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II - 21. L'ambassadeur


29 décembre 2018 – 1700 mots


Les Namanes sont de fervents unumistes, mais leur religion diffère radicalement de celle d'Eden. Ils méprisent les anges, car ils estiment que ces derniers instrumentalisent le culte d'Unum à des fins politiques. A contrario, ils font de leur religion une affaire politique, mais à des fins radicalement opposées.

L'Empire Naman est une terre de traditions et de protocoles. À la cour de l'Empereur, à Kimpa, se côtoient plus de cinq cent titres, de celui de docteur ès arts rupestres à celui de commandant de la garde de l'aile droite du palais, premier étage, porte du fond. Quant à l'Empereur lui-même, c'est un mythe vivant, ou plutôt une mascarade selon la plupart des diplomates étrangers. Il assiste masqué à quelques rares cérémonies officielles au palais. Il ne parle jamais. On ne trouve ni photographie ni enregistrement vidéo de lui. Il est réputé immortel, car béni par Unum lui-même pour guider l'Empire. Malgré mon expérience en la matière, je suis peu enclin à voir des immortels partout, aussi je pense également que l'Empire est dirigé par un concile de ministres où l'on entre par cooptation, la figure masquée de fer, vêtue de rouge, n'étant qu'un acteur qui sert d'élément de décor.

Adrian von Zögarn, Histoire de Daln


Yora, capitale de l'Orkanie, 4 décembre 2010


Bill Velt était le meilleur président qu'ait jamais connu l'Orkanie, un miracle quand on songe que le processus démocratique ne sélectionne habituellement les candidats que sur leur capacité à plaire, et non à gouverner. Hélas, il l'ignorait lui-même : dans ses mémoires, pour lesquelles il retranchait chaque semaine quelques heures de son sommeil, il écrivait à l'envi combien il maîtrisait peu les rênes du pouvoir. L'assurance dont il disposait encore en public, lors des discours et solennités, n'était qu'un reliquat de ses espoirs de jeunesse, comme la façade intacte d'un immeuble dont l'intérieur tombe en ruine.

Lors du décès de sa femme, les journaux à scandale avaient mené l'assaut contre sa présidence, distillant les allusions à un possible empoisonnement. Même après que ce torchon Fallnirien de Rema eut présenté ses excuses publiques et que le Quadrant eut mené sa propre contre-enquête, attestant irréfutablement une maladie rare, le doute installé dans les esprits subsistait. On voyait Bill Velt comme un homme froid et calculateur en relations humaines et incapable en politique. Ces événements avaient peut-être été de trop pour lui. Quoi qu'il en fût, son épouse n'étant plus là pour le modérer, il appelait « prudence » sa paranoïa naissante, « inquiétude légitime » son stress permanent ; pour se délivrer de ces maux indissociables, il prenait parfois le verre de trop.

Bill Velt pensait faire un troisième mandat. Mais il se sentait désormais vieux et las, à la tête d'un navire qu'il ne pilotait plus, perplexe face à un monde qui avançait sans lui. Lui, l'individu le plus puissant de Daln – le Chancelier Pierre d'Eden n'était pas sur la surface de la planète, il ne comptait donc pas – faisait l'objet d'un décryptage permanent, comme si chacune de ses paroles devait cacher une pensée multiple. Il était ce monument que les visiteurs toujours plus nombreux démantèlent, ce pan de béton du mur de Berlin qui s'effondre parce que chacun en emporte un petit caillou – tout ça pour le poser sur le bord de la cheminée et en oublier la provenance.

Ce soir-là, Bill Velt travaillait encore. Lorsque s'éteignaient la plupart des lumières du Quadrant, le palais présidentiel orkanien, le bureau de l'aile Nord brillait comme une étoile solitaire. Dans les trois autres ailes, chacune dédiée à la représentation d'un des trois États de l'Orkanie unifiée – l'Octanie, l'Orkanie du Nord et l'Alagon, les diplomates fédéraux pouvaient s'endormir tranquilles. Placé au-dessus de leurs querelles budgétaires et légales, « le bon vieux Bill » veillait sur le pays le plus puissant de Daln et ses cent millions d'habitants.

« Monsieur...

— J'ai demandé à ce qu'on ne me dérange pas, Christian.

— C'est urgent, monsieur.

— Je travaille à deux heures du matin précisément pour éviter ce genre de désagrément. Qui est-ce, cette fois ? La représentante du congrès des médiums ? Le chef de la fédération de pêche à la ligne ? Je dois décorer quelqu'un ?

— C'est l'ambassadeur Li Louang.

— Alors ne le faites pas attendre. »

Comme tous les officiels de l'Empire Naman, l'ambassadeur Li Louang était petit, sec, rigide et procédurier, à croire qu'ils provenaient tous d'un même moule. Son uniforme était arrangé d'une façon subtile pour exprimer son rang exact. Ses conseillers avaient expliqué à Bill le sens de chaque bouton doré, chaque boucle, même le choix du tissu. Il en retenait que Li Louang avait droit de présence au réunions des ministres de l'Empereur, ce qui faisait de lui un des vingt plus hauts dignitaires d'un Empire aussi étendu que l'Orkanie.

« Je dois vous donner ceci » dit l'ambassadeur en mettant sous ses yeux un document cacheté.

La lettre avait beau arborer le sceau de l'Empereur, ils le mettaient partout, des factures pour rembourser une commande de fromage aux invitations pour un dîner de gala, aussi Bill Velt ne s'en émut point. Du reste, il avait déjà vu l'ambassadeur dans la journée et lui avait même offert un verre de Viska. Il supposa que l'homme avait oublié ce courrier dans sa mallette.

« Très bien, dit-il en replongeant son visage dans ses autres dossiers, je vous remercie. Mettez-le là, je le lirai avant demain matin.

— Je dois vous le remettre en mains propres, dit Li Louang. Tel est le sens de ma présence à cette heure, vous en conviendrez, assez avancée.

— Eh bien, cela est fait. Déposez votre courrier et je m'en occuperai dans une heure. Christian, voulez-vous bien raccompagner monsieur Li ? Merci. »

Au contraire, ce fut Li qui raccompagna Christian à la porte du bureau présidentiel et referma celle-ci, signe d'un urgent conciliabule.

« Que me voulez-vous ? Se décida à demander Bill Velt.

— Lisez. »

Bill décolla son séant du fauteuil présidentiel, avec lenteur, comme si c'était là une opération délicate. Homme de bureau, il lisait debout et écrivait assis – les hommes de terrain font le contraire. Il décacheta le courrier et le parcourut du regard.

Li Louang gardait sa prestance et sa tenue, mais transpirait l'inquiétude, comme s'il venait de tendre à Bill une lettre d'insultes et qu'il serait aux premières loges pour recevoir la réponse.

Le sceau de l'Empereur se répétait sur le papier, une lettre prétendument écrite de sa main. Rupture des traités... rappel immédiat des ambassadeurs... prise de mesures unilatérales... fermeture des voies commerciales... au nom d'Unum, pour la grandeur de l'Empire, etc, etc.

« Que signifie ce papier, monsieur Li ?

— Il s'agit de la déclaration de guerre que je suis chargé de vous remettre. »

Silence.

Bill appréciait les diplomates namanes. Quoique l'Empire poursuivît toujours une politique ambiguë, parfois agressive et parfois coulante, comme un fluide non newtonien, les diplomates savaient arrondir les angles, placer les formes, minimiser les fantaisies de l'Empereur.

Cette fois, Li Louang ne pouvait y faire quoi que ce soit.

« C'est grave, dit Bill, sur le ton las d'un commentateur sportif qui, après les vingt premiers kilomètres du marathon, découvre qu'il n'a plus rien pour meubler.

— Très grave, indiqua Li Louang sur le même ton. Nous ne pouvons rien y faire. La représentation diplomatique de Yora est déjà en train de préparer son rapatriement. Je crains que la guerre ne soit inévitable.

— Nous allons trouver une solution diplomatique, avança Bill. Monsieur Li, je compte sur votre soutien. Vous plaiderez la cause de la paix auprès de l'Empereur. Il est primordial que nous puissions poser les bases de nouveaux accords internationaux sans en arriver à de telles...

— Monsieur le président, j'ai très apprécié le travail que l'Empereur m'a confié ici, à Yora. Je vous remercie pour votre sollicitude ainsi que celle de vos équipes. Pour ma part, je suis un fervent admirateur de votre efficacité administrative. »

L'Empire Naman était une société hiérarchique et structurée. L'Empereur, figure tutélaire suprême, incarnait le pouvoir étatique dans son ensemble, qui infusait d'un échelon à l'autre de la pyramide administrative. Mais la complexité de ces titres, de ces protocoles et de ces usages grippait parfois la machine, lorsque tel noble refusait de recevoir un ordre de tel autre sous prétexte qu'il était né six jours avant lui. Les choses étaient tout simplement différentes en Orkanie, où chaque individu possédant quelque pouvoir voyait se former autour de lui une troupe de parasites persuadés que leur destin est de révolutionner tel ou tel ministère, mais qui se contentent très bien de faire fructifier leur carrière.

« Attendez, intervint Bill. Ce n'est pas fini. Faisons comme si je n'avais pas lu ce courrier. Attendons demain matin. J'en parlerai avec le service des affaires étrangères. Vous ne pouvez pas déclarer la guerre comme ça, ça ne se fait pas, ça ne s'est jamais fait.

— Il y a un début à tout.

— Qu'est-ce que vous ne me dites pas, monsieur Li ? Pourquoi l'Empereur a-t-il eu cette idée ?

— J'imagine que vous devinez fort bien. L'Empereur a vu ce qui se déroulait en Westie et en Salvanie. Nous étions jusqu'à présent épargnés par ces remous, mais ce n'est qu'une question de temps. Il a été décidé que l'aide proposée par les anges libres serait acceptée. L'Empereur a fourni des garanties suffisantes aux anges.

— Vous ne pouvez pas faire ça.

— Il ne s'agit pas de ma décision. Personnellement, monsieur le président, sachez que j'y étais opposé. Néanmoins, si vous me permettez un conseil d'homme à homme – je ne représente plus l'Empire dans ce pays, je vous conseille de rendre les armes dès que possible. Il est probable que l'Empereur ne mette en place qu'un protectorat, sans conséquence économique notable pour l'Orkanie.

— Vous voulez que je lui offre mon siège ? J'ai été élu pour occuper ce fauteuil, monsieur Li. J'ai juré de défendre l'intégrité de la fédération.

— Il est parfois nécessaire, pour le bien de tous, de faire des entorses à nos principes.

— Laissez-moi juger du bien de tous.

— Vous le savez : nous allons gagner. La présence des anges d'Eden à Verde n'y changera rien. Les études que vous menez avec eux ont beau être prometteuses, ils ne possèdent plus aucun pouvoir.

— Au revoir, monsieur Li.

— Au revoir, monsieur le président. »

L'ambassadeur claqua des talons et se couvrit.

Le président soupira, se rassit et chercha de la main la bouteille d'alcool de son bureau.

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