♪ : Love wins all (slow piano instrumental version) - Kev Lai

Janvier 2017

En ce nouveau début d'année, mon premier regret avait été de ne pas avoir pu le fêter aux côtés de Taehyung. A vrai dire, je n'avais pas du tout osé le lui demander, et j'avais appris qu'il n'était pas le genre à s'en préoccuper non plus.

Pourtant, à mes yeux, le dernier jour de l'année avait toujours été une fête. Peut-être que cela avait été le résultat de ce que ma famille m'avait inculqué, après tout, je pouvais tout aussi bien comprendre et entendre que tout le monde ne pensait pas comme moi.

Alors, sans grande surprise, j'avais partagé ce merveilleux moment aux côtés de ma famille, comprenant également Jimin et sa mère. Hayun nous avait fait le plaisir d'être là, et j'avais beau avoir essayé de combattre ma curiosité, j'avais fini par lui demander où était son frère. C'est avec un doux regard, et peut-être un peu de peine, je crois, qu'elle m'avait répondu qu'il était parti rendre visite à Muna, à Sokcho, pour ne pas la laisser passer le cap de cette nouvelle année seule.

Rassuré, et surtout touché par cette marque d'affection, j'avais acquiescé avant que Jimin ne m'embarque dans une danse endiablée et ridicule qui avait fait rire toute la galerie. J'avais passé une excellente soirée, et bien que Taehyung n'avait pas été présent, j'avais eu l'impression de commencer une nouvelle vie.

Savoir qu'il existait, qu'il était mon... Ami, et qui qu'il faisait partie de ma vie, de mes proches, avait suffit à me rendre heureux. Je ne sais pas comment le décrire, vous savez, c'est un peu comme le syndrôme du main character. Je m'étais retrouvé à hurler "bonne année", une coupe de soju à la main, comme si tout autour de moi s'était arrêté et que la musique berçait mes pas.

Bref, retenez que j'avais adoré vivre ce moment hors du temps, et que ma première pensée était allée à Taehyung. A lui, et à son merveilleux sourire qu'il me tardait de revoir.

Quelques jours plus tard, après une matinée de cours, je m'étais retrouvé à accompagner Hayun faire quelques emplettes dans les magasins. Elle avait longuement insisté, me disant que c'était une tâche "absolument importante et top secrète" alors, en tant que meilleur ami exemplaire, j'y étais allé.

C'était peut-être une fille qui avait cette allure de petite caïd, mais Hayun restait une fille très coquette et qui prenait soin de son image. Cela dit, ce jour-là, elle ne fit que lécher les vitrines de bijoutiers, de produits et d'accessoires pour homme. Bêtement, j'avais pensé qu'elle souhaitait faire une surprise à Jimin, alors j'avais jugé bon de la conseiller quant à ses goûts.

— Il n'est pas si difficile que ça, tu sais.

— Mais de qui tu parles, Kook ? me dit-elle alors qu'elle lorgnait sur un joli bracelet fait main.

— Tu cherches un cadeau pour Jimin, pas vrai ? Vu qu'il t'en a offert un à Noël, tu veux lui rendre la pareille.

Contre toute attente, elle se mit à rire de bon cœur et secoua la tête de droite à gauche avant de prendre le bracelet dans sa main.

— Pas du tout, trancha-t-elle.

— Hein ?

— J'ai déjà offert mon cadeau à Jimin, mais ce que je cherche n'est pas pour lui.

D'abord surprit, je fis la moue avant de m'imaginer qu'elle pouvait faire faux bon à mon meilleur ami. Cela dit, je me trouvais de suite idiot de penser une telle chose, Hayun était peut-être le genre à se la jouer dur, mais elle aimait Jimin autant que Taehyung aimant l'océan.

— C'est quoi cette tête ? se moqua-t-elle en me pinçant la joue.

— Tu... Pourquoi tu cherches un cadeau alors ?

Elle fixa encore le bracelet avant de sourire à pleine dent, certainement fière de son choix. Elle finit par appeler la vendeuse et nous nous dirigeâmes vers la caisse. C'est seulement lorsqu'on quitta la petite boutique qu'elle me donna une tape sur l'épaule, attirant mon attention.

— C'est pour mon frère.

— Oh. Oh... Tu n'avais pas pu lui faire de cadeau à Noël ?

— Non, ce n'est pas ça. Je n'ai pas pu le voir pour son anniversaire, il était déjà parti alors je profite du fait qu'il ai pu oublier pour lui faire la surprise.

— Son... Anniversaire ?

— Bah oui, c'était le 30 décembre, tu ne le savais pas ?

Le ciel me tomba littéralement sur la tête. Je me sentis d'abord bête, puis fichtrement idiot. Taehyung ne m'avait jamais rien dit sur sa date d'anniversaire, et je me fis la réflexion que si j'avais su, je ne l'aurais loupé pour rien au monde.

— Jungkook ?

— Si, bien sûr si que je le savais ! Qu'est-ce que tu crois...

Le soir même, après avoir raccompagné Hayun, j'avais couru jusqu'à ma chambre et m'était enfoui dans mon lit, les yeux rivés sur mon téléphone. Ma dernière conversation avec Taehyung datait de la nouvelle année, nous nous étions seulement envoyé un simple message, et je m'étais trouvé pitoyable de ne pas avoir su pour son anniversaire. Peut-être que j'avais dû le décevoir, que je l'avais vexé ?

Soudain, une petite lumière scintilla dans ma tête et ni une, ni deux, je me mis à taper plus vite que l'éclair sur mon écran et sorti tel une furie de ma chambre. Mes parents étaient déjà partis au restaurant, et autant dire que seul, ma tâche allait être longue.

Au même moment, alors que j'étais dans la cuisine, debout et les bras ballants comme un imbécile, ma sœur passa par là. Comme nous allions être en week-end, elle se baladait avec un masque en tissu sur la tronche et ses cheveux étaient entremêlés dans des bigoudis. Elle passa devant moi, ignorant ma détresse et allait attraper de quoi manger dans le frigo.

— Jiwoo ?

Parfois, je me disais que ma sœur était une véritable actrice de nature. Comme elle n'avait pas dû faire attention à moi, ma voix la fit sursauter et je ne pu me retenir de rire lorsque je vis son masque glisser sur sa peau, la faisant grimacer.

— Putain, Kook !

— Eh, maman t'as déjà dit de pas parler comme ça. Mais t'aurais dû voir ta tête, alors, il est bon ce masque ?

Elle grogna dans sa barbe et remit en place (comme elle put) son masque sur son visage, avant de me fixer, et c'est là que je me rappelais que moi non plus, je ne ressemblais pas à grand chose, un peu perdu et pourtant plein d'espoir.

— Tu te moques, tu te moques, mais tu fais quoi tout seul dans le noir ?

— Eh bah, je...

Elle leva les yeux aux ciel, et s'apprêtait à partir quand je la retins.

— J'ai besoin que tu m'aides... dis-je, presque dans un murmure.

— Quoi ? J'ai pas compris Kook. Que je quoi ?

Je savais qu'elle avait entendu et qu'elle voulait juste que je le dise plus fort, cette fourbe.

— Que tu m'aides. J'aimerais que tu m'aides, s'te plait.

— Ah ouais ? A faire quoi d'abord ?

— Ben, je...

Je passais la main derrière mon crâne, un peu embêté. Je savais que Jiwoo se doutait que je ressentais quelque chose pour quelqu'un, elle ne cessait jamais de me charrier et à vrai dire, elle ne se doutait même pas qu'il pouvait s'agir d'un garçon.

— Je veux préparer une surprise pour quelqu'un.

— T'as une copine Oppa ? se mit-elle à hurler, comme une fan en délire.

— Non ! Je veux juste préparer des trucs cool pour une surprise, j'aime personne.

— Tu mens.

— Je t'ai pas demandé ton avis.

— Alors débrouille toi, salut !

Je l'entendis rire, et elle, m'entendit souffler, avant de se retourner face à moi, les bras croisés contre son torse.

— Je vais t'aider grand-frère, fais pas cette tête. Je suis la meilleure, avec moi, ta copine sera la plus heureuse, t'inquiète pas ! Laisse moi juste nettoyer mon visage et j'arrive ! dit-elle en partant vers la salle de bain.

— J'ai pas de copine ! hurlais-je, un sourire aux lèvres.

