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Part 3 Chp 6 - Faith : méfie-toi de lui

J'ai laissé Gerald descendre tout seul. Il est revenu de New Arkonna avec un corps flambant neuf, pour y stocker la personnalité de Luvine. Et maintenant, nous filons vers Altaïs.

La plume noire. Sous la lumière artificielle de la lampe sous ma couchette, elle montre des reflets bleutés. Avant de rencontrer Tamyan, je ne savais pas que le noir avait tant de nuances. Pailleté d'or et d'argent, comme les étoiles sur le fond sidéral. D'un brun chaud et rougi comme le sang qu'on trouve au plus profond du myocarde. Et d'un bleu acéré, presque violet, comme la nuit au crépuscule. Il y avait toutes ces couleurs dans la chevelure obsidienne de Tamyan, dans ses yeux abyssaux et sur ses ailes.

Dans son cœur aussi, peut-être.

Le sas chuinte, s'ouvrant sur Gerald.

— Tu l'as ? je lui demande en glissant la plume dans ma poche.

Il hoche la tête.

— Oui. On décolle.

Prochaine destination, Altaïs. Je ne sais pas pourquoi, mais y penser me fait peur. Est-ce la perspective de retrouver Tamyan ?


*


Je suis assise dans le cockpit du vaisseau, l'espace autour de nous est d'un noir profond, parsemé de points lumineux. Gerald pilote, ses mains fermes sur les commandes. Cela fait une bonne heure déjà que nous traversons une tempête éléctromagnétique. De temps à autre, les lumières vacillent, plongeant le cockpit dans le noir. Luvine est menottée à l'arrière, assise sur des caisses comme une poupée désarticulée. Lorsque Gerald a téléchargé sa conscience dans ce corps synthétique de premier prix, elle a ri comme une hystérique. Sa présence me met à l'aise. Il faut que je parle, que je rompe ce silence.

— Comment était Taros quand tu y étais ?

Gerald tourne lentement la tête vers moi, une lueur sombre dans ses yeux verts.

— Pourquoi ?

— On en a parlé tout à l'heure. Et Luvine...

Je coule un regard vers la hackeuse, toujours perdue dans son monde intérieur. Quand Gerald disait que son mental avait souffert des décennies d'isolation, il n'avait pas tort.

Il esquisse un rictus.

— Ça me fait penser que je ne t'ai toujours pas demandé comment tu étais courant, pour moi et Taros. Les informations me concernant sont classées secret défense. Aucun civil n'est censé savoir qu'un semi-ældien fait partie du SVGARD... ni que notre Ordre autorise des agents à garder un corps organique.

— Yolen me l'a dit, avoué-je. Elle sait tout de toi. Une vraie fan...

— Yolen... sourit-il. Je vois.

Il prend une profonde inspiration, comme si le souvenir le brûlait encore.

— Taros, répète-t-il. Tu connais la colonie ?

Je secoue la tête.

— C'est un lieu où il fait toujours nuit, où la pluie acide tombe comme une malédiction. Sur Taros, il n'y a pas de place pour les faibles. Les gangs rôdent dans les ruelles, attendant de dévorer ceux qui tombent ou trébuchent. Les enfants sont des proies particulièrement faciles.

Un pli amer alourdit sa bouche. Je devine qu'il ne parle pas seulement des victimes de Luvine, qui chantonne à l'arrière.

Une image de ce monde dévasté me frappe : des ruelles sombres, des éclats de lumière troublés par des gouttes de pluie corrosive, des cris étouffés par la nuit perpétuelle.

Il a vécu tout cela.

— Tu... comment es-tu arrivé sur cette colonie minière ? demandé-je prudemment. Elle est exploitée par la mégacorporation Toa, et ils délivrent des permis au compte-gouttes... Est-ce que ce sont tes parents qui travaillaient là ?

— Je ne sais même pas qui étaient mes parents, répond-t-il, la voix teintée de ressentiment. J'ai été élevé dans un orphelinat d'état, jusqu'à ce qu'on me mette à la porte, quand j'ai été assez vieux pour tenir une clé à molette et travailler sur les foreuses.

— Tu n'as aucun souvenir d'eux ?

— Strictement aucun.

Je le regarde, n'osant lui poser la question.

— Ma mère, coupe-t-il avec un demi-sourire. C'était ma mère.

— Ta mère ? répété-je doucement.

— C'était ma mère, l'ældienne. Je l'ai toujours su, tout au fond de moi. Même si pour tout le monde, j'étais l'enfant du viol, et que ce viol avait nécessairement été commis sur une femme humaine. Comment forcer une femelle de près de trois mètres de haut à avoir des rapports sexuels avec ce qui, pour elle, n'est qu'un misérable singe ? C'est comme ça que les ældiens nous voient. Comme des créatures inférieures, des singes.

