Chapitre 9
♪ : Fever Dreams - DUUNES
Janvier 2018
Je m'en rappelais encore comme si c'était hier.
Mon entrée en terminale m'avait complètement chamboulé, c'était la dernière ligne droite avant de pouvoir s'imaginer entrer à l'université. Une année décisive pour l'avenir de toute personne souhaitant espérer une vie digne de ce nom. Mes parents n'étaient pas de ceux qui visaient la lune, je veux dire par là qu'ils ne faisaient pas partie de cette élite de la SKY, et ne me poussaient pas à faire plus que mes propres capacités.
Pour autant, ma mère espérait que je puisse avoir un avenir plus brillant que le leur disait-elle. Mon père, lui, espérait que mes choix puissent influencer Jiwoo, que je fasse honneur à ma place d'aîné, que je lui montre le chemin de la réussite. Quant à moi, et bien... Je ne pensais à rien. Rien, mis à part Taehyung.
A vrai dire, j'étais beaucoup plus occupé à me poser des questions quant à l'avenir de notre relation incertaine, plutôt qu'à me préoccuper à réviser le seneug*. J'oscillais entre des moments de joie intense et de désespoir total avec Taehyung qui, plus le temps passait, devenait pour ainsi dire "instable" émotionnellement. Nous finissions toujours par nous réconcilier, de la meilleure façon possible, et à chaque fois, je finissais par jeter aux oubliettes cet élan de courage qui me susurrait de lui avouer ce que je ressentais.
Cette semaine-là, j'avais proposé à Taehyung qu'on se rende au cinéma, j'avais trouvé un des films à l'affiche plutôt intéressant, et avait prétexté vouloir m'aérer l'esprit afin de pouvoir le voir. Lui aussi était assez occupé avec ses cours, et à côté de ça, sans même le vouloir je pense, il mettait une grande pression sur les épaules d'Hayun qui s'était plongé dans une phase d'autonomisation et de rébellion totale.
J'avais rejoins Taehyung à l'heure, mais avant même que nous entrions dans le cinéma, je vis Hoseok arrivé à la hâte et nous emboîter le pas. Ces deux-là s'entendaient à merveille, et j'avais cru comprendre qu'ils leur arrivaient de se voir quand leur emploi du temps le permettait. Hoseok était aussi étudiant, et de fait, il partageait les mêmes malheurs que celui qui faisait chavirer mon cœur. Vous vous en doutez bien, sa présence avait littéralement gâché mon espoir de me retrouver seul à seul avec Taehyung et bien que j'adorais la compagnie d'un de mes plus vieux amis, je lui en avais voulu de s'être mis entre nous, nous séparant par un siège moelleux et rouge. Et oui, je n'avais même pas pu profiter de pouvoir partager mon cornet de pop-corn avec Taehyung, et avait abandonné l'idée de pouvoir y plonger ma main et de rencontrer la sienne par mégarde.
C'est avec une moue considérable que j'avais quitté la salle à la fin du film, et tandis que nous marchions vers la voiture de Taehyung, Hoseok nous arrêta.
– J'ai entendu dire qu'il y avait un groupe super cool qui se produit ce week-end. C'est dans un bar underground pas très loin du resto des parents de JK, ça vous tente ?
– Je ne serais même pas étonné de savoir que ce sont tes amis ou que ce soit toi qui l'organise, le taquina Taehyung.
– Et non, tu fais fausse route ! Un pote de la fac m'en a parlé, de ce que j'ai compris c'est des aînés qui se sont lancés dans un truc un peu pop-rock. Ma copine Yun dit qu'ils sont cool, il y aura un peu de monde mais ça peut être cool. J'en ai déjà parlé à Namjoon et Yoongi, ils sont chauds.
Je n'étais pas jaloux de Hoseok, je veux dire par là que je ne pouvais pas l'envier. Après tout, j'étais le plus jeune des deux, et même si Taehyung appréciait ma compagnie, même si parfois, de brefs moments de certitude me faisait croire à ce rêve que je pouvais suffire à répondre à tous ses désirs seulement par ma compagnie, je devais admettre que ce n'était que fantasme. Évidemment perdu dans mes pensées, la réflexion de Taehyung m'avait ramené à la raison.
– Tu penses y aller ?
– Hein, quoi ? dis-je, cachant le rouge de mes joues.
– A cette soirée, tu vas y aller ?
– Tu devrais venir Jungkook ! Ça te permettra de décompresser un peu, ce sera sans prétention je te le promets, me dit Hoseok en me faisant un clin d'oeil.
Le regard persistant de Taehyung me rendit chancelant, et passant la main dans mes cheveux, je répondis que je verrais avec mes parents. Hoseok parti le premier, Taehyung à sa suite, sous prétexte qu'une amie de la fac lui avait demandé de l'aide sur un devoir.
Après être rentré chez moi, je m'étais enfermé dans ma chambre sans même dire un mot à ma mère. J'étais jaloux, c'était indéniable, mais je n'avais pas voulu l'admettre. Même bosser des heures mes fiches de révisions n'avaient pas suffit à faire passer cette drôle de sensation qui avait élu domicile dans ma poitrine.
Le reste de la semaine s'écoula sans grande surprise, et je m'étais même surpris par mon propre comportement. Jimin et Hayun filait le parfait amour, et même s'ils se disputaient souvent pour tout et rien, moi, je ne pensais qu'à Taehyung. A sa façon de me regarder quand il s'était tenu à table chez mes parents, à sa façon d'être tout et rien à la fois. Cette fâcheuse impression de parfois passer à côté de sa véritable raison d'être me rendait anxieux.
La veille de la soirée, j'avais préféré rester dans mon lit après le service au restaurant. Taehyung s'était bien vite éclipsé, me soufflant rapidement de le tenir au courant de ma décision pour le lendemain. Je n'avais même pas eu envie de lui demander ou est-ce qu'il était si pressé de se rendre, et, vexé, m'était terré dans le silence entre mes draps.
Hoseok n'avait pas arrêté de me tanner pour que je cède à la soirée, me disant que c'était le moment parfait pour enfin laisser parler mon coeur. Je lui étais redevable pour tous ses efforts et étais à la fois en colère contre sa manie de toujours se mettre entre Taehyung et moi quand je me sentais enfin pousser des ailes. Avec du recul, aujourd'hui, je sais que j'étais juste idiot, aveugler par ma vigilence et ma peur de me faire rejeter au risque de voir ma dignité partir en éclats.
Je m'étais endormi un peu fiévreux ce soir-là, attristé de voir que Taehyung n'avait pas jugé bon de répondre à mon dernier message.
Le lendemain, le jour-j, il m'avait été impossible de me concentrer sur mes livres de cours. C'était sans compter la joie de ma sœur qui n'avait pas cessé d'écouter les derniers titres en vogue à fond la caisse entre les quatres murs aussi fins que du papier de sa chambre.
En parlant de Jiwoo, c'est elle qui avait réussi à me faire sortir de ma grotte quelques heures à peine avant la soirée.
– Oh, allez Kookie, tu vas bien y aller à cette soirée non ?
– Je sais pas... Je ne sais pas si j'en ai envie.
– Hm.
– Quoi ? demandais-je devant son air suspicieux.
– Tu ne sais pas si la personne que tu veux voir y sera, c'est ça ?
– Comment tu peux être aussi perspicace, sérieux...
– Fréro, c'est toi qui n'as pas les yeux en face des trous.
– Eh, j'suis ton aîné je te rappelle.
– Ouais, et moi je suis la reine d'Angleterre Jungkook. Je sais très bien que t'es amoureux. Je sais aussi que c'est pas d'une...
Avant qu'elle ne le prononce, je me jetais sur elle et barrait ses lèvres de ma main, presque affolé. Je n'avais pas honte d'aimer, qui plus est, d'aimer un garçon, surtout Taehyung. Je ne savais juste pas comment en parler à qui que ce soit, encore moins à ma famille. Mais j'avais sans aucun doute oublié que ma sœur, comme moi, avait grandi, et que le monde n'avait jamais cessé de tourner, la société avec elle. J'étais peut-être le plus vieux de nous deux, mais elle avait déjà expérimenté le fait d'être en couple avec quelqu'un, de pouvoir ressentir son coeur se gonfler de plénitude dû au fait de sentiments partagés.
Nous avions toujours été proches, Jiwoo et moi, mais je ne lui avais jamais dit que j'étais amoureux, elle l'avait deviné toute seule. Comme ma mère, je crois bien.
– Demande-lui, me dit-elle.
– De quoi tu parles ? dis-je, laissant tomber ma tête dans mes genoux.
– De Taehyung. Demande lui s'il va venir à cette soirée.
– Comment tu...
– Jungkook, tu te souviens ? dit-elle en pointant sa tête. J'ai un cerveau, et des yeux. Maman nous a toujours dit que nous, les filles, on avait un radar pour ces choses-là.
Je préférais taire mes réflexions pour ne pas lui donner raison, mais elle savait très bien que je m'étais avoué vaincu au moment où j'évitais son regard.
– Tu fais genre que tu fais partie de ces bandes de gars qui se la joue bad boy et ténébreux, mais tu as un vrai cœur d'artichaut, fréro, dit-elle en riant mais je sais qu'elle ne se moquait pas. Tu restes coincé dans ta chambre pendant des heures beaucoup plus souvent depuis que Taehyung est venu manger à la maison. Tu peux choisir de ne rien me dire, mais j'ai tout vu. Tu as toutes tes chances, alors tu vas sortir de ce lit, et on va te faire le plus beau gosse de la soirée. Tu vas voir !
J'avais bien été obligé d'abdiquer. D'ailleurs, c'est Jiwoo qui avait fini par prendre mon téléphone pour prévenir Jimin et Hayun de venir me chercher pour qu'on se rende ensemble à la soirée. J'aurais aimé pouvoir l'emmener avec moi ce soir-là, mais j'avais préféré éviter les foudres de mon père quant au faite qu'elle restait ma petite soeur et qu'elle n'était pas encore en âge de faire ce genre de chose...Soit, c'était une façon de penser je présume.
Arrivé devant le bar, j'avais découvert le monde qui bientôt m'ouvrirait grand ses portes. Des masses d'étudiants riaient à plein poumons dehors, certains fumaient et partageaient des bières, tandis que d'autres semblaient attendre quand viendrait leur tour d'entrer.
– Merde, j'espère qu'on va pouvoir entrer, se plaignit Hayun en réajustant sa jupe.
— Tu devrais plutôt t'inquiéter de ce que va dire ton frère quand il te verra porter cette jolie jupe bébé, répondit Jimin en embrassant sa tempe.
– Taehyung va venir ? demandais-je, les mains dans les poches de mon cuir.
– Il ne m'a pas répondu, on aura qu'à demander à Namjoon quand il... Ah ! Les voilà ! Nam, Yoongi !
C'est avec plein d'espoir que je me retournais pour accueillir nos amis, mais fut tout de suite déçu de ne pas voir Taehyung en leur compagnie. Hoseok ne tarda pas à nous rejoindre, et nous ne l'avions pas attendu pour entrer. D'après Hoseok, le concert allait bientôt commencer et toujours pas de Taehyung en vue.
La soirée battait déjà son plein, et le groupe, du nom de DUUNES si je me souviens bien, se faisait encore attendre. Les vibrations de la musique pop à travers les enceintes me faisaient étrangement penser être acteur d'une de ces fameuses séries pour ado ne manqua pas de faire palpiter l'air, créant une atmosphère euphorique.
J'étais là, avec Namjoon et Yoongi, à écouter distraitement leurs conversations. Mes pensées divaguaient, captivées par le mouvement des corps et les rires qui résonnaient dans la pièce underground. Pourtant, malgré toute cette agitation, un poids pesait sur moi.
Les échanges chaleureux entre Jimin et Hayun ne faisaient qu'accentuer mon malaise. Le regard amoureux que mon meilleur amie réservait à Hayun contrastait fortement avec mes propres sentiments intérieurs. Je me sentais en décalage avec leur bonheur évident, tandis que le mien attendait encore de pouvoir s'exposer au grand jour. Quand Namjoon mentionna Taehyung qu'il avait croisé plus tôt en compagnie d'une amie, je ressenti comme un coup au cœur. Yoongi enchaîna en répondant qu'il viendrait certainement avec elle, et là, je me senti presque défaillir. L'idée qu'il puisse venir accompagné me troubla et sema le doute dans mon esprit déjà tourmenté. Je me demandais pourquoi j'avais même décidé de venir ici, si c'était pour affronter cette déception évidente.
Puis, le groupe, du nom de DUUNES si mes souvenirs sont exactes, monta sur scène, déclenchant une vague d'excitation sans pareille dans la foule. Les premiers accords de guitare secouèrent la pièce, incitant tout le monde à se laisser emporter par la musique. Malgré moi, je me laissais entraîner sur la piste de danse par Jimin, cherchant un répit à mes tourments. Pourtant, même au milieu de cette euphorie puant la jeunesse et la liberté, le poids de mes émotions restaient accablant. Mon esprit était envahi par Taehyung, son absence me pesant comme une ancre. Je me sentais submergé par un mélange de désir et de désespoir, cherchant désespérément une échappatoire.
Dans cette nuit bruyante et étourdissante, j'aspirais à trouver le courage de surmonter mes peurs et de révéler mes sentiments à mon aîné. Mon cœur battait au rythme des notes, oscillant entre espoir et déception, dans l'attente incertaine d'un dénouement qui pourrait changer le cours de ma soirée, voire même de ma vie.
Ma terrible attente ne fut pas vaine, et alors que je m'attelais à paraître emporté par ma danse terrible (je l'admets), Taehyung finit par se montrer, et comme dans une scène au ralenti d'un film de romance stupide et naif, je le vis au bras d'une très jolie fille qui lui lançait de superbes sourires. Elle semblait déjà conquise par l'atmosphère de la soirée, tandis que taehyung, lui, avait l'air perdu dans ses pensées. Son regard cherchait quelque chose, ou peut-être quelqu'un au milieu du tas d'étudiants enjoués.
Accablé par ma peine, je décidais de m'échapper. Je ne sais pas pourquoi, mais ma première pensée fut de me dire qu'il valait mieux l'éviter pour le moment. Je me frayais donc un chemin à travers la masse de corps ondulant sans rythme, essayant de me perdre dans l'anonymat de la nuit, comme l'aurait fait un poisson dans la profondeur des océans. Néanmoins, et malgré tous mes efforts pour l'éviter, je me retrouvais face à lui. Heureusement, sa copine semblait l'avoir déjà abandonné.
Nos regards se croisèrent dans un instant chargé de tension, sans que je ne sache pourquoi, et je sentis mon cœur s'emballer dans ma poitrine. Je me mordis la lèvre inférieure, tentant de cacher l'orage d'émotions qui faisait rage en moi, comme une terrible tempête prête à déchainer un véritable tsunami.
– Salut, dis-je d'une voix à peine audible, cherchant à dissimuler ma propre vulnérabilité.
Taehyung me lança un regard que je ne pus définir, un léger froncement de sourcil traduisant son trouble intérieur, certainement.
– Salut Jungkook, répondit-il, sa voix empreinte d'une étrangeté que je ne pu déchiffrer.
Nous restions là, face à face, pris dans un silence tendu que pouvait aisément traduire nos visages, contrebalançant avec la musique de la salle. Je sentis le poids de toutes ses paroles non dites planer entre nous, comme une barrière infranchissable qui séparait nos mondes.
Finalement, Taehyung brisa le malaise.
– Tu vas bien ? demanda t-il, ses yeux scrutant les miens avec une intensité troublante, à travers les différents spots de couleur qui habillait son visage de bleu et de rose.
Je hochais timidement la tête, essayant de garder mon calme malgré le chaos qui régnait en moi.
– Ouais, ça va, mentis-je sachant que ni lui, ni moi ne pouvions être dupé par cette façade fragile.
Un sourire triste étira les lèvres de Taehyung, et mon cœur se serra à cette vision.
– Tant mieux, dit-il simplement, mais ses mots résonnèrent dans le vide, chargés de significations que je ne pu tout à fait saisir.
D'un commun accord, nous nous séparions alors, emportés par le flot de la soirée, chacun portant le poids de nos propres secrets et tourments. Dans le tumulte de la nuit, je me demandais si peut-être, juste peut-être, il y avait un espoir pour nous, ou si nous étions destinés à nous perdre dans les ombres de nos propres désirs inassouvis.
Sans bouger, j'observais Taehyung rejoindre nos amis, la fille de nouveau à ses côtés. Elle s'intégra rapidement au groupe, saluant tout le monde avec un beau sourire chaleureux, même Jimin. Je me mordis les lèvres, sentant une pointe de trahison envahir mon coeur. C'était idiot, je le savais. Personne ne m'avait jamais rien promis, surtout pas Taehyung. Mais au fond de moi, j'avais espéré être spécial à ses yeux, comme il l'était pour moi.
Je me décidais quand même à les rejoindre à mon tour, et me sentais comme un étranger parmi eux, spectateur solitaire de leur bonheur et de leur légèreté. Je refusais l'invitation de Hayun à retourner danser, préférant rester en retrait et observer taehyung s'amuser.
Je le découvris sous un nouveau jour, dans cet environnement festif, loin de la sérénité de la mer et du silence des vagues. Taehyung, d'ordinaire si sérieux et mystérieux, se révélait sous une autre facette que je n'avais jamais vue auparavant. Et malgré moi, je le trouvais encore plus fascinant.
Mon cœur bondit à cette constatation, avant que la fille ne lui saute sur les épaules. Une pointe de jalousie me transperça, et je passais la langue contre l'intérieur de ma joue, serrant les poings pour réprimer mes ressentiments.
C'est alors que Hoseok arriva à mes côtés, venant de nul part, me tirant de mes pensées tourmentées.
– Qu'est-ce que tu fiches, Kook ? dit-il en passant le bras sur mes épaules. Tu devrais foncer !
Je soupirais.
– Il n'a pas l'air d'être disponible, là. De toute façon, il semble qu'il la voit beaucoup en ce moment, non ?
Hoseok secoua la tête avec détermination, retirant son bras et me poussant dans mon dos.
– Tu ne dois pas hésiter, Kook. Saisis ta chance.
Ses mots résonnèrent en moi, et malgré mes doutes et mes peurs, je sentis une lueur d'espoir naître en moi. Peut-être que Hoseok avait raison, peut-être que je devais oser, même si cela signifiait risquer de me briser. Et avec cette pensée comme leitmotiv, je lui volais son verre des mains, finissant sa bière et ignorant ce goût amer glisser dans ma gorge, avant de me lancer pour affronter mes démons et saisir ma chance, quoi qu'il en coûte.
Je m'approchais de la piste, et, d'un geste impulsif, j'attrapais Taehyung par le bras et tentais de lui parler.
– Taehyung, je... Je voudrais te parler ! articulais-je, ma voix tremblant légèrement sous le poids des émotions contraires qui m'habitaient.
Mais il ne sembla pas m'entendre, absorbé par l'euphorie de la soirée. Mes paroles se perdirent dans le vacarme de la musique, et je sentis la frustration monter en moi.
– Taehyung, bon sang, écoute-moi ! criais-je, ma patience s'effritait un peu plus à chaque seconde.
Il m'accorda enfin un regard, une expression confuse sur son visage.
– Qu'est-ce qui se passe Jungkook ? demanda t-il, sa voix se perdant dans la foule.
Je sentis la colère monter en moi, cette fille était toujours là, elle me regardait gentiment pourtant mais elle m'agaçait, et mes mots s'échapèrent de ma bouche avant même que je puisse les retenir.
– Tu te moques de moi, c'est ça ? Tu te moques de ce que je ressens ? lui dis-je, mes paroles teintées d'amertume et de douleur.
Remarquant sûrement que je commençais à m'exciter pour pas grande chose, Taehyung me tira à sa suite et nous nous éloignâmes de la piste, trouvant enfin un coin plus calme, vers le fumoir extérieur.
– Qu'est-ce que tu veux dire, Jungkook ? De quoi tu parles ? demanda t-il, empreint de sincérité.
Je secouais la tête, honteux et vexé de ma propre intervention, sentant mes émotions me submerger. Jiwoo avait raison, j'étais un vrai cœur d'artichaut.
– Ça ne fait rien, murmurais-je. C'est pas grave.
Me sentant prêt à craquer, je m'apprêtais à fuir quand Taehyung me retient en attrapant mon poignet. Son contact me figea sur place, mon cœur battant la chamade dans ma poitrine. Puis, il attrapa ma main, ses doigts serrant les miens avec une force inattendue.
– Jungkook, sérieusement, qu'est-ce qui se passe ?
La douceur de sa voix rauque me toucha au plus profond de mon être, et j'hésitais, déviant le regard, sentant que mon cœur était sur le point de déborder. Je le sentais comme une terrible envie de vomir, remontant le long de mon oesophage, prêt à dépasser la barrière de mes lèvres que je ne cessais de pincer. Une partie de moi voulait fuir, se réfugier dans le confort de mon propre chagrin naïf, mais une autre savait qu'il était temps de mettre cartes sur table.
Alors, sans vraiment comprendre pourquoi, je me lançais dans une dispute, mes mots libérant mon cœur meurtri.
– Tu me manques ! Voilà ! Taehyung... On se voit de moins en moins ces temps-ci, et j'ai l'impression que pour toi, ça ne change rien.
Il fronça les sourcils, son expression se mêlant d'incompréhension et de tristesse.
– Je suis désolé, Jungkook. J'ai eu beaucoup à faire ces derniers temps, mais ça ne veut pas dire que je ne veux pas passer du temps avec toi. Tu sais, je donnerais n'importe quoi pour être avec toi, même quand je ne le peux pas. Surtout quand je ne peux pas.
Mes yeux s'emplirent de frustration, les mots me brûlant la langue alors que je luttais pour exprimer mes sentiments.
– Ca ne suffit pas, Tae, répliquais-je sous le poids de ma propre peine. J'ai l'impression que je suis l'autre, comme une option. Tu passes tout ton temps avec cette fille et moi je... Moi je me sens... Abandonné.
Je relevais enfin les yeux, rencontrant la tristesse qui voila son propre regard.
— Ce n'est pas ce que je voulais ! Jungkook... Je pensais que tu comprendrais que parfois, les choses sont compliquées. Tu le sais déjà, c'est pas toujours simple pour moi.
– Je comprends, mais ça ne rend pas la douleur plus facile à supporter, dis-je, massant ma gorge qui était prête à me trahir.
Il ouvrit la bouche pour me répondre, mais je secouais la tête, sentant que c'était enfin le moment, le moins propice possible finalement, pour laisser échapper ce qui ne cessait de tordre mes entrailles.
– Je t'aime, Taehyung, avouais-je enfin, mes mots chargés de toute la vérité de mon cœur. Mais je... Je peux pas te regarder partir avec quelqu'un d'autre sans te le dire.
Une lueur de compréhension passa dans ses yeux, je crois, et sa main se posa doucement sur ma joue, arrêtant le temps.
– Je suis désolé, Jungkook. Je ne voulais pas te faire de mal.
Nos regards se croisèrent, une connexion silencieuse s'établissant entre nous. Et alors que le monde autour semblait s'effacer, alors que je me faisais rapidement à l'idée que je n'aurais pas d'autre réponse de sa part, il ébranla tout mon univers en s'approchant de moi comme si j'étais un foutu bout de porcelaine, une petite vague qu'on a peur d'effrayer, il posa son front contre le mien, faisant effleurer nos lèvres.
Comme si je m'étais mis sur pause, mes sens s'activèrent dans tous les sens, me plongeant dans un tourbillon de panique, mais Taehyung ne laissa pas le temps à la tempête de s'installer, et captura mes lèvres dans un baiser doux et passionné, scellant à tout jamais mon coeur au sien.
Rien n'était dit, aucun mot n'avait défini ce que nous étions, ce que nous faisions à ce moment même, ni même ce qu'il adviendrait ensuite. Pourtant, je ne m'étais jamais senti aussi vivant qu'à cet instant, amarrant enfin mon bateau aux portes de son cœur, et le sien, gravant son ancre dans ma peau.
nda : le seneug* est une compilation d'examens destinés aux élèves de terminal pour accéder aux universités.
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