Le lendemain soir, je m'étais rendu comme toujours au restaurant de mes parents pour les aider pour le service. En partant, je n'avais pas oublié les tupperwares que j'avais rangé dans le frigo la veille, et que Jiwoo m'avait aidé à préparer. En cachette, j'avais piquer le joli panier que ma mère utilisait lorsque nous allions pique niquer quand j'étais petit,et y avait tout ranger, n'oubliant pas quelques friandises. Lors de mon service, j'avais profité d'un moment d'inattention de la part de mes parents pour attraper quelques boissons, dont du soju dans la réserve, et les avaient rangés avec soin dans mon panier.

A la fin de mon service, alors que quelques clients, amis de mes parents profitaient encore de leur boisson pendant que je nettoyais, je vis Taehyung arriver au loin. Je lui avais demandé s'il comptait me rendre visite, et bien que cela était une habitude, j'avais tenu à ce qu'il me le confirme, de peur que ma surprise ne parte en fumée.

Il faisait encore très froid en ce mois de janvier, la neige tombait encore. Il portait un merveilleux manteau noir qui lui allait à ravire, et qui le rendait plus adulte qu'il ne l'était déjà. Ses cheveux dansaient au vent, et je remarquais que sa couleur blonde était encore plus éclatante que la dernière fois que nous nous étions vues.

Je devais peut-être avoir eu un moment d'égarement, puisqu'il fallut que ma mère me fasse revenir sur terre en secouant un chiffon sous mes yeux.

— Jungkook, mon petit, ton ami est là. Que fais-tu encore ici à nettoyer ces... Oh, Jungkook, tu avais la tête ailleurs à ce que je vois, dit-elle en souriant.

A vrai dire, la vision de Taehyung m'avait totalement éloigné de ma tâche, résultat, j'avais renversé (involontairement bien sûr) le reste des verres que j'avais pris dans les mains sur la table qui, au final, était encore plus sale qu'avant.

— Tu devrais filer, mon fils.

Reprenant mes esprits, je m'excusais de suite auprès de ma mère qui m'arracha presque le chiffon de mes mains.

— Il t'attend, alors va. Porte bien ton manteau.

— Oui, maman !

Pressé, je courais presque jusqu'à la réserve et me changea aussi rapidement que possible. Mais avant que je ne franchisse la porte du restaurant, muni de mon sac à dos et du panier que j'avais tenté de cacher dans un autre sac de course, ma mère m'attrapa pour me faire un baiser sur la joue, et me chuchota :

— Je ne dirais rien à ton père, et je me suis permise de te glisser quelques tteokbokki dans le panier. Amuse toi bien, mon petit.

Gêné, j'étais sorti en trombe pour échapper au regard bienveillant et doux de ma mère. Évidemment, il avait fallu que je rougisse comme une tomate trop mûre, et Taehyung ne tarda pas à le remarquer, même dans la nuit.

— Hey Jung... Tu rougis ? Quoi, je suis aussi beau que ça ?

La remarque de Taehyung n'arrangea pas mon état, et sans répondre, je brisais toutes mes barrières en lui attrapant le poignet, presque envieux de sa main, avant de le tirer du côté de la plage.

Taehyung, lui, se contenta de me suivre en riant de bon cœur, et ce n'est que lorsqu'on atteignit notre petit coin à nous que je remarquais qu'il portrait une guitare dans son dos.

— Tu... Tu fais de la musique ? avais-je dis, surpris.

— Un peu.

Il haussa les épaules, et très vite, son attention dériva sur le sac que je portais.

— Et toi, tu as prévu quelque chose ?

Aussitôt, je me gonflais de courage et même avec ce froid qui faisait rougir mes joues et mon nez, je le fixais avec intérêt.

— Ferme les yeux, s'il te plait.

Ce que j'aimais le plus avec Taehyung, c'est qu'il ne posait jamais trop de question. Avec moi, du moins, il avait une facilité étrange pour me faire confiance, et s'exécuta de suite. Je pouvais le voir un peu frissonner bien qu'il était emmitouflé dans son beau manteau, alors, je me hâtais à préparer ma surprise, le cœur battant et surtout, appréhendant sa réaction.

Chose faite, j'inspirais un bon coup et serrais les poings.

— Tu peux ouvrir les yeux, Hyung.

De tous les scénarios que je m'étais faits, je n'avais pas pu penser à celui-ci. La réaction de Taehyung fut une réelle délivrance, et bientôt, mon cœur loupa un battement lorsque je vis ses yeux briller grâce à la petite lumière que j'avais pensé à amener. Ce n'était vraiment pas grand chose, et à vrai dire, je n'avais encore jamais fait ça pour quelqu'un. Qui plus est, je devais être la seule personne sur terre à penser à faire un pique-nique à la plage, avec ce temps,et surtout, en pleine nuit.

Taehyung s'abaissa le premier, et ses yeux parcoururent la serviette sur laquelle j'avais posé mes glorieuses préparations, ainsi que les différentes boissons, dont le soju qu'il adorait, sans oublier la petite enveloppe à son nom.

N'ayant toujours pas de retour de sa part, je me mis à paniquer et comme un abruti, faillit tomber comme un bleu en voulant m'asseoir face à lui. Je le fixais, anxieux, et le vit se débarrasser de sa guitare qu'il posa à ses côtés avant de tendre la main vers l'enveloppe.

Sans dire un mot, il passa le doigt sur son nom que j'avais calligraphié avec amour, puis il décacheta l'enveloppe pour en sortir ce que j'avais qualifié comme étant son cadeau. Je retenais mon souffle, voyant ses yeux valser entre les lignes des titres de chansons que je lui avais dédié, et surtout, sur ce dessin de l'océan qu'il aimait tant.

C'était certainement le cadeau le plus simple de la terre, et je me sentis très vite mal à l'aise, me disant que j'aurais peut-être dû lui offrir quelque chose de plus utile, quand soudain, il releva les yeux vers moi. Je vis une larme coulée sur sa joue, une seule, avant qu'il ne porte la feuille à son cœur.

— Je... J'ai quand même du retard, pardonne moi. Mais voilà, je... Joyeux anniversaire Hyung.

Comme remerciement, j'eu droit à un sourire encore plus beau que tous ceux qu'il m'avait déjà adressés auparavant. Autant dire que ce simple geste me suffit pour me faire tomber encore plus amoureux que je ne l'étais déjà, mais effrayé par l'idée qu'il puisse le comprendre, je me hâtais à lui présenter les différents "plats".

Ma sœur avait fait un travail de chef, et bien que nous n'avions pas les qualités d'un chef, nous avions fait des choses simples et que je savais, Taehyung appréciait. Nous commençâmes assez vite à grignoter, avant que je ne prenne l'initiative de lui servir un peu de soju, en l'honneur de son année de plus.

Il me remercia et me taquina, encore et encore, me faisant sourire de temps à autre, puis il prit le temps de m'expliquer ce qu'il avait fait pour le nouvel an, écoutant mes propres anecdotes avec attention.

Je sentais son regard sur moi, comme si quelque part, j'étais la chose la plus belle et la plus merveilleuse qu'il pouvait exister au monde. Je ne faisais pourtant rien de bien extraordinaire, si ce n'est faire des gaffes et rire de mes propres blagues.

Bientôt, l'alcool commença à me rendre bien joyeux, et c'est avec douceur que Taehyung me retira mon verre.

— Assez pour cette fois, pretty boy.

— Tu... Tu m'as appelé comment ? demandais-je, l'air bienheureux.

— Comme tu le mérites, répondit-il sincèrement.

Avant que je ne puisse réagir, je le vis attraper sa guitare et s'accorder à son rythme.

— Je ne savais pas que tu jou-jouais, dis-je entre deux hoquets.

— Tu as trop bu, Jungkook, se moqua t-il gentiment.

— Faux ! Je vais TRÈS bien Monsieur !

— Bien, alors... dit-il en baissant la tête sur sa guitare. Tu apprécieras sans doute ce morceau, dans ce cas.

La mélodie qu'il commença à jouer apaisa de suite les battements de mon cœur, mais cela fut de très courte durée, avant qu'il ne commence à chanter. Enfin, il se contenta de chantonner quelques paroles, qui, non seulement me firent frémir, mais aussi, surent me faire fondre comme les petits flocons qui finissaient leurs route sur nos épaules.

— Mon cher bien-aimée, mon univers...Veux-tu m'emmener ? Dans un endroit que ma propre imagination ne pourrait envisager. Loin de la Terre, sur Mars, veux-tu venir avec moi ? Où que tu sois, longue solitude. Je recherche le sentiment opposé. Est-ce par erreur que nous sommes si loin l'un de l'autre... Serons-nous réunis ? Échappons au monde et continuons d'avancer. Je n'ai pas d'autre choix que d'aller jusqu'au bout, mon amant. Est-ce une mauvaise fin si nous nous perdons ensemble ?Serre moi le plus fort possible, embrasse moi plus tendrement, mon cher amant. L'amour est à l'origine de tout. Échappons au monde et continuons d'avancer. Avançons ensemble jusqu'à la fin, mon cher amant. Est-ce une mauvaise fin si nous nous perdons ensemble ? Les yeux rivés sur toi, je souris de nouveau, en paix. Tout en flottant dans l'air, comme cette nuit-là. Veux-tu partir au soleil couchant avec moi ? Je veux être triste avec toi. Fuyons l'inévitable, continuons. Continue avec moi jusqu'à la fin, mon cher amant. Nous deux, désespérément perdus l'un aux côtés de l'autre. Serre moi le plus fort possible, embrasse moi plus tendrement, mon cher amant. Notre amour est plus fort que tout.

Je ne connaissais pas la chanson qu'il me chantait, mais j'avais pu deviner qu'elle devait être importante pour lui, qu'elle devait signifier quelque chose de fort et de profond à son cœur. Il l'avait joué et chanté avec tellement de peine et de douceur, que j'avais vraiment eu envie d'en pleurer. Quelque part, mon coeur avait aussi, et peut-être égoistement, pensé que ces paroles pouvaient m'être destinées.

Lorsqu'il eut fini, il releva la tête vers moi, et me fixa de ce regard troublant, et je ne pu faire autre chose que d'applaudir avec toute ma gratitude, et surtout, avec cet air niais collé au visage. L'alcool m'avait totalement chamboulé, sans parler de la voix rauque et précieuse de Taehyung qui, une fois encore et sans surprise, avait su me séduire jusqu'au plus profond de mon âme.

— C'est un très belle chanson, avais-je dis après un moment de blanc.

— C'est vrai. Elle me fait souvent penser à quelqu'un que j'aime beaucoup.

— Ah ? Ah oui ?

— Hm, acquiesça t-il en se tournant face à l'océan.

— Merci de me l'avoir joué, cette personne doit vraiment avoir de la chance et ne le sait même pas.

Je le vis sourire, mais comme l'alcool me jouait des tours, je ne pus vraiment voir ce qu'il murmura avant de me répondre.

— Je pense que c'est plutôt moi qui ai de la chance, mais oui, tu as raison, c'est dommage que cette personne ne le sache pas.

— Hyung ! Tu devrais vra-vraiment lui chanter un jour.

— J'y penserai, me dit-il les yeux rivés à nouveau sur moi.

Une fois encore, je me mis à rougir, et soudain pris d'une montée d'adrénaline que je ne pus définir ou stopper, je m'étirais totalement sur la serviette et me glissa petit à petit à ses côtés, jusqu'à ce que nos deux épaules se frôlent.

Taehyung sembla d'abord surpris de mon geste, je le sentis se crisper avant de se détendre à nouveau. Personnellement, ce fus la chaleur de sa présence à mes côtés qui eut le don de m'apaiser, et sans vraiment demander mon reste, je me permis d'attraper son bras et de plonger ma tête contre ce dernier.

Encore aujourd'hui, je remercie le temps de cette fameuse soirée de m'avoir soutenue dans mon projet ambitieux, et par ailleurs, Taehyung ne m'envoya pas une seule fois valser. Au contraire, cela le fit rire, ou du moins, je sentis son corps tressauter avant que le silence ne revienne nous bercer.

Puis, alors que je commençais doucement à m'endormir, malgré le froid, malgré le bruit des vagues, il retira quelque peu son bras et laissa ma tête retomber sur ses genoux. De fait, je sentis sa main glisser lentement, comme s'il avait longuement hésité, sur mon dos.

Mais alors que je m'apprêtais à doucement trouver le monde des rêves, Taehyung prit une douce inspiration et...