— Ça a dû être très dur, pour toi, osé-je lui dire.

— Pas tant que ça. Je n'avais pas d'autre référentiel que ce que je vivais. C'est quand j'ai rencontré un véritable ældien que ça a été dur... Nímrod.

Son visage devient si sombre qu'on dirait que quelqu'un a éteint la lumière. Et Gerald se ferme complètement.

Nímrod. L'ældien qui l'a torturé... gardé en captivité, comme esclave sexuel.

Le parcours de Gerald résonne en moi comme une chanson amère. Moi aussi, j'ai été une paria. Et ensuite... Je sais ce qu'il a traversé.

— Je comprends ce que tu ressens, murmuré-je en avançant la main vers lui. J'étais le mouton noir, sur la colonie où j'ai grandi... l'albinos, la femme stérile, aux gènes impropres pour le mariage. Puis j'ai été capturée par un seigneur de la guerre ældien... comme toi.

Mais Gerald secoue la tête. Ses yeux sont loin, très loin.

— Non. Tu n'as aucune idée de ce que j'ai vécu. Même si Tamyan est un dorśari qui a tourné le dos aux lois de Mannu... c'est un prince, et au fond de lui, il a des idéaux, comme tous les Niśven. C'est la lignée ældienne la plus noble, la plus pure... la toute première. Mais Nímrod... Nímrod n'était qu'une brute. Un bourreau. Et sa voracité ne connaissait pas de fin.

L'obscurité qui a pris possession des traits de son visage m'effraie presque. Qu'a donc vécu Gerald pour que la mémoire en soit si vive, même des centaines d'années plus tard ?

— C'est une bonne chose que Tamyan, d'une certaine manière, se soit entiché de toi, dit-il en redressant la tête. S'il ne t'avait pas nommée alchimiste... tu aurais connu un sort bien moins enviable. Après tout, il ne t'a fait ça qu'une fois, et tu étais sous l'effet du luith.

Je le regarde, choquée. Son discours diffère totalement de celui qu'il tenait jusqu'ici.

— Être sous l'emprise du luith ne vaut pas pour un consentement... es-tu en train d'insinuer que j'avais envie que Tamyan me viole ? Que c'est une « bonne chose », parce que c'est un « noble prince » qui appartient au clan le plus révéré chez les ældiens ? Que je devrais me sentir honorée, en gros ?

Gerald tourne la tête vers moi. Comme s'il venait de réaliser.

— Excuse-moi... ce n'est pas ce que je voulais dire. Juste que je suis heureux que tu n'aies connu ce cauchemar qu'une fois, si peu de temps.

Il y a autre chose à l'origine de mon malaise. Tout ce qu'il sait sur ma captivité aux mains de Tamyan. Je ne lui avais pas donné tous ses détails.

— Gerald... comment tu sais que Tamyan m'a nommée « alchimiste » ?

C'était ses mots, en effet. Des termes peu communs, désuets. Que seul un ylfe âgé de plusieurs centaines de millénaires pouvait employer. Un ylfe qui, avant moi, n'avait plus parlé à un humain depuis le moyen-âge pré-atomique.

— C'était dans ta confession, répond Gerald en me jetant un regard bref. Tu as tout raconté.

— Je n'en ai aucun souvenir...

— Tu as oublié. C'est l'effet de la confession.

Je secoue la tête. Non. Ce n'est pas l'effet de la confession. C'est l'effet du pouvoir de persuasion des ældiens. C'est le pouvoir... du luith.

— Gerald... tu dois me répondre, murmuré-je. As-tu utilisé ton... luith sur moi ?

Il me fixe, ses pupilles de chat braquées sur les miennes.

— Si je l'ai utilisé, murmure-t-il enfin, c'était indépendamment de ma volonté. Quand j'ai reçu ta confession, j'ai... j'étais au début de mes fièvres.

Il baisse la tête, embarrassé. Ma colère s'évanouit aussitôt.

Ce n'est pas de sa faute. Il n'a pas demandé à être ainsi. À vivre ça, cet esclavage de la chair, de ces pulsions primaires.

— Je suis désolée.

— C'est moi qui suis désolé, dit-il en secouant la tête. J'avoue que j'utilise le pouvoir de persuasion des ældiens un peu trop souvent... le SVGARD compte dessus, d'ailleurs. Mais là, vraiment, je n'ai rien fait de tel.

— Ce que le SVGARD te fait vivre... vraiment, ça me révolte. Ils n'ont pas le droit de t'utiliser ainsi !

— Tout le monde utilise quelqu'un, à un moment donné. Si cela peut servir de plus grands desseins, cela me va.

Je ne suis toujours pas convaincue.

— Comme quoi ? Quels desseins du SVGARD pourraient justifier ce qu'ils te font ? demandé-je durement.

— L'éradication de la menace ældienne de l'univers.

Je médite en silence sur ces mots. L'éradication des ældiens. La fin des raids qui m'ont séparé de ma sœur, le disparition des créatures voraces et violentes qui nous ont attaqué. Il n'y aurait plus non plus d'hybrides lumineux comme des astres, ou de princes déchus mélancoliques et sarcastiques, se complaisant dans leur propre noirceur.

— Tiens, dit-il enfin. La dose pour aujourd'hui. C'est la date. La prochaine doit avoir lieu dans 17 jours.

Je regarde la poche plastifiée qu'il me tend.

— Prends-la, Faith. Au pire, tu prendras ta décision après. Mais pour le moment... prends-la.

Après ? Quand les embryons seront assez gros pour être une véritable vie, que j'aurais des scrupules à éliminer ? Mais de toute façon, je ne veux pas de cet enfant. Le rejeton d'un monstre. Est-ce que j'aurais le cœur assez dur pour m'en servir de monnaie d'échange contre Mila... telle est la question.

Je tends la main. Alors qu'ils se referment sur la pochette, mes doigts effleurent ceux de Zrivian.

Gerald relève les yeux vers moi. Son regard, à la fois intense et mystérieux, me capture immédiatement.

Je sens mon cœur s'emballer, une attirance tumultueuse mêlée à un sentiment prégnant de malaise. Je sais que c'est l'effet de son luith. Comme avec Tamyan, peut-être même plus fort encore. Tamyan était le chef vénéneux et cruel d'une bande de pirates violents, sur un vaisseau en ruine bardé de noirs secrets. Une étoile sombre hérissée de piquants. J'avais peur de lui, une crainte irrépressible, qui ne partait jamais tout à fait, même lorsqu'il me regardait en coin de ses yeux si aigus, me balançait un de ses sourires ironiques ou faisait incidemment tomber la superbe vague noir bleuté qui lui servait de chevelure sur son épaule. Même lorsqu'il ronronnait de son hypnotique voix rauque tous les mots doux de la poésie ældienne à mes oreilles, me tenant étroitement serrée contre lui, ou quand il couvrait mon corps de compliments et de baisers, j'en avais peur.

Pas Gerald. Ce qui rend son luith autrement plus dangereux. Avec sa part humaine, j'oublie ce qu'il est.

Et il n'enlève pas sa main. Il me fixe en silence, la pointe de ses doigts touchant les miens, comme s'il leur communiquait une impulsion continue et électrique.

— Alors, vous allez vous embrasser, oui ou non ?

Luvine. Elle est juste derrière nous.

Gerald se redresse, son visage reprenant le masque inexpressif de l'Inquisiteur. Quant à moi, je me sens rougir de honte.

Qu'est-ce qui se serait passé, si Luvine n'avait pas été là ?

— Va te rassoir, lui ordonne Gerald en lui montrant la caisse. Ou je t'enferme dans un container.

La pirate s'empresse d'obéir. Elle semble craindre de perdre sa liberté nouvellement acquise, si limitée soit-elle.

— D'accord, d'accord ! s'écrie Luvine en levant ses deux bras synthétiques. Je ne faisais rien de mal.

Sans répondre, Gerald s'engouffre dans le couloir. Je me retrouve seule avec la terroriste la plus dangereuse de la galaxie, qui, en plus, a montré qu'elle pouvait se balader à sa guise. Si j'étais Gerald, je l'aurais enfermée. Mais on dirait qu'il veut éviter de se la mettre à dos, finalement.

Je reste un moment sur le fauteuil, embarrassée, l'esprit encore embrouillé. Puis je me lève. Je ne peux plus rester enfermée dans ce cockpit, entre le vide déprimant de l'espace et une hérétique folle à lier. Il faut que je me change les idées. Je vais regarder un film dans ma cabine.

Au moment où je passe devant elle, Luvine me saisit l'avant-bras. Sa poigne est forte, celle d'un robot.

Je tourne la tête vers elle, choquée.

— Méfie-toi de lui, murmure-t-elle, les yeux brillants. Il n'est pas ce qu'il semble être.

Elle me relâche, puis replonge dans son délire, sans me prêter la moindre attention.

Sans demander mon reste, je file dans le couloir. Ses mots me brûlent encore plus que la marque de sa prise sur mon poignet.

Il n'est pas ce qu'il semble être.

Qu'est-ce que sait Luvine, au sujet de Gerald ? A-t-elle découvert qu'il était semi-ældien ? Et si c'est le cas, ne risque-t-elle pas de nous trahir, le moment venu ?

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