Chp 7 - Tamyan : chasse au renard
Cair amiral Mercor, système de Nuniel
La flotte des adannath. Immenses boîtes grises d'une laideur fruste, à l'apparence indubitablement faible si on la compare aux lignes effilées et agressives de nos vaisseaux. La différence entre un pachyderme lourdaud et un prédateur à la beauté létale : en somme, la différence entre un humain et un ædhel. Bien sûr, il y a des exceptions, des individus hors du commun parmi les adannath, qui justifient l'intérêt que nous leur portons. Ma femelle Faël en constitue le meilleur exemple. Mais cela reste rare. Je vais anéantir toute cette laideur, cette suffisante insolence, cette bêtise crasse qu'incarne cette armée humaine grouillant comme un contingent de sangsues sur la bête malade qu'est ce paquebot de croisière humain. Une proie assaillie par les charognards, et cette proie blessée abrite mon fils, le futur prince héritier de Dorśa, et surtout, le petit de ma concubine tant chérie... L'audace de ces pitoyables mortels n'a pas de limite. Oser s'attaquer à des ædhil – mille fois supérieurs en intelligence, en beauté, en force et en technologie qu'eux – passe encore, mais à la Neuvième Cours d'Ombre, et en particulier, au fils du futur roi... Je devine la main de ce Ger-ald, mon rival, derrière tout cela. Il va payer très cher cette erreur. J'ai avec moi le double des effectifs utilisés lors de la défense du Mebd, aujourd'hui. Je veux que ça aille vite, et que la victoire soit écrasante : une illustration de la volonté inébranlable du commandant des armées d'Ombre, de sa fureur guerrière. Car cette bataille n'est qu'une étape préalable à mon plan de conquête. Ils vont tous ployer la tête devant moi, tous autant qu'ils sont : les humains, Ger-ald, Edegil, Fornost-Aran. S'ils ne se soumettent pas, alors toutes leurs tours s'écrouleront, et leurs âmes se tordront de douleur jusqu'à ce qu'ils implorent mon juste règne.
— C'est la première fois que je vois un tel déploiement de forces contre ces cloportes adannath, ard-æl, murmure Unila en se positionnant avec déférence à mes côtés. C'est une magnifique démonstration de votre puissance inégalée.
Un sourire crépite sur mes lèvres fermées. Ces idiots d'humains voulaient une grande bataille... m'affronter directement, moi, qu'ils appellent « boucher », et dont ils redoutent – à juste titre – la réputation. Ces singes à la mémoire courte ne savent pas que je culmine sur un monticule de squelettes, d'armures rouillés, de lances brisées et de fanions déchirés. Combien d'armées ennemies ai-je anéanti, depuis que je dirige des bataillons pour la gloire des Neuf Croissants de Dorśa ? Des millénaires de combats, de batailles toujours gagnées. La soumission des rebelles d'Urdaban, pour le compte de Fornost-Aran ? C'était moi. L'éradication de la Cour de Tará (même si visiblement, leur général a fui) ? Moi encore. Maintenant, des humains, pilotés en sous-main par ce perædhel à crinière blanche. Les adannath souhaitent croiser le fer avec le plus impitoyable des généraux ældiens ? Je vais leur donner ce qu'ils veulent. Leur passer l'envie de s'attaquer à ma famille, à ma femelle, et à mon fils. Car je sais pourquoi ils sont là. Le perædhel... c'est lui qui les a attirés ici. Et c'est lui qui va payer en premier. Ma véritable proie, c'est lui. Ger-ald. Je ne cesse de tourner ce nom entre mes crocs depuis qu'il a posé les siens sur Faël, et ma langue garde le goût de son sang.
Je me tourne vers mon nouveau porteur de cor, l'ex-gladiatrice que Lathelennil a bêtement délaissée.
— Tu veux te couvrir de gloire, Unila ? Te rendre maîtresse de tels exploits qu'ils seront chantés par les bardes pendant des millénaires, et que même mon cousin, qui doit être quelque part dans ce vaisseau de croisière assiégé, le verra là où il est ?
Elle me fixe, les yeux brillants.
— Oui, ard-æl. Je le veux.
— Alors gagne cette guerre pour moi. Écrase-moi ces limaces. Et je te garantis que ton prestige rejaillira jusqu'à Dorśa.
— Tu ne vas pas diriger tes armées au combat, Tamyan ?
— Tu le feras pour moi. Je te fais confiance. J'ai une autre proie à chasser. Le général ennemi, le cerveau derrière tout ça.
Le perædhel. Il est là, je le sens. Tout près. Dans l'un de ces vaisseaux... Non, il est dans ceux qui ont abordés ce gros navire civil humain. Celui qui porte une grosse croix sur la proue.
Maintenant que j'ai goûté son sang, humé sa déplaisante odeur, Ger-ald est devenu ma proie. Je rêve de lui la nuit, je le vois fuir comme un lâche, se faire soigner par ses congénères herbivores et se cacher dans les fourrés, tout tremblant, dans la peur fébrile d'être attrapé. Il croit qu'il peut m'échapper... mais il est comme toutes les proies, et n'attend, au fond, que la mise à mort, l'extase finale sous les crocs de son maître, la poigne mortelle du veneur plus fort, plus doué et plus expérimenté que je suis. Lui qui m'a défié, a cru pouvoir se mesurer à moi, autant dans le domaine martial que sexuel... il a lamentablement perdu sur les deux plans. Non seulement je le casse en deux quand je veux, mais en plus, c'est moi qui ai conquis la femelle convoitée par lui. C'est dans mes bras que Faël se réfugie à chaque fois, sous mon étreinte qu'elle crie de plaisir et s'abandonne. C'est moi qu'elle a choisi pour la féconder, moi dont la lignée est meilleure, la semence plus forte, la puissance virile plus prégnante, et les canines, les griffes, plus aiguisées. J'ai écarté tous mes rivaux, et Anwë sait qu'ils étaient nombreux et déterminés. Ger-ald n'est que le bouquet final, la cerise offerte sur le gâteau de viande.
Et un lien puissant nous réunit, ma proie et moi, désormais. Le lien du sang, qui s'exprime de trois façons chez nous : l'amour, l'amitié, et la haine. C'est ce que je ressens pour lui, ce Ger-ald : de la haine. Une haine intense, qui ne pourra être assouvie que lorsque j'aurais à nouveau mes crocs sur sa gorge, et me serais vautré dans ses entrailles fumantes.
— Je te confie le commandement, Unila, dis-je en lui passant le lourd pectoral du général autour du cou. Provisoirement. Sois fidèle, inventive, féroce et audacieuse, et je t'offrirai ta lune de miel avec Lathelennil en récompense. Si tu me trahis par contre... tu regretteras d'être née, ma beauté.
Elle tombe à mes pieds, toute fébrile.
— Vos paroles font acte de loi, ard-æl, murmure-t-elle.
Je lui tapote la tête, alors qu'elle enserre mes genoux avec adoration.
— Détruis ces humains. Ne montre aucune pitié. Écrase-les jusqu'au dernier.
Moi, je m'occupe de Ger-ald.
*
Depuis combien de temps n'ai-je pas piloté personnellement un cair ? Me retrouver aux commandes de ce petit croiseur nerveux et rapide comme un carcadann de course fait chanter mon sang. Rien de tel qu'une bonne monture pour aller à la chasse. Reste à débusquer le rusé renard.
Mais son fumet flotte dans l'air. La carte de la proie et du chasseur, ce lien invisible qui nous lie, m'attire dans une zone précise du gros vaisseau à la croix brillante. Je sais que mes pupilles ne sont plus qu'un mince filament, que mes oreilles pointent de ma chevelure détachée comme deux dagues. Mes griffes, sous le gantelet d'iridium, sont tellement tendues qu'elles me font mal. Et, comme c'est le cas lors de chaque chasse, mon skryll est érigé, affamé de chair et de sang. La dernière fois que j'ai ressenti une telle envie de fondre sur ma proie, c'était avec Faël, lorsqu'elle m'avait échappé. La connaissant comme je la connais maintenant, je sais que c'était un jeu, une provocation plus ou moins consciente de sa part. Elle voulait, à l'instar de toute femelle qui sait ce qu'elle vaut, tester ma détermination. Ger-ald, lui aussi, veut jouer à ce jeu dangereux. Sauf que cela se terminera différemment avec lui. Lorsque j'ai enfin attrapé Faël dans cette grotte, après avoir détruit les rivaux qui voulaient me voler ma proie – encore une fois -, je l'ai possédée, faite mienne charnellement, l'imprégnant à jamais et déposant ma graine de vie dans sa matrice ouverte pour moi. Cette fois, avec le perædhel, ce sera un acte de mort. Bien sûr, je pourrais jouer avec lui de bien des façons, comme le faisaient parfois les ard-ælim des anciens temps de leurs rivaux défaits. Un mâle dans le feu du combat est souvent pris par la frénésie de sang, qui se confond avec celle du sexe chez nous. Surtout lorsque la proie est aussi défiante et belle, oui, il faut l'avouer, que ce Ger-ald. Il mériterait que je le pilonne férocement, les dents vissées sur sa nuque, juste avant de lui porter le coup de grâce. Mais je ne le ferais pas. Je dois me garder tout entier pour Faël, et conserver cette fièvre charnelle, cette soif de coït conquérant, pour elle et uniquement elle. Juste après la victoire, je reviendrai la voir. Fornost-Aran attendra. Je lui rendrai notre fils, puis je la coucherai dans notre lit et la prendrai férocement. Un acompte pour la nuit de triomphe final, celle où elle sera enfin marquée par mes soins, une fois notre dernier ennemi vaincu.
En attendant, les humains me tirent dessus. Je passe sous leurs rayons aussi lents que maladroits, virevolte pour les éviter avec la facilité déconcertante que confère à mon ADN plusieurs millions d'années de perfection mortelle délicatement manufacturée par le génie du Créateur, et élimine quelques cibles statiques au passage. La nullité de ces adannath... leur lenteur, leur lourdeur. Oui, je sais que leurs nouveaux chevaliers fusionnés dans le métal peuvent s'avérer dangereux, au corps à corps. Qu'ils possèdent un émetteur de faisceau gravitationnel qui a donné du fil à retordre au grand Silivren... mais ils ne peuvent pas l'utiliser contre une cible aussi mouvante et petite que moi, d'autant plus que je prends soin de toujours placer l'un de leurs gros porteurs en pare-feu dans mon dos. Et finalement, ayant franchi leurs lignes de défenses les unes après les autres, aussi facilement qu'un ard-æl entre dans sa tanière pour honorer ses femelles, je pénètre dans leur vaisseau amiral, celui avec la croix brillante, et me pose comme une fleur. J'actionne bouclier et camouflage holographique, puis descend, l'épée de guerre de mon père dans une main et un collisionneur adannath récupéré sur le dernier butin dans l'autre.
Leur pitoyable infanterie m'attend à la sortie, des soldats alignés qui ressemblent à des jouets : je les pulvérise comme un jeu de quilles. C'est si facile que ç'en est risible. Mais la fureur du Père de la Guerre brûle dans mes veines. Ma peau est d'acier, mon sang, de lave. Un légionnaire en armure se jette sur moi, tentant de me barrer le passage. Je dégaine ma grosse épée et je l'engage. Il bloque mon premier coup, son visage crispé dans la haine et la douleur... mais pas le deuxième. Lorsque je le coupe en deux, l'odeur de ses entrailles fumantes me fait saliver. Je continue mon trajet sanglant, taillant dans les rangs de ces humains qui croient pouvoir se mettre en moi et ma juste vengeance. Je me mets à hurler, tel un wurg devant la lune :
— Ger-ald ! Je suis venu pour toi ! Tu vas me laisser massacrer tes hommes sans rien faire ?
Mon défi finit par le faire sortir du bois. Il apparait engoncé dans un exosquelette de métal, en haut d'une coursive, ses yeux froids brillant d'une lueur rageuse. Ses deux bras sont de fer, maintenant, faite de ces assemblages de matière que nous haïssons tant et qui doivent le mettre à la torture. Il pointe sur moi une de ces armes qu'affectionnent tant les adannath... un canon octogonal dont je reconnais le sifflement caractéristique, alors qu'il me vise.
Un émetteur à faisceau gravitationnel. Je connais le nom. Lathelennil m'en a parlé.
— À couvert ! hurle une voix.
Ger-ald s'est décidé à me prendre au sérieux. Il est prêt à tuer tous les autres humains, à faire somber cet énorme vaisseau avec son arme radicale, à la seule condition de m'avoir. Après tant de lâcheté, enfin, il se comporte comme un rival digne de ce nom.
Le rayon rouge fuse et j'ai juste le temps de me déporter sur le côté, avec ce réflexe béni qui nous rendent nos mouvements quasiment invisibles aux humains. Quelque chose explose dans mon dos, plusieurs centaines de mètres plus loin, dans ce hangar qu'ils ont fermé après mon arrivée. Et soudain, le chaos s'engouffre sur le champ de bataille.
— Il a percé la coque ! Fermez le sas de secours !
Une pression énorme essaie de m'arracher au sol. Je plante mes griffes dans la grille du pont, alors qu'hommes et machines sont aspirés dans l'espace, le temps que les humains parviennent à contenir la brèche. Ger-ald saute le parapet, avec sa carapace verrouillée magnétiquement sur la plateforme. Il compte pallier son déficit de force physique avec ça. Qu'à cela ne tienne... J'ai besoin d'un peu d'exercice.
Le sourire dément, je balaie l'air de mon épée pour le couper en deux. Son robot arrête mon coup, et d'un revers, il contre-attaque. J'esquive d'un bond et me réceptionne derrière lui. Il arrive tout de même à se retourner avant que je le fende en deux. Il est rapide, pour une grosse boîte de conserve... c'est le sang ældien qui parle en lui.
— Tu devrais faire ton Choix, grincé-je tout près de son visage, alors qu'il s'efforce de bloquer la pression de ma lame abattue sur lui. Embrasser pleinement ce que tu es. Là, tu aurais une chance – minuscule – de me battre.
Il rugit et se dégage, fou de rage.
— Tu vas mourir, démon, corrupteur d'âmes ! hurle-t-il.
Je réponds à son insulte pathétique par un ricanement sardonique.
— Accepte ta défaite. Faël n'a jamais voulu de toi. C'est moi qu'elle a choisi, et tu n'as jamais été une option pour elle. Comment voulais-tu soutenir la comparaison ? Je suis un véritable ædhel, dans toute sa puissance. Toi... tu n'es qu'un ver de terre.
Mes propos lui font perdre tout bon sens. Il se jette sur moi, la colère décuplée. Mais je me joue de lui comme d'un enfant. Je finis par le coincer contre un mur, et, passant ma main gantée d'iridium sur sa joue glabre, sa jolie joue de perædhel, je le griffe vicieusement, lui entaillant la peau jusqu'à l'os. Il hurle de douleur alors que j'arrache le lambeau de chair, mettant ses dents à nu.
— Tu vas mourir lentement, Ger-ald, murmuré-je à son oreille. Payer pour la marque infâme que tu as faite à Faël. Et ce que tu l'as forcé à faire à notre fils.
D'un coup de dents, je lui sectionne l'oreille. Puis la deuxième.
— Ça, c'était pour Cyann, grogné-je en l'envoyant bouler au sol.
Il tente de se relever, mais je le bloque avec mon pied.
— Toute ta technologie ne te sauvera pas, dis-je en saisissant mon couteau. Ton joli visage, tes oreilles... tu sais ce que je vais prendre, maintenant, n'est-ce pas ?
La lame de ma dague luit magnifiquement sous la lumière artificielle. Elle fait la taille de son avant-bras. Ger-ald est grand, pour un humain, mais il reste faible et petit par rapport à un ædhel. Plus encore comparé à un Niśven.
Je me penche sur lui, et, d'un coup de lame, ouvre sa combinaison.
— Je suis réputé pour mon habileté au couteau, lui dis-je, courbé sur lui. C'est la véritable raison de mon surnom, le Boucher. Dans l'arène, j'étais capable de castrer un orc d'un seul mouvement de lame, lui enlevant en même temps pénis et roustons.
Ma lame s'enfonce dans son ventre tendre.
— Hurle pour moi, Ger-ald.
Mais un tir bien ajusté me fait lâcher mon arme.
Je me retourne, choqué. Qui a osé s'interposer dans un duel entre mâles ? Une femelle. Une des pitoyables femelles humaines du harem de ce perædhel, qui me fixe, son petit visage simiesque figé dans la peur et la haine.
— Je vous interdis de lui faire du mal, sale monstre ! bégaie-t-elle, une terreur sans nom dans ses yeux de souris brillants de larmes, brandissant en tremblant une arme trop grande pour elle.
Comme c'est mignon.
En deux secondes, je suis sur elle, et l'envoie s'écraser contre le mur. Alors qu'elle tente péniblement de se relever, je m'avance vers elle, le sourire carnassier.
— Tu veux prendre sa place, ma petite ?
Elle glapit lorsque je la saisis comme une poupée de chiffons, la soulevant à ma hauteur, devant mes crocs qui glissent lentement de la gaine de ma mâchoire. Le parfum de sa peur est irrésistible, et son cœur bat si fort que je m'attends à ce qu'elle me claque dans les doigts, comme un petit lapin terrorisé par le loup. Une image bien humaine, qui lui convient bien. Mais avant de planter mes crochets en elle et de la vider de son sang chaud et sucré, par acquit de conscience, je jette un œil par-dessus mon épaule : je veux me repaitre de la vue du perædhel brisé au sol tandis que je me nourris de sa femelle sous ses yeux.
Mais ma proie a disparu.
Rhach.
La fuite, encore une fois... ce rat a sauté dans un astronef, qui file vers la sortie. Je lâche la fille, que je comptais saigner pour me refaire des forces avant de finir Ger-ald. Dommage, mais je devrais m'en passe. En deux mouvements, je suis aux commandes de mon croiseur, et je le prends en chasse. Il espère encore m'échapper... mais c'est vain. Car, malheureusement pour lui, je suis aussi un bon pilote.
Il s'en sort pas trop mal, cela dit. Il réussit à s'engouffrer dans le trou béant laissé par son arme dévastatrice, et à éviter les vaisseaux qui se trouvent juste derrière, à slalomer entre les rayons de plasma qui zèbrent l'espace à tout va. Je constate qu'Unila suit mes ordres à la lettre, et que les troupes humaines se font laminer comme il se doit, mais je résiste à l'envie de contempler ce beau spectacle. Je dois rester concentré sur Ger-ald, qui fuit comme un renard avec tours et détours. Je lui colle au train, alternant à sa suite loopings et voltes. Je lui balance un missile, qu'il esquive. Un deuxième. Il largue des leurres, sans cesser ses figures acrobatiques. J'essaie de le rabattre vers le Mercor, mais il ne se laisse pas faire. Et soudain, alors que je l'ai pris en tenaille... il décroche.
Le con.
J'évite la collision de justesse.
Il a encore des couilles, pour un homme que je m'apprêtais à castrer...
Mais il ne me sèmera pas comme ça.
Eh oui Ger-ald, je ne te lâcherai jamais. Tu le sais.
La chasse reprend. Je le vois descendre sur la petite boule bleue et or de Nuniel, en contrebas. Je le suis. S'il veut mourir là-bas, libre à lui. La proie choisit le lieu de sa mise à mort.
L'entrée dans l'atmosphère me secoue un peu, mais le croiseur, même abimé, est solide. Ger-ald est juste devant moi. Il continue sa fuite désespérée, ses tours de renards. Maintenant, il vole en rase motte sur une chaîne de montagne. Il veut me refaire le même coup que tout à l'heure... je le vois venir. J'enclenche le camouflage de mon cair et le double pour le cueillir derrière une éminence. Lorsqu'il émerge, je bondis devant lui, pour le forcer à atterrir en urgence. Ce qu'il ne fait pas.
Il a du cran, quand même.
Je suis au-dessus de lui, j'ai la main. C'est là que je vois que son aile est endommagée. Il ne va pas tenir longtemps comme ça... pourtant, j'aimerais qu'il s'éjecte, atterrisse, me permette de le regarder dans les yeux au moment où je prendrais ce qui m'est dû, sa vie. Mais il ne veut pas abandonner. Et tout d'un coup, alors qu'il file au-dessus de l'azur de l'océan nunellien... j'aperçois un deuxième cair. Le glyphe de l'Aleanseelith sur le coque... qu'est-ce que ces comploteurs de filidhean font ici ?
Ger-ald les as vu aussi. Et alors, dans un ultime baroud d'honneur, il fonce droit vers la masse bleue. Son vaisseau, en heurtant la mer, explose en mille morceau.
Je reste un moment fasciné par la vue de l'océan qui engloutit les morceaux de son épave, le cœur vide, toute excitation disparue.
Il m'aura fait courir jusqu'au bout. Et il m'a ôté le plaisir de la mise à mort.
Je relève un regard vindicatif sur le cair qui apparait sur la baie, un peu au-dessus de la côté que j'aperçois au loin. L'Aleanseelith. Ces foutus bardes m'ont volé ma proie.
Je mets le cap sur eux. Ils me doivent des explications, et elles ont intérêt à être bonnes.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro