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Chapitre 47 : Raven

Il n'était pas attendu chez les Goodwind avant le milieu d'après-midi mais il avait envie de voir Dylan. Les messages n'étaient pas suffisants. Pas maintenant qu'il pouvait l'avoir dans ses bras, qu'il pouvait l'embrasser. Il partit à pied, savourant l'air qui commençait à se réchauffer, la légère brise du printemps qui commençait à se faire attendre, la sensation du soleil qui pointait entre deux nuages.

Il frappa comme il put à la porte et Dylan vint lui ouvrir. Il lui offrit un large sourire en entrant et il alla mettre au frigo l'énorme gâteau qu'il avait préparé le matin même pour Amanda.

- Il a fallu que tu en fasses un, soupira Dylan.

Raven se tourna vers lui avec un air innocent. Comme s'il aurait pu faire autrement. Il n'allait pas les laisser acheter un gâteau bourré de produits chimiques et de sucre dans un supermarché alors qu'il pouvait le faire. Il avait adoré le décorer spécialement pour Amanda et il espérait qu'elle allait apprécier.

- Tu savais très bien que je n'arriverais pas les mains vides, chéri, répondit-il en se rapprochant de lui.

- Un bouquet de fleurs aurait suffi.

- Mais ça ne se mange pas. En parlant de ta mère, elle est où ?

- Partie avec Darren acheter l'élément essentiel de ce repas, à ces yeux : la chantilly.

- Ce qui fait qu'il n'y a que toi et moi...

Dylan rosit alors que Raven glissait ses bras autour de lui et venait lui voler un long baiser. Il se sentit sourire lorsque le présiden tdes élèves si timoré et dans la retenue glissa ses doigts sous son t-shirt, appuyant sa main sur sa hanche.

Ils restèrent dans la cuisine, Dylan appuyé contre le mur, pris en étau dans les bras de Raven. Il n'aurait pas cru que ça pourrait être aussi intense d'embrasser quelqu'un juste parce qu'il en avait envie, parce que c'était Dylan. Les seules fois où c'était arrivé, ça n'avait duré que le temps de gagner une chambre ou un endroit à l'écart pour pouvoir faire tomber les vêtements et s'envoyer en l'air.

Cette fois, c'était différent. Totalement différent. Il aurait pu embrasser Dylan pendant des heures sans se lasser, sans chercher à aller plus loin, sans rien vouloir de plus. C'était terrifiant mais, en même temps, il ne serait revenu en arrière pour rien au monde. Il ne s'était jamais mieux senti qu'en cet instant. Il n'avait jamais été plus heureux.

Ils firent un bond lorsque la porte claqua. Amanda et Darren les regardaient, la première avait une main plaquée sur la bouche alors que Darren avait l'air consterné et secouait la tête. Embarrassé, Raven se recula, se grattant l'arrière de la tête. À côté de lui, Dylan se cacha dans ses mains, rouge tomate.

Amanda vint les prendre dans ses bras, visiblement heureuse.

- Je le savais ! Je savais que ça arriverait ! s'écria-t-elle. Vous venez de me donner le plus beau des cadeaux pour mon anniversaire !

Elle les serra un peu plus, embrassant leurs joues avant de les relâcher.

- Ah, je suis heureuse ! Vous avez fait ma journée !

Dylan était toujours aussi rouge et Raven trouva ça absolument adorable. Il l'attira à lui, refusant de se cacher plus longtemps. Ils avaient été vus, peu importait qu'ils le soient encore, désormais.

- Le petit secret n'aura pas tenu longtemps, murmura-t-il à son oreille.

L'autre lui donna un coup dans les côtes pour le faire reculer et Raven se mit à rire. Il n'était pas gêné de savoir qu'ils avaient été vus en train de s'embrasser par Amanda et Darren, contrairement à Dylan qui semblait n'avoir qu'une envie : disparaître. Il aurait éventuellement pu mal réagir si Amanda n'avait pas été si heureuse de les savoir en couple.

- D'où vient ce magnifique gâteau ?

- Raven l'a fait, répondit Dylan.

- C'est toi qui as fait ça ? répéta Amanda, abasourdie. Un gâteau aussi beau ?

Cette fois, ce fut à son tour d'être embarrassé. Il hocha la tête. Il en voulait un peu à Dylan de l'avoir vendu aussi directement. Il détestait quand on vantait ses créations. Ce n'était qu'un gâteau, il n'y avait pas de quoi en faire tout un plat.

- Merci, Raven. Je n'ai jamais eu un aussi beau gâteau d'anniversaire !

Elle vint à nouveau le serrer dans ses bras et il y prit un immense plaisir. Elle avait ce parfum qu'il avait toujours pensé que devait avoir une mère. C'était le plus beau parfum du monde. Le seul qu'il n'avait jamais senti sur sa mère. Parce que Miranda Herron était un être froid et vide dépourvu de la moindre affection envers lui.

- Quel bonheur de t'avoir, Raven ! dit-elle. C'est un véritable bonheur de t'avoir dans cette famille.

Personne ne lui avait jamais rien dit de tel. Personne n'avait jamais voulu de lui. Pour sûr, il avait ses amis du Texas mais ce n'était pas pareil. Des amis, c'était une famille mais ce n'était pas la famille qu'il aurait toujours voulu avoir. Celle dont il avait toujours été privé. Parce que, avant Amanda Goodwind, personne ne l'avait aimé comme ça.

Il ne dit rien, gardant en lui toutes les émotions qui l'avaient assailli et pris en otage. Il sentit les doigts de Dylan venir se mêler aux siens, pressant sa main entre leurs deux cuisses, discrètement, ne voulant que lui montrer son soutien et son réconfort. Il osa un léger sourire vers son petit ami, discret, à peine perceptible.

Amanda exigea qu'ils regardent les albums photos et ils s'installèrent tous dans le salon, à même le sol. Raven absorba tous les souvenirs contenus dans les centaines de photos glissées dans les épais albums. Amanda, jeune fille, à son bal de promo, au bras de son futur mari. Des photos de mariage, de repas de famille, de voyages. Et puis, Dylan, bébé, vagissant depuis les bras de son père. Endormi dans son berceau. Sur le pot. Galopant à quatrepattes sur le tapis. Assis dans sa chaise haute, riant de voir sa mère couverte du petit pot qu'elle tentait de lui faire avaler.

Arriva Darren, un petit bébé tout frêle, beaucoup plus que son frère. Les deux ensemble. Le premier jour d'école de Dylan. Leurs vacances à la mer. Des anniversaires. Des fêtes d'Halloween. Des sorties en famille. Darren avec un singe accroché à son dos.

Une vie entière se déroula devant ses yeux jusqu'à la dernière page. Le faire-part. Celui du décès de leur père. Aaron Samuel Goodwind. La tristesse pesait encore sur eux. Elle serait toujours là. Ils avaient perdu un être cher, un membre de leur famille. C'était une douleur que Raven ne connaîtrait jamais. Sa famille n'en avait jamais été une. Ce n'était que des morceaux éclatés d'un puzzle qui ne s'assemblerait jamais. Stanford ne lui manquait pas. Ses parents ne lui manquaient pas. Moins il les voyait, mieux il se portait.

Plutôt que de se laisser aller, Amanda força Dylan à passer la commande qui leur servirait de dîner. Elle s'amusa à taquiner son fils aîné, le faisant râler. Darren ne fut pas en reste, révélant des anecdotes sur Dylan que Raven adora entendre. Personne ne s'attendit à ce qu'il partage ses propres expériences. Dylan savait et il soupçonnait que Amanda se doutait que sa famille ne ressemblait en rien à la leur. Malgré tout, elle le faisait se sentir accueilli et membre de leur tribu.

La soirée passa à toute allure. Darren se fit un devoir de planter les bougies dans le gâteau avant de l'amener devant sa mère. Elle râla mais les souffla. Raven coupa une part pour chacun et il regarda Dylan et Amanda noyer la leur sous la chantilly jusqu'à ce que le gâteau ne soit plus visible. À côté d'eux, Darren parut modéré avec la petite pompe de crème qu'il prit.

- Si tu en veux, prends-en tout de suite, lui dit le plus jeune. Les deux rapaces vont tout vider, sinon.

- Je n'aime pas tellement la chantilly, admit-il.

- Pardon ? s'écrièrent la mère et le fils aîné en chœur. Tu n'aimes pas la chantilly ?

- Non.

- Tu viens de te faire deux ennemis, mec. Pour eux, la chantilly est une religion et tu viens de blasphémer. T'es mal.

- Je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui n'aime pas la chantilly, soupira Dylan en secouant la tête. Et bien sûr, il a fallu que mon copain soit cette personne. Le pire, c'est qu'il sait en faire.

- Je pensais que c'était celle en bombe que je n'aimais pas, expliqua-t-il. Alors j'ai appris à en faire. Et je n'aime toujours pas.

- Je vais être très gentille et te pardonner, Raven, lui dit Amanda sur un ton faussement tragique. Mais c'est vraiment parce que c'est toi.

Darren roula des yeux en avalant son gâteau au lance-pierre. Raven commença sa part et se souvint pourquoi il donnait souvent ses créations. Il n'aimait vraiment pas ça. Le sucre, la texture... Ce n'était pas ce qu'il préférait manger. Par contre, les trois autres semblaient adorer. Darren reprit une seconde part alors que Amanda et Dylan terminaient les leurs avec contentement. Il ne put s'empêcher de sourire en voyant la chantilly sur le nez de Dylan. Il prit sa serviette pour l'essuyer, gagnant un coup de pied dans le tibia sous la table.

- Yeurk, marmonna Darren, le nez dans son assiette.

- Tu ferais mieux de te taire, le chevalier servant. Tu portes le plateau de Delilah, répliqua Raven avec un regard entendu.

- Ça a beau être ton petit ami, ça reste mon frère, hein.

- Moi, je trouve ça trop chou ! intervint Amanda. Ne t'occupe pas de lui, Raven. Il est toujours ronchon quand on touche à son grand frère.

- MAMAN ! râla le concerné, la bouche pleine de gâteau.

Sa mère se contenta de lui fourrer une serviette en plein visage. Dylan lui donna un coup de coude.

- Tu ne le finis pas ?

Raven regarda sa part de gâteau, à peine touchée, et secoua la tête.

- Si je dis que je ne mange jamais de gâteau, tu vas m'en vouloir ?

- Tu fais des gâteaux presque toutes les semaines et tu n'aimes même pas ça ?

- Je préfère un bon muffin ou un cupcake à un gâteau. Je n'en ai jamais raffolé.

- Donne-moi ça. Moi, j'aime le gâteau et il reste de la chantilly.

Il tendit la main pour prendre l'assiette de Raven qu'il noya sous une nouvelle montagne de chantilly avant de la dévorer avec un plaisir évident.

Quand Darren et Dylan eurent terminé de manger, Amanda frappa dans ses mains avec excitation.

- Où est mon cadeau ? demanda-t-elle.

- Avec tout ce que tu as déballé tout à l'heure sur nous, je suis pas sûr qu'on doive te le donner, répondit Darren.

- Je dis ça très rarement mais je suis d'accord avec lui, ajouta Dylan.

- Allez ! Donnez-moi mon cadeau !

- C'est vraiment parce que c'est ton anniversaire, fit mine de céder Darren.

Ils se levèrent tous et les deux fils prirent la main de leur mère, l'entraînant avec eux vers le garage. Raven suivit, curieux de voir sa réaction. Il espérait qu'elle serait contente de la restauration, que ça lui ferait plaisir.

Darren poussa la porte et la laissa entrer. Elle plaqua les mains sur sa bouche en approchant de la voiture. Elle fit glisser ses doigts sur la carrosserie. Elle se retourna vers eux.

- Elle file comme le vent, assura Dylan en lui tendant la clé.

- Vous... Vous l'avez fait réparer ? bégaya Amanda, des larmes au bord des yeux. C-Comment ? P-Pourquoi ?

- Parce que ça serait moins fatiguant pour toi de te déplacer en voiture qu'en bus. Et puis, tu adorais cette voiture. C'était celle de papa.

- Elle a la même allure que le jour où il l'a achetée... Mais comment... ? Ça a dû vous coûter bien trop cher !

- Pas quand on a un bon mécanicien.

Raven rendit son sourire à Dylan, heureux de la tournure des choses.

Amanda les serra tous les trois dans ses bras, les larmes aux yeux. Elle garda Raven un peu plus longtemps contre elle, chuchotant à son oreille :

- Je sais que tu as une grande part dans tout ça alors merci, Raven. Merci du fond du cœur.

Il ne sut que répondre. Personne ne l'avait remercié aussi sincèrement auparavant. Les mots d'Amanda le touchèrent et le bonheur et la joie dans son regard si semblable à celui de ses fils étaient la seule chose qu'il avait espéré en retapant la voiture.

Amanda décida de faire rouler la voiture en les emmenant pour une courte balade nocturne. Darren prit le siège passager d'autorité et Dylan et Raven montèrent à l'arrière. Très vite, Darren réalisa que l'autoradio fonctionnait à nouveau et une vieille musique d'Elvis se mit à hurler dans l'habitacle, vrillant les tympans de Raven. Les deux à l'avant hurlèrent la chanson en chœur alors que Raven était prêt à se jeter hors de la voiture.

- Merci.

Dylan s'était rapproché de lui sur la banquette. C'était étrange qu'il ne s'en soit pas rendu compte. Ce vieux rock devait détruire son cerveau et tous ses sens.

- Tu n'as pas à me remercier, chéri.

- Tu sais bien que si.

- Je te dis que n...

Il ne put terminer que Dylan plaquait ses lèvres sur les siennes pour le faire taire. Il ferma les yeux et lui rendit son baiser.

- Tu sais que tu as été conçu sur cette banquette, Darren ?

Raven et Dylan se collèrent chacun à leur portière pendant qu'Amanda riait.

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NdlA : Je sais pas vous, mais moi, j'adore Amanda !

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