Vol de nuit:
(TW: scène érotique)
Les poissons pensent-ils voler lorsqu'ils nagent dans les profondeurs ?
Dans le sous-sol inondé, Lazuli, elle, pensait voler.
Les mirettes closes, la voilà dans un océan qui n'était p't'être que l'ciel des poiscailles.
Son corps se tordit, elle était devenue anguille, les autres filles aimeraient pas être comparées à ces longs serpents aquatiques, grisâtres et moches, pour elle ce ne pouvait être que le compliment ultime. V'là qu'elle gigote pour passer sous un bureau flottant, même pas besoin de d'faire d'effort, c'était naturel.
P était barrée dehors, elle avait pris d'assaut le van, pour elle c'était une partie d'tetris sur roues, le pied absolu. Lazuli l'imaginait bien, et allez que j'emboîte les meubles, que j'te fourre les tiroirs de fringues, que j'bataille pour tout bien ranger. Avec un sourire d'extase, le même que lorsqu'elle jouissait.
Baiser et s'casser la tête, s'rendre compte que sa chérie prenait autant son pied pour l'un qu'pour l'autre l'avait bien fait marrer.
L'eau reflua autour d'elle, ses g'noux touchèrent les escaliers, elle allait devoir redev'nir terrienne, ça f'sait chier. Mais sur la Terre, y'avait P, alors sûr que ça valait l'coup.
Le Grand Déjeuner.
C'était là qu'tout avait commencé.
Quarante et un clients, un joli p'tit mariage privé comme le Resto n'en avait jamais accueilli. Et une liste d'emmerdes sans fin. Le promis qu'avait pris son pied avec une dizaine de zoulettes, le témoin qu'avait tenté de buter le prêtre, la promise qui mouillait pour l'frère d'son chéri, les mômes qui d'vaient être loin du tonton lubrique, la mère toquée à positionner juste en d'ssous d'un lustre.
Un plan de table transformé en travaux d'Hercule.
La patronne avait été à deux doigts de tous les flinguer, d'assaisonner les essais de pièce montée avec du cyanure et d'envoyer tout c'beau monde bouffer les tubercules par en d'ssous. Et puis elle était arrivée, comme les super-héros des BD, la cape en moins, et avait emporté toutes les notes avant d'calquer une bise à la femme au bord de la crise de nerfs.
En rentrant c'soir-là, Lazuli avait trouvé P les joues rougies, les tétons crevant presque son T-shirt tant ils étaient raides et la culotte détrempée. Le sol, bordel, une apocalypse de papier, des croquis, des notes, partout des solutions avortées, des sacs de noms pas démêlés, et elle, assise au milieu de c'foutoir, excitée de s'être astiqué l'cerveau.
Merde.
Lorsqu'elle était descendue, elle était venue d'où d'jà ?
Rien à foutre, disons droite.
L'eau se glissait sur ses chevilles, un vrai chien en manque d'affection, il aurait au moins pu s'bouger l'cul et chercher sa copine, au lieu d'la coller comme ça. P portait des bottes, des grands machins d'un vert atroce, un truc de pêcheur voulant pas s'mouiller les guibolles, ça f'sait un bruit d'tous les diables lorsqu'elle avançait, alors sûr qu'elle n'était pas là, tout était calme.
Tiens, c'te partie, elle la connaissait pas.
Le trou du cul d'ce centre, paumé dans une impasse, un disquaire, une librairie, une boutique de bonbecs, sûr le genre d'endroit fréquenté par les mômes à la sortie du bahut. Heureusement les caisses sont hautes, les disques n'ont pas les fesses dans la flotte, elle en rafle une vingtaine, surtout des vinyles. C'était con à dire, mais ces vieux trucs elle les aimait, c'était son enfance ce genre de machin, les CD, ouais, plus pratique c'était sûr, mais clairement moins classe.
Elle entassa l'tout dans un sac, que du rock, P allait être dingue, et y rajouta un flot d'bouquins. Recettes de cuisine pour la patronne, des trucs policiers pour papy, des illustrés pour les gamins, d'la poésie pour elle, merde, c'était l'apocalypse dans la SF, tout était mort. Sérieux, ça f'sait chier, Péri lisait que ça, p't'être qu'en fouillant un peu, bingo, gros lot. Une demi-étagère cohabitait en hauteur avec la fantasy, elle embarqua le tout.
Le sac était putain d'lourd, mais les sucettes ça pesait que dalle, elle pouvait bien faire un effort. Merde, encore, tout avait été vidé, non, au fond, les paquets mouillés avaient été entassés, les cons, ils étaient même pas ouverts, dedans les bonbons sont encore bouffables. Voilà, shopping terminé, bras en hachis Parmentier, mais elle s'en foutait, elle allait faire des heureux.
Restait plus qu'à trouver P.
Elle erra dans les couloirs, s'énerva un peu, gueula même une fois ou deux, ça durait d'puis quoi ? Au moins cinquante piges, du moins elle en avait l'impression. Et, mine de rien, c'était qu'elle commençait à flipper un peu, dans c't'endroit immense, même qu'elle avait sursauté pas mal de fois, persuadée d'avoir entendu des clapotements dans son dos.
Merde, fallait vraiment qu'elle se grouille, manquerait plus qu'ça recommence, comme l'autre nuit. Nan, elle ne devait pas y penser, tiens, d'la lumière, par là, allons voir.
« T'aurais pu m'chercher. »
La jeune femme était tranquille, l'cul posé sur une statue.
« J'l'ai fait. Et puis j'en ai eu marre, sérieux à tous les coups on f'sait comme dans les dessins animés, quand ils s'courent tous après en s'passant à côté. »
Elle sauta à terre, sa bouche s'arrima contre la sienne.
«Va falloir qu'tu t'planques ou qu'tu trouves une couverture. »
P la dévisagea de la tête au pied, regard lubrique derrière ses lunettes.
« Sérieux, t'as trouvé ça où ? »
La chemise de nuit, même sèche, n'avait pas dû être bien opaque, là elle était carrément indécente. Tissu transparent — bleu ? blanc ? — pâle comme de l'écume, collant au corps comme sa peau, bordel, ça aurait pu être le poster d'un magasine de cul.
« P'tain tu m'expliques pourquoi t'es à poil là-d'ssous ? »
Lazuli fronça le nez, la pudeur, en v'là un concept qui lui était étranger. Ces gens, franchement, auraient bien eu besoin de s'dérider un peu, sérieux, pourquoi s'embêter à porter une culotte, alors que du tissu recouvrait déjà son sexe ? Enfant, elle s'était toujours baladée sans fringues, ça l'avait pas tué.
« Dans une boutique en bas, et parce que ça s'porte comme ça.
— T'as d'là chance d'avoir croisé personne, ya d'autres types qui s'baladent dans l'coin, sérieux s'ils t'avaient mis le grappin dessus. »
V'là autre chose d'étrange, Péri qui s'excitait dès qu'elle se dénudait, le monde entier qui bandait devant une peau dévoilée, elle, elle mouillait pour un tissu foutreusement bien agencé. La chemise de P, ça, ça la faisait saliver, le bouton ouvert sur la naissance des seins, les avant-bras surgissant des manches, les clavicules saillantes et tentatrices.
Elle avait connu trop d'gens en tenue d'Adam, c'était p't'être là l'souci.
«Dis...
— Ouais ?
— T'y tiens à tes fringues ?
— Hein ?
— S'ils étaient mouillés, y'aurait un souci. »
Seul le silence lui répondit.
«— J'ai une surprise pour toi. Ferme les yeux, donne-moi ta main. »
Miracle, elle obéit.
Le visage détendu, la bouche sereine, les bras ballants, tant de confiance, Lazuli, elle n'aurait jamais pu, bordel, non, s'abandonner comme ça.
Elle balança son sac sur le socle de la statue, parfait, bien au sec, et attrapa la main de P.
« Tu sais nager ?
— Ouais. Putain c'est froid. »
Elles venaient d'atteindre l'escalier, l'eau leur grignotait les cuisses.
« Enlève tes bottes, c'est chiant, ça te coule. »
Elle s'exécuta.
Et l'eau leur mangea le pubis, Lazuli frissonna, mille gouttes la caressaient, pas aussi bon qu'en mer, P avait-elle déjà baisé dans l'océan, nan, elle était sa première, faudrait qu'elles aillent voir la côte, un jour.
« Faut qu't'arrêtes de respirer. Pas longtemps. A trois. »
A cet endroit, le sol était plus bas, la porte de la boutique aussi, faut être sous la flotte pour pouvoir passer, mais la promesse est tenue, y'avait intérêt, l'apnée c'était pas franchement le truc de Péri, elles ressortirent très vite.
