Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Chapitre 11 : Rien ne se perd, rien ne se crée ...

Et voilà le chapitre suivant promis ! Avec une petite gourmandise à un moment que je sais que vous allez tous.tes apprécier ... on se retrouve en bas pour faire un point ! 

***

 ! WARNING !

Même chose qu'au dernier chapitre : Certains propos dans le chapitre (Au début) peuvent heurter la communauté LGBT+. C'est fait dans un soucis de réalisme et en aucun cas ça ne traduit ma profonde pensée. Je vous demande pardon d'avance pour les heurts occasionnés. 

*** 

L'inconvénient de la pudeur, c'est qu'elle se jette sans cesse dans le mensonge ... 

- Stendhal. 

***

Chapitre 11 : Rien ne se perd, rien ne se crée.

Jeudi 11 octobre 1990

Clap clip clap, petite pluie l'avril tombe du ciel en jolis diamants ... Clap clip [tâche] pluie d'avril, ta mélodie est un enchan [tâche] antement , enchantement ...

Clap clip clap, quand le ciel se [tâche] refrain met du bleu dans le cœur ... Clap clip clap, giboulée d'étoiles peint l'arc-en-ciel aux couleurs [tâche]

***

Bérénice Abbot avait toujours apprécié se lever aux aurores. Elle était la seule de sa fratrie à apprécier le matin : Ophélia trainait très souvent au lit et Joséphine était une créature de la nuit qui veillait tard pour contempler les étoiles. Mais pour Bérénice, le plus beau spectacle c'était celui du soleil qui se levait, rendait au monde ses véritables couleurs et faisait jouer des ombres et lumières aussi incroyables que fascinantes sur son univers. Et du haut de la Tour de Serdaigle, le spectacle sur les montagnes était d'une magnificence à couper le souffle. Elle ne s'en priverait pour rien au monde ...

Pelotonnée dans sa robe de chambre sur le rebord de la fenêtre de sa chambre, elle étouffa un bâillement quand le cercle solaire émergea enfin de l'horizon. Il fallait qu'elle profite de ces derniers instants : les jours allaient raccourcir et bientôt elle serait en cours avant l'aube. Déjà ses camarades de dortoirs s'agitaient dans leur lit et le réveil de Joan sonna d'un son si strident qu'il réveilla l'ensemble des filles. Un bruit étouffé derrière les rideaux de Maya indiqua que son sursaut l'avait projetée contre sa tête de lit et sa chatte noire de malheur émergea du baldaquin avec un miaulement indigné. Gracieuse, elle fit quelques pas en direction de Bérénice qui tapota ses genoux jusqu'à ce que Bastet y saute et s'y love, apportant avec elle sa chaleur et les vibrations rassurantes d'un ronronnement.

-Joan, je hais ton réveil ! beugla Vivian depuis son lit.

-Boh, au moins il nous réveille toutes, tempéra Maya en émergeant du sien, les yeux gorgés de sommeil. Enfin, toute sauf une.

A l'aveugle, elle adressa un signe de main à Bérénice et tira ses rideaux pour découvrir son lit complétement défait. Ses boucles noires tombaient en cascades resserrées sur ses épaules et son visage. Bérénice trouvait ce phénomène impressionnant : à présent, elle était incapable de songer qu'elle ressemblait si fort à Farhan O'Neil. Et puis après sa douche, elle dompterait sa chevelure en chignon stricte avant de se vêtir de son hijab qui masquerait le plus grand marqueur de la féminité : les cheveux. Et une fois la féminité écartée des traits, la lumière était faite sur l'évidence.

Profitant d'être la première à poser le pied à terre, Maya rassembla ses affaires de toilettes et ses vêtements avant de jeter sa serviette sur son épaule. Elle pouffa en découvrant Bastet sur les genoux d'une Bérénice en train de lui gratter les oreilles.

-Dis-le que tu veux piquer mon chat !

-C'est une chatte, rectifia Bérénice avec un sourire. Et elle serait merveilleuse si elle n'essayait pas de tout le temps attaquer Magnus chaque fois qu'il entre dans la chambre...

-Qu'il est grincheux ton hibou, aussi ! Je prends la douche !

-Ne prends pas toute l'eau chaude, marmonna Vivian.

-Et coiffe-toi dehors ! Tu passes des plombes à faire ton chignon ... De si belles boucles, pff ...

Les yeux café de Maya roulèrent dans leurs orbites mais elle s'abstint de tout commentaire en s'engouffrant dans la salle de bain. Bérénice, elle, fusilla du regard Joan qui venait de basculer ses jambes parfaites et fuselée sur le sol pour s'étirer de tout son corps gracile. Ses camarades de dortoir s'étaient voulues bienveillantes avec la décision de Maya de porter le voile et s'étaient toujours intéressées à ses motivations religieuses concernant son régime alimentaire par exemple, mais de temps à autre, une remarque fuitait, marquant le fossé culturel entre elles et Maya. Mais ce n'était pas la religion au centre du débat : selon elles, il s'agissait d'abord et avant tout d'une sorte d'excentricité moldue à laquelle les sorciers étaient par chance imperméable. Si pour les Anglais, tous les arabes se ressemblaient, il ne faisait pas de toute que pour les sorciers, tous les moldus étaient également mis dans le même sac.

Bérénice observa Joan, déjà occupée à préparer soigneusement quelle sorte de jupe elle allait porter et quel maquillage convenait le mieux pour le temps radieux qui s'annonçait. Parfois, Bérénice songeait qu'elle devrait prendre des cours de maquillage avec sa sœur. Joan en mettait toujours trop, ou de façon déséquilibrée : rien n'était harmonieux. Mais Joséphine avait cette finesse-là, cet œil qui lui permettait d'effacer ses imperfections et de se sublimer sans trop en faire. Bérénice ne l'aurait avoué pour rien au monde, mais c'était une capacité qu'elle enviait à sa sœur. C'était futile. Ce n'était pas le visage qu'il fallait travailler, pas son corps mais seulement l'esprit qui importait. Une philosophie qu'elle avait en commun avec Maya.

Celle-ci finit par sortir de la douche, en uniforme mais les cheveux complétement lâchés dans son dos et Joan s'engouffra dans la salle de bain sans demander l'avis à quiconque. Vivian était en train de tambouriner à la porte, furieuse et Maya poussa un profond soupir.

-Je te jure ces gamines ...

Elle fouilla sa trousse de toilette pour en sortir une brosse et une boite d'épingle à cheveux puis s'appliquer à plaquer ses boucles contre sa tête. L'opération lui arracha une grimace qui fit rire Bérénice.

-Que la torture matinale commence !

Maya, serrant un élastique entre ses dents, ne put lui répondre mais la fusilla du regard. Elle réussit sans trop de cris à attacher sa masse de cheveux en une queue-de-cheval et coinça ses mèches une à une dans un chignon. Bérénice la laissa à son rituel, trop occupée à regarder le paysage en jouissant de la chaleur de Bastet. Elle observa sa meilleure amie à la dérobée et retint un grognement de frustration lorsque le visage de Farhan O'Neil se superposa à celui de Maya. Elle n'avait pas la volonté infernale de Joséphine, mais elle avouait que cette ressemblance l'intriguait. Ça lui avait sauté aux yeux sur les gradins : elle avait carrément dévisagé ce garçon aux cheveux noirs et à la mâchoire contractée d'être forcé de parler de son identité. Bérénice avait une excellente mémoire visuelle. C'était peut-être aussi pour cela qu'elle était si douée aux échecs : visualiser, prophétiser, c'était ce qu'elle faisait de mieux. Alors dès qu'elle fermait les yeux, c'était très facile de rappeler à elle les traits communs de Maya et de Farhan et de prospecter sur la raison de cette ressemblance. Et un lien familial était en haut de sa liste.

Mais comment le prouver ?

-Maya ?

-Hum ?

Maya avait une épingle dans la bouche mais incita Bérénice à poursuivre d'un geste de la tête. La jeune fille passa le doigt sur l'oreille souple de la chatte sur ses genoux et évita le regard de son amie.

-Tu n'as jamais ... songé à demander ton dossier d'adoption ?

Maya en recracha son épingle. Elle adressa un regard à Bérénice un regard chargé de choc et d'incompréhension avant d'observer la chambre pour être certaine que personne ne les avait entendues.

-Mais Bérénice !

Bérénice s'en voulut pour son manque de tact. Maya était très prude sur la question : elle devait être l'unique au courant de son adoption. Même si Vivian s'égosillait toujours devant la porte et que leur dernière camarade Julia peinait à sortir de son lit, leur simple présence empêchait toute conversation sur le sujet. Sans cesser de caresser Bastet, Bérénice leva une main en signe de résignation.

-D'accord ... Pardon.

Maya continua de la fixer de biais, à la fois perplexe et contrariée. Sans arrêter de la lorgner, elle ramassa son épingle et la glissa pour fixer une dernière mèche de cheveux pour parfaire son chignon. Elle sortit un foulard bleu marine de sa penderie et sur le miroir de la porte, Bérénice vit ce que Maya tentait de cacher, soit avec sa tignasse soit avec son voile : une large cicatrice, comme des griffures irrégulières qui lui entaillait le côté gauche de la gorge jusque sa clavicule. Elle capta également le geste de son amie, cette caresse sur les marques, le regard songeur dans le miroir.

Ces cicatrices, c'était le seul indice qui lui restait de son monde d'avant.

Alors d'un geste leste, Maya les fit disparaître sous son hijab. A travers le miroir où on distinguait lointainement Bérénice et Bastet lui l'observait, elle leur adressa un sourire. Elle pointa deux doigts sur le miroir d'un air mutin.

-Je vous vois, toutes les deux.

-Et tu ne réponds pas à notre question. Pourquoi ?

Pour attendrir Maya, Bérénice agrippa Bastet qui lâcha un miaulement et la ramena à côté de son visage avec une moue qu'elle espérait adorable et irrésistible. Les lèvres de Maya se tordirent et son regard se figea sur son reflet. D'un geste mécanique, elle ajusta son foulard sur son front avant de l'attacher sur sous son menton.

-Parce que ... ça n'a pas d'importance, tu comprends ? Bérénice, ça m'a assez chamboulé d'apprendre que j'avais été adoptée ... que j'étais une sorcière, que j'aurais pour toujours ce petit quelque chose de magique qui me séparerait de mes parents ... Je n'ai pas envie de creuser d'autres fractures.

Elle ajusta son hijab sur ses épaules. Après quelques secondes de flottement, elle semblait à présent plus sereine, déterminée, en accord total avec les mots qui sortaient de sa bouche.

-Qu'est-ce que ça va m'apprendre, sérieusement ? Que mes géniteurs n'ont pas voulu de moi ? Je n'ai pas envie de m'infliger ça. Ni à moi, ni à mes parents. Je suis la personne que je suis devenue : pas celle que je suis née. (Elle fronça les sourcils et chercha le regard de Bérénice dans le miroir). Elle est grammaticalement correcte ma phrase ?

Bérénice la rassura d'un sourire mais intérieurement, son cerveau surchauffait. C'était bien ce qu'elle songeait : Maya n'avait pas envie de creuser, de remettre sa vie, son identité en cause. C'était une décision qui se respectait. Elle était si épanouie dans sa vie : quelles raisons avait-elle de bouleverser son monde ? Un frère, ça pourrait être une excellente raison, songea malgré tout Bérénice. Ou un cousin. Peu importait : une famille qu'elle méritait de connaitre. Mais comment confirmer cette intuition qu'elle avait eue avec Joséphine ? Devant le refus de Maya de consulter son dossier d'adoption, Bérénice commença à envisager directement l'analyse de cheveux. Ça lui avait paru saugrenu quand sa sœur l'avait suggéré, mais à présent elle songeait que c'était peut-être le moyen le plus sûr et le plus direct de le prouver.

Mais aurait-elle la force de bouleverser le monde de Maya ? De faire entrer la tempête dans l'univers équilibré et serein de la jeune fille ?

Bérénice caressa le dos de Bastet, tiraillée. Peut-être laisserait-elle faire Joséphine, pour cet aspect. Elle n'avait jamais pu prendre des décisions, malgré sa volonté, sa détermination. Elle voyait beaucoup trop les points négatifs de chaque choix. Joséphine avait moins de scrupule. Et si les choses se déroulaient mal, elle en prendrait le blâme. Mais là encore, son plan comportait de failles. Maya était son roc. Elle ne voulait pas risquer de la voir sombrer. Après avoir grandi dans une famille où chacun avait son égo, son caractère, ses sœurs qui prenaient une place monstre, grignotaient la sienne avec des cris, des disputes, des mariages, arriver à Poudlard pour découvrir cette fille remarquablement dénuée d'intérêt, calme et qui ne cherchait pas à l'écraser mais à l'écouter avait été un véritable bonheur. Contrairement à Ophélia, elle avait attendu avec impatience chaque été de pouvoir reprendre le train et échapper à la lourdeur de l'ambiance familiale. Joséphine et elle pensaient sans doute qu'elle était la favorite, que tout lui était dû, que sa vie dans leur demeure de Bodmin au cœur de la Cornouaille était d'une facilité déconcertante mais c'était tout le contraire. Comment se sentir à l'aise, sereine, en sécurité, dans une maison où l'une donnait de grandes leçons de morales alors que son but de vie était très clairement le mariage et l'autre s'amusait à faire exploser bombe sur bombe au sein du foyer ? Elle était peut-être un peu sévère avec Joséphine : elle savait pertinemment que si sa grande sœur était si vindicative, c'était qu'au fond elle souffrait aussi. Mais ça ne changeait rien au fait que Joséphine ne voyait que sa propre douleur. Elle était incapable de la discerner chez les autres.

Malheureusement, il y avait une vérité universelle. Malgré son caractère obstiné et colérique, Joséphine était peut-être la personne avec laquelle Bérénice réfléchissait le mieux.

Alors elle attendit que Vivian puis Julia se douchent avant de prendre la sienne, coiffer sommairement ses longs cheveux châtains en une queue-de-cheval plus pratique que jolie et n'attendit pas que Maya ait fini de se préparer pour se dépêcher dans la chambre des septième année. La porte était entravaillée et le rire caractéristique d'un groupe de fille qui crispa Bérénice. Elle s'était toujours sentie mal à l'aise dans ce genre de bande. Le dortoir de Joséphine s'était constituée ainsi avec cinq filles très soudées, qui riaient à la bibliothèque et trempaient ses pieds dans le lac les beaux jours arrivés. A côté, sa sœur avait été incapable de s'intégrer. Sans doute ne l'avait-elle jamais souhaité.

Bérénice finit par frapper doucement au battant en jetant un coup d'œil à l'intérieur. Elle fit un véritable bond quand dans la seconde d'après, la porte s'ouvrit à la volée sur le visage souriant d'Elisa, la préfète-en-cheffe.

-Bérénice ! En quoi je peux t'aider ?

-Je cherche ma sœur. Elle est là ou elle est déjà descendue ?

Elisa passa une main dans ses boucles blondes et jeta un coup d'œil à l'intérieur de sa chambre. Derrière elle, une brune était allongée sur son lit, un magasine ouvert au-dessus de sa tête pendant qu'une troisième mettait du vernis sur ses ongles.

-Joséphine ? Je ne pense pas l'avoir vue ce matin ... hé les filles, vous avez vu Joséphine ?

-Pas depuis hier soir ! répondit la brune en tournant une page.

-Et tant mieux !

Bérénice serra les dents et même Elisa parut gênée. Elle fit un geste désinvolte de la main.

-Laisse tomber. Elle doit déjà être au petit-déjeuner ...

-Non mais Zaza, je pense qu'elle n'est pas rentrée hier soir ! indiqua une quatrième voix depuis l'intérieur. En tout cas, son lit est encore fait ...

Elisa soupira avant de hausser les épaules à l'adresse d'une Bérénice qui s'était figée.

-Ta sœur, je te jure ... Désolée de ne pas avoir pu t'aider.

-Pas grave, lâcha Bérénice, l'esprit déjà ailleurs. Merci ...

La préfète-en-cheffe sourit et referma la porte. De l'autre côté du battant, les éclats de rire semblaient percer le battant de bois ouvragé en forme d'arcade et finement ouvragée. Bérénice fixa l'arbre qui avait sculptée dans la porte, suivant les branches en espérant trouver sa sœur au bout de l'une d'entre elles. Sur la leur, c'étaient des astres. Sur celle des première années, c'était la réplique des montagnes majestueuses des Highlands. Quelque part dans sa poitrine, son cœur avait manqué un battement.

Sa sœur avait découché. Et peu importe le pourquoi du comment, c'était une mauvaise nouvelle pour elle.

***

-Je crois que j'ai eu tort ...

Charlie piqua dans sa saucisse mais il ne mangeait rien. Même Farhan en avait plus dans l'estomac avec son thé à la menthe et le bol de fruit et de fromage blanc qu'il s'était constitué. Le visage du Capitaine était fermé, torturé et chaque fois qu'une personne passait les portes de la Grande Salle, son regard s'y aimantait dans l'espoir d'y apercevoir Joséphine. Mais chaque fois il revenait vers son assiette, déçu.

-Asexuel ... Bon sang, qu'est-ce qui m'a pris d'écouter Lauren ...

-Tu voulais faire quoi ? soupira Farhan. Continuer dans votre dynamique ?

Il se resservit une tasse de thé piocha des feuilles de menthe séchées qu'il gardait dans une petite boite en bois dans son sac. Il avait réellement un problème avec cette plante. En face de lui, Charlie lui lança un regard pénétrant. Il n'avait pas dormi de la nuit ou très peu, collé à la fenêtre à observer le parc ou occupé à faire des croquis dans son lit de Quidditch ou de créatures magiques pour s'occuper l'esprit. Ses allées et venues avaient été si peu discrètes que ses camarades avaient été également privé de sommeil. C'était déjà le deuxième thé de Farhan et il doutait que les arômes vitalisantes absorbées le maintienne éveillé.

-J'aurais essayé d'arranger les choses ...

-Ce n'est pas ce que tu essayais de faire depuis plus d'un mois ?

-Mais vraiment ! Sans écouter Lauren et ses conneries ! Bon sang, qu'est-ce qui m'a pris ? Evidemment qu'elle allait mal le prendre, qui prendrait bien un truc pareil ? Est-ce que c'est un véritable truc, en fait ? On n'en sait rien ! Lauren a toujours été bizarre !

Farhan jeta un regard inquiet à la préfète qui déjeunait plus loin avec Polly Bell, l'autre Poursuiveuse de Gryffondor. C'était l'une des rares personnes dans la confidence, Charlie et lui-même ne savaient que grâce à leur amitié avec Aidan.

-Elle n'est pas bizarre, elle est homosexuelle.

-Et bien les homosexuelles inventent des choses bizarres !

Farhan leva les yeux au ciel en buvant une gorgée de thé. Charlie continuait de tout remettre en question depuis hier soir. Il était revenu de chez Hagrid hagard, hésitant à moitié à revenir sur ses pas et revenir sur sa décision, récupérer Joséphine qu'il avait laissé seule dans le parc à la merci des éléments et de ses tourments intérieurs. Farhan savait très bien qu'il s'était plus inquiété pour elle que pour lui. Qu'il était capable de revenir, de reconstituer leur couple, juste pour elle. Et Farhan se sentait affreusement illégitime à lui dire à quel point il avait tort.

-Ne lui dis jamais ça. A Lauren.

-Pourquoi ?

-Parce qu'on dit ça aussi des arabes. Ou des Irlandais. Qu'on invente des choses bizarres, comme le ramadan ou la Saint-Patrick. Et que si jamais je t'entendais dire quelque chose comme ça, je te mets mon poing dans la figure.

Charlie essuya un petit rire et pointa sa fourchette sur Farhan.

-Bah bien sûr.

-Oh, ne sois pas si dubitatif. Tu fais peut-être gorille dans ton genre, mais c'est qu'une façade. En réalité, tu me laisserais te frapper juste par gentillesse.

Comme tu laisserais Joséphine revenir, songea à part lui Farhan alors que Charlie s'esclaffait sans pour autant protester. Juste par gentillesse, juste parce qu'il n'oserait pas l'abandonner comme il n'oserait pas blesser Farhan. Charlie avait le syndrome du sauveur et avait tendance à disparaître derrière ce rôle. Mais encore une fois, Farhan était extrêmement mal placé pour le lui faire remarquer.

-Très bien, sans doute, admit Charlie, enfin souriant. Cela dit, je pense que tu te feras plus mal que moi ...

-Ah. Ça dépend où je vise ?

Charlie afficha une mine perplexe avant que ses yeux s'écarquillent devait l'air malicieux de son meilleur ami. D'un geste compulsif, il serra les jambes et darda sur Farhan un regard indigné.

-Mais que tu es fourbe ! Pourquoi tu me parles d'une telle douleur dans un moment pareil ?

-Parce que la douleur détourne la douleur ?

Charlie poussa un grognement de dépit et enfourna une belle cuillère d'œufs brouillés – une quantité qui rassura Farhan. Mais son teint restait pâle, ses yeux cernés. Même ses tâches de rousseurs avaient blêmies. Son regard se tournait toujours régulièrement vers la porte chaque fois qu'un nouveau groupe d'élève s'engouffraient dans la Grande Salle et il se redressa quand l'une d'elle fut une jeune fille à la chevelure cuivrée. Mais une moue déforma ses lèvres lorsqu'il réalisa que c'était simplement la jeune sœur de Joséphine. Avec un soupir, il s'en retourna vers son assiette et farfouilla dans ses œufs.

-Farhan, j'ai fait une bêtise ...

-Oh par Merlin, arrête, finit par lancer Farhan, désespéré. Tu ne l'as pas quitté : tu lui as exposé ce que tu ressentais et ce qui se passait en toi et elle a décidé qu'elle ne pourrait pas passer outre. Tu n'es responsable en rien de ce qui se passe.

-Si. J'aurais dû la fermer et ...

-... subir ? Quelle vie.

Les lèvres de Charlie se pincèrent et il piqua rageusement dans un morceau de saucisse. Loin de le manger, il le trimbala dans son assiette pour constituer des monts d'œufs. A son silence, Farhan devina qu'il s'était fait cette exacte conversation en boucle toute la nuit.

-Je ne sais pas. Je me demande si ... je n'ai pas un peu trop pris pour acquis ce que m'a dit Lauren. Si je n'aurais pas dû ... demander d'autres conseils. A Bill, par exemple ... Bon sang, j'ai joué mon couple sur une notion que je ne connaissais même pas il y a quelques jours ...

-Charles ... c'est normal que tu te sentes coupable, que tu remettes en cause la façon dont tu as géré ça – j'ai ressenti la même chose avec Alice ... Mais c'est trop tard, maintenant.

-Je pensais que je me sentirais mieux, marmonna Charlie. Que ce serait sa décision, pas la mienne ...

-On ne sent jamais bien après une rupture. Peu importe si on la provoque ou la subi.

Charlie pencha la tête sur le côté, l'air de lui concéder ce point. Sans pouvoir s'en empêcher, Farhan finit par lui aussi guetter la porte, et à espérer autant que craindre que Joséphine passe la porte. Mais encore une fois, ce fut sa sœur qu'il vit : elle discutait à l'entrée de la Salle avec Maya et Aidan, le Capitaine de Serdaigle. Elle faisait de grands mouvements, si ample qu'Aidan finit par poser ses deux mains sur ses épaules pour la tranquilliser. Farhan trouva l'agitation de la jeune fille de mauvaise augure et son intuition fut approuvée lorsqu'Aidan tourna le regard vers eux. Il tapota l'épaule de la jeune fille et marcha droit vers leur table, le regard sombre.

-Oh oh ...

-Quoi ?

-Weasley !

Aidan venait d'arriver à leur hauteur, Maya et la sœur de Joséphine sur les talons. Ses cheveux blonds-roux étaient ébouriffés et sa cravate sommairement nouée sur sa gorge, ce qui donnait l'impression qu'il sautait du lit.

-Désolé de te déranger ... Tu as vu Joséphine ?

Charlie eut l'air d'un petit garçon pris en faute. Son visage pâlit encore et il abaissa ses couverts qui teintèrent contre son assiette dans un bruit qui sonnait coupable. Il échangea un regard avec Farhan avant de revenir sur Aidan. Derrière le Batteur, la sœur de Joséphine lui jetait un regard perçant.

-Non ... non, pourquoi ... ?

-Elle n'a pas dormi dans son lit, répondit Maya. Bérénice est inquiète ...

-Oh Merlin ..., souffla Charlie.

Il ferma les yeux avant de presser les paupières de son pouce et de son index. Farhan sentit son estomac se tordre, sans réellement savoir quelle était la source de cette réaction. L'inquiétude envers Charlie qui se retrouvait devant les conséquences de sa rupture ? Ou bien envers Joséphine elle-même, imprévisible, sans doute blessée par la séquence ? Bérénice plissa les yeux devant la plainte de Charlie.

-Tu n'as pas une petite idée d'où elle serait ?

Charlie prit le temps de se frotter vigoureusement le visage avant de répondre :

-Non ... non, la dernière fois que je l'ai vue, c'était dans le parc ... hier soir ... mais ...

Bérénice semblait pouvoir percer son front d'un regard et c'était sans doute ce qui déstabilisait Charlie. Farhan se bâillonna d'une longue gorgée de thé mais capta le regard de Maya sur lui. Il eut juste le temps d'effleurer ses prunelles café avant qu'elle ne détourne les yeux, préférant s'intéresser à Charlie qui semblait chercher les mots adéquats. Il avait définitivement lâché ses couverts et frottait sa tempe d'une main, l'air soucieux.

-Oh ... Mille gargouille ... Qu'est-ce que j'ai fait ...

-Charles, ce n'est pas ta faute, marmonna Farhan entre ses dents.

-Qu'est-ce qui s'est passé ? s'enquit Aidan.

Charlie lui jeta un regard oblique et finit par avouer du bout des lèvres :

-Je crois qu'on a rompu ...

Il eut un silence glaçant pendant lequel Bérénice, Aidan et Maya fixèrent Charlie, hébété, et où Farhan n'entendit plus rien d'autre que le murmure des conversations alentours et le son des couverts contre les assiettes. Puis dans un ensemble absolument parfait, Aidan se frappa le front de la main pendant que Bérénice se précipitait pour prendre Charlie par les épaules.

-Vous avez quoi ?!

-Bérénice !

-Quand ça ?

-Comment ça « tu crois » ?!

Face à toute ses interrogations, Charlie réagit avec une impressionnante dignité en se redressant et écartant la main de Bérénice qui semblait labourer son épaule. Farhan lui, se cacha dans son bol de thé.

-C'est compliqué ... On s'est séparés dans le parc, elle voulait être seule je pense, je ne sais pas ...

-Oh par Merlin, jura Bérénice, livide. Qu'est-ce qu'elle me fait encore ?

-Je suis désolé ...

-Charles, intervint Farhan d'un ton ferme.

Son meilleur ami lui jeta un regard appuyé et déchiré. Derrière lui, Aidan semblait fouiller la Salle du regard et Maya tenait le bras de Bérénice, comme pour l'empêcher d'à nouveau se jeter sur Charlie.

-Il a raison, ce n'est pas toi c'est elle, confirma celle-ci avec une certaine hargne avant de se tourner vers Maya. Je vais la chercher dans le château, peut-être ... ?

-Je vais t'aider, la rassura-t-elle.

-Et moi je vais pousser jusqu'au terrain de Quidditch, annonça Aidan.

-Attends, je vais venir ...

Charlie amorça un mouvement pour se lever mais Bérénice et Maya échangèrent un regard dubitatif. Farhan devant avouer qu'il partageait leur scepticisme.

-Charles, tu dois être la dernière personne qu'elle a envie de voir ...

-Je m'en fiche de ce qu'elle veut, rétorqua Charlie. Je n'ai pas envie qu'elle pense que parce qu'on a pris cette décision-là, je l'efface de ma vie. Elle compte encore. Viens, Collins ...

Sans attendre une nouvelle protestation quelconque, il se leva, enjamba le banc et se dépêcha dans la longue allée, laissant les trois Serdaigle abasourdis sur place. D'un geste vif, Bérénice se retourna vers Farhan, le regard étincelant.

-Tu sais ce qui s'est passé ?

-Hum hum. (Occupé à boire son thé, Farhan se contenta d'agiter un index avant de poser son bol). Ne comptez pas sur moi. Ça les regarde.

-C'est fou ce que tu peux être Suisse, O'Neil, soupira Aidan, dépité. Bon, j'y vais, Weasley me sème dans la poussière ... J'en reviens pas qu'il l'ait quitté ! Dix Gallions que c'est une tentative de nous déstabiliser pour le Quidditch !

-Il n'y a pas que le Quidditch dans la vie, répliqua sèchement Farhan. Comme si Charlie serait capable de faire ça pour une raison si futile ...

Aidan haussa les épaules et s'empressa de rejoindre Charlie qui venait de passer les portes. Bérénice dévisagea Farhan de son regard noisette, les paupières plissées. Pourtant, le jeune homme avait l'impression que son attention allait plus loin que la simple réalité : son cerveau semblait surchauffer. Maya tira délicatement sur son bras.

-Allez viens, on va fouiller le château ... Elle ne traine pas parfois du côté de la Salle des trophées ? Viens ... Au fait, merci Farhan.

Farhan répondit modestement d'un signe de main et Maya réussit à entrainer Bérénice, bon gré mal gré. Resté seul face à sa tasse de thé et l'assiette intacte de Charlie, le Gryffondor retint un profond soupir. Il ne savait pas que penser de la situation, sinon qu'elle était incroyablement prévisible. Le couple de Charlie et Joséphine ne pouvait rester à flot avec des bases aussi friables, d'un côté comme de l'autre et la réaction forte de la Serdaigle était l'évidence même, comme l'obstination de Charlie à vouloir son bien. Tout ce qu'il avait fait, toute l'énergie qu'il avait investi dans ce couple, il l'avait fait pour elle. Son esprit se projeta sur le lendemain et le cours de potion qui se profilait avec une Joséphine certainement amère et meurtrie. Son cœur se serra. Il avait attendu six ans pour établir un contact et malgré les débuts chaotiques, il avait fini par les apprécier malgré lui. Maintenant, tout volerait certainement en éclat et il ne pouvait s'empêcher de se sentir déçu. Par Merlin, pourquoi avait-il fallu qu'il s'assoit à sa table ... ?

Mortifié, il acheva son bol avec une lenteur d'escargot, sachant pertinemment que son cours de Botanique ne commençait que dans une heure. Il espérait apercevoir Tonks pour se changer un peu les idées mais la Poufsouffle semblait en profiter pour dormir un peu. Il s'apprêtait à se lever et à remonter dans sa Salle Commune quand une voix l'interpella dans son dos :

-Farhan ?

C'était Percy, le plus âgé des petits frères de Charlie. Il redressa ses lunettes sur son nez et donna à Farhan la lettre qu'il tenait dans sa main d'un air important.

-Errol l'a déposée, c'est pour Charlie mais il est parti ...

-Je lui donnerai, promit Farhan en rangeant la lettre dans son sac. Au fait, ton rat va bien ?

Il voyait son museau froissé dépasser de la poche de Percy. Le quatrième année rougit et jeta un regard gêné la créature qui s'agitait dans sa cape.

-Oh ... oui, Croûtard va bien ... A un de ses jours, Farhan !

Percy fit volte-face et Farhan perçut le mouvement qu'il fit pour repousser le rat dans le fond de sa poche et le regard qu'il lança à la table. Il était en train de se demander si son rat ne lui avait pas valu quelques moqueries quand une nouvelle fois quelqu'un lui fit perdre le fil de ses pensées :

-Vous êtes seul, O'Neil ?

Farhan se retourna pour voir le professeur Chourave remonter l'allée entre les tables de Gryffondor et de Poufsouffle. C'était une petite sorcière replète aux cheveux gris-fer sous un chapeau rapiécé, toujours de bonne humeur comme en témoignait l'immense sourire qu'elle adressa à Farhan. Bien que directrice de Poufsouffle, elle ne faisait aucune différence entre ses élèves : elle fonctionnait à l'affinité et au mérite et c'était naturellement qu'un lien s'était tissé avec un fils d'apothicaire qui présentait des facilités dans sa matière. Elle se rapprocha de lui et Farhan eut une vue magnifique sur ses ongles incrustés de saleté.

-C'est assez inhabituel, où est passé Weasley ?

-Pris par une urgence, répondit Farhan avec un sourire. Vous allez bien professeur ?

Chourave fut prise d'un petit rire.

-Très bien, c'est gentil de me demander. Je viens de recevoir quelques pousses de tarentula vénéneuse pour la serre numéro 3, il faut que je les mette en terre avant le début de votre cours ... (Elle observa Farhan un instant avant de sourire). Si vous vous ennuyez, vous pouvez venir m'aider. J'irais plus vite et vous avez toujours eu la main verte, O'Neil. Nolan vous a bien formé ...

Le compliment toucha Farhan et l'attendrit assez pour qu'il accepte la proposition d'un hochement de tête. Ce serait sans doute mieux de s'atteler à des plantations plutôt que de retourner dans sa chambre en se demandant où en étaient les recherches de Charlie ou qui de lui ou de Bérénice trouverait Joséphine en premier. Et pire, il n'aurait pas à ressasser ses propres inquiétudes concernant la jeune fille ou son meilleur ami. Alors il rassembla ses affaires et suivit son professeur entre les tables. Chourave eut un cri indigné lorsqu'il se porta à sa hauteur.

-Mais vous avez pris du poussos pendant l'été, O'Neil ? Vous faites bientôt une tête de plus que moi ! Ah par Merlin, parfois j'aimerais vous mettre un parpaing sur la tête ! Oh la la ... Bones !

Ils venaient d'émerger dans le Hall, désert si on exceptait deux jeunes élèves aux uniformes aux couleurs de Poufsouffle. Le garçon, blond et chétif, avait coincé la tête d'une fille aux boucles brunes sous son bras. Il se figea, paralysé par l'apparition de sa directrice de Maison et la fille en profita pour se prendre d'un grand coup dans son pied pour l'inciter à la lâcher. Le garçon poussa un cri de douleur et se mit à sautiller sur place pendant que la fille se dégageait vivement et que Chourave poussait un profond soupir de lassitude. Elle posa ses deux mains sur ses hanches et darda sur eux un regard inhabituellement sévère. En retrait, Farhan se retenait de rire devant la scène et les bonds incessants du garçon qui faillit s'étaler de tout son long, son pied dans la main.

-C'est de la faute de qui, cette fois ?

-Lui, répondit la fille en le pointant du doigt avec hargne.

-Tu me brises le pied et tu dis que c'est moi ?!

-Tu m'avais attrapé ! Tout ça parce que tu ne supportes pas que pour une fois j'ai eu une meilleure note en Histoire de la magie !

-Tu n'avais pas venir t'en vanter !

-Et toi tu te vantes tout le temps !

-Stop ! rugit Chourave en se dressant entre les deux élèves qui semblaient prêts à en venir de nouveau aux mains. Stop, vous m'épuisez, tous les deux ! Mille gargouille, l'été ne vous a pas fait du bien ... ! Allez vous assoir à chaque extrémité de la table et calmez-vous ! Si jamais j'apprends par le professeur Rogue que ça s'est mal passé en Potion, ce sera une retenue – voire une double retenue. Est-ce bien clair ?

La fille aux boucles brunes rentra la tête dans ses épaules et bredouilla des excuses inaudibles mais le garçon sembla défier sa directrice de Maison de son regard vert. Il finit par lâcher du bout des lèvres :

-Bien, professeur ...

-Parfait. Maintenant, disparaissez !

Les Poufsouffle firent volte-face et passèrent à côté de Farhan sans faire attention à lui, à la fois penaud mais toujours en se jetant des regards suspicieux. Et alors qu'ils passaient la porte, le Gryffondor fut persuadé de voir la fille faire un croche-patte au garçon qui trébucha sur les dalles, avant de détaler en vitesse. Cette fois, Farhan laissa échapper un petit rire et Chourave se fendit d'un soupir, une main sur le front.

-Bennett et Bones. J'ai l'impression d'avoir passé mes cours de l'année dernière à empêcher des catastrophes entre ses deux-là ... Un jour, j'ai retrouvé Bennett avec une truelle à la main, prêt à l'asséner sur Bones qui venait de se moquer de la ressemblance entre ses cheveux et un filet du diable ...

La comparaison était recevable, dut admettre Farhan, amusé par les anecdotes de Chourave. Son agacement s'était vite envolé et à présent il sentait la profonde et sincère affection qu'elle ressentait pour ses deux élèves. L'air dehors était encore chargé d'humidité après les averses nocturnes : des nappes de brumes s'élevaient un peu partout dans le parc et le chemin qui menait aux serres glissaient assez pour que Farhan propose son bras à son professeur. Ils atteignirent la serre numéro 3 et Chourave l'ouvrit, le nez froncé face aux effluves de tabac qui semblaient emplir l'atmosphère.

-Laissez tomber, depuis toujours les serres sont un repère pour fumer discrètement ... Déjà à mon époque ... Je vais finir par poster quelques filets du diable, qu'est-ce vous en pensez ? (Elle ouvrit la porte et indiqua l'entrée à Farhan). Allez-y, je vais chercher les pousses. En attendant, vous serez mignon de tâter mes Géraniums, il y a longtemps qu'ils ne m'ont plus donné de jus ... La dernière fois je me suis faite mordre, ils sont agressifs par ce temps ...

-Mais vous n'avez aucune vergogne à m'y envoyer ? plaisanta Farhan.

-Ah, O'Neil ... Je sais que le Choixpeau vous a envoyé dans la bonne maison.

Elle tapota son épaule et s'en fut vers une autre serre pendant que Farhan s'engouffrait dans la sienne. Il huma les odeurs de terre et d'humus qui régnaient dans la serre et profita de la relative chaleur de celle-ci pour retirer sa cape. Devant lui, deux rangées de bacs contenaient des plantes de tailles et d'espace variées, de la mandragore soigneusement enterrée pour étouffer son cri mortel aux feuilles caractéristiques d'un champifleur. Quelques Géranium Dentu ouvrirent leurs pétales rosées sur leurs crocs à son passage et d'une façon à la fois joueuse et suicidaire, Farhan laissa ses doigts parcourir les feuilles d'un vert bleuté de la plante et observa la réaction du Géranium qui dont la tige se gonfla. Ses pétales se rabattirent sur ses crocs, signe qu'elle était prête à attaquer mais au moment où ça aurait dû être le cas, Farhan remonta ma main et scella les pétales d'une torsion pour lui éviter d'à nouveau découvrir ses dents.

-Petite saloperie, souffla Farhan avec un sourire. Allez, donne un peu de jus ...

De son autre main, il attrapa le seau qui trainait à côté puis ouvrit largement la plante en écartant un pétale. Un liquide chaud à l'étrange odeur de réglisse se déversa dedans depuis l'intérieur de la plante, glissant sur le pétale rose comme s'il s'agissait d'un bec naturel. Dans sa volonté d'agression, le Géranium sécrétait toujours cette substance difficile à reproduire artificiellement et qui constituait un ingrédient rare pour les potions. Il avait risqué de perdre ses doigts dans l'opération mais d'une manière générale, Farhan prenait assez peu en considération son intégrité physique quand il s'agissait de recueillir cette matière première. Satisfait de la récolte, Farhan se mit en quête de fiole pour confier la substance au professeur Chourave. Au détour d'une rangée de bac, il sursauta violement et son seau lui échappa, déversant la substance noire et odorante qui imprégna le sol. Emmitouflée dans une cape qu'elle avait drapée sur son corps recroquevillé contre la verrière, une fille dormait profondément, son souffle élevant le voile de cheveux fins qui couvrait son visage.

Il cherchait des fioles. A la place, il avait trouvé Joséphine Abbot.

-Oh misère ...

Farhan resta quelques secondes tétanisé face à la jeune fille, incapable de savoir que faire. Toute la témérité dont il avait fait preuve face au Géranium Dentu semblait s'envoler et être réduite à néant face à la présence de cette fille endormie. Il découvrait également l'origine de l'odeur de tabac qu'il avait senti à l'entrée : dans un étui ouvert sur le sol gisaient les cendres et les cadavres d'une dizaines de cigarette qui répandait une odeur désagréable dans l'air. Il fallut que le jus sécrété par les Géraniums atteigne son pied pour qu'il daigne se mettre en mouvement : il ramassa le seau et d'un coup de baguette parvint à récupérer l'ensemble de sa récolte. Durant l'opération, Joséphine n'avait pas bronché, prouvant qu'elle dormait comme une souche. Farhan s'interrogeait encore sur ses prochaines actions lorsque Chourave entra dans la serre, un une cagette contenant les quelques pousses dans les bras.

-Faisons vite, O'Neil : elles croient plus vite que je ne le pensais ... je savais que je n'aurais pas dû mettre cet engrais, c'est trop ... (Elle s'interrompit, abasourdie). Que fait Abbot endormie dans ma serre ?

-Euh ...

Farhan passa une main dans ses cheveux noirs qui bouclaient sous l'effet d'humidité. Il hésita quelques secondes, le regard allant de Joséphine à Chourave avant de décider d'être franc avec son professeur pour appeler à son indulgence :

-Elle ... enfin, je ne sais pas si vous saviez mais elle sortait avec Charlie et ils ont ...

-Rompus ? devina Chourave, l'air vaguement affecté. Bon sang ...

Elle vrilla un regard peiné sur Joséphine et posa ses pousses qui s'agitaient seules sur le bac vide à côté d'elle. Farhan pensait que son émotion était due à la situation mais Chourave le détrompa en jurant une seconde plus tard :

-Mille gargouilles, je vais devoir cinq Gallions à Minerva. Elle l'avait dit que ça ne durerait pas ...

-Vous pariez sur nous ? s'indigna Farhan, estomaqué.

Chourave eut un sourire étrangement diabolique et se fendit d'un mouvement désinvolte de la main.

-Oh, ne soyez pas naïf O'Neil, bien sûr qu'on parie sur vous. Je ne vous remercie pas : Miller et vous m'avez fait perdre douze mornilles l'année dernière. Et vous voyez les deux gamins qui se disputaient dans le Hall ? Mon challenge. J'ai mis dix Gallions sur eux. Filius dit que je suis folle : moi je dis qu'on ne reste pas collé dans l'ombre et la lumière d'une personne qu'on déteste.

-Vous êtes philosophique, professeur mais ... vous n'allez pas la coller ?

Les lèvres de Chourave se pincèrent mais elle secoua la tête, affligée.

-Heureusement, elle tombe sur une bonne. J'ai été jeune, moi aussi : une rupture c'est déjà assez douloureux pour qu'on en rajoute ... Mais il va falloir la réveiller quand même pour qu'elle quitte ma serre avant le cours. J'ai déjà Bennett et Bones à gérer : je ne veux pas d'autres drame dans mon environnement.

Elle planta un regard entendu sur Farhan et il comprit très vite que sa bonté n'ira pas jusqu'à elle-même sortir Joséphine de son sommeil. Conscient qu'elle était déjà plus généreuse que d'autres dans la situation présente, Farhan ne chercha pas à protester malgré l'appréhension qu'il ressentait. Avec une lenteur exagérée, il s'accroupit auprès de la jeune fille. Sa cape était remontée sur son menton et son souffle profond et régulier trahissait un profond sommeil qu'elle avait dû mettre des heures à chercher. Derrière ses mèches éparses, il parvint à percevoir sur son visage blafard des trainées noires de mascara qui traçait des sillons sur ses joues. La vision l'ébranla assez pour qu'il suspende le geste qu'il avait amorcé. Ses doigts se rétractèrent contre sa paume avant qu'il ne se fasse violence et qu'il secoue doucement l'épaule de Joséphine.

-Abbot ?

La jeune fille poussa un long gémissement et ramena sa cape jusque son nez. Farhan échangea un regard avec Chourave qui l'incita d'un geste de main à y aller plus franchement. Loin d'être serein, Farhan poursuivit et la secoua une nouvelle fois.

-Abbot, ça va être le début des cours ... Allez, réveille-toi.

Cette fois, les yeux de Joséphine papillonnèrent, révélant un regard noisette complétement embué par le sommeil et assombri par le rouge qui veinait le blanc de ses yeux. Il fallut quelques secondes avant que son regard ne se fige quelque part du côté de l'étui à cigarette. Petit à petit, tout changea en elle : sa respiration se raccourcit, se fit plus hachée et ses traits se tendirent de minutes en minutes. Ses yeux finirent par retrouver leur mobilité et sans bouger d'un iota elle-même, elle découvrit son environnement, de la main qui tenait toujours son épaule à Chourave en arrière-plan derrière, la mine inquiète. Et brusquement, ses pupilles s'étrécirent et elle se redressa d'un sursaut, repoussant par là-même sa cape et la main de Farhan sur son épaule.

-Merde !

-Restez polie, Abbot, la rabroua gentiment Chourave. Je suis curieuse : comment vous avez fait pour forcer ma serre ?

Joséphine ne répondit pas : à la fois furieuse et déboussolée, elle tenta de se lever mais elle chancela dès qu'elle fut sur ses jambes. Par automatisme, Farhan la rattrapa par le bras mais de nouveau elle le repoussa pour plutôt s'appuyer sur les bacs de terre. Elle faisait déjà peine à voir, endormie sous sa cape, mais elle brisait littéralement le cœur une fois éveillée : la colère sur son visage ne suffisait pas à masquer le fait qu'elle avait certainement passée la nuit la plus difficile de sa vie. Ce n'était pas que sa joue : son visage, ses tempes et même son nez était maculé d'un mélange de larmes et de mascara, ses cheveux étaient désordonnés et gonflés par l'humidité, son uniforme froissé semblait avoir pris la pluie et dans sa main que la cape avait dissimulée jusque-là, Farhan découvrit les lambeaux de sa cravate bleue et bronze. D'un geste compulsif et rageur, elle tira sur sa jupe.

-La fenêtre, avoua-t-elle d'une voix rauque. Le loquet était ouvert ...

-Hum, laissa échapper Chourave, la mine compatissante. Ecoutez Abott, retournez dans votre lit pour cette fois, je vous excuse. Reposez-vous un peu : c'est inutile que vous alliez en cours dans votre état ...

-Dans mon état ... ?

Aussitôt, le feu embrasa ses iris et elle les vrilla d'une manière accusatrice sur Farhan qui dût faire tous les efforts du monde pour ne pas reculer d'un pas. Chourave plissa les yeux et asséna :

-Ne le regardez pas comme ça : s'il ne me disait rien, je vous collais, Abbot.

Joséphine poussa un grognement dédaigneux accompagné d'un roulement des yeux qui prouvait bien que la retenue n'était plus une menace crédible depuis longtemps. Farhan en profita pour réellement faire ce pas en arrière et s'échappa de la scène en ramassant la cape de Joséphine et nettoya l'étui à cigarette de ses cendres et mégots. C'était dommage de se servir d'un tel objet ainsi : il était beau, gravé aux initiales graphiques de Joséphine. Derrière, un début de dessin était amorcé mais les traits étaient sommairement formés.

-Allez Abbot, poursuivit Chourave avec douceur. Retournez dans la Tour de Serdaigle ... Je préviendrais l'infirmière de vous faire un mot. N'essayez même pas de protester sinon je reviens sur ma décision et je vous force à affronter mon cours – et vos camarades.

Ce dernier argument parut avoir raison des objections de Joséphine qui blêmit encore. Sans doute n'était-elle pas encore prête à affronter Charlie ... Chourave considéra son silence comme une acceptation et elle poussa un profond soupir avant de se tourner vers ses pousses de Tarentula vénéneuse.

-Merci O'Neil, je me débrouillerais avec les plants ... Vous raccompagnez Joséphine jusqu'au château : je ne veux pas qu'elle se remette à errer dans le parc.

-Quoi ? s'exclamèrent-ils en même temps.

-Euh, professeur ...

-Je n'ai pas besoin d'aide !

-Abbot, qu'est-ce que j'ai dit sur les protestations ?

La menace parut atteindre presque physiquement Joséphine qui serra les dents. Furieuse, elle lança un regard incendiaire à Farhan puis dépassa sa professeure d'une démarche peu assurée mais assez déterminée pour faire illusion. Le jeune homme attendit qu'elle soit loin pour se précipiter vers Chourave, épouvanté :

-Mais professeur, vous me jetez dans la gueule du snargalouf, là !

-Non, j'ai juste du bon sens : les serres sont loin du château et elle tient à peine sur ses jambes. Raccompagnez-la au moins jusqu'aux portes, O'Neil et pour vous remercier, j'enverrais quelques plants à votre père. Gratuitement.

Avec un sourire maternel, Chourave lui tapota l'épaule puis l'abandonna pour enfin faire ses plantations en chantant gaiement. Farhan frotta sa tempe, contrarié de se retrouver dans une telle situation. Il en aurait assez des cours de potions assise à côté de la turbulente ex-petite-amie de son meilleur ami : c'était l'évidence même qu'il était la deuxième personne qu'elle ne voulait pas voir. Il songea vaguement à la laisser partir et à prétexter le fait qu'elle le sème, mais à cet instant il la vit trébucher sur le sol inégal de la serre et pester copieusement. Farhan poussa un soupir résolu et s'avança vers Joséphine qui s'était rattrapé à un autre bac. Elle jeta un regard assassin à Farhan et se redressa le plus dignement que possible.

-Pas un mot, siffla-t-elle d'un ton bas.

Farhan se contenta de lever les mains pour l'assurer de son silence. Il n'allait pas provoquer la tempête : juste s'assurer que celle-ci arrive saine et sauve au château. Et visiblement, Joséphine devait avoir conscience de sa propre faiblesse car elle ne protesta plus et sortit de la serre. La brume ne s'était pas levée, si bien que le château était à peine visible derrière les nappes. L'air matinal était frai et sans un mot, Farhan tendit sa cape à Joséphine. Elle la gratifia d'un regard suspicieux avant de la lui arracher des mains pour s'emmitouflée dedans à la manière d'une couverture. Ils traversèrent dans un silence lourd une partie du parc : Joséphine regardait ses pieds, sans que Farhan ne sache si c'était pour éviter de trébucher ou pour fixer son esprit. Il évitait de trop la dévisager, conscient que c'était un regard qui pouvait l'indisposer mais il ne pouvait s'empêcher de remarquer quelques détails à la volée. Des reniflements. L'humidité suspecte de ses yeux. Quelques râles furieux. Ils étaient à mi-chemin lorsqu'il croisa pour la première fois son regard. Amer, percé d'éclat de colère et de dépit. Elle se détourna et se remit à fixer le sol.

-Tu sais ?

Sans un mot, Farhan hocha la tête et Joséphien renifla de nouveau avec mépris. Il crut qu'elle allait de nouveau se renfermer dans son mutisme mais après quelques secondes, elle lâcha du bout des lèvres :

-Je risque d'être désagréable dans les jours qui suivent. Injustement désagréable. Je voulais juste te prévenir.

C'était si inattendu que Farhan ne put s'empêcher de tourner franchement le regard vers elle et de la considérer, estomaqué. Devant sa surprise manifeste, elle leva les yeux au ciel.

-C'est juste pour que tu te prépares.

Elle le lorgna du coin de l'œil et Farhan finit par comprendre que malgré son exigence dans la serre, elle attendait une réponse. Une conversation pour que son esprit arrête de tourner en boucle sur la scène qu'elle avait dû subir hier. Et pour effacer le désarroi qui brillait régulièrement dans son regard, Farhan s'exécuta de bonne grâce :

-Je vais bouger mon chaudron, je me mettrais en face. En diagonale.

La commissure des lèvres de Joséphine trembla en un semblant de sourire.

-Tu crois que ça va m'arrêter ?

-Non mais ça ne te facilitera pas la tâche. Tu aurais plus de chance d'être découverte par Rogue ou de gâcher tes propres préparations. Attends, je ne suis pas sûr que ça t'arrête non plus ça ...

-Non, en effet. J'aime les défis.

La fin de sa phrase se brisa et son regard se riva sur l'horizon couvert de brume dans laquelle la silhouette du château commençait à peine à être discernable. Son pas s'était progressivement ralenti et Farhan s'efforça de s'adapter. Elle contemplait le château comme s'il était devenu une sorte de monstre dont les tours étaient des têtes prêtes à l'engloutir. Devant son appréhension manifeste, Farhan se sentit obliger de lui révéler :

-Ta sœur te cherche. Elle est venue nous voir au petit-déjeuner en disant que tu n'avais pas dormi dans ton lit alors ...

-Elle sait aussi, comprit Joséphine d'une voix blanche. Fantastique ...

-Non. Enfin, ce n'est pas ce que je voulais te dire. Ce que je voulais te dire, c'est qu'elle s'inquiète.

Joséphine battit des paupières mais ne répondit pas. Elle se contenta de resserrer sa cape contre elle jusqu'à en presser le col contre sa bouche. Farhan se retourna pour voir le parc baigné dans la brume. Quelque part derrière les nappes de brouillard, Charlie cherchait lui aussi Joséphine, s'inquiétait pour elle et Farhan se souvint de sa réserve quand son ami avait décidé de se mettre à sa recherche. Quitte à faire le tampon entre les deux, autant qu'il assume le rôle ...

-Dis ... Tu n'es pas obligé de répondre mais ... tu as un message pour Charlie ?

-Quoi ?

Le ton de Joséphine était brusque, incrédule, étouffé. Un timbre pareil dans la voix habituellement fluide et assurée de la jeune fille, cela portait nécessairement un coup au cœur. Farhan hésita à poursuivre mais finit toute de même par expliciter :

-Si tu veux qu'il te laisse tranquille dans les prochains jours ou si tu veux le voir ... enfin, je peux passer le message, si tu veux.

Joséphine le contempla en silence, impassible derrière ses traces de larmes et de mascara. Seul son regard un peu hagard, aux abois, laissait supposer une tourmente intérieure et devant une telle expression, Farhan se sentit honteux d'avoir craint qu'elle n'explose contre lui. Ce n'était pas pour lui qu'il fallait s'inquiéter dans un moment pareil ... D'ailleurs y pensait-elle réellement ? N'avait-elle pas que sa douleur en tête ? A trop répéter que Joséphine était une tempête, il en avait oublié qu'elle était humaine avant tout. Elle finit par baisser le regard, les lèvres pincées.

-Je ne sais pas. Je ... je n'ai pas encore pris le temps de réfléchir à ça.

Farhan hocha doucement la tête, compréhensif. Il se souvenait de sa propre rupture avec Alice Miller l'année dernière, à comment dans leur naïveté ils avaient tenté de rester amis avant de comprendre que pour guérir il fallait couper les ponts. Les ponts n'avaient jamais été reconstruits depuis et parfois, Farhan en souffrait, d'autant que depuis Alice s'était mise avec un de ses camarades de Poufsouffle. Mais ils avaient agi en bonne intelligence l'un et l'autre : Charlie et Joséphine arriveraient-ils à faire de même ?

Lentement, comme une apparition, le château émergea du brouillard et ils parvinrent aux immenses portes de chêne du Hall. Par ce temps et pendant cette première heure de cours, l'espace était complétement déserté par les élèves et Joséphine s'immobilisa devant. Farhan, qui s'apprêtait à entrer, lui jeta un regard interloqué et elle lui adressa un sourire penaud.

-C'est juste ... je ... (Elle buta sur les mots, mais finit par achever dans un filet de voix : ) Qu'est-ce que Charlie t'a dit exactement ?

-Joséphine ...

Farhan se rendit compte que c'était la première fois qu'il prononçait son nom à voix haute, face à elle et cela contracta étrangement son ventre. Il se morigéna intérieurement, d'autant que le regard de Joséphine s'était glacé. Il leva les mains en signe de paix.

-Ecoute, je ne veux juste pas être au milieu de tout ça ... Si tu veux avoir plus d'explication, essaie de le revoir mais ce n'est pas par moi qu'il faut passer ...

-Non, toi pour que tu l'ouvres il faut vraiment forcer, lâcha amèrement Joséphine.

Farhan devina que derrière cette remarque, il y avait toute son histoire qu'elle était allée chercher dans son dos du côté de Charlie et l'allusion le piqua au vif. Il écarta les bras, dépité.

-Qu'est-ce que tu veux que je te dise, sérieusement ? Honnêtement, tu en sais sans doute plus que moi, je n'ai rien à t'apprendre. Juste qu'il est en train de te chercher du côté du terrain de Quidditch et qu'il s'inquiète ...

-Oh, il s'inquiète ? grinça Joséphine.

Farhan retint un sourire extrêmement mal venu devant son scepticisme. C'étaient les mots exacts qu'il avait lui-même rétorqué à Alice après qu'elle était venue lui demander si « ça allait ». Après tout, Joséphine Abbot était capable d'avoir des réactions normales.

-Oui. Parce qu'une rupture n'efface pas tout d'un coup de baguette, ça se saurait. Tout ce que vous avez ressenti, ça ne disparaitra pas, ça ... se transformera. Il faut juste bien gérer la transformation.

Joséphine le considéra quelques secondes. Elle avait l'air hébété.

-Ce n'est pas un principe en Potion ça ? De réaction chimique ? « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » ?

Farhan n'avait jamais fait le rapprochement et éclata de rire quand il fut étalé devant ses yeux par Joséphine.

-Principe affreusement piqué par Hector Dragworth-Granger à un moldu, mais oui, c'est un peu ça.

-On a piqué des théories à des moldus ?

Farhan laissa enfin échapper le sourire qui jouait sur ses lèvres. L'avantage à ne pas réellement savoir son statut de sang, c'était qu'il s'était fortement intéressé à la culture moldu, que ce soit en classe ou à Londres qu'il connaissait aussi bien que le Chemin de Traverse. Et il avait été surpris de constater que ce principe avait été établi par un certain Lavoisier au XVIIIe siècle, soit plus de cent ans avant son apparition dans les manuels de potions sorciers.

-Tu sais, la potion ce n'est rien d'autre que de la chimie, avec un soupçon de magie en plus. Alors si on ne comprend pas les réactions chimiques, on est incapable de maîtriser l'art de la Potion et il se trouve que les moldus s'y connaissent mieux que nous en la matière parce qu'ils ne sont pas obnubilés par la magie, eux. Ils s'intéressent à tous les aspects qui composent ce monde.

-Ah ...

Une lueur d'intérêt avait commencé à briller dans les yeux de Joséphine, mais passivement, très pâle. Son regard s'était régulièrement rivé dans le parc depuis que Farhan avait évoqué Charlie, vers le terrain de Quidditch. Elle finit par s'arracher à sa contemplation quand la cloche sonna la fin de la première heure de cours et le début de la leur. Farhan se trémoussa, mal à l'aise et indiqua d'un geste vague les serres en contre-bas.

-Je dois y aller, euh ... repose-toi bien.

-Je ne suis pas sûre que je vais me reposer ... (Elle garda le silence quelques secondes avant de décréter d'une voix plus sûre : ) Tu peux dire à Charlie que j'ai besoin de faire le point. Pas de le voir. Je veux être tranquille.

Sans attendre sa réponse ou même daigner le remercier, elle amorça un mouvement vers la Grande Porte. La lueur intérieure des torches jeta une lumière chaude sur son visage et Farhan faucha son coude au dernier moment. Elle lui jeta un regard incrédule.

-Quoi ?

-Attends ! Euh ... tu as ... des traces sur le visage ...

Joséphine posa une main sur sa joue, toujours maculée de sillons noirâtres. Farhan s'attendait à ce qu'elle soit mortifiée par son état, qu'elle les efface d'un coup de baguette mais à sa grande surprise, un étrange, fin, machiavélique sourire se dessina sur ses lèvres.

-Ah. Tant pis. On se voit en Potion, Farrell.

Et elle s'engouffra dans la gueule béante du château d'une démarche plus déterminée, moins chancelante, le menton relevé pour assumer les noires cicatrices que les larmes avaient laissé sur son visage. Farhan n'eut même pas le temps de lui rendre son étui à cigarette. Il aurait tout le loisir de le faire demain ... pendant qu'elle essaierait de faire exploser son chaudron. 

*** 

ET VOILA ! Votre avis sur ce retour de LDP? 

J'espère que vous avez apprécié le petit caméo express de Simon et Victoria (personnages principaux de mon autre fanfiction Ombres et poussières pour ceux qui l'ignorent). 

MAINTENANT. 

Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais l'histoire est passé sous le seau du "mature". Alors certains savent que j'hésite à écrire du lemon : je ne sais toujours pas si j'irais jusque là, mais je sais que j'ai d'ors et déjà écrit une scène qui mérite un petit avertissement. Mais pas de panique, je reste dans le cadre d'une pudeur, de l'intérêt de l'histoire ou des personnages. Rien n'est gratuit, tout sert et je tiens à ce que ça reste lisable. 

MAIS c'était simplement pour prévenir. Evidemment, toute scène problématique sera indiquée clairement et je vais essayer de ne pas les multiplier - mais certains l'ont fait remarqué, cette histoire s'y prête plus qu'O&P. 

Allez, à la semaine prochaine pour O&P, bisous et bonne rentrée ! 

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro