras et les frotta pour la calmer.

-J'allais compter Charlie, c'est le seul important, déclara-t-elle d'un ton qu'elle espérait neutre. Mais deux aussi.

-Ouh. Qui ?

Qui. La question était légitime aussi, badine, anodine mais encore une fois plongea le corps de Joséphine trois ans en arrière, en pleine tempête. Pourtant, elle eut un petit sourire. C'était idiot de sourire ainsi, mais elle ne put l'empêcher de fleurir sur ses lèvres.

-Morgan. Un ancien membre de l'équipe de Quidditch. Mais c'était plus un flirt ... Il était plus âgé, on ne voulait pas les mêmes choses ...

-Il t'a brisé le cœur ?

Il y avait une pointe de dérision dans la voix de Farhan, légère, de quoi dédramatiser la conversation mais Joséphine sentait bien la sollicitude dans son regard. De quoi refermer complètement la poitrine de la jeune fille jusqu'à ce que son cœur étouffe dans sa cage. Elle lui adressa un sourire crispé pour lui faire comprendre de ne pas insister.

-Disons cela. Mais dis-moi, tant qu'on parle de ça ... Est-ce que Charlie t'a tout dit ?

C'était terrible, mais elle préférait parler de Charlie, de la douleur de sa rupture plutôt que de s'attarder sur Morgan. Morgan, c'était un aspect humiliant de sa vie qu'elle préférait oublier. A l'instar de Farhan avec Tonks, elle le comptait à peine dans sa liste. Charlie était encore frai dans son esprit, et quelques interrogations demeuraient. Elle avait beau chercher, Farhan était peut-être le seul à avoir les réponses. Il le prouva d'ailleurs en se figea brusquement, son verre à mi-hauteur. Il le reposa lentement, un peu pris de court par la question.

-Hum ... le principal ..., concéda-t-il, prudent. Sans entrer dans les détails ...

-Et tu en penses quoi, toi ? Sincèrement, sans langue de bois.

Mais dire le fond de sa pensée ne paraissait ce qu'il avait de plus intuitif pour Farhan, dont le visage se ferma. Joséphine retint son soupir coincé entre ses dents. Il entrait de nouveau dans sa bulle, elle le voyait à la façon dont son regard fixait un point – sur son visage, certes, mais elle avait surtout l'impression qu'il ne la voyait pas. Elle aurait pu s'énerver pour lui arracher une réponse, mais elle sentait que ce n'était pas la bonne méthode avec Farhan O'Neil. Non, si elle voulait qu'il se livre, il allait falloir qu'elle se livre elle. Et heureusement, elle comprenait maintenant que tout ce qui entrait dans la tête du Gryffondor était un secret bien gardé.

-T'inquiète, je n'irais pas le répéter, promit-t-elle. Bon, juste à mon journal mais je me suis assurée que Berry n'y aurait plus accès. (Farhan laissa échapper un petit rire encourageant) Je ... je veux juste avoir le fin mot de l'histoire. J'ai l'impression que je ne l'ai jamais eu et que je ne l'aurais jamais. Charlie n'avait pas l'air de comprendre ce qui lui arrivait et je ne suis pas sûre que ce soit plus clair maintenant. Toi, tu vois ça de l'extérieur. Et tu es un demiguise. Tu es clairvoyant.

La mention du demiguise fit trembler un sourire sur les lèvres de Farhan. Plus Joséphine y songeait, plus la comparaison se tenait. Une créature très douce, dans sa bulle, invisible et clairvoyant. Maya correspondait aussi à la description, l'invisibilité en moins. Non, Maya brillait, chatoyait de mille feux. Farhan se fendait dans les ombres et privé d'existence, il percevait tout. Il fit tourner son verre entre ses longs doigts, indécis, pour enfin daigner ouvrir la bouche avec une grande prudence :

-Si tu veux mon avis ... Pour moi les pépins physique de Charlie, c'est complètement l'arbre qui cache la forêt. Vous vous êtes tous les deux concentrés là-dessus, mais de mon point de vue c'était clairement un prétexte. Vous étiez dans une mauvaise posture, tous les deux. Il voulait te sauver alors que tu n'es pas une demoiselle en détresse. Tu l'as dit toi-même, tu as choisi ta voie et ce n'est pas celle que les autres ont tracé pour toi, Charlie ne l'a pas compris ... Toi tu t'es investie dans l'exploration alors qu'il est lui-même un explorateur et que Charlie appartient au monde. C'est une personne qui donne trop pour appartenir qu'à une seule personne ... Je connais Charlie. Et malgré ce que tu penses, je commence à te cerner. Il y avait incompatibilité, c'est aussi simple que ça. Ce n'est pas plus de ta faute que de la sienne. C'est vraiment de la faute de personne. Ça devait arriver, c'est tout. Si c'est ce que tu cherches à savoir ... il n'y absolument rien qui cloche chez toi.

La conclusion était dite d'un ton très doux, à peine plus haute qu'un murmure et sans comprendre, Joséphine sentit les larmes lui monter aux yeux. Les effets de la seconde bière, ou simplement les mots qu'elle espérait secrètement entendre, elle ne saurait le dire. Elle les chassa d'un battement de paupières et hocha la tête, pour accepter cette conclusion comme celle qui clôturait définitivement son histoire avec Charlie. Il n'y avait pas de faute. Juste incompatibilité.

Farhan savait écouter. C'était indéniable, et ce qu'il ressortait de ses écoutes étaient incroyablement juste. Les larmes refoulées, Joséphine se surprit à sourire. Elle leva son verre, comme pour poster un toast à Farhan.

-Oui ... c'est vrai que tu commences à me cerner. 

*** 

ALOOOOOORS? 

J'avoue que j'ai tellement aimé écrire ce chapitre que j'ai trop hâte d'avoir vos réactions !

On se retrouve dans une semaine pour O&P (et encore merci pour tous vos commentaires du dernier chapitre, vraiment vous êtes tops <3)

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