Une volée de marches les emmena haut, sur la terre ferme d'une petite mezzanine.
« Je vais te déshabiller. Bouge pas. »
Lazuli ôta le pull, le jeans et les chaussettes, balança le tout, les fringues flottèrent un instant, avant de couler, sortes de grosses méduses mortes. Tendrement elle sécha sa chérie, la serviette, un truc de riche, épaisse comme une tranche de pudding, douce comme une peluche, était chaude, comme longuement posée sur un radiateur.
« Laz... On est où là ? »
Péri était certaine de sentir de la vapeur contre son corps nu et une entêtante odeur d'encens lui parvenait aux narines, bordel, sans y voir que dalle elle aurait pu parier être dans une sorte de temple, un bordel construit pour l'adoration d'une divinité païenne.
« Tu verras, après. Lève les bras. »
Lazuli l'habilla comme une poupée, habitée par une fièvre quasi sexuelle. Le débardeur lâche, dévoilant presque les seins, s'ouvrant bas sur les côtes, plongeant dans le dos, dévoilant vertèbres et chairs et omoplates. Le caleçon, tombant à mi-cuisses, baillant autour d'elles, il ne dévoilait rien, personne d'autre qu'elle ne pouvait aimer ce genre de chose.
« Ouvre. »
Péri sursauta, elle venait de se bouffer son reflet en pleine face, et le regard de Laz dans son centre du plaisir. C'te fille, elle était pas croyable, rien ne l'allumait plus que d'la voir fagotée comme l'as de pique.
Et puis ses mirettes s'arrêtèrent sur le reste.
« Putain... »
Elle avait pas été loin, en pensant à un temple, des bougeoirs de partout, allumés hein, bordel elle avait dû y passer du temps, des bâtonnets desquels s'élevait la fumée qu'elle avait r'niflée trônaient dans tous les coins, et des pierres, des putains de pierres, d'où s'élevaient de la vapeur.
« Putain...
— Tu aimes ? J'ai tout préparé c't'aprèm.
— Bordel. Et y'a personne qu'est descendu ?
— Nan, trop d'eau. »
Elle balança le contenu d'un seau sur les cailloux, la mezzanine se satura d'un brouillard brûlant. Dans c'monde de coton, elle se colla contre P.
« Laz, putain, c'est pas l'moment, l'van est tout seul, sérieux on va s'faire piquer des trucs. »
Deux mains se faufilèrent sous son T-Shirt, empoignèrent le peu qu'il y avait à empoigner, elle se cabra, sérieux, c'était fourbe, ça comme argument.
« Laz...
— T'as pas envie ?
— Nan. Du tout. »
Les doigts agacèrent les tétons, puis migrèrent, vers le sud, ils passèrent la frontière du sous-vêtement en conquérant, écartèrent les lèvres et appuyèrent leur domination.
« Menteuse. C'est le casse-tête du rangement, hein ?
— Peut-être. T'arranges rien aussi, fringuée comme t'es. »
Lazuli frotta tendrement son nez contre le pubis, P se sentit céder.
« Si quelqu'un arrive...
— Aucun risque.
— Te tue. Sérieux, t'es morte, j'te zigouillerai. »
Le rire carillonna contre son sexe, trente secondes de guerre et v'là que les armes étaient déjà rendues. Au-dessus d'elles, il lui sembla entendre des pas, p't'être juste des mouvements d'eux, en tout cas si quelqu'un s'pointait, la peau d'Laz ornerait son lit, fois d'Péri.
Hello!
Hello!
Un petit dessin de Laz pour accompagner un chapitre de son point de vue, quoi de plus logique?
Contrairement à la dernière fois j'ai décidé de faire ses cheveux dans plusieurs teintes de bleus et non dans une unique teintes marines. Malgré quelques endroits où la transition est un peu...abrupte je trouve ça plutôt pas mal et vous?
Et est-ce qu'avoir des dessins à la fin des chapitres vous plaît?
Sinon c'est un de mes chapitres préférés, comme tous ceux du point de vu de Laz en fait.
Le titre est une référence à Vol de Nuit de Saint-Exupéry parce que...Parce que je pouvais le faire et puis voilà.
J'espère que vous avez aimé en découvrir plus sur Laz!
On se retrouve la semaine prochaine avec Là-bas chantent les oiseaux, du point de vu d'Ami.e!
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