— Il était une fois, dans un petit village en bord de mer, un jeune homme. Il était un rêveur, une âme passionnée par la beauté de l'océan et les mystères qu'il renfermait. Chaque jour, il se rendait sur la plage pour contempler les vagues qui s'écrasaient contre le rivage, emportant avec elles les soucis du monde. Un jour, alors qu'il se promenait le long de la côte, il aperçut un homme se tenant là, les yeux fixés sur l'horizon. Un marin au cœur vaillant et à l'esprit aventureux. Le jeune homme fut immédiatement attiré par sa présence, par cette aura de mystère qui l'entourait. Au fil du temps, ils se rencontrèrent régulièrement sur la plage. Ils partageaient leur amour pour la mer, échangeant des histoires de voyages et de découvertes. Le marin avait une manière unique de la regarder, comme si elle était la chose la plus précieuse au monde, oubliant ainsi ses malheurs et ses démons. Ses yeux pétillaient d'admiration et de respect, faisant fondre le cœur du jeune homme à chaque regard. Chaque fois qu'ils se promenaient ensemble, le marin lui faisait se sentir exceptionnel. Il lui montrait les coquillages les plus rares, lui racontait les légendes marines les plus captivantes et lui enseignait les secrets de la navigation. Il l'encourageait à explorer son propre potentiel, à embrasser sa propre beauté intérieure. Un jour, le marin invita le jeune homme à monter à bord de son voilier. Ils partirent en mer, naviguant sur les eaux azurées, sentant le vent caresser leur peau. Le jeune homme se sentait vivant, libre et en parfaite harmonie avec le monde qui les entourait. Le marin lui apprit à manier les voiles, à diriger le bateau, lui montrant que ses capacités étaient infinies. Alors que le soleil se couchait à l'horizon, teintant le ciel de nuances éblouissantes, le marin prit la main du jeune homme et lui dit doucement : "Tu es la perle rare de ma vie. Tu es la merveille qui illumine mon monde. Chaque instant passé avec toi est une aventure inoubliable, une expérience qui me fait sentir vivant. Je suis éternellement reconnaissant d'avoir trouvé une âme sœur aussi extraordinaire que toi." Les mots du marin touchèrent le cœur du jeune homme, sans savoir que derrière se cachait une douleur immense, lui faisant réaliser à quel point leur amour était précieux. Ils continuèrent à naviguer ensemble, explorant les océans et créant des souvenirs qui resteraient gravés dans leur esprit pour toujours. Ils vécurent leur histoire d'amour au rythme des vagues, se soutenant mutuellement dans leurs rêves et leurs aspirations. Chaque fois que le marin regardait la mer, il se souvenait de cet amour qui le faisait se sentir exceptionnel, sachant qu'il avait trouvé un compagnon qui partageait sa passion et qui lui donnait l'impression d'être la plus précieuse des perles dans l'immensité de l'océan.

L'histoire que Taehyung me conta ce soir-là eut l'effet d'une bombe dans ma tête et dans mon cœur. C'est avec une facilité déconcertante qu'il m'avait plongé dans son univers fictif, au gré du vent et des vagues que j'avais retrouvé dans son récit. J'en avais oublié le temps et le froid, m'imaginant voguer sur cet océan qu'il avait décrit. A l'époque, je n'aurais jamais pu comprendre un seul instant que son histoire faisait référence à sa propre personne, et peut-être à moi-même. Je ne m'étais pas posé plus de questions sur qui pouvaient être le marin ou le jeune homme, m'identifiant à chacun d'eux.

Bien qu'elle avait eu une fin heureuse, l'histoire de Taehyung avait réellement touché mon cœur, au point où après ça, nous n'avions plus partagé de mots si ce n'est que notre silence. L'ambiance n'avait pas changé, et sa main avait retrouvé son chemin jusqu'à mon dos. Il avait continué de me sourire, je l'avais entendu, comme s'il avait voulu me remercier de l'avoir écouté, de l'avoir entendu.

En me laissant emporter par les vagues dans son propre monde, ce soir-là, je trouvais le sommeil en remerciant le ciel, quiconque avait pu guider le chemin de Taehyung vers le restaurant de mes parents, quelques mois plus tôt.

J'avais décidé de ne pas de poser de questions, de profiter de l'instant que l'on m'offrait, espérant quelque part, qu'un jour, je serais assez courageux pour être ce cher amant qu'il attendait tant.