11
Mathilde se retrouva en bas de chez lui, essouflée et dans un état de rage tel qu'elle se mit à marcher rapidement. Le ciel s'était obscurci, il allait pleuvoir. Au loin, elle entendit gronder. Mathilde regarda sa montre, onze heure moins le quart. Son sac sous le bras, elle se dirigea vers l'abribus. Machinalement, elle regarda encore sa montre, agacée de devoir une nouvelle fois prendre les transports en commun. Reprendre le métro fut tout aussi désagréable. La bousculade était intense mais sa tension ne laissait pas de place à sa paranoïa. La foule se déplaçait en deux lignes invisibles qui délimitaient ceux qui sortaient de ceux qui entraient. Dans les couloirs raisonnaient des guitares, des voix qui espéraient se faire remarquer et gagner quelques pièces. Elle arriva sur le quai et attendit. Elle se fit bousculer. Son sac glissa, elle recula pour éviter cette masse. Le métro s'arrêta dans un bruit sourd et strident ; tous se précipitèrent pour avoir une place. Dans cette cohue, Mathilde se fit bousculer par un homme. Son sac glissa et tomba sur le quai au moment où les portes se refermaient. L'homme se prit les pieds dans la lanière et s'étala sur le quai. Mathilde dans le wagon avait les deux poings fermés, le nez collé sur la vitre rayée et sale et les yeux rivés sur cet homme qui se redressait le sac dans les bras. Il la regardait, surpris et lui fit signes.
Ce n'est pas possible, ce n'est pas possible, se répétait-elle la gorge nouée de rage et de trémolos.
Mathilde sentait les regards pesant. Un grand-père assis sur un strapontin insistait mais elle n'osait pas le regarder. Elle voulait sortir au plus vite, courir à la gendarmerie. Mon sac, tous mes papiers d'indentité, mon permis de conduire, mon chéquier, ma carte bleue, mon portefeuille et mon téléphone portable, inventoriait-elle. Le grand-père persistait. Sa patience semblait être arriviée à son extrème, Mathilde était prête à l'incendier de tous les mots vulgaires qu'elle connaissait pour se libérer de ce stress et de cette colère. Lorsqu'elle tourna la tête, prête à mordre, il lui sourit compatissant.
- Il avait l'air aussi surpris que vous, ce pauvre homme.
Surprise, elle lui répondit aigre :
- Peut-être, mais c'est lui qui a Mon sac.
- Mais, il semblait vous faire signe de vous arrêter à la prochaine station... Vous savez, il n'y a pas que des gens malhonnêtes dans le métro.
- Vous croyez... qu'il me faisait signe de...
- Il me semble que oui ! Arrêtez-vous et vous verrez bien.
Mathilde lui esquissa un léger sourire d'espoir. Le métro ralentit et freina brusquement.
- Merci, lança-t-elle en sortant, emportée par la foule.
Elle resta sur le quai, regardant le métro disparaître dans le tunnel, se recula et alla s'asseoir sur un des bancs. Elle avait les yeux dans le vagues avec la sensation que le temps s'était arrêté et qu'elle attendait cet homme pour rien. Le bruit de la rame la fit sursauter, son coeur battait tellement fort dans sa poitrine que cela lui faisait mal. Ses mains étaient moites. Ses yeux fixaient les wagons qui filaient si vite que tout était flou. Les gens sortirent, Mathilde baissa la tête pour se reprendre. Elle attendait le départ du métro pour se lever et partir. Une ombre lui fit lever la tête. Il était debout devant elle, son sac dans les bras.
- c'est mon sac ! dit-elle en bondissant.
- Vous êtes sûr ! répondit-il en souriant.
- Oui, oui, je ne croyais pas le revoir.
- Et bien vous avez l'air d'y tenir. J'aurais peut-être dû regarder à l'intérieur, vous transportez une fortune ? le sourire toujours aux lèvres.
Elle tendit les mains pour le récupérer.
- Non, je vous assure. Je ne suis pas millionnaire et je ne transporte pas d'argent. Mais, je suis ravie de ne pas avoir de démarches à faire pour récupérer tous mes papiers.
- Je comprends....Ça vous dit de prendre un verre pour nous remettre de nos émotions.
Elle l'examina. Il était grand, les épaules carrées, les cheveux bruns et ses yeux d'un vert profond qui la dévisageaient. Elle avait bien besoin de boire quelque chose.
- D'accord.
- Je m'appelle Michel, dit-il en lui tendant la main. Et vous ?
- Mathilde.
- Et bien, Mathilde, heureux de faire votre connaissance, lâcha-t-il en lui rendant son sac.
- Merci..., merci beaucoup Michel. Vous m'évitez bien des déboires. Et en ce moment, j'ai l'impression que j'attire les ennuis.
- Sympa pour les ennuis, lui rétorqua-t-il en faisant la moue.
Mathilde lui sourit et ils partirent en direction de l'air frais. Ils pénétrèrent dans le premier bar, brasserie qui se trouva sur leur chemin. Son compagnon d'infortune semblait boiter.
- Vous vous êtes fait mal, commença-t-elle pour briser le silence.
- J'en ai vu d'autre, répondit-il en se frottant le genou.
- Je suis vraiment désolée de vous avoir fait tomber.
- Vous n'avez pas à vous excuser car je crois que j'ai dû vous mettre un sacré coup d'épaule. On est quitte alors, ajouta-t-il d'un magnifique sourire.
- Pas vraiment ! Vous m'avez tout de même ramené mon sac, je vous suis redevable.
- Alors, il faut que je réfléchisse à ce que je vais vous demander.
Michel était charmant. En guise de verre, ils déjeunèrent ensemble. Ce repas et ce Michel regonflèrent les batteries de Mathilde. En sortant de la brasserie, il lui proposa une balade qu'elle accepta, ravie. Le ciel s'était dégagé, le vent chassant les nuages noirs de l'orage mais l'air était encore lourd et l'odeur de l'humidité persistait. Ils prirent la direction des quais de Seine. Ils s'étaient trouvés un sujet de discussion. Tous les deux aimaient le rugby. Michel était agréablement surpris car elle connaissait le nom des joueurs, les termes techniques et donnait son avis sur les matchs. Il la dévorait des yeux mais cela ne troubla pas Mathilde, elle était heureuse de cette rencontre. Il était bel homme, rugbyman ce qui ne gâchait rien. L'amour après tant de malheurs, de tristesses, pensa-t-elle, mais refusa d'aller trop vite dans ses pensées et les chassa. Michel s'était rapproché d'elle, dans un geste tendre voulut l'attraper par l'épaule mais un individu vint les séparer. Mathilde perdit l'équilibre et fut projetée violemment à terre. Michel réalisa un figure acrobatique, se rattrapa et vit s'enfuir un jeune homme en roller qui zigzaguait entre les passants. Il aida Mathilde à se relever.
- Ça va...Tu n'as rien de cassé ?
- Ça va, juste un peu sonnée, souffla-t-elle en reprenant ses esprits et regardant autour d'elle. Il a pris mon sac !
- Ne bouge pas ! je vais essayer de le rattraper, scanda-t-il en partant en courant.
Mathilde le suivit des yeux, il slalomait lui aussi entre les promeneurs qui pour certains râlaient de ce deuxième passage mouvementé. Le jeune en roller avait une vitesse modérée et Michel qui était endurant se trouvait à une trentaine de mètres derrière lui. Par chance, le jeune trébucha après avoir percuté un homme d'une bonne stature. Michel arriva juste à temps pour lui éviter de reprendre sa course.
- Hop, hop...lui dit-il en l'empoignant fermement.
Le jeune commença par vouloir se défendre, se dégager de l'emprise mais s'aperçut de son infériorité. Il se plaignit à voix haute. Michel ne se laissa pas démonter et lui arracha le sac de Mathilde. Celui-ci se trouva éjecté et tout son contenu éparpillé sur le quai. Le jeune en profita pour prendre la poudre d'escampette et Michel le regarda s'enfuir. Je n'aime pas cette ville avec toute cette racaille, ragea-t-il en remettant tout dans le sac. Il rejoignit Mathilde qui l'attendait sur un banc, les yeux dans le vague. lorsqu'il s'approcha, elle releva la tête et tous deux se mirent à rire. Ils se trouvaient dans la même situation à quatre heures d'intervalle.
- Cette fois-ci, c'est un dîner, dit-elle toujours en riant.
- Et une bonne douche, dit-il en lui donnant son sac et s'asseyant à côté d'elle.
- Je ne t'ai pas demandé, où habites-tu ?
- En Bretagne.
- Ça fait un peu loin pour la douche !
- Je suis à la brigade des sapeurs pompiers du 13ème et j'y retournais quand j'ai croisé ton sac à main. Je dois partir demain.
- C'est du vite fait !
- J'étais en stage.
- Tu es pompier ?
- Oui, mais dans ma petite bourgade de l'Hermitage à une trentaine de kilomètres de Paimpont.
Elle pouffa.
- Paimpont répéta-t-elle, c'est une blague !
- Pas du tout, dit-il sérieusement.
- Pardon, je ne voulais pas...
Elle regarda sa montre. Il était trop tard pour tout ce qu'elle avait prévu de faire et trop tôt pour aller dîner mais elle n'avait pas envie de le quitter même pour une douche. Michel s'aperçut de son geste mais lui non plus n'avait pas envie de la laisser. Cette fin d'après-midi était douce, Paris avait retrouvé son ciel bleu et sa chaleur de ville. la circulation était toujours aussi dense. Michel avait proposé de la ramener et Mathilde en avait profité pour l'inviter à dîner. Ils arrivèrent à l'appartement de Mathilde vers 18h30. Michel se sentit à l'aise dans cet environnement, ils s'installèrent au bar pour boire un verre de vin et elle se souvint qu'elle n'avait plus rien dans son réfrigérateur.
- Chinois, tu aimes ?
- Oui
- Je devais faire des courses mais..
- Pas de souci, ça sera très bien.
Mathilde attrapa son téléphone
- Je vais passer la commande et ils nous livrent.
- Nickel, heu...Excuse moi de te demander ça mais est-ce que je pourrai prendre une douche ? J'ai transpiré comme un boeuf pour récupérer ton sac et je n'aime pas rester comme ça.
Mathilde ne se trouva pas du tout gênée de sa demande et lui indiqua la salle de bain. Michel prit son temps. Sans être trop curieux, il observa la salle de bain dans ces moindres détails, à la recherche d'une trace masculine. Il appréciait cette fille sans extravagance. Elle était nature et c'était ce qu'il aimait chez la gente féminine. Elle était simplement jolie. Sous les jets d'eau de la douche spacieuse, il rêvait. Puis, il entendit la porte s'ouvrir. Il ne bougea plus, dos à la porte, sa respiration s'était ralentie. Mathilde qui après cinq aller et retour dans le couloir avait décidé de le rejoindre, s'était dévêtue et était entrée. Son coeur battait fort dans sa poitrine, entre le désir et la peur. Sans un mot, elle tira sur la porte de la douche. Il ne se retourna pas. Elle prit la fleur de douche mousseuse et la lui passa sur ses épaules, sa nuque puis descendit sur le creux de ses reins. Michel se retourna. Il ne pouvait plus cacher son désir. Il l'attrapa doucement par la taille et l'attira tendrement sur son corps. Il prit son visage entre ses mains et l'embrassa. Ils firent l'amour sous cette pluie d'eau chaude, glissant sur leurs corps brûlants.
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