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IV - 13. Le retour


2 janvier – 1600 mots


Lorsque la sonnerie retentit, May avait le téléphone à l'oreille et l'insulte à la bouche. Elle attendait depuis une demi-heure que le service client de son lave-linge veuille bien répondre ; la même musique tournait en boucle entrecoupée des mots rassurants d'une voix enregistrée. Toutes nos lignes sont occupées, mais rassurez-vous, nous allons vous prendre en charge dès que possible.

À l'autre bout du fil se trouvait un centre d'appel où cinq employés sous-payés traitaient cent communications par jour, selon des schémas précis que des spécialistes du genre humain, payés une fortune, avaient spécialement réalisés. Bonjour, expliquez-moi la cause de votre problème, entendu, je prends note, nous transmettons aux services adaptés, etc.

« C'est qui ? » demanda Phil.

Sans doute encore ce crétin de voisin qui avait oublié sa clé et voulait passer par le balcon.

« Bonsoir.

— Armand ? Armand Gillian ?

Votre appel va être pris en charge dès que possible. »

Elle laissa le portable pendre dans sa main.

« Son » extraterrestre était de retour.

En le voyant, elle ressentit aussitôt le besoin de s'excuser pour la vie tout à fait convenue, commune et presque ennuyeuse qu'elle avait vécue lors de son absence.

« Est-ce que tu me croirais encore...

— Qu'est-ce que tu fais là ?

— Je suis revenu.

— Comment ? Pourquoi ?

— Eh bien, j'avais toujours le même appareil... le concentrateur... j'ai essayé de le refaire fonctionner et puis... il a marché.

— May ? demanda Phil, toujours occupé à peler des carottes. C'est qui ? »

Le regard d'Armand signifiait qu'il se posait à peu près la même question.

« Ça fait au moins deux ans que je ne t'ai pas vu...

— Un an et demi.

— Les années sont les mêmes ici et... là-bas ?

— Oui, à peu de chose près.

— Pourquoi est-ce que tu es parti ?

— Je n'ai jamais choisi de partir. Je ne voulais pas. Mais la machine...

— Pourquoi est-ce que tu es revenu ? »

La question sembla l'atteindre comme un coup de poing à l'estomac. May ne voulait pas paraître aussi brutale, car elle se doutait bien qu'Armand n'avait pas tout choisi. Mais tout de même ! Pourquoi ? Et qui des deux devait se sentir le plus responsable ? Elle visualisait une interaction subtile entre Armand et la machine qui l'avait transféré entre Daln et la Terre – là où l'inventeur lui-même, le grand Adrian von Zögarn, se serait bien gardé de tirer des conclusions. Car ce n'était que donner libre cours à ce biais cognitif très répandu, qui consiste à rendre quelqu'un responsable des malheurs qui lui arrive, à attribuer à l'univers un sens de la justice. Armand lui-même s'y laissait prendre. S'il était retourné sur Daln, c'était qu'il le voulait, au fond de lui-même, et non parce que le concentrateur avait choisi pour lui.

« May ? C'est qui ? Encore un calendrier ? »

Elle ressentit le besoin de s'excuser. Là encore, de quoi ? De l'entrée de Phil dans son existence ?

Un bruit féroce jaillit de la rue lointaine ; un crissement de pneus qui se termina en invective. Armand se colla au mur et écouta le silence pend ant plusieurs secondes. Son réflexe en disait long. May n'avait pas un talent particulier d'observatrice ; mais il suffit souvent de ne pas projeter sur les autres ce que l'on veut qu'ils soient, pour les comprendre intégralement. Exempt de blessure physique, Armand traînait derrière lui des démons échappés de son monde natal. Une forme archaïque de peur, chevillée au corps comme une nécessité.

« Entre, dit-elle.

— Je ne vais pas vous déranger plus longtemps. Je reste à l'hôtel ce soir.

— Entre.

— Bonjour » tenta Phil, qui devait se sentir bien seul avec ses légumes.

May lui désigna la troisième chaise de leur minuscule espace cuisine. Le jeune homme s'y assit, le regard aussitôt absorbé par le vide. Il avait beaucoup à raconter, mais aucun mot ne voulait se lancer en premier.

« Vous vous connaissez ? demanda Phil, qui était passé à la salade de tomates.

— Je ne peux pas mentir, prévint Armand.

— Ça fait un an et demi qu'on ne s'est pas vu, dit May.

— Que sait-il ?

— Tu peux tout dire. C'est un homme ouvert d'esprit. »

Tant mieux, grand bien lui fasse, semblait vouloir dire Armand, sans une once de jalousie, un peu à la manière d'un bon perdant qui se force à complimenter celui qui l'a coiffé au poteau.

« Qu'est-ce qui t'est arrivé, Armand ? Qu'est-ce qui est arrivé là-bas ? »

Phil comprit que plus personne ne s'intéressait à ses tomates, aussi abandonna-t-il la cuisine et entreprit-il de proposer de loin quantité de boissons – un verre de lait ? Une bouteille de bière ? – qu'Armand ne le voyait pas agiter.

« Pourquoi est-ce que je parlerais de moi ? dit le dalnien. Parlez-moi de vous. Comment est-ce que vous vous êtes rencontrés ?

— On n'a pas besoin de parler. Toi, si.

— J'ai un psychologue au Bureau. Ce serait compliqué d'aller voir un autre médecin. Je lui parle de mes rêves. C'est toujours un peu le même. Je revis toujours le même moment... mais je ne suis même plus sûr de l'avoir vraiment vécu.

— Je vais sortir le linge de la machine à laver, tenta Phil pour se défiler.

— Reste, ordonna May.

— Mais vous ne savez pas ce qu'est le Bureau...

— Quels rêves, Armand ?

— La campagne orkanienne... mais il faudrait que je commence par le début, par Eden.

— Tu restes manger ? » demanda Phil.

Il semblait se trouver dans un autre espace que le leur, suivre une conversation parallèle ; parfaitement conscient de cela, il ne pouvait rien faire d'autre que de garder les pieds sur Terre.

« Je suis seul, avoua le jeune homme. Je voudrais recommencer une vie, mais je ne sais pas si c'est possible.

— Tu feras comme la dernière fois... tu te retrouveras une identité ici, et puis...

— Oh, tout cela est déjà fait. Le Bureau s'est occupé de tout. J'ai un nom, une date de naissance, une carte d'identité. On m'a juste interdit de changer de pays. Mais je pourrais être ici ou ailleurs, ça n'a aucune importance. Je crois que je serai toujours dans la forêt orkanienne, à marcher dans la boue.

— Tu es avec nous, l'encouragea May.

— Je me suis dit que j'allais te revoir... à la vérité, un jour sur deux je pense retourner sur Daln, même si je n'en ai pas les moyens ; un jour sur deux je me dis qu'il faut plutôt rester ici. Je ne suis nulle part. C'est comme si je n'existais pas, sauf pour me souvenir. Et je ne peux pas me souvenir sans penser à l'Orkanie. Un jour sur deux, je me dis que c'était là que j'avais à faire, que j'aurais dû y retourner... j'en ai eu la possibilité.

— Et ce Bureau ? Ils peuvent t'aider ?

— Ce sont des gens qui cultivent le secret. Ils seraient capables de garder sous scellés des archives disponibles depuis dix ans en libre accès sur Internet, juste par bureaucratisme. »

Phil leva la main.

« Vous permettez que je pose une question ?

Intimidé par le retour de regard, il déglutit.

— De quoi parlons-nous exactement ? »

Ce fut à ce moment que la sonnerie retentit.

« Vous attendez quelqu'un, comprit Armand en se levant. Je ne vais pas vous déranger plus longtemps.

— Ne bouge pas de cette chaise ! s'énerva May.

— Encore un calendrier » soupira Phil.

Quelqu'un tambourinait à la porte.

« Armand Gillian ! Je sais que vous êtes ici ! Sortez ou je vous fais sortir !

— Marcion ?

— Je vous entends respirer ! »

May ouvrit la porte en grand. Un individu extrêmement pâle lui fit face, étiré tout en hauteur comme un coprin, avec un costume noir aux manches râpées, coiffé d'un large haut-de-forme. Il ne fit pas le moindre geste, comme un hareng suspendu au plafond pour sécher. Après une dizaine de secondes, toutefois, il toussota :

« J'attends que vous m'invitiez à entrer. Ce n'est pas que je suis superstitieux, mais voyez-vous, chez nous, nous avons cette coutume.

— Qu'est-ce que vous faites là, Marcion ? intervint Armand.

— Lui aussi reste pour manger ?

— Je vous suis, bien évidemment.

— Je croyais que le Bureau vous avait encore sous clef.

— Le Bureau n'a pas pu me supporter longtemps. J'ai de grandes nouvelles à vous annoncer, jeune homme : la guerre est finie.

— C'est ce qu'ils disaient il y a deux mois, puis ils ont démenti...

— Cette fois le Bureau est formel. La guerre est terminée. Les anges déchus sont tous plus ou moins morts. Samaël s'est enfui sur Terre, il a été pourchassé par une ange de Daln. Évidemment, rien de tout ça n'est passé à la télévision. »

Marcion, manifestement conscient de l'état déplorable de son costume, ne cessait de gratter les ronds de cuir sous les coudes – ce qui n'arrangeait rien.

« Enfin, voilà, il fallait que je vous dise.

— Vous aimez les tomates ? parvint à placer Phil, persuadé du bien-fondé de ses prises de parole.

— J'aime les tomates, confirma Marcion, avec un air étrangement soupçonneux, comme s'il cherchait un sens caché dans ces mots.

— Vous allez me raconter ça autour d'un verre, proposa Armand. Nous allons arrêter de déranger...

— Je ne m'invite jamais chez les gens sans raison.

— Rentrez, ordonna May. Qu'on tire tout ça au clair.

— Vous êtes des dalniens ? dit Marcion, plein d'espoir.

— Pas vraiment, non.

— Bon, sinon, vous buvez quoi ? tenta Phil.

— Si vous avez un peu de sang de lapin, ça m'irait bien. Un tout petit verre, juste pour réveiller le palais.

— Euh...

— Sinon, une bière. »

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