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Part 3 Chp 17 - Rika : anciens amis, nouveaux ennemis

Orbite de la Nouvelle Arkonna, système de Solaris


Priyanca Varma nous invita à passer en revue une bonne partie de son armada. Ayant une réunion, elle nous abandonna bien vite, et Ren profita de l'opportunité pour se changer en humain. Un humain à la peau beaucoup plus claire que ses configurations habituelles, et sur lequel ne subsistait plus aucune trace ældienne : il ressemblait seulement à un beau jeune homme aux cheveux très blonds et à la peau caramel.

— Tu ne devrais pas faire ça, lui soufflai-je en jetant des regards inquiets autour de moi.

— Au contraire, me rassura-t-il en prenant ma main. On attirera moins l'attention, et on pourra contrôler les ressources tactiques de l'Holos de manière plus discrète.

Je me rangeai à son argument. Nous continuâmes nos explorations, quittant le grand tarmac principal pour explorer ce que Priyanca Varma avait caché dans les étages inférieurs de la plateforme, à l'abri.

Il y avait de quoi conquérir la galaxie à nouveau. Gros porteurs, navires moyens, petits astronefs rapides... Tous étaient équipés de collisionneurs, et un grand nombre, je le notais, d'émetteurs à faisceau gravitationnel.

— Ils ont réussi à miniaturiser le système, murmurai-je à Ren en pointant le canon octogonal d'un collisionneur CERG embarqué. Sur un astronef !

J'interpellai un mécano, occupé à huiler les moteurs. Après avoir discutaillé un peu des détails techniques de la machine qu'il astiquait – une superbe bête – je lui demandai de me prêter son utilitaire de traitement des informations sous prétexte de régler le mien. La date qu'il afficha me fit dresser les cheveux sur la tête : nous avions quitté la Voie il y a huit ans solariens. Voilà ce que nous avait coûté nos errances... Alors que dans ma tête, et sur le calendrier que j'utilisais à bord de l'Elbereth, il ne s'était écoulé que quelques mois.

Merde.

J'échangeai un regard rapide et silencieux avec mon compagnon, puis nous quittâmes la zone.

Mon attention fut soudain attirée par le fuselage familier d'un vaisseau, en assez mauvais état. Stupéfaite, je donnai un petit coup de coude à Ren.

— Regarde cet astronef ! lui intimai-je en pointant la machine en question. Ça ne te rappelle rien ?

— Le croiseur de ton ex-mâle, observa Ren judicieusement en hochant la tête d'un air entendu.

— Mon ex-mâle... c'est beaucoup dire, non ?

— Tu t'es accouplée avec lui, insista Ren, impitoyable. C'est donc ton ex-mâle.

— Ok, si tu veux, soufflai-je.

C'était bien l'astronef de Levi Fenrig. On pouvait apercevoir de nombreuses traces d'impact dessus. Mon premier élan fut celui de la peur : si son vaisseau se trouvait là, où était son pilote ?

Heureusement, nous dénichâmes ce dernier dans le mess des officiers, où Varma nous avait instruit de nous rendre pour manger. J'étais heureuse de le voir. Ren vint lui serrer la main – il le faisait automatiquement, depuis Louis Wu – que Levi prit chaleureusement.

— Enchanté, se présenta-t-il. Commandant Levi Fenrig, corps des chasseurs de l'alliance indépendante de Padma.

Ren garda un silence prudent, affichant un demi-sourire mystérieux. Un peu curieux, Levi profita que Ren regarde ailleurs pour me jeter un regard interrogatif, mais qui me parut particulièrement content.

— Je suis l'époux de Rika, se présenta Ren, à qui le petit coup d'œil de Levi n'avait pas échappé.

Il avait omis de donner son nom, mais pas cette information capitale.

— Une bonne chose, mon vieux, le congratula Levi Fenrig en lui tapant dans le dos. Une très bonne chose !

Il se tourna vers moi.

— J'ose comprendre que tu ne sers plus à bord du navire ældien, Rika ?

— Si, toujours, lui répondis-je en regardant Ren en biais.

Quand-est-ce qu'il allait se décider à dire à Levi qui il était ? En avait-il seulement l'intention ?

Je constatai que le visage de Levi s'était assombri.

— Et comment va ton commandant ? Euh, Den ?

Ren, corrigeai-je, sans lâcher des yeux le susnommé. Il va bien.

Ren nous fit un petit sourire, puis il s'éloigna vers le buffet. Fenrig en profita pour me faire face.

— Toujours avec l'ældien, alors... Et ton mari, alors ? Il fait partie du personnel ?

Je poussai un soupir résigné.

— C'est Ren, lui appris-je discrètement. Il se change en humain pour passer inaperçu. Fais comme si tu ne savais pas.

La tête que fit Fenrig valait bien cette petite mascarade. Il était littéralement sans voix. Lorsqu'il la récupéra, ce fut pour me poser la question fatidique :

— Mais alors... Ça veut dire que tu es avec lui ? En couple, je veux dire ?

— Oui, acquiesçai-je.

— Par l'Omnipotent ! lâcha Fenrig.

C'était un cri du cœur.

Je n'avais plus le courage de me justifier. Que les gens pensent ce qu'ils veulent.

— Je suis contente de te savoir en vie, en tout cas, lui dis-je pour changer de sujet.

Fenrig se passa la main dans les cheveux, qu'il gratta pensivement. Je souris en le regardant : il était toujours aussi charmant, avec sa barbe de trois jours (une coquetterie que Ren ne posséderait jamais).

— En vie... Oui. J'ai eu de la chance. Figure-toi que c'est passé près, cette fois ! J'ai senti la faux de l'ange de la mort sur ma nuque, ce jour-là...

— Qu'est-ce que tu veux dire ? m'enquis-je en décelant une nuance plus sombre dans son ton.

Fenrig me jeta un regard dur.

— T'es pas au courant ? C'est pour ça qu'on est là. Padma n'existe plus, Rika. La colonie a été annihilée. Pour nous, la stabilité n'aura pas duré bien longtemps. Les trois quarts de la flotte s'est fait massacrer... Et le reste emmené en esclavage.

Mon sourire s'évanouit.

— C'est pas vrai, murmurai-je. Qu'est-ce qui s'est passé ?

Fenrig soupira, et il jeta un regard à Ren l'humain, qui picorait tranquillement au buffet en discutant avec un troufion.

— Les ylfes, asséna-t-il en me regardant. Les unseelie, ou dorśari, ou quoiqu'on appelle ces monstres. Des tueurs sans pitié... Jamais je n'avais participé à une bataille où les forces en présence étaient aussi déséquilibrées. Ils sont arrivés avec un seul vaisseau de guerre qui a lui-même dispatché des astronefs. Ces monstres se sont jetées littéralement des airs sur nous, je n'avais jamais vu ça... En fait, rien de ce que j'ai vu ou fait ce jour-là ne pouvait être relié à mon expérience habituelle de la guerre. Ces putains d'ylfes ! On a des hommes solides parmi nos troupes, enfin, on avait – des vétérans qui en ont vu de dures comme tu peux l'imaginer – mais là... J'ai vu des mecs se chier dessus et implorer leur mère, supplier pour qu'on les achève. On a connu l'enfer sur terre, Rika. Ces créatures sont démoniaques. Tu les aurais vus ! Bardés d'acier, de scarifications et collectant des morceaux de corps pour les épingler sur leurs armures... Ils ont pris le héros des premières heures, Kenario Chigozi, un soldat brillant qui a réussi à fédérer les hommes de son ancien bataillon et à former une poche de résistance. Ils lui ont coupé les quatre membres, l'ont empalé sur un tuyau rouillé et l'ont trimballé comme un étendard pendant tout le temps qu'a duré la bataille. On pouvait l'entendre hurler à des kilomètres. Un certain nombre de gars ont essayé de mettre fin à ses souffrances en lui tirant dessus à distance, mais à chaque fois que ça arrivait, un de ces fantassins ældiens hyper rapides déboulait de nulle part à toute vitesse – ils bougent tellement vite, c'est presque impossible de les suivre à l'œil nu ! – et épinglait le tireur. Finalement, quand Chigozi a rendu l'âme au petit matin, on était tous soulagés. Les rares survivants dont je fais partie ont fait une sortie peu après, la tentative de la dernière chance. Une bonne partie s'est fait abattre, mais j'ai réussi à percer avec quelques gars et me voilà... J'ai tout de suite rallié le centre tactique de l'Holos. Je veux me venger, et si ça signifie signer une trêve et abandonner momentanément la cause, eh bien j'en suis ! On est tous humains, après tout. Mais ces créatures... Maintenant, je comprends l'obsession de la République pour les ældiens. C'est ce que m'a dit l'amiral Varma en me recevant : « Vous comprenez, maintenant ? »

J'étais sans voix. D'un autre côté, je ne pouvais pas mettre sa parole en doute. Je savais ce que les ældiens pouvaient être.

— Keri ? murmurai-je. Keri Mauser. Qu'est-il devenu ?

— Keri ? Il est mort, asséna froidement Fenrig. Dès les premières minutes, si ça peut te rassurer. Son croiseur s'est fait abattre tout de suite : il faisait partie de la première salve de défense. Au moins, il n'aura pas souffert.

— Et Evangelios Nekin ? Le Sekhmet ? déglutis-je. Et...

Cette question, je n'avais pas osé la poser. Sur Demeria Tri, alors que Ren et moi étions prisonniers du gang d'Oktav, Nils Hogar avait été comme un père pour moi. On s'étaient séparés sur un différend – il n'approuvait pas ma décision de suivre Ren - , mais je lui devais la vie.

— C'est la seule bonne nouvelle : le vaisseau est reparti aussitôt après nous avoir déposé sur la nouvelle colonie, avec Nils à son bord, qui voulait continuer à explorer la Voie. Au moins l'un de nos vaisseaux que ces putains d'ylfes n'auront pas !

— Ren est différent, m'empressai-je de dire sitôt la consternation passée. Il n'est pas comme eux. Je t'assure, Fenrig... Il est vraiment de notre côté.

— J'espère bien, gronda Fenrig sombrement. Je l'espère vraiment, Rika. Pour toi. Moi, je ne pourrais plus faire confiance à ces créatures. Je m'en méfiais déjà avant mais là... Non, pas après avoir vu ce qu'ils ont fait. Ils sont anthropophages : tu le savais ?

— Ren est ... végétarien, glapis-je maladroitement, cherchant à chasser de mon esprit l'air gourmand qu'il avait pris en dévorant mon placenta.

Levi soupira – un soupir plus excédé que résigné – et passa à nouveau sa main dans sa chevelure bouclée.

— Je veux bien te croire, murmura-t-il, les yeux posés sur Ren l'humain qui continuait de socialiser au buffet. J'aimerais, en tout cas... Après tout, aucun des ældiens que j'ai vu ce jour-là n'aurait accepté de se métamorphoser en humain comme ton Ren l'a fait. Aucun ! Ils nous méprisent tellement... Pour eux, on n'est rien d'autre que du bétail, seulement bon à se faire écharper.

Je décidai d'embrayer rapidement.

— Comment étaient-ils, ces ældiens ? Tu dis que c'était des dorśari. Tu en es sûr ? Avaient-ils la même couleur de peau que Ren ?

Fenrig me regarda.

— J'ignore à quoi ressemble ton Ren, Rika... Je ne l'ai vu qu'en armure complète, avec un de ces masques horribles qu'ils portent en sortie et une capuche par-dessus. Il n'a jamais daigné nous montrer son visage. Maintenant, je comprends mieux ! Oui, ils avaient tous le même genre d'armure que lui : une carapace en iridium bardée de lames, avec des pièces de cuir par-dessus et un masque grimaçant.

Il posa la main à son front, se perdant dans ses souvenirs. Le syndrome post-traumatique typique du soldat de retour du front. Je le laissai se reprendre avant d'enchaîner.

— Mais sinon, comment étaient ces ældiens ? Avaient-ils la peau noire et la crinière blanche ?

Levi secoua la tête.

— Non, pas que je sache. Ils avaient la peau blanche, blafarde même. Une très longue crinière, épaisse et ébouriffée. Tous très grands, agiles, rapides, mortels. Avec des yeux effilés, sans pupille et sans humanité. Et de grandes oreilles pointues. Des ylfes, quoi ! On dirait que t'en as jamais vu, persifla-t-il.

Je le sentais agacé. Décidant de ne pas relever – il y avait de quoi avoir la haine, après ce qu'il avait vécu – je poursuivis mon interrogatoire.

— Il y a plusieurs couleurs de peau et de cheveux chez eux – plusieurs robes, comme ils disent. Certains – dont Ren – ont la peau sombre et les cheveux blancs.

Fenrig me jeta un regard acide.

— Je me fiche de leur couleur, ou de leur robe. Je te dis ce que j'ai vu. C'était bien des ældiens. Impossible de se tromper. Et pour moi – noirs ou blancs, blonds ou rouges – ils sont tous pareils. Il faut qu'ils disparaissent de la galaxie. Il le faut.

Levi Fenrig était devenu un adversaire déclaré des ældiens. Comment l'en blâmer ? Lorsque Ren revint, je le tirai sur le côté et l'emmenai faire un tour sur le tarmac.

— J'ai une mauvaise nouvelle, Ren, lui annonçai-je tout de go.

Il me regarda attentivement.

— Oui, c'est ce que j'avais compris, à voir ta tête tout à l'heure.

Très observateur, Ren avait bien compris que quelque chose n'allait pas.

— Padma s'est fait hacher menue par des ædhil. Des dorśari, d'après la description. Ils se sont montrés particulièrement cruels.

Ren accusa le choc en silence.

— Inutile de dire que désormais, les rares survivants de Padma – Fenrig le premier – te détestent.

— C'est tout à fait normal et compréhensible, dit seulement Ren.

Pourtant, ce n'était pas de sa faute. Il avait fait de son mieux pour les aider. Tout ça pour qu'ils se fassent massacrer ensuite par ses frères de race... Je soupirai, découragée. Nous n'étions pas près de connaître la paix !

— J'ai bien fait d'opérer cette configuration, statua Ren en croisant les bras. Les padmiens doivent certainement croire que c'est moi qui les aie vendus aux dorśari.

Je n'avais pas pensé à ça. Mais oui, c'était probablement ce que Fenrig pensait. Il n'avait juste pas osé me le dire.

— On nous regarde, murmura-t-il en me tapotant le dos.

Je le lâchai. Effectivement, deux troufions nous regardaient, ainsi que Fenrig. Le regard de ce dernier était tout sauf amical.

— Tu crois que je devrais lui parler ? ajouta Ren à mon intention.

Je secouai la tête.

— Il ne vaut mieux pas. Retournons sur l'Elbereth, Ren.


*


Les heures suivantes se déroulèrent dans une ambiance morose. Ren faisait profil bas, s'affichant toujours en humain et reléguant sa fille dans la salle des armes. Je réalisai qu'elle s'entraînait pour devenir une tueuse impitoyable, dans la digne tradition ældienne des hordes de sicaires qui partent se faire les griffes sur des biotopes en paix en déboulant parmi eux comme des prédateurs affamés – ce qu'ils étaient, en réalité.

Círdan et Tanit, désœuvrés, traînaient dans le vaisseau. Je les savais inoffensifs, mais néanmoins capables de devenir des bêtes sauvages si on leur brandissait un bout de viande sous le nez. Le jeune soupirant d'Angraema était d'humeur mélancolique depuis qu'on l'avait séparé de sa belle. Dès qu'il me vit revenir sur le vaisseau, il se précipita pour me parler d'elle, m'expliquer ses futurs souhaits de mariage, et me décrire en long et en large la famille qu'il voulait construire avec elle.

— Peut être une portée, ou deux, commença-t-il en croisant et décroisant ses longs doigts sur son giron. Je voudrais qu'on ait exactement le même nombre de petits mâles et de petites femelles, mais bien sûr, ce sera à Angraema de décider. C'est une elleth forte et puissante : elle sera certainement très fertile et capable de mettre bas de nombreux petits. Qu'en pensez-vous, Baran ? Qu'est-ce qui est le plus souhaitable, selon vous, d'avoir d'abord une portée avec plus de filles, ou plus de garçons ?

— Je n'en sais rien, Círdan, soupirai-je, déjà fatiguée, et un peu irritée qu'il m'appelle par le nom que Ren me réservait. Je ne suis pas une spécialiste des portées et des mises bas... Je ne suis même pas ældienne !

Il me regarda, interloqué, ouvrant grand ses yeux rubis. Comme tous les membres de son espèce, Círdan avait toujours été fascinant à regarder, mais depuis qu'il était officiellement en couple avec Angraema, il était d'une beauté à couper le souffle.

— Mais vous avez déjà eu une portée, et...

Je l'interrompis avant qu'il ne s'enfonce.

— Cette maigre qualification est loin de faire de moi une pédiatre, ou une médiatrice familiale. Demande plutôt à Tanit. C'est elle, la spécialiste de la culture ældienne, sur ce rafiot. En plus, elle est enceinte. Elle est venue me l'annoncer la semaine dernière.

La nouvelle m'avait plutôt contrariée. Qui allait s'occuper de faire grossir sa portée ?

Je vis que Círdan fronçait un sourcil, l'air contrarié.

— Ce ne serait pas convenable de demander une telle chose à l'ancienne concubine de mon père, répondit-il. Ce serait indécent !

Je le regardai, surprise.

— Tanit était la bonne amie de ton père ?

Je comprenais mieux. Ainsi, elle avait gardé les embryons en dormance dans son ventre pendant tout ce temps, sur le Mirhendelas.

— Tanit est une barde. Comme toutes les bardes, son rôle est de témoigner de l'histoire de la Cour où elle sert, de divertir et d'instruire ses membres, ainsi que dame Erenwë et dame Ardamirë l'ont souligné tantôt. Je savais qu'elle partageait le khangg de mon père, oui... Ainsi que celui d'autres mâles. Ce qui est normal.

Il disait cela, mais je voyais bien qu'il n'en pensait pas moins.

— Normal, certes, lui concédai-je. Mais cela ne te plaisait pas, je me trompe ?

Il soupira. De nouveau, ses longs doigts s'agitèrent.

— J'aurais préféré que mon père reste fidèle à ma mère pour toujours, c'est sûr, admit-il. C'est ce que je souhaite moi, en tout cas : rester fidèle à dame Angraema jusqu'à la mort !

Encore des idées extrêmes, même chez un jeune innocent... Un peu agacée, je décidais de lui dire ses quatre vérités :

— À quoi sert de prendre cette décision radicale, Círdan ? Vous autres ældiens pouvez vivre des millénaires, pourquoi parler de mort et chercher absolument à se mettre une chaîne au cou ? Tu ne sais même pas ce que la vie te réserve : tu n'as encore rien vu du monde réel ! Angraema est la première jeune femelle que tu rencontres. Qui te dit que c'est vraiment la bonne, celle avec qui tu veux passer la majeure partie de ta vie ?

Choqué, Círdan se redressa. Il arborait une expression d'intense outrage dans ses yeux ambrés. Je sentis qu'il allait me dire une méchanceté – peut-être me donner un coup de queue ou de griffe, même – mais il sut se contenir.

— Je crois que vous êtes préoccupée, dame Baran, fit-il d'un ton pincé. Je reviendrai parler de cela avec vous plus tard. En attendant, permettez-moi de vous donner mon congé.

— Oui, grommelai-je. À plus tard, Círdan.

Il se releva, le dos droit comme un i et le cou bien déroulé, et s'en alla d'un pas digne et gracieux.

Je savais que je l'avais blessé, et je le regrettai déjà. Mais parfois, les ældiens me sortaient par les yeux avec leurs états d'âme égoïstes et leurs problèmes métaphysiques. Pourquoi se simplifier la vie quand on peut se la compliquer !

Dépitée, je restais là un moment à broyer du noir. Je m'en voulais d'avoir envoyé sur les roses ce pauvre Círdan, qui avait toujours été si gentil avec moi. Jusqu'au jour où il te sautera dessus sans raison, me susurra une petite voix intérieure.


*


Dans la soirée, Priyanca Varma déplaça ses troupes en orbite du satellite Europa, au large de Jupiter. Ren, qui avait accepté de l'aider, suivit. La veille du départ, j'eus une discussion avec lui, où il me proposa de rester sur Europa à l'attendre, pendant qu'il partait en reconnaissance avec Varma. Des navires orcanides avaient été vus en bordure du système.

Mana et ses filles. Elles étaient seules, dans cette zone.

— Je peux partir seul pour cette bataille, Rika, m'assura-t-il. J'emmènerai juste Angraema pour sa formation, et Tanit, qui doit se porter témoin. Mais toi, tu pourras rester ici, sur la nouvelle Arkonna. Priyanca m'a assuré qu'elle pouvait t'allouer un habitacle, pour toi et les petits. Círdan restera avec toi pour vous protéger.

Je m'étais figée, catastrophée. Et Círdan, ce jeune prince intello, comme chevalier servant ! Ren abusait. Je réussis à le convaincre de faire en sorte qu'il accompagne sa belle. Sinon, on allait se retrouver avec un ældien dépressif sur les bras.

— Tu l'as dit à Priyanca, pour nos enfants ?

— J'ai pas eu besoin de lui dire, répondit Ren. Elle en avait déjà été informée.

— Par qui, à ton avis ?

Ren me regarda sans répondre. Il l'ignorait.

Je poussai un soupir sonore. Si seulement Ren se montrait un peu moins jovial et confiant avec cette Priyanca Varma !

— Hors de question de laisser mes enfants sur une base de l'Holos, Ren, statuai-je sans hésitation. Ils sont à moitié ældiens. Et tu as vu comme les tiens sont appréciés, ici ! C'est trop dangereux. Nos deux espèces ne peuvent pas cohabiter, on le sait, maintenant. Des deux côtés, ça ne marche pas.

— Nos petits sont pourtant la preuve irréfutable que c'est possible, Rika, murmura Ren, déçu.

Je ne répondis rien à cela. Certes, Ren n'était pas un ældien normal. Il était différent des autres membres de son espèce. Un peuple sadique, dont j'avais eu vent des déviances et de la cruauté. J'avais peut-être eu des petits avec lui, mais je doutais fortement que l'exploit soit reproduisible.

Face à mon silence, Ren baissa le nez. Je lui trouvai un air mélancolique, qui me fit un peu regretter mes paroles.

— Il y a une autre raison, ajoutai-je en tendant la main pour caresser sa joue. Il est également hors de question de prendre le moindre risque de laisser celui que j'aime mourir loin de moi... Plus jamais tu ne partiras combattre seul, Ren. Pas tant que je serais vivante.

Il eut un sourire bref, auquel je trouvai une nuance douloureuse.

— Très bien. Je vais lui proposer d'emmener Angraema sur un de ses vaisseaux, avec Círdan. Cela fera une formation pour ma fille.

Et j'étais sûre que Pas Douée verrait clair dans le jeu de l'Amirale. En dépit de sa jeunesse, elle avait un regard intelligent et affûté, sans concession sur les choses... alors que Ren, lui, avait perdu tout recul avec Varma.

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