xii. Retour du printemps
Mme Castor avait raison. En s'enfonçant un peu plus dans la forêt, je constate que certains arbres bourgeonnent, laissant apparaître de jolies petites fleurs roses sur les branches. Les manteaux ne sont bientôt plus qu'un poids pour nous.
Alors que nous sommes entourés de végétation, nous abandonnons les fourrures sur une branche. Nos vêtements sèchent rapidement, tout comme nos cheveux.
Le printemps est bel est bien de retour.
Au bout de quelques heures de marche, nous arrivons à l'orée de la forêt. Juste à côté, dans une grande plaine, un camp a été dressé. Une centaine de tentes rouges et jaunes sont montées et de nombreuses créatures tel des faunes, des centaures ou même des animaux parlant — comme les Castors ou Renard — s'affairent dans les allées.
J'échange un regard avec Lucy. Nous sommes enfin arrivés au Camp d'Aslan. Mr et Mme Castor nous conduisent jusqu'à l'entrée du camp. En haut d'un rocher, un Centaure souffle dans une corne, sûrement pour annoncer notre arrivée. J'ai vu ces créatures dans le livre que Mr Tumnus m'a prêté. Elles ont le buste d'un humain, et le corps et les jambes d'un cheval.
Nous nous avançons alors dans l'allée, Peter, Susan et Lucy à ma droite sur ma droite. Tout ce que je vois autour de moi me fascine. J'ai un grand sourire collé aux lèvres qui ne semble pas vouloir me quitter. Toutes les créatures que nous croisons se retournent sur notre passage.
— Pourquoi nous regardent-ils ainsi ? demande Susan.
— Je ne sais pas, peut-être parce qu'ils te trouvent bizarre, taquine Lucy.
Je ris, accompagnée de Peter. Lucy fait un sourire éclatant, fière de sa plaisanterie.
Nous arrivons alors sur ce qui semble être la place principale du camp. Devant nous se dresse un pavillon avec de belles tentures rouge et or, tenu par des piquets, de la même manière que les tentes autour de nous. Un centaure se place à côté de nous. Peter dégaine son épée et la tend devant lui.
— Nous venons voir Aslan, déclare-t-il.
Le centaure désigne d'un mouvement de tête le pavillon devant nous. Soudain, toutes les créatures qui s'étaient agglutinées derrière nous posent un genou à terre. Alors que je me penche discrètement vers Peter pour lui demander d'expliquer ceci, un grand lion majestueux sort du pavillon, sa crinière d'or scintillant autour de sa tête telle une couronne. Je suis immédiatement impressionnée et décide d'imiter tout le monde et m'agenouillant. Les Pevensie font rapidement de même, sans doute aussi impressionnés que moi.
— Bienvenue à toi, Peter, fils d'Adam, dit alors Aslan d'une voix de velours, grave et chaleureuse. Bienvenue à vous, Susan, Lucy et Abigail, filles d'Ève. Et bienvenue à vous, Castors, vous avez toute ma gratitude.
Et jetant un coup d'œil du côté des Castors, je remarque qu'ils sont très honorés et très fiers d'être ici. Ils le méritent amplement, après tout ce qu'ils ont fait pour nous.
— Mais où est le cinquième ? demande alors Aslan.
Mes pensées dévient immédiatement vers Edmund.
— C'est ce qui nous amène, explique Peter en rangeant son épée. Nous avons besoin de votre aide.
— Nous avons eu quelques ennuis en chemin... ajoute Susan.
— Notre frère a été capturé par la Sorcière Blanche.
— Capturé ? Comment est-ce possible ?
Voyant que personne n'ose donner la raison de l'absence d'Edmund, Mr Castor prend la parole :
— Il les a trahi, votre Majesté.
Aussitôt, une rumeur se met à courir dans les troupes.
— Alors il nous a tous trahi ! lance le Centaure avec colère.
— Du calme, Oreius, ordonne Aslan. Il a certainement une explication.
— C'est de ma faute, en vérité... dit Peter après quelques secondes de flottement. J'ai été trop dur avec lui.
Je lève les yeux vers lui. Il a l'air véritablement abattu. Je pose une main sur son épaule pour le réconforter.
— Nous l'avons tous été, rectifie Susan.
J'hoche tristement la tête.
— C'est notre frère... lâche Lucy. Et même si ce n'est pas celui d'Aby, elle-
— Je regrette qu'il ne soit pas avec nous en ce moment, je finis à sa place.
Il est vrai que moi aussi, j'ai été en colère contre lui. Mais nous avons le même âge, avec Edmund. Même si nous sommes différents, je comprends qu'il puisse se sentir seul.
— Je le sais, mon enfant, me dit-il avant de se tourner vers les Pevensie. Le fait qu'il soit votre frère rend la trahison encore plus grave. Ce sera plus difficile que je ne le pensais...
Aslan relève la tête vers nous.
— Oreius va vous montrer vos quartiers. Un festin en votre honneur va être préparé. Vous êtes ici chez vous.
Il se retire ensuite dans son pavillon.
Le centaure nommé Oreius s'avance vers nous. Il a de longs cheveux noirs qui lui arrive aux épaules. Sa carrure est assez impressionnante, il est beaucoup plus grand qu'un adulte ordinaire.
Il nous conduit jusqu'à deux tentes voisines, un peu en retrait du campement. Celle de droite est pour Susan, Lucy et moi. Celle de gauche est pour Peter et Edmund, lorsqu'il reviendra.
Après m'être installée et changée, revêtant une longue robe médiévale d'un rouge bordeaux, je vais me promener dans le camp, croisant quelques aimables créatures qui m'adressent un sourire. En arrivant vers l'entrée, une jeune femme faite de pétales de fleur me fait un grand signe de la main auquel je réponds. Si je me rappelle bien, c'est une Dryade, un esprit des arbres.
Sur ma gauche, j'aperçois quelques cibles. Je m'avance vers celles-ci. Ce serait peut-être une bonne idée de s'entraîner. Le fait d'avoir raté mon coup, tout à l'heure sur la glace, me reste légèrement en travers de la gorge.
J'arrive alors à une distance respectable pour un lancer de poignards. Je saisis mon premier à ma ceinture et le lance, visant le point rouge au milieu de la cible. Manque de chance, il atterrit tout au bord de celle-ci. Le deuxième ne touche même pas la cible. Je vais donc les chercher et recommence. Premier lancer. Deuxième lancer. Ramassage des poignards. Et ainsi de suite.
Au bout de presque trente minutes de lancers, mes bras commencent à être endoloris. Je m'allonge dans l'herbe pour me reposer un peu.
— Alors comme ça, tu ne fais pas partie de la famille Pevensie ? me dit une voix douce et feutrée derrière moi.
Je me redresse brusquement. Aslan se tient derrière moi, ses yeux ambrés fixés sur mon visage. Je me plante sur mes deux pieds.
— Euh, non, Monseigneur, je... Je n'ai pas de frères, ou de sœurs.
— Je vois. Pourtant, tu fais également partie de la Prophétie, Abigail, fille de Grace.
— Vous... Vous connaissez ma mère ?
— Je sais beaucoup de choses, mon enfant. Je n'oublie jamais un nom, ou un visage. Et je me rappelle très bien de celui de ta mère.
Je fronce les sourcils.
— Que... Que voulez-vous dire ?
Aslan me sourit. Il n'a pas besoin de répondre. Je comprends immédiatement.
— Ma... Ma mère est... Déjà venue ici ?
Aslan hoche la tête. J'écarquille les yeux de stupeur, balbutiant quelques syllabes sans aucun sens :
— Mais... Je... Ce...
— Tu es son digne portrait, mon enfant.
— Mais... Elle ne m'a jamais dit qu'elle... Qu'elle était venue ici...
— Parce que je lui ai fait promettre. À partir du moment où elle a définitivement quitté Narnia, je n'ai cessé de veiller sur elle. Lorsque tu es arrivée dans sa vie, j'ai immédiatement su que tu serais comme elle, que tu ne serais pas ordinaire. J'ai su que, tôt ou tard, tu viendrais ici à ton tour. Alors, j'ai visité Grace dans l'un de ses rêves pour lui demander de te laisser dans l'ignorance. Elle n'a jamais cessé de croire en la magie de Narnia.
Quelques larmes se mettent à couler sur mes joues.
— Malheureusement, Monseigneur, elle est...
— J'ai appris la triste nouvelle, oui. Mais, sois-en sûre, elle a quitté ce monde en paix.
J'hoche la tête, le menton tremblant.
— J'aimerais qu'elle soit toujours là... je lâche.
Mes jambes ne me supportant plus, je tombe au sol et fond en larmes. Aslan vient s'asseoir à côté de moi et pose une de ses énormes pattes sur mon dos. Je me blottis contre lui. Sa douce chaleur m'apaise rapidement. Cependant, même lorsque mes pleurs se sont arrêtés, il ne s'éloigne pas.
— Grace était très courageuse et très aimante, me dit-il. Elle ne méritait pas ce qui lui est arrivé. Mais, au lieu de la pleurer, célébrons sa mémoire. Elle t'accompagnera dans toutes tes décisions.
J'essuie mes larmes d'un revers de la main. Aslan se remet debout sur ses quatre pattes.
— Ma chère Abigail, veux-tu venir marcher avec moi ?
J'hoche la tête.
J'espère que ce chapitre vous a plu !! On rencontre Aslan pour la première fois, j'espère que ça a été à la hauteur de vos attentes 😁 Merci infiniment pour les 1k de lectures atteint si rapidement, j'en reviens pas 😶 vous êtes vraiment les meilleurs 💙 à bientôt pour un nouveau chapitre :))